Revue d’histoire du théâtre avril— juin 2019–2 Revue trimestrielle éditée par l
Revue d’histoire du théâtre avril— juin 2019–2 Revue trimestrielle éditée par la Société d’histoire du théâtre 282 Récits et imaginaires des fêtes de cour Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Illuminations du palais et des jardins de Versailles. Gravure de J. Le Pautre. © Coll. personnelle. Couverture : Détail de la planche représentant la salle de bal. Folio 4 de l’exemplaire du Balet comique de la Royne conservé à l’INHA sous la cote NUM 4 RES 819. Source : Bibliothèque de l’Institut National d’Histoire de l’Art, collections Jacques Doucet. Soixante- et-onzième année 2019–ii numéro 282 Revue d’histoire du théâtre 3 2019— II — № 282 Table des matières Dossier Récits et imaginaires des fêtes de cour Coordination Marine Roussillon 5 Marine Roussillon Introduction 29 Benoît Bolduc Le Balet comique de la Royne. Détour historiographique 41 Youri Carbonnnier Les Menus Plaisirs, mémoire et laboratoire des fêtes de cour au XVIIIe siècle 55 Claudine Nédelec Les fêtes burlesques des mazarinades 65 Marie-Claude Canova-Green Une « petite lunette d’approche enchantée ». Regards scudériens sur le Grand Divertissement de Versailles 77 Laura Naudeix La « Fête Dauphine » de Chantilly. Un autoportrait de Monsieur le Prince 89 Christophe Schuwey Une fête virtuelle. Le Parlement d’amour de 1669 101 Entretien avec Thomas Leconte (Centre de Musique Baroque de Versailles) et Sébastien Daucé (Ensemble Correspondances) Recréer le Ballet royal de la Nuit Varia 119 Romain Bionda Où est passé le théâtre de science-fiction ? Histoire et historiographie d’un genre inaperçu 4 REVUE D'HISTOIRE DU THÉÂTRE Table des matières 139 Recensions 157 Biographies des auteur•e•s 160 Actualités des parutions et des expositions Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Illuminations du palais et des jardins de Versailles. Gravure de J. Le Pautre. © Coll. personnelle. Marine Roussillon 5 Introduction Récits et imaginaires des fêtes de cour A Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Les Plaisirs de l’île enchantée, page de titre. Gravure d’I. Sylvestre. © Coll. personnelle. B Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Les Plaisirs de l’île enchantée, première journée : Marche du roi et de ses chevaliers. Gravure d’I. Sylvestre. © coll. personnelle. C Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Les Plaisirs de l’île enchantée, première journée : course de bague. Gravure d’I. Sylvestre. © Coll.personnelle. D Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Les Plaisirs de l’île enchantée, seconde journée : La Princesse d’Élide. Gravure d’I. Sylvestre © Coll. personnelle. E Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Les Plaisirs de l’île enchantée, troisième journée : feu d’artifice. Gravure d’I. Sylvestre. © Coll.personnelle. F Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Les Divertissements de Versailles, première journée : Alceste. Gravure de J. Le Pautre © Coll. personnelle. G Les Fêtes et divertissements du Roy à Versailles. Le Grand divertissement royal : collation. Gravure de J. Le Pautre. © Coll. personnelle. 20 REVUE D'HISTOIRE DU THÉÂTRE Introduction Dans votre costume identique à ceux des plus belles époques de Versailles, vous êtes invités à retrouver l’ambiance raffinée et artistique des Soirées d’Appartement qu’organisait Louis xiv, un moment hors du temps, inoubliable1. Chaque année depuis 2015, des centaines de convives versent entre 130 et 500 euros – auxquels il faut ajouter la location d’un « costume baroque de qualité », sans lequel l’entrée est impossible – pour participer aux « fêtes galantes » organisées à Versailles. À partir de la diversité des divertissements de cour du passé est constitué un objet composite, la « fête galante », situé hors du temps et offert à l’admiration des spectateurs présents et à venir. Le phénomène, s’il est extrême, n’est pas isolé : des grandes eaux de Versailles aux spectacles de Benjamin Lazar, les divertissements de cour sont régulièrement re-créés, dans une démarche qui cherche à prolonger dans le présent leurs effets passés. Spectacles éphémères, puisque la plupart d’entre eux n’étaient donnés qu’une fois, et irrémédiablement perdus, les divertissements de cour ont laissé derrière eux de nombreuses traces. Aux livrets distribués aux spectateurs et aux relations plus ou moins officielles s’ajoutent les dessins de costumes ou de décors et les comptes conservés dans les archives2. Restent aussi les textes et la musique de ces pièces « classiques » que nous avons appris très tôt à admirer : le Tartuffe de Molière, son George Dandin, l’Iphigénie de Racine, les premiers opéras de Quinault et Lully, qui furent créés dans le cadre de fêtes de cour. Les lieux demeurent, bien que transformés : le Palais Royal, Saint-Germain, Versailles… Les palais et les jardins fonctionnent comme autant de traces des lieux disparus qui ont servis de décor aux fêtes. Ainsi, le passé des fêtes persiste, tel une lumière trop vive qui aurait inscrit son empreinte sur nos rétines, suscitant toujours émerveillement et admiration. Cette admiration semble réaliser le projet même des fêtes et des récits qui en rendent compte : les divertissements offerts par le roi à sa cour sont toujours « agréables », « admirables », « magnifiques », « merveilleux »… Les textes les décrivent avec force superlatifs, rendent compte du plaisir et de l’émerveillement des spectateurs et se proposent de produire le même effet sur leurs lecteurs. « [Les divertissements de Versailles] ont été trop éclatants et trop magnifiques, pour n’être pas un sujet d’admiration à un chacun3 », affirme le numéro extra ordinaire de la Gazette consacré à la première fête organisée par Louis XIV à Versailles, Les Plaisirs de l’île enchantée. Et il poursuit en se proposant d’en produire une « histoire » pour en « transporter le spectacle » dans tout le pays, voire dans toute l’Europe. Comment alors comprendre cette admiration devant les fêtes de cour ? Le lecteur d’aujourd’hui retrouve-t-il, grâce à la force des récits et à la puissance de l’imagination, les émotions des spectateurs du passé, témoignant ainsi de la beauté du spectacle disparu ou de l’efficacité prolongée de la propagande dont il est le support ? Notre émerveillement signalerait alors l’existence, dans le spectacle du passé, de quelque chose – qu’on l’appelle beauté ou efficacité – qui serait capable de traverser le temps et de résister aux bouleversements aussi bien politiques qu’esthétiques pour réunir le courtisan du XVIIe et le citoyen du XXIe siècle dans une émotion partagée. C’est cette apparente communion qu’il s’agit ici d’interroger, en étudiant des réceptions des fêtes de cour : des manières de les raconter, de se les approprier, de les utiliser pour agir. À partir du Balet comique de la Reine dansé en 1581 et du 21 2019— II — № 282 Marine Roussillon livre commémoratif dont il a fait l’objet, l’article de Benoît Bolduc met en lumière la succession d’appropriations diverses qui ont permis à l’événement de traverser l’histoire pour venir jusqu’à nous, non pas tel qu’il fût, mais transformé et chargé de significations toujours nouvelles. Ce parcours est aussi celui des décors de fêtes étudiés par Youri Carbonnier : créés pour des divertissements de cour, ils ne sont conservés que pour être ré-employés et transformés. La présence des fêtes dans notre actualité n’est pas le résultat d’une résurrection, mais d’une longue suite de ré-emplois, de transformations, de détournements. Les articles de ce volume étudient quelques-unes de ces appropriations et défont ainsi l’apparente unanimité des récits de fêtes. Claudine Nédelec fait entendre les critiques des fêtes de cour présentes dans les Mazarinades ; Marie-Claude Canova-Green, à partir d’un récit de Madeleine de Scudéry, et Laura Naudeix, en travaillant sur plusieurs récits d’une fête organisée par le Prince de Condé en 1688, montrent que l’expression de l’admiration elle-même peut être chargée de significations diverses, en fonction du lieu et de la manière dont elle est énoncée. À travers le cas limite d’une fête fictive, qui n’existe que dans le récit qui en est fait, Christophe Schuwey démontre que raconter une fête est aussi une manière d’agir dans le monde social. Là où les récits donnaient à entendre une admiration unanime et toujours renouvelée jusqu’au présent, les articles de ce dossier font apparaître des usages divers, des appropriations et des détournements, qui visent à intervenir dans des débats ou à agir sur le monde. Voilà qui conduit à interroger notre propre regard sur les fêtes et le sens qu’elles prennent aujourd’hui : c’est l’objet de l’entretien qui clôt ce dossier, autour de la re-création du Ballet royal de la Nuit. Les fêtes de cour : des objets d’écriture Cette étude de la réception des fêtes de cour se fonde sur un changement de point de vue. Là où l’histoire des spectacles prend pour objet la fête comme événement dont les écrits sont autant de traces, dans une démarche de reconsti tution, nous nous proposons de faire de ces écrits les objets centraux de notre enquête. L’historiographie des fêtes de cour est liée au développement des études théâtrales comme discipline académique : en 1956, la publication, sous la direction de Jean Jacquot, d’un premier volume d’études consacrées aux Fêtes de la Renais sance invente dans un même mouvement les fêtes comme objet d’études et les études uploads/Litterature/ rht-n282-2019-2-recits-et-imaginaires-des-fetes-de-cour.pdf
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- Publié le Mar 02, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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