UNIVERSITE PARIS XIII UFR DES LETTRES DES SCIENCES DE L’HOMME ET DES SOCIETES E

UNIVERSITE PARIS XIII UFR DES LETTRES DES SCIENCES DE L’HOMME ET DES SOCIETES ETUDES LITTERAIRES FRANCOPHONES ET COMPAREES Mémoire de D.E.A. Sujet : Relecture de La Colline oubliée de Mouloud Mammeri . Présenté par Sous la direction du Professeur Nadjia LACETE -TIGZIRI. Charles BONN. Juin 1998. 2 REMERCIEMENTS Je remercie le Professeur Charles Bonn d’avoir accepté de diriger ce travail. Je le remercie pour ses conseils et sa patience. 2 SOMMAIRE: Présentation du travail. Page 1 I-Appréhension d’un écrivain et d’une production.: 6. 1. L’écrivain. 7. 2. La production algérienne. 12. II- Réception de La Colline oubliée: 17. 1. Une lecture politique. 18. 2. Une lecture thématique. 30. III- L’inscription du lecteur dans l’écriture 41. 1. Le glossaire: lecteur étranger et traduction. 42. 2. La présence du lecteur naturel. 49. 3. Un lecteur fictionnel. 53. Conclusion. 56. Bibliographie. 60 2 Présentation du travail On parlera de littérature algérienne avec le roman de Mouloud Féraoun , Le Fils du pauvre, paru en 1951, suivi de celui de Mouloud Mammeri, La Colline oubliée et du roman de Mohammed Dib, La Grande maison publiés en 1952. Mammeri partagera avec Féraoun l'étiquette régionaliste1, connaîtra comme Dib par rapport à sa trilogie, le revers de l'adaptation cinématographique: le grand public le réduit à L'Opium et le bâton2, et avec Kateb Yacine une lecture de l'oeuvre qu'informe leurs positions politiques. C'est le premier roman de Mammeri, La Colline oubliée, qui fera l'objet d'une relecture. Si le roman a été critiqué, il a été très peu exploité et d'une manière générale, il a été appréhendé à travers les thèmes traditionnels ou a servi de support pour 1. C. Achour écrit à propos de l'oeuvre de Féraoun dans une étude qu'elle a faite : Mouloud Féraoun . Une voix en contrepoint : " Le réalisme et le régionalisme de l'oeuvre empêchent , semble - t - il , d'en lire la construction comme si toute approche critique devenait sacrilège ou profanation dès lors qu'elle n'est pas , d'emblée hommage déférent " (p 7 ) 1986 . ed Silex. 2. Mouloud Mammeri : L'Opium et le bâton . 1956 . ed . Plon. 2 illustrer un concept en littérature tel que le "roman ethnographique". Abdelkader Khatibi 3 , rappelant la polémique qu'a provoquée l'oeuvre, avance que Le Sommeil du juste 4 démontre mieux l'amour de Mammeri pour L'Algérie : Sa meilleure réponse nous parait cependant être la publication de son deuxième roman . Est - ce - un hasard si ce livre est engagé manifestement dans la lutte anticoloniale ? Le même constat se lit dans le travail fait en duo par L. El Hassar Zeghari et D. Louanchi 5 Mammeri prit-il conscience d[u] rôle [ que toute production doive témoigner de la soif de liberté du peuple ] ? Ou les événements se chargèrent-ils d'infléchir sa pensée ? Le fait est que l'auteur du Sommeil du juste mit une sourdine aux pulsions poétiques de sa sensibilité, et, retrouvant les règles de la rhétorique pour décrire l' Algérie à la veille de la guerre de libération, livra au public un roman beaucoup plus engagé politiquement que le précédent. Le dernier roman de Mouloud Mammeri, La Traversée, reprendra La Colline oubliée: non seulement les personnages du premier roman y sont rappelés, mais même le titre peut être lu dans le passage qui suit: Dans ce village oublié au haut d ' une colline que la montagne ne protège plus des sauterelles ni du sirocco (il y a partout la route, l'électricité, le percepteur et le transistor) je me présenterai demain les mains nues, couvert du burnous 3. A . Khatibi : Le roman maghrébin . p . 26 . ed SMER . 1979. 4 M . Mouloud Mammeri : Le Sommeil du juste . Plon . 1955. 5 El Hassar-Zeghari et Louanchi: Mouloud Mammeri. 3 ancestral, comme l'un des hommes qui l'ont fait durer jusqu'ici 6 . Et comme en écho au héros de La Colline oubliée, celui de La Traversée retourne à Tasga sans que rien ne le prévoie et y meurt. Mammeri, par le texte littéraire utilisé comme tribune, assume son premier roman si contesté. C'est le héros Mourad qui évoque tous les personnages de La Colline oubliée: La nuit était celle des sehdjas anciennes , et devant les yeux éblouis de Mourad se dressa tasga, le vrai, celui de Mokrane, de Mouh, de Menach et d'Aazi 7 Ou encore: Mokrane et Mouh étaient morts, morts Raveh et son tambourin, Ouali avait été tué dès le début de la guerre sous prétexte qu'il était berbériste. Menach avait épousé Aazi .[...] Meddour et Davda habitaient Alger [...] 8. Cette revendication de La Colline oubliée peut se lire comme la réponse littéraire de l ' auteur mais du même coup, parce que littéraire, elle devait provoquer l’interrogation sur la première oeuvre: Qu'est-ce-qui a échappé à la lecture? Qu'est-ce-qui n'a pas été lu ? Dans ses Nouveaux essais critiques, Roland Barthes note qu’: Il ne s'agit pas d’obtenir une "explication" du texte, un "résultat positif" [... ] mais qu'il s'agit d'entrer, par l'analyse , dans le jeu du signifiant, dans l'écriture: en un mot d'accomplir par son travail, le pluriel du texte 9 . 6 M . Mammeri : La Traversée . p 180 . Plon 1982 . 7 Mammeri . op cité . p. 61 . 4 Comme le contexte socio-politique a changé depuis la parution du roman, il est peut-être possible aujourd'hui de lire l'un des premiers textes romanesques non pour y trouver les réponses politiques attendues mais comme une création littéraire et où l'écriture, constitutive de l'oeuvre, est à interroger. Pierre Barbéris souligne que: Ce qu'une oeuvre contient d'explicite -et donc de non spécifiquement littéraire -compte moins que ce qu'elle dit en partie sans le vouloir, dans un mouvement non d'analyse, mais d'écriture et de création, dans un mouvement qui, au travers de masques, ruses, inhibitions, choix de sujets, effets de style, constitutions de mythes, métaphores obsédantes, etc ..., tente de résoudre les contradictions vécues et constitue -ceci est capital -un APPORT10 . Par la relecture de La Colline oubliée que nous nous proposons dans ce travail, notre objectif est de montrer qu'une lecture politique, dès la publication du roman, a pris en otage l'oeuvre et conditionné l'appréciation de son auteur. Aussi avons-nous consacré une première partie du travail à la présentation de Mouloud Mammeri à travers des témoignages et le texte dans le paysage littéraire de l'époque. Les témoignages se sont faits à la double faveur (toutes deux biens violentes) d’événements de 1988 qui ont permis de desserrer l'étau autour de la liberté de l'expression et de la brutale disparition de l'écrivain quatre mois plus tard. 8 Mammeri op . cité :p . 53 . 54 . 9 R . Barthes : Par où commencer ? p . 145 . in Nouveaux essais critiques . 5 Nous avons essayé alors de comprendre, en analysant la réception de La Colline, ce peu d'intérêt dans lequel est tombé le roman qui avait, à sa parution, suscité des critiques passionnées. Dans une troisième partie, nous proposons les premiers éléments de lecture de La Colline oubliée appréhendé comme une oeuvre qui s'était élaborée par rapport à une production qui dominait alors l'espace littéraire algérien et qui inscrivait les conflits qui avaient présidé à l'avènement d'une écriture romanesque. 10 P . Barbéris : Lectures du réel p . 250 . 6 I. APPREHENSION D’UN ECRIVAIN ET D’UNE PRODUCTION 7 1. L’écrivain: A la mort de Mouloud Mammeri survenue le 25 février 1989, des témoignages révéleront l'homme à un public algérien qui pensait le connaître, à un public français intéressé par des écrivains venus après Mammeri ou à ceux de sa génération -Dib deuxième façon , Kateb- dont l'écriture différente fascinait. Dans le numéro spécial de Awal 11 qui lui était consacré, deux articles retiennent l'attention: celui de Wadi Bouzar et de Abdelkader Djeghloul. W. Bouzar qui a eu un entretien 12 , en 1974, revient sur une des trois questions qu'il lui posait; elle concernait le colonisateur dans La Colline oubliée: Une image de la société algérienne en période coloniale " sous-tend" au moins deux représentations essentielles: la société musulmane colonisée, et la société de l'autre, du colonisateur. Etes-vous d'accord avec ceux qui affirment que dans votre premier roman, l'autre est pratiquement absent?13 Or, tout en signalant qu’il partageait l'avis de Mammeri qui évoque "la présence occulte" du colonisateur qui "écrase" toute la narration de La Colline oubliée, W. Bouzar estime nécessaire de justifier la question posée: 11 Awal : une revue fondée par Mammeri en 1985 à Paris . Cahiers d' Etudes Berbères . Numéro spécial . Hommage à Mouloud Mammeri . 1990 . 12 W . Bouzar : " Où serait la différence avec les arbres ? " in Awal ( op . cité ). Entretien inédit : il avait posé ,par écrit , des questions à Mammeri . 13 W . Bouzar . in op . cité ; p. 102 . 8 L'art du questionnement n'implique-t-il pas que l'on uploads/Litterature/ relecture-de-la-colline-oubliee-de-mouloud-mammeri.pdf

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