Chapitre 3 : L’entrepreneuriat Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et j

Chapitre 3 : L’entrepreneuriat Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et jusqu’à la fin des années 1970, les grandes entreprises ont dominé l’économie. La grande taille était considérée comme souhaitable, voire inévitable, et la croissance de la firme était jugée indispensable pour réaliser des économies d’échelle. La PME était perçue comme une simple étape de la vie de l’entreprise. Durant cette période, le nombre d’entreprises par habitant a diminué, en Europe et aux États-Unis (Wtterwulghe, 1998 ; Shane, 1996). Le climat économique était plutôt propice à l’étude de la grande entreprise, voire de la multinationale, et, par conséquent, l’entrepreneuriat intéressait peu les chercheurs. La récession économique, la reprise et l’avènement de l’économie de l’information ont mis à mal le postulat de l’inévitabilité de la grande dimension. Le nombre de grandes entreprises a diminué durant les années 1970 et 1980. Les chercheurs ont alors pris conscience de l’importance économique des entreprises nouvellement créées. Bien qu’il ait déjà fait l’objet de recherches isolées auparavant et que ses bases historiques remontent au xviiie siècle, le champ académique de l’entrepreneuriat a réellement pris son envol dans les années 1980. C’est alors qu’apparaissent des revues scientifiques et des conférences spécialisées entièrement consacrées à l’entrepreneuriat. Ce mouvement s’est encore considérablement accéléré au début des années 1990, période durant laquelle des cours ou des programmes d’entrepreneuriat ont été créés dans de très nombreuses universités et écoles supérieures. Dans le monde en mutation où nous vivons, les crises se multiplient. Ces crises sont autant d’opportunités que peuvent saisir de jeunes entrepreneurs susceptibles d’apporter des solutions innovantes aux problèmes actuels. Nous avons donc besoin, plus que jamais, d’entrepreneurs pour changer le monde. 1. Les paradigmes Fayolle et Verstraete (2005) pensent que l’entrepreneuriat est un domaine trop complexe et trop hétérogène pour se limiter à une seule définition. Ils proposent donc de classer les différentes définitions avancées par les auteurs selon quatre courants de pensée ou paradigmes. 1. Le paradigme de l’opportunité d’affaires Cette perspective définit l’entrepreneuriat comme la capacité à créer ou à repérer des opportunités et à les exploiter (Shane et Venkataraman,2000). Elle y associe parfois d’autres notions, telles que la capacité à réunir les ressources pour poursuivre l’opportunité. Elle s’intéresse aux sources des opportunités, au processus de découverte, d’évaluation et d’exploitation de celles-ci, ainsi qu’aux individus qui les découvrent, les évaluent et les exploitent. 2. Le paradigme de la création d’une organisation Ce courant de pensée définit l’entrepreneuriat comme la création d’une organisation par une ou plusieurs personnes (Gartner, 1990). La notion d’organisation ne s’y réduit pas à celle d’entreprise. 3. Le paradigme de la création de valeur Cette approche définit l’entrepreneuriat comme un phénomène ou un processus créant de la valeur (Ronstadt, 1984 ; Bruyat et Julien, 2001), qu’elle soit individuelle, économique ou sociale. Les travaux portant sur le lien entre l’entrepreneuriat et la croissance économique peuvent être rattachés à ce paradigme. 4. Le paradigme de l’innovation Dans la lignée des travaux de Schumpeter, ce courant accorde une importance capitale à l’innovation dans la définition de l’entrepreneuriat (Julien et Marchesnay, 1996 ; Drucker, 1985). Pour Carland et al. (1984), l’innovation permettrait également de différencier les entrepreneurs des propriétaires- dirigeants de PME. L’innovation peut prendre de nombreuses formes différentes (nouveaux produits ou services, nouvelles sources de matières premières, nouvelles méthodes de production, de distribution ou de vente, nouveaux marchés, nouvelle organisation…), mais c’est elle qui constituerait le fondement de l’entrepreneuriat. 2- Les concepts centraux Quatre concepts restent centraux dans la plupart de ces définitions : • l’entrepreneur : selon les approches, il pourra être le créateur de nouvelles organisations, le repreneur d’organisations existantes, voire un employé développant de nouveaux projets au sein de son organisation. On parlera dans ce cas « d’intrapreneur » ou « d’intrapreneuriat » • les ressources à mobiliser : celles-ci sont nécessairement limitées et l’entrepreneur doit les contrôler, sans nécessairement les posséder, pour atteindre ses objectifs ; • la création de valeur : elle suppose la création de toute forme de richesse (argent, indépendance, pouvoir, estime de soi…), non pas uniquement pour une partie prenante dans l’organisation, mais également pour l’entrepreneur lui- même, voire pour la société dans son ensemble. La notion de valeur est donc fonction de la perception de l’entrepreneur et des motivations qui le poussent à entreprendre ; • l’opportunité, notion centrale de l’entrepreneuriat : celle que l’entrepreneur cherchera à saisir sera fonction de ses motivations et de ses attentes. Pour Schumpeter l’entrepreneur, grâce à une perception différente de la réalité, est le premier à prendre conscience des changements dans l’environnement, ainsi qu’à les identifier et à les exploiter comme opportunités. L’entrepreneuriat étant défini en relation avec la notion de création de valeur, il convient de préciser le processus par lequel l’individu peut créer cette valeur. Shane et Venkataraman (2000) identifient trois étapes dans la démarche entrepreneuriale : l’identification de l’opportunité, la décision d’exploiter l’opportunité et son mode d’exploitation. a) L’identification de l’opportunité Celle-ci présuppose une intention de création d’activités. Au cours de cette étape d’identification, l’entrepreneur scrute son environnement, à la recherche de nouvelles idées qui lui permettent d’atteindre son objectif. Les avis sont partagés quant à la source des opportunités. Selon les économistes de l’école « autrichienne » (Hayek, Kirzner…), les opportunités émergent dans l’environnement indépendamment de l’individu qui les identifie. Elles apparaissent à un moment précis à la suite de changements technologiques, politiques, sociaux ou démographiques. Le rôle de l’entrepreneur consisterait, pour les tenants de cette école, à reconnaître ces opportunités existant déjà dans l’environnement. D’autres auteurs réfutent ce point de vue (Timmons, 1994) et suggèrent que les opportunités peuvent aussi se construire. Elles n’existeraient pas avant d’être découvertes par l’individu. L’entrepreneur devrait donc les créer. b) La décision d’exploiter l’opportunité Lorsque l’opportunité est identifiée, l’entrepreneur doit l’évaluer, afin de décider s’il va l’exploiter. Son rôle consiste alors à établir un jugement sur la valeur de l’opportunité et à faire ou non le choix de l’exploiter, ce qui suppose une certaine capacité d’engagement et de prise de décision. Lorsque l’entrepreneur décide d’exploiter une opportunité, il doit faire face à des contraintes liées à un haut degré d’incertitude et à une grande ambiguïté. Il devra chercher des solutions à des problèmes non encore parfaitement définis, trouver des applications à des idées non totalement développées et explorer des débouchés commerciaux pour des concepts encore très flous. Il dispose généralement, pour cela, de très peu de ressources en temps, en financement et en attention. Ses actions seront tournées principalement vers la recherche et la reconfiguration des ressources cruciales, qu’elles soient tangibles (information, capital humain) ou non (capital social et organisationnel). c) Le mode d’exploitation On distingue principalement deux façons d’exploiter une opportunité. La première tombe sous le sens : elle consiste à créer une nouvelle organisation ; la seconde consiste à vendre l’opportunité à des organisations existantes. Il va de soi que des situations intermédiaires existent. Certains employés d’organisations existantes décident d’exploiter les opportunités qu’ils ont découvertes pour le compte de leur employeur ou, au contraire, de le quitter et de créer une nouvelle entreprise. À l’inverse, des acteurs isolés décident de vendre l’opportunité décelée à une entreprise ou de la poursuivre en créant leur propre firme. 3- Esprit d’entreprendre et esprit d’entreprise Deux visions différentes, et néanmoins compatibles, de l’entrepreneuriat peuvent être distinguées : l’esprit d’entreprendre et l’esprit d’entreprise. La première vision, associée à l’esprit d’entreprise, se développe surtout dans la sphère économique. La seconde, associée à l’esprit d’entreprendre, est beaucoup plus large et se focalise sur l’individu. L’esprit d’entreprise est la mentalité qui pousse un individu à créer une entreprise, souvent, mais pas nécessairement, à vocation commerciale. L’esprit d’entreprendre n’est pas uniquement réservé à la sphère de l’entreprise. La création d’entreprise n’est donc qu’une des manifestations possibles de l’esprit d’entreprendre. La définition apportée par le groupe d’experts de l’Union européenne chargé de l’enseignement et de la formation à l’entrepreneuriat (2002) souligne bien cette distinction, puisqu’elle considère que « l’esprit d’entreprendre ne doit pas se limiter à la création d’entreprises, mais doit être perçu comme étant une attitude générale qui peut être utilement adoptée par chacun dans la vie de tous les jours et dans toutes les activités professionnelles ». L’esprit d’entreprendre est avant tout une façon de penser et de repérer ce qui représente une opportunité. Il est associé à la passion, au défi et à la persévérance. Dans l’enseignement, développer l’esprit d’entreprendre, c’est aussi contribuer à construire la confiance en soi du jeune et, oserions-nous dire, son bonheur. L’obligation scolaire et le manque de valorisation des formations par alternance immobilisent certains jeunes démotivés dans l’enseignement secondaire, et cela au détriment de leur parcours personnel. Par ailleurs, certains jeunes universitaires sortent des études sans avoir véritablement opéré un choix professionnel. Développer son esprit d’entreprendre, c’est assimiler des compétences et nourrir des attitudes qui aident à réaliser un projet de vie, à s’émanciper et à devenir responsable et autonome. 4- Les capacités entrepreneuriales À côté du débat sur la définition de l’entrepreneuriat, une autre discussion porte sur la définition et l’identification des attributs qui caractérisent un comportement uploads/Management/ chapitre-3 3 .pdf

  • 30
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Aoû 08, 2021
  • Catégorie Management
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.1105MB