ANR TRANSLIT et COST “Transforming Audiences/Transforming Societies” 1 Politiqu
ANR TRANSLIT et COST “Transforming Audiences/Transforming Societies” 1 Politiques d’éducation aux médias et à l’information en France (2013) Expertes: Divina Frau-Meigs, Université Sorbonne Nouvelle Marlene Loicq, Université de Rouen Perrine Boutin Université Sorbonne Nouvelle Mai 2014 ANR TRANSLIT et COST “Transforming Audiences/Transforming Societies” 2 L’éducation aux médias en France est apparue presque simultanément aux médias eux-mêmes et a toujours suivi leur évolution et leur implantation dans la vie sociale1. Ces initiatives de rapprochement de l’éducation et des médias se sont majoritairement développées en annexe de l’éducation formelle obligatoire, autour de projets et d’événements portés par des enseignants engagés. L’inscription officielle de l’éducation aux médias dans le socle commun des compétences et des connaissances est introduite dans la loi en 2005. Elle est mise en place au primaire en 2008, au collège en 2009, et nécessaire à l’obtention du Diplôme National du Brevet en 2011. L’éducation aux médias a souvent été mobilisée pour le développement de nouvelles pédagogies, dans la mouvance de pédagogues innovants comme Ovide Decroly, Célestin Freinet, Paolo Freire et Janusz Korczak. Elle est alors perçue comme ayant vocation à faire évoluer le système éducatif de manière transversale, en dehors des disciplines traditionnelles. Certains toutefois la considèrent comme une discipline autonome, à instituer pour bénéficier des dispositifs socio-techniques associés à l’audiovisuel et au numérique et des compétences « enseignables » du champ de l’information et de la communication. De nos jours, l’éducation aux médias comme objet d’enseignement aux dispositifs divers côtoie souvent l’éducation par les médias comme support pédagogique d’autres disciplines. Cette proximité, qui peut prêter à ambiguïté, a été entretenue par le fait que l’éducation aux médias a pu officiellement se développer au niveau de l’Union Européenne sous le programme E-learning, qui met en avant les Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement (TICE), à partir des années 2000. La convergence actuelle des médias sur le numérique repose la question des frontières entre les deux et remodèle les périmètres, d’autant que les pratiques des jeunes montrent que, pour eux, la circulation se fait sans suture entre les médias comme supports et les médias comme objets de jeu et d’apprentissage. Ce débat s’enrichit d’une discussion sur la place relative de l’éducation aux médias en relation à l’éducation à l’information et l’enseignement de l’informatique dans la perspective des nouvelles cultures de l’information augmentées par le numérique, ce qui justifie de considérer ces diverses « éducation à » dans ce rapport. 1. Dimension Histoire et définition Historiquement, le rapprochement des médias et de l’éducation s’est opéré par support (presse, radio, télévision, internet), et à l’initiative d’activistes (généralement associés à des mouvements d’éducation populaire). Deux modes d’expression tendent à s’opposer : l’écrit et l’image. La France a une tradition distincte dans les deux cas et le numérique vient remettre en question cette distinction. 1/ L’éducation aux médias par l’écrit (la presse d’information essentiellement) L’écrit est, et reste, le mode d’expression privilégié de l’enseignement en France. Pourtant, la presse, support d’information, a été formellement interdite à l’école et dans les pratiques 1 Les auteures souhaitent remercier Amélie Turet pour ses apports sur le numérique ainsi que Morgane Louis pour son assistance dans les recherches et pour une partie de la traduction de ce rapport. Ont également contribué à la traduction Divina J. Meigs and Julie Momméja. ANR TRANSLIT et COST “Transforming Audiences/Transforming Societies” 3 éducatives jusqu’en 19762. À partir de cette date, l’utilisation des supports écrits de l’information sont apparus comme étant un enjeu majeur de l’éducation, tel que le montre le rapport fondateur de l’éducation aux médias à la française, le rapport d’orientation Gonnet/Vandervoorde remis au ministre de l’éducation nationale en avril 19823. Il préfigure la mise en place d’une instance de prise en charge de l’éducation aux médias en France, le Centre le Liaison de l’Enseignement et des Moyens d’Information (CLEMI) créé en 1983. Si le CLEMI est historiquement plutôt tourné vers l’éducation à l’actualité, l’évolution des médias et de leur place dans la société a conduit à une ouverture plus large de la notion d’information : l’actualité est progressivement abordée sous les divers dispositifs qui la configurent, de la presse papier aux sites internet spécialisés. Toutefois, contrairement à d’autres pays, le CLEMI n’inclut pas la notion d’information dans son acception la plus large comme « ce qui donne du sens au monde » au sein d’autres genres très divers de l’audiovisuel (séries, fictions) ou du numérique (jeux, blogs…), tout en la percevant de manière transversale. L’étude des spots publicitaires y trouve une place mais reste associée à une démarche critique visant à « repérer les procédés de persuasion mis en œuvre dans leur fabrication » (CLEMI, 2012). Convaincu de l’importance de ne pas condenser cet enseignement dans une discipline propre, le CLEMI veut garder la cohérence du travail et les objectifs liés à l’éducation à l’actualité dans une approche transversale, articulée autour de cinq axes : la démarche citoyenne, la dynamique entre actualité et disciplines scolaires, les langages de l’information et leurs conséquences sur la réception, la mobilisation de différentes disciplines dans la vie scolaire et la relation avec des partenaires extérieurs au système scolaire, dont les médias eux-mêmes. Cette démarche s’illustre dans l’activité phare du CLEMI, la Semaine de la Presse dans l’école. Cette éducation aux médias passe essentiellement par l’implication des enseignants des disciplines et par la prise en charge par le personnel documentaliste dans les écoles du secondaire, qui reçoivent tous les documents pédagogiques préparatoires produits par le CLEMI. En 2007, sous l’impulsion de l’Agenda de Paris4 discuté avec l’UNESCO suite à la célébration des 25 ans de la Déclaration de Grunwald5, le CLEMI modifia son intitulé, pour rejoindre le mouvement international de l’éducation aux médias et à l’information (EMI). Le CLEMI devint Centre de Liaison de l’Enseignement et des Médias d’Information, la Semaine de la Presse dans l’école muant en Semaine de la Presse et des Médias dans l’école. 2/ L’éducation à l’image (écrans – cinéma, télévision, puis numérique) Dès le début du XXe siècle apparaissent les « ciné-clubs » et les préconisations diverses de l’usage du cinéma dans l’enseignement, souvent dans une perspective d’éducation esthétique et au « bon goût ». Divers rapports commentent l’utilisation du Cinématographe dans les écoles, et des instances commencent à se mettre en place comme les offices régionaux du cinéma éducateur, l’UFOLEIS (Union Française des Œuvres Laïques d’Éducation par l’Image et par le Son), l’ANPEDU (Association Nationale pour la Promotion des Arts de l’Ecran dans l’Université), le Centre National de Documentation Pédagogique (CNDP), etc. Mais si ces nouvelles approches trouvent une place importante dans l’éducation populaire, les 2Lettre de René Haby publiée au BO en septembre 1976 http://www.clemi.org/fichier/plug_download/40051/download_fichier_fr_lettre.r.haby.pdf 3 http://www.clemi.org/fichier/plug_download/40052/download_fichier_fr_tgv.pm.pdf 4 http://www.clemi.org/fichier/plug_download/38257/download_fichier_fr_agendaparisfinal_fr.pdf 5 http://www.unesco.org/education/pdf/MEDIA_F.PDF ANR TRANSLIT et COST “Transforming Audiences/Transforming Societies” 4 modifications de l’éducation formelle dans le milieu scolaire restent plus minoritaires, jusqu’à la mise en place de projets académiques et nationaux qui, grâce à leur ampleur, laisseront des traces plus sensibles sur le système éducatif. Il s’agit des projets de l’Institut Coopératif de l’École Moderne (ICEM), porté par la pédagogie Freinet et du cours d’Initiation à la Communication Audio-Visuelle (ICAV) développé par René La Borderie en 1965. En 1971, l’ICAV devient l’ICOM (Initiation à la Communication et aux Médias), ouvrant alors à l’intégration plus large des questions de communication, et donc, se détachant du support pour se tourner vers l’éducation aux médias. Ce projet et les évaluations qui en découlent donnent lieu à des recommandations quant à l’intégration de l’audiovisuel à l’école, ce qui est renforcé par le rapport Nora/Minc en 1978 sur l’informatisation de la société. Parallèlement à cela, des initiatives interministérielles voient le jour avec la création d’associations telles que le JTA (Jeunes Téléspectateurs Actifs). En partenariat avec l’INA (Institut National de l’Audiovisuel), certaines chaînes de télévision et divers ministères, tentent des initiatives de rapprochement des mondes de l’école, de la famille, du milieu socio- culturel, etc. Les conséquences de ce projet se trouvent essentiellement dans les instructions officielles de 1985 pour les écoles et les collèges qui retiendront l’idée d’une éducation aux médias citoyenne et critique. Le cinéma se constitue en enseignement optionnel dans les classes de 2nde et continue son rapprochement avec le milieu éducatif. La constitution de la COSEAC (Commission d’Orientation et de Suivi des Enseignements et Activités de Cinéma-Audiovisuel) en 1990 est suivie en 1992 de la création des PLEA (Plans Locaux d’Éducation Artistique) incluant le cinéma et l’audiovisuel (sans précision). A partir de 1993, se mettent en place divers dispositifs Ecole et cinéma (primaire), Collèges au cinéma (secondaire) Lycéens et apprentis au cinéma (lycée) ainsi que des rencontres pour l’éducation au cinéma et à l’audiovisuel en 1999. Pour l’année 2010-2011, les trois dispositifs ont mobilisé 1 406 973 élèves, 50 000 enseignants, plus de 2 000 salles de cinéma et ont généré 3,7 millions d’entrées en salles6. Il apparaît que l’éducation au cinéma a trouvé une place dans l’éducation artistique et culturelle de l’institution. Pour les autres écrans, la situation est plus difficile car ils sont victimes de la dichotomie française entre culture haut de gamme (le cinéma comme uploads/Litterature/ www-cours-gratuit-com-id-7170.pdf
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- Publié le Mar 27, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
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