FACULTÉ DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE DÉPARTEMENT DROIT, ECONOMIE, MANAGEMEN
FACULTÉ DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE DÉPARTEMENT DROIT, ECONOMIE, MANAGEMENT CENTRE DE RECHERCHES EUROPÉENNES (CE.D.R.E.) Institut de l’Ouest : Droit et Europe (IODE - UMR CNRS 6262) IMPACT DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE SUR LE TRAVAIL : LES NOUVEAUX DEFIS DU DROIT EUROPEEN Approche économique et juridique de la Quatrième Révolution Industrielle Mémoire pour le Master de droit européen Spécialité droit et gestion des politiques européennes Présenté et soutenu par : Sous la direction de : Charlie NOUJARRET Frédérique MICHÉA Professeur à l’Université de Rennes 1 Frédéric GAVREL Professeur à l’Université de Caen Suffragant : Éric MALIN Professeur à l’Université de Rennes 1 Année universitaire 2016/2017 I Remerciements Je tiens à remercier très chaleureusement Monsieur Jean-Baptiste Lenhof pour son écoute et son ouverture, plus encore pour son soutien indéfectible et précieux, sans lequel ce mémoire n’aurait certainement pas vu le jour. Mes remerciements vont également à Madame Frédérique Michéa, Monsieur Frédéric Gavrel et Monsieur Eric Malin pour avoir partagé la passion présidant à la naissance de ce mémoire, pour leur confiance, leur patience, et leurs conseils avisés. Je remercie Madame Tara Peuvrel pour sa présence de cœur et d’esprit, qui vinrent enrichir ce mémoire plus sûrement que bien des sources. Je remercie enfin, quelle que soit leur importance, tous ceux qui rêvent, tous ceux qui créent, tous les passionnés et volontaires, tous ceux qui croient en l’avenir et contribuent chaque jour, par leurs pensées, leurs paroles, leurs écrits ou leurs actes, à découvrir et réifier les conditions d’un plus grand bonheur pour notre espèce. II Sommaire IntroductionDéfinition des contours de la Quatrième Révolution IndustrielleDes enjeux majeurs posés par le remplacement Homme-IA dans le travailUne nécessitéde traitement scientifique de ces enjeuxPartie premièreDe l’anthropo-substituabilité et de l’anthropospécificité du travailChapitre premierDe la réalité et de l’ampleur du phénomène de remplacement homme-intelligence artificielle dans le travailChapitre deuxièmeDe l’anthropospécificité du travail : un remplacement différenciéPartie deuxièmePremière approche des conséquences juridiques à apporter à la Quatrième Révolution IndustrielleChapitre premierForces et limites du droit actuel pour répondre aux défis d’un remplacement différencié de l’Homme par l’intelligence artificielle dans le travailChapitre deuxièmeRecherche de pistes de réformes du droit européenConclusion III Liste des principales abréviations AI/IA Artificial intelligence / intelligence artificielle BCG Boston Consulting Group CDFUE Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne CESDHLF Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, entrée en vigueur le 3 septembre 1953 cf. Confer « voir référence dont il est question » COMEST Commission Mondiale d’Ethique des Connaissances Scientifiques et des Technologies e.g. Exempli gratia « par exemple » HECI Humanity, ethics, creativity, imagination (compétences) HRI Human-robot-interaction i.e. Id est « autrement dit » IoT Internet of Things L(TEM) Science, technology, engineering, mathematics (compétences) NBER National Bureau of Economic Research OCDE Organisation de Coopération et de Développement Economiques OIT Organisation Internationale du Travail TFUE Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne, entré en vigueur le 1er janvier 1958, dernière version au 1er décembre 2009 TUE Traité de l’Union Européenne, entré en vigueur le 1er novembre 1993, dernière version au 1er décembre 2009 1 Introduction Dans son ouvrage L’Obsolescence de l’Homme (1956)1, le philosophe Günther Anders considère un fait marquant de l’époque à venir dans la multiplication des machines, mais aussi l’accroissement de leur taille, vitesse et complexité, conduisant à une « obsolescence » progressive de l’Homme. Il crée alors le concept de « honte prométhéenne », nouveau motif de honte « s’emparant de l’homme devant l’humiliante qualité des choses qu’il a lui-même fabriquées ». A l’heure du remplacement de nombre d’emplois par les machines, les robots, l’intelligence artificielle, la crainte d’un « monde sans hommes »2, dépassés ou détruits par la technologie par eux créée, semble au moins en partie fondée. On peut donc s’interroger sur la place de l’Homme dans le travail à l’ère de l’intelligence artificielle, et sur les moyens de faire d’un tel état de fait un atout pour celui-ci et la société. I- Des contours de la Quatrième Révolution Industrielle Afin de pouvoir poser correctement le problème, il s’agit en premier lieu de définir précisément la notion de travail, la nature des candidats au remplacement de l’Homme en son cadre, et caractériser ce phénomène de remplacement. Le mot travail proviendrait du latin tripalium, instrument d’immobilisation et de torture à trois pieux utilisé par les Romains pour punir les esclaves rebelles. Bien que cette thèse soit contestée3, le travail emporterait donc dans le concept-même, au sein des pays latins, l’idée de souffrance, de désutilité. Cette vision se retrouve dans l’étymologie du mot pour les langues slaves, avec par exemple le bulgare et russe работа, très proche de son origine « robota » signifiant « jeune enfant, esclave », mais aussi en coréen, où l’alphabet hangeul construit le mot travail 단수 autour de l’idée mouvement, d’existence côte à côte, tout en donnant au mot le sens d’application à une tâche, d’effort soutenu, en évoquant à la fois le corps et l’esprit. En Anglais, bien que labour descende du latin labor, avec un sens d’effort4, le mot work descend du Proto-germanique *werkan5, signifiant « faire, confectionner », à mettre en lien avec le mot Mercien 1 C. H. BECK, Die Antiquiertheit des Menschen. Band I: Über die Seele im Zeitalter der zweiten industriellen Revolution., München 1956, ISBN 3-406-47644-9. 2 Ibid ; crainte également partagée, entre autres et notamment, par Jacques ELLUL 3 Cette thèse est contestée notamment par Émile LITTRE et Michel BREAL, mais aussi par Marie-France Delport (DELPORT Marie- France (1984), « Trabajo-trabajar(se) : étude lexico-syntaxique », dans Cahiers de linguistique hispanique médiévale, n°9, pp. 99- 162. ), qui, à partir de l’analyse des mots hispaniques médiévaux trabajo et trabajar privilégie un principe unificateur d’étymologie du mot dans l’idée de « tension qui se dirige vers un but et qui rencontre une résistance ». (https://blogs.mediapart.fr/flebas/blog/240316/l-arnaque-de-l-etymologie-du-mot-travail#_edn3) 4 Black's Law Dictionary, 7th edition 5 Robert K. BARNHART, Barnhart Dictionary of Etymology, H.W. Wilson Co., 1988. 2 wircan, apparenté au Vieux Frisien werkia, signifiant « mettre en mouvement ». On constate donc que là où les pays latins, slaves et certains pays asiatiques entendent le travail comme un vecteur de souffrance, les pays anglo-saxons, germaniques, lui attribuent une place nettement plus positive, ce qui se traduit également dans l’éthique protestante imprimée au corps social de ces pays, par opposition partielle à une conception catholique plus méfiante vis-à-vis du travail, y voyant la part maudite de la condition humaine (« tu gagneras ton pain à la sueur de ton front » suite au péché originel) sans pour autant nier son importance sociale majeure6. Pour ce qui est de ses contours, le travail peut être en première analyse défini comme toute activité de l’Homme productrice de biens et services, ou comme mesure de l’effort fait par les êtres humains. Pour l’analyse économique classique, il s’agit, aux côtés du capital, d’un facteur de production des biens et services, réalisé par un agent, lequel vend le temps et l’effort d’exercice de son capital humain7, lui procurant désutilité, notamment du fait de la privation de loisirs engendrée, à un demandeur de travail offrant en contrepartie un salaire. Cette définition est toutefois contestée, tout d’abord par la proportion importante de biens et services produits en dehors de toute activité salariée8, mais aussi dans le fait que le travail est désormais rarement considéré comme une marchandise ordinaire. Pour le juriste, la « notion de travail ne semble jamais définie précisément et en tant que telle. Le droit positif l’envisage essentiellement au regard de certaines de ses formes particulières »9, lui donnant parfois des contours inattendus10, étant donné que d’après Guillaume Henri Carmerlynck, « dans la cité moderne aucune tâche ne répugne par sa nature objective propre à s’inscrire dans le cadre d’un contrat de travail, en dehors des interdictions légales concernant des fonctions publiques ou parapubliques »11. Pour le philosophe, le travail est un mode d’activité, id est une modification consciente de l’environnement selon une intention réfléchie. Il est en premier lieu marqué par la nécessité et la contrainte dans le cadre de l’assujetissement de l’Homme à sa matérialité, dans son rapport primordial à la nature.12 Il est en second lieu le substrat de rapports 6 Cf. Lettre encyclique Laborem exercens du souverain pontife Jean-Paul II, 14 septembre 1981 7 "l'ensemble des capacités productives qu'un individu acquiert par accumulation de connaissances générales ou spécifiques, de savoir-faire, etc." Gary S. BECKER (1964, 1993, 3e éd.). Human Capital: A Theoretical and Empirical Analysis, with Special Reference to Education. Chicago, University of Chicago Press. ISBN 978-0-226-04120-9. (UCP descr) 8 J. STIGLITZ, A. SEN, J.-P. FITOUSSI, Rapport de la Commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social, 2009 9 Delphine GARDES, Essai et enjeux d'une définition juridique du travail, éditeur : Institut Fédératif de Recherche "Mutation des normes juridiques" - Université Toulouse I, Collection : Thèses de l'IFR, ISBN : 978-2-36170-053-9, 670 pages - Parution : 04/2013 10 Cf. Cass. Soc., 3 juin 2009, L’Île de la Tentation, Bull. V, 141 : requalification d’une participation d’une émission de téléréalité en contrat de travail 11 Guillaume Henri CAMERLYNCK, Le uploads/Management/ memoire-impact-de-l-x27-intelligence-artificielle-sur-le-travail-les-nouveaux-defis-du-droit-europeen.pdf
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- Publié le Oct 04, 2022
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