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ESSAIS ESSAIS Éducation et humanisme Études réunies par Nicole Pelletier et Dom

ESSAIS ESSAIS Éducation et humanisme Études réunies par Nicole Pelletier et Dominique Picco Numéro 4 - 2014 ÉCOLE DOCTORALE MONTAIGNE-HUMANITÉS Revue interdisciplinaire d’Humanités Éducation et humanisme Études réunies par Nicole Pelletier, Dominique Picco Numéro 4 - 2014 ÉCOLE DOCTORALE MONTAIGNE-HUMANITÉS Revue interdisciplinaire d’Humanités Comité de rédaction Laetitia Biscarrat, Brice Chamouleau, Fabien Colombo, Hélène Crombet, Nestor Engone Elloue, Magali Fourgnaud, Stan Gauthier, Pierre-Amiel Giraud, Aubin Gonzalez, Bertrand Guest, Sandro Landi, Sandra Lemeilleur, Mathilde Lerenard, Yannick Mosset, Maria Vittoria de Philippis, Isabelle Poulin, Anne-Laure Rebreyend, Hugo Remark, Elisabeth Spettel, Jeffrey Swartwood, Cristina Tossetto, François Trahais, Valeria Villa Comité de lecture Patrick Baudry, Pascal Bertrand, Pierre Beylot, Patrice Brun, Florence Buttay, Hélène Camarade, Valérie Carayol, Adrian Cérépi, Laurent Coste, Pierre Darnis, Jean-Paul Engélibert, Richardo Etxepare, Michel Figeac, Jérôme France, François Godicheau, Elvire Gomez-Vidal, Pierre Guibert, Nathalie Jaëck, Martine Job, Frédéric Lambert, Valéry Laurand, Guillaume Le Blanc, Caroline Le Mao, Elisabeth Magne, Myriam Métayer, Émilie d’Orgeix, Cristina Panzera, Nicole Pelletier, Dominique Picco, Denis Retaillé, Jean-Paul Révauger, Bernadette Rigal-Cellard, Christophe Pébarthe, Céline Spector, Isabelle Tauzin Comité scientifique Anne-Emmanuelle Berger (université Paris 8), Jean Boutier (EHESS), Catherine Coquio (université Paris 7), Javier Fernandez Sebastian (UPV), Carlo Ginzburg (UCLA et Scuola Normale Superiore, Pise), German Labrador Mendez (Princeton University), Hélène Merlin-Kajman (université Paris 3), Franco Pierno (Victoria University in Toronto), Dominique Rabaté (université Paris 7), Charles Walton (University of Warwick) Secrétaire de rédaction Chantal Duthu Les articles publiés par Essais sont des textes originaux. Tous les articles font l’objet d’une double révision anonyme. Tout article ou proposition de numéro thématique doit être adressé au format word à l’adresse suivante : revue-essais@u-bordeaux-montaigne.fr La revue Essais est disponible en ligne sur le site : www.u-bordeaux-montaigne.fr/fr/recherche/ecole_doctorale/la-revue-essais/les-numeros-de-la- revue.html Éditeur/Diffuseur École Doctorale Montaigne-Humanités Université Bordeaux Montaigne Domaine universitaire 33607 Pessac cedex (France) www.u-bordeaux-montaigne.fr - rubrique Recherche - École Doctorale Montaigne-Humanités Revue de l’École Doctorale ISBN : 978-2-9544269-2-1 • EAN : 9782954426921 © Conception/mise en page : DSI Pôle Production Imprimée Édito Édito En peignant le monde nous nous peignons nous-mêmes, et ce faisant ne peignons « pas l’être », mais « le passage »*. Dialogues, enquêtes, les textes amicalement et expérimentalement réunis ici pratiquent active ment la citation et la bibliothèque. Ils revendiquent sinon leur caractère fragmentaire, leur existence de processus, et leur perpétuelle évolution. Créée sur l’impulsion de l’École Doctorale « Montaigne-Humanités » devenue depuis 2014 Université Bordeaux Montaigne, la revue Essais a pour objectif de promouvoir une nouvelle génération de jeunes chercheurs résolument tournés vers l’interdisciplinarité. Essais propose la mise à l’épreuve critique de paroles et d’objets issus du champ des arts, des lettres, des langues et des sciences humaines et sociales. Communauté pluridisciplinaire et plurilingue (des traductions inédites sont proposées), la revue Essais est animée par l’héritage de Montaigne, qui devra être compris comme une certaine qualité de regard et d’écriture. Parce que de Montaigne nous revendiquons cette capacité à s’exiler par rapport à sa culture et à sa formation, cette volonté d’estrange ment qui produit un trouble dans la perception de la réalité et permet de décrire une autre scène où l’objet d’étude peut être sans cesse refor mulé. Ce trouble méthodologique ne peut être disjoint d’une forme particulière d’écriture, celle, en effet, que Montaigne qualifie de façon étonnamment belle et juste d’« essai ». Avec la revue Essais nous voudrions ainsi renouer avec une manière d’interroger et de raconter le monde qui privilégie l’inachevé sur le méthodique et l’exhaustif. Comme le rappelle Theodor Adorno (« L’essai comme forme », 1958), l’espace de l’essai est celui d’un anachronisme permanent, pris entre une « science organisée » qui prétend tout expli quer et un besoin massif de connaissance et de sens qui favorise, plus encore aujourd’hui, les formes d’écriture et de communication rapides, lisses et consensuelles. Écriture à contrecourant, l’essai vise à restaurer dans notre communauté et dans nos sociétés le droit à l’incertitude et à l’erreur, le pouvoir qu’ont les Humanités de formuler des vérités complexes, dérangeantes et paradoxales. Cette écriture continue et spéculaire, en questionnement permanent, semble seule à même de constituer un regard humaniste sur un monde aussi bigarré que relatif, où « chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage ». C’est ainsi qu’alternent dans cette « marqueterie mal jointe », numéros monographiques et varias, développements et notes de lecture, tous également essais et en dialogue, petit chaos tenant son ordre de lui-même. Le Comité de Rédaction * Toutes les citations sont empruntées aux Essais (1572-1592) de Michel de Montaigne. Dossier Dossier Éducation et humanisme Dossier coordonné par Nicole Pelletier Dominique Picco Les questions d’éducation et de formation constituent l’un des plus grands enjeux de la société actuelle et du monde à venir ; elles sont au cœur des problé matiques de la mondialisation, des échanges et du développement. Alors que sans cesse la communauté éducative s’interroge sur la nature et les contenus de l’édu cation des hommes et des femmes de demain, il paraît tout à fait légitime de les examiner au prisme des conceptions qui, dans le monde occidental, se sont affir mées à partir de la Renaissance, en particulier dans les Essais de Montaigne, et ont prévalu tout au long des siècles suivants et pendant une large part du XXe siècle. Pour les humanistes de la Renaissance, dire que la nature humaine est bonne suppose la nécessité de l’éducation. Pour Érasme « on ne naît pas homme, on le devient ». Le petit de l’homme n’étant à la naissance et dans sa petite enfance qu’animalité (boire, manger, dormir), il ne devient « homme » que via l’acquisition et l’assimilation d’une culture où corps et esprit sont liés. Ainsi, les manuels de civilité – la Civilité puérile d’Érasme, en particulier – accordent-ils une large place à la discipline du corps : dès le plus jeune âge, les éducateurs posent et imposent des normes d’hygiène, de maîtrise et de tenue du corps. Quant à la formation de l’esprit, elle privilégie les litterae humaniores, ces bonnes lettres qui rendent l’homme plus humain encore. Elles reposent sur la maîtrise des langues anciennes (latin, grec, hébreu) qui seules permettent la lecture dans le texte des écrits des Anciens, la Bible, mais aussi les auteurs de l’antiquité gréco-latine qui n’étaient souvent connus au Moyen-Âge que dans des versions plus ou moins fidèles au texte original. Pour ces humanistes, la pratique des auteurs anciens permet à la fois la construction de la pensée et du raisonnement mais aussi la maîtrise du langage écrit et oral qui ouvre la possi bilité de l’adéquation du discours à l’idée. Rhétorique et art de l’éloquence donnent au théâtre une place essentielle dans tout le processus éducatif. Cette éducation complète vise à promouvoir un être humain « achevé » ayant à la fois une soif intarissable de connaissances (Pantagruel), une capacité à hiérarchiser les savoirs (valorisation des arts libéraux par rapport aux arts mécaniques), Avant-Propos Nicole Pelletier, Dominique Picco Nicole Pelletier, Dominique Picco 8 mais également des exigences éthiques : « science sans conscience n’est que ruine de l’âme » (Rabelais). Ces pédagogues masculins qui s’intéressent surtout à l’éducation des jeunes garçons des élites sociales, milieux princiers et aristo cratiques en particulier, affirment également comme une nécessité l’éducation des femmes appartenant aux mêmes milieux (Castiglione1, Vivés2, Érasme) ; celle-ci doit développer chez elles les qualités de l’esprit, du corps et du cœur afin de faire de ces femmes de bonnes chrétiennes mais aussi des compagnes idéales3. On peut suivre la postérité de ces principes dans les théories éduca tives développées par les jésuites jusqu’aux humanités enseignées aux XIXe et XXe siècles dans tous les établissements soclaires européens en passant par les écoles fondées à l’iniative de Jean-Baptiste de la Salle4 au début du XVIIe siècle et par nombre de pédagogues du siècle des Lumières. Mais aujourd’hui la place de l’enseignement des humanités et, plus large ment, des sciences humaines fait débat. L’intérêt sinon la nécessité de s’in terroger sur ces questions dans le cadre de la formation des doctorants en Lettres et Sciences humaines n’en était que plus évident. C’est ce qui a poussé à envisager l’organisation d’un séminaire interdisciplinaire sur deux ans dans le cadre de l’École doctorale Montaigne-Humanités de l’Université Bordeaux 3, devenue au 1er janvier 2014 Université Bordeaux Montaigne. Rappelons que ce projet, aujourd’hui mené à son terme, a correspondu à la mise en place dans cette même univerité d’une licence unique en France, intitulée Culture humaniste et scientifique, se situant tout à fait dans l’esprit des premiers humanistes puisqu’elle propose de croiser les disciplines en favorisant ainsi un rapport approfondi à la connaissance. Réunissant des doctorants, de jeunes docteurs et des chercheurs confir més, le séminaire a considéré la première année ces thématiques du XVIe au XVIIIe siècle dans les espaces allemand, français, espagnol et italien, à travers les interventions d’historiens, de littéraires et de linguistes. La seconde année, la même approche pluridisciplinaire et les mêmes espaces géographiques ont été conservés tout en déplaçant le curseur chronologique de la Révolution française au XXIe siècle afin d’envisager le devenir des conceptions des humanistes de la Renaissance, leurs infléchissements, leurs uploads/Litterature/ revue-essais4.pdf