4 I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 54 I Du franc à l’euro RENCONTRES SCIENCE

4 I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 54 I Du franc à l’euro RENCONTRES SCIENCES & CITOYENS Plus de 400 jeunes Européens de 18 à 25 ans et une centaine de chercheurs de toutes les disciplines sont invités à dialoguer lors des 11e Rencontres CNRS Sciences & Citoyens, du 26 au 28 octobre au palais des congrès du Futuroscope. Le comité scientifique, présidé par Edgar Morin, a choisi dix thèmes de discussion : Clonage et bioéthique ; La mondialisation ; Science et cuisine ; Jusqu’où peut aller l’informatique ? ; Science et religion ; Amour ; Le génome, et après ? ; L’eau pour la vie ; Drogue : les passions dangereuses ; Les scientifiques face à la responsabilité. «La science, affirme Edgar Morin, est très branchée, via la technique, sur l’économie, l’industrie et l’Etat mais elle n’est pas directement accessible aux citoyens.» D’où la nécessité de «réconcilier la science et les citoyens». Anglais. La frappe d’une nouvelle pièce, le franc, permettra de finan- cer la rançon du roi. Janvier 2002 : l’euro remplace le franc pour as- seoir la construction européenne. «Parce que l’histoire du franc est liée à l’histoire de Poitiers, le Cen- tre de recherche sur l’intégration économique et financière (Crief) a voulu donner une ampleur particu- lière au passage du franc à la mon- naie unique», explique Christian Aubin, professeur à la faculté des sciences économiques de Poitiers. Ainsi, le Crief organise un collo- que scientifique à Poitiers (14-16 novembre, soutenu par Com’ science), une exposition et un cy- cle de conférences à l’Espace Men- dès France (du 14 novembre au 17 février) «pour, d’une part, donner l’occasion aux spécialistes de con- fronter le fruit de leurs recherches, d’autre part, contribuer à la diffu- sion d’un savoir scientifique et cul- turel sur la monnaie en général et le passage à l’euro en particulier auprès d’un large public». Ces ma- nifestations permettront de mettre en valeur l’originalité de cette nou- velle monnaie dans une approche économique, historique ou psycho- logique. «En permettant de tout évaluer et de tout comparer, la monnaie est un lien social primordial pour tra- vailler et vivre ensemble, explique Jacques Léonard, doyen de la fa- culté des sciences économiques de Poitiers. Ainsi, en instaurant une monnaie unique, l’Union euro- péenne compte sur ces qualités fé- dératrices pour accélérer l’intégra- tion européenne.» Dans cette opti- que, la construction européenne s’inscrit dans la continuité des gran- des nations telles que l’Allemagne ou la France qui se sont construites en premier lieu sur une monnaie commune. Mais, alors que ces der- nières ont immédiatement instauré un pouvoir commun à la nation, l’Europe s’en démarque en éludant toute unité politique. Or, cette ab- sence de pouvoir politique risque de nuire à la nouvelle monnaie, notamment dans le cadre de son internationalisation. En effet, c’est en conduisant une politique de taux de change qu’un Etat régule les effets de l’offre et de la demande sur sa monnaie à l’échelle mon- diale, et ni Ecofin, le conseil des ministres des finances européens, ni la Banque centrale européenne ne sont habilités ou missionnés pour cela. «Il y a un grand vide», cons- tatent les deux économistes. Depuis janvier 1999, l’euro a perdu 30% à 35% de sa valeur. Cette dépréciation est en grande partie due à la croissance remarquable qu’ont connue les Etats-Unis ces dernières années : les investisseurs ont préféré les USA aux dépens de l’Europe, rendant l’offre d’euros Autre originalité de la monnaie unique : «Alors que les change- ments de signe monétaire sont pres- que toujours subis, le passage à l’euro est volontaire», note Jac- ques Léonard. Entièrement tributaire de la con- fiance que les gens placent en son pouvoir d’achat, la monnaie entre donc pleinement dans le champ d’étude des psychologues et des sociologues. Ces derniers s’inter- rogent également sur la grande in- connue du passage à la monnaie unique. En se basant sur les don- nées recueillies pour le passage des anciens aux nouveaux francs, les spécialistes ne sont guère optimis- tes quant à la capacité des Français à changer des processus ancrés de- puis l’enfance : de fait, il semble établi que les générations actuelles ne passeront à l’euro que pour les petites sommes, le calcul des gros- ses sommes se fera en francs et seuls les enfants «passeront» vrai- ment à l’euro. Anh-Gaëlle Truong E supérieure à la demande. Pourtant, le fait qu’on paye ainsi plus cher pour les importations n’a pas eu d’impact sur l’économie euro- péenne. «Ce phénomène s’expli- que par le fait que l’Union réalise les 4/5e de ses échanges à l’inté- rieur de la zone euro. Une telle cohabitation d’une dépréciation et d’une inflation structurelle stable aurait été impossible à l’échelle d’un pays.» D’une certaine ma- nière, la nature des échanges pallie ainsi le manque d’unité politique. université Christian Aubin Jacques Léonard Michel Popoff, conservateur en chef au cabinet des médailles de la Bibliiothèque nationale de France, donnera une conférence sur l’histoire du franc (1360-2001) à l’Espace Mendès France, le 5 décembre à 20h30. n 1356, à Poitiers, Jean le Bon est fait prisonnier par les I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 54 I 5 dictin que le siècle des Lumières aura injustement maintenu dans l’ombre. Sous la direction d’Eric Puisais, cet ouvrage collectif (avec notamment Jacques D’Hondt) constitue les actes du colloque, organisé par la Société chauvinoise de philosophie, con- sacré à Léger-Marie Deschamps (1716-1774). Ce volume nous of- fre une vision éclairante sur un philosophe – non moins éclairé – qui considérait son temps comme un siècle de «demi-lumière». La lecture de ce livre nous laisse apparaître Deschamps comme l’ex- ception qui infirme toute règle. Sa pensée, bien que proche des maté- rialistes, semble en effet échapper aux grands courants philosophiques de son temps. Une pensée n’appar- tenant manifestement à aucune école et qui n’en produira d’ailleurs aucune. Paradoxe temporel d’une œuvre qui prédit le passé et se souvient du futur : «En effet, nous avons d’une part avec Deschamps un précurseur de Hegel que l’on découvre cinquante ans après la mort de celui qu’il précède, et d’autre part avec Spinoza une ré- pétition qui anticiperait de cent cin- quante ans la philosophie qu’elle répète», écrit Eric Puisais. La mé- taphysique deschampsienne abolit les apories et dissout les opposi- tions. Du Tout ou Rien au Rien du Tout, les contradictions n’ont plus lieu d’être : «Il n’a jamais, vrai- semblablement, été écrit, ni dit, ni pensé, jusqu’à moi, que Tout et Rien fût la même chose. On a tou- jours cru absurdement que le Rien était la négation de toute existence ; on a toujours été de la plus pro- fonde ignorance de l’existence né- gative.» Là où certains de ses contempo- rains ne voyaient dans ses écrits qu’un ramassis d’ élucubrations et d’«idées abstraites», Diderot écrira cette phrase : «Un moine appelé Dom Deschamps m’a fait lire un des ouvrages les plus violents et les NOUVELLES PISTES POUR LE CIRQUE Dans le cadre de l’année des arts du cirque, l’Université de Poitiers, le Centre d’études sur la coopération juridique (Cecoji) et le Centre socioculturel de la Blaiserie proposent de «Nouvelles pistes», c’est-à-dire le premier colloque consacré aux aspects juridiques du cirque et autres arts itinérants, et une semaine du cirque à Poitiers, du 12 au 17 novembre. Le Cecoji réunit une soixantaine d’intervenants du 15 au 17 novembre pour tenter de dresser un état des lieux d’un art riche d’enjeux socio- économiques, culturels et juridiques : du droit de l’entreprise à la responsabilité en passant par les droits de la personne humaine, la propriété littéraire et artistique, le droit international privé, la protection des animaux de cirque... Côté piste, dix spectacles sont programmés à la Blaiserie, au Théâtre de Poitiers, à la Maison des étudiants, un film au Dietrich (Circus Baobab), une exposition sur les Fratellini et une conférence sur l’histoire du cirque à la Maison des étudiants. Contact : Sylvie Laurens- Aubry, 05 49 49 40 60 www.cecoji.com Centre de la Blaiserie : 05 49 58 05 52 Léger-Marie Deschamps un philosophe entre Lumières et oubli E trange personnage que ce philosophe et moine béné- cien professeur d’histoire médié- vale, rappelle les circonstances de l’apparition du franc pendant la Guerre de Cent ans : «Cette pé- riode était rythmée par les incur- sions anglaises dans le royaume. Pris par surprise, les rois de France eurent rarement le temps de réagir. C’est au cours d’un des rares af- frontements entre les camps enne- mis que Jean le Bon est fait prison- nier par le Prince Noir à Nouaillé- Maupertuis en 1356. La création du franc découle de cet événe- ment.» De fait, les Anglais exigent une rançon de 4 millions d’écus d’or. Tractations et négociations dureront quatre ans au terme des- quels la somme est abaissée à 3 millions. Libéré en 1360 après ver- sement d’un acompte de 400 000 écus d’or, Jean le Bon doit encore plus originaux que je connaisse.» Les spéculations métaphysiques de Deschamps s’ouvrent sur une uto- pie de la condition humaine et pos- uploads/Litterature/ universite.pdf

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