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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/4875177 Pour une véritable théorie de la latitude managériale et du gouvernement des entreprises Article in French journal Revue Francaise de Gestion · July 1996 DOI: 10.3166/RFG.253.189-212 · Source: RePEc CITATIONS 79 READS 930 1 author: Gérard Charreaux University of Burgundy 95 PUBLICATIONS 2,404 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Gérard Charreaux on 03 June 2019. The user has requested enhancement of the downloaded file. POUR UNE VÉRITABLE THÉORIE DE LA LATITUDE MANAGÉRIALE ET DU GOUVERNEMENT DES ENTREPRISES -------------------------------------- Gérard CHARREAUX(*) _________________________ Juin 1996 (*) Professeur en Sciences de Gestion, Directeur du Programme doctoral en Sciences de Gestion de l'Université de Bourgogne IAE DIJON - CREGO / LATEC 4, Bd Gabriel, 21000 Dijon; Tel. 80.65.35.66; Fax. 80.39.54.88 e-mail : gcharrea@satie.u-bourgogne.fr 2 Faut-il contrôler les dirigeants? La réponse à cette question volontairement provoquante, en regard des débats qui ont actuellement lieu en France sur le gouvernement des entreprises, n'est pas triviale. Traditionnellement, ce débat ancien est principalement associé à la confrontation entre actionnaires et dirigeants. Les dirigeants, mandataires des actionnaires, géreraient en fonction de leurs seuls intérêts particuliers et au détriment de ceux des actionnaires, voire des autres stakeholders1 de l'entreprise (créanciers, salariés, clients, fournisseurs...). Certains scandales récents, par exemple ceux du Crédit Lyonnais ou d'Eurotunnel, semblent corroborer cette vision conflictuelle et l'absence d'une discipline suffisante des dirigeants. En réaction à ces affaires et également sous l'influence grandissante des investisseurs institutionnels étrangers, un certain nombre d'initiatives prises par les pouvoirs publics ou par les milieux patronaux (par exemple, le rapport Viénot sur le conseil d'administration) ont eu pour objectif de renforcer le contrôle des dirigeants, notamment en préconisant un plus grand activisme et une plus grande indépendance des conseils d'administration. La question du gouvernement des entreprises qui dépasse largement celle des seules relations entre actionnaires et dirigeants, dans la mesure où les décisions managériales ont des conséquences sur le bien-être de l'ensemble des stakeholders de l'entreprise, recouvre l'ensemble des mécanismes qui gouvernent les décisions des dirigeants et définissent leur espace discrétionnaire [Charreaux, 1996]. Elle est indissociable de la notion de latitude (ou de pouvoir discrétionnaire) managériale. Le dirigeant au centre du noeud de contrats ou de la coalition que constitue la firme, joue un rôle principal dans les décisions déterminant la création et la répartition de la valeur, ces deux aspects n'étant pas indépendants. La latitude managériale conditionne le processus de création de valeur, d'une part, parce qu'elle détermine les décisions stratégiques et financières et d'autre part, car elle peut être un des objectifs visés par ces décisions ; ainsi, une décision d'investissement peut avoir pour objectif, en élargissant le champ d'activité de l'entreprise, de rendre plus complexe l'évaluation de la performance du dirigeant et d'élargir son pouvoir discrétionnaire en affaiblissant le système de contrôle. Une théorie du gouvernement des entreprises est également une théorie du pouvoir discrétionnaire managérial, c'est-à-dire de la latitude dont disposent les dirigeants pour gérer les différents contrats. La notion de latitude managériale dépasse cependant la seule dimension opportuniste, élément essentiel de la théorie des coûts de transaction. Si la latitude managériale peut conduire les dirigeants à faire prévaloir leurs propres objectifs au détriment de ceux des actionnaires (ou de l'ensemble des composantes de la firme), elle peut également être une condition nécessaire à la création de valeur, en élargissant l'espace des choix des dirigeants et en accroissant leur 1 - La notion de stakeholder qu'on peut traduire imparfaitement par partenaire est assez imprécise. Est considéré comme stakeholder tout agent (ou groupe d'agents homogène) dont le bien-être peut être affecté par les décisions de l'entreprise. 3 motivation, l'extension du pouvoir présentant un caractère incitatif évident. La valeur créée peut permettre de satisfaire l'ensemble des stakeholders et d'éviter la spoliation d'une catégorie d'agents particulière, favorisant ainsi la survie de la coalition que représente la firme. Une telle théorie doit proposer prioritairement un modèle explicatif du pouvoir discrétionnaire des dirigeants et de sa liaison avec la performance de l'entreprise. Elle doit permettre en outre — en supposant que le système de gouvernement soit inefficace, par exemple parce qu'il conduit à la spoliation d'une catégorie de stakeholders — d'orienter d'éventuelles réformes réglementaires, si la sélection naturelle se montre inapte à révéler les formes institutionnelles et organisationnelles les plus efficaces. La construction d'une telle théorie passe par une représentation préalable du comportement des dirigeants, précisant notamment les objectifs qu'ils poursuivent. Cet article a pour objectif de contribuer à la construction d'une telle théorie. La première section permet de présenter une réflexion sur la représentation du comportement des dirigeants dans les principaux courants théoriques qui irriguent la recherche sur le gouvernement des entreprises. En s'appuyant sur cette réflexion initiale, la seconde section vise à revisiter le thème du gouvernement des entreprises, en dégageant un certain nombre d'aspects fondamentaux qui peuvent éventuellement orienter de nouvelles recherches dans ce domaine particulièrement complexe et important pour comprendre le développement des entreprises et les déterminants de leur performance. 1 . La représentation du comportement des dirigeants dans la recherche sur le gouvernement des entreprises La réflexion sur le système de contrôle des dirigeants s'est construite principalement et progressivement à partir de différentes recherches, inscrites dans les courants théoriques de l'agence et des coûts de transaction, dont l'objectif initial était d'expliquer les formes organisationnelles (la distribution des droits de propriété, la répartition des fonctions de propriété et de décision...) en s'appuyant sur le principe d'efficacité. Les différents systèmes de contrôle des dirigeants apparaissent comme des mécanismes de discipline efficaces, puisque seules les formes organisationnelles efficaces — qui minimisent les coûts d'agence et de transaction — sont supposées survivre. Dans ces analyses, le rôle des dirigeants est réduit au minimum. Les mécanismes de contrôle, qu'ils soient intentionnels ou spontanés, émergent comme des moyens de réduire les coûts organisationnels. Dans les premiers travaux, l'attitude des dirigeants relativement à ces mécanismes est le plus souvent passée sous silence. On ignore si les mécanismes s'imposent aux dirigeants ou s'ils sont mis en place avec leur accord, voire à leur initiative. Le jeu des mécanismes est supposé se faire librement en posant l'hypothèse que les dirigeants subissent passivement la discipline exercée, 4 qu'elle provienne par exemple du marché des prises de contrôle ou du conseil d'administration. La réflexion se complexifie dans les travaux plus récents qui introduisent de façon plus explicite la stratégie du dirigeant, en particulier dans la théorie dite de l'enracinement des dirigeants. Cette dernière qui suppose un comportement actif des dirigeants, repose cependant sur l'hypothèse que la stratégie de carrière du dirigeant s'accomplit à l'intérieur de l'entreprise. Or, cette stratégie peut être orientée de façon externe, de façon à permettre au dirigeant d'occuper successivement plusieurs postes directoriaux, en recourant au marché managérial. Cette progression dans la représentation du comportement des dirigeants nous conduit à proposer en conclusion de cette première section une ébauche de modèle comportemental des dirigeants. 1.1. Le comportement passif des dirigeants Rappelons brièvement le rôle des dirigeants, tel qu'il apparaît dans les articles fondateurs de la théorie contractuelle des organisations2. Dans le travail pionnier d'Alchian et Demsetz [1972], le dirigeant est chargé de contrôler la performance des autres membres composant la firme. Son contrôle est censé être assuré par un certain nombre de mécanismes disciplinaires (la concurrence sur les marchés des différents facteurs, le statut de créancier résiduel, le marché des dirigeants, la menace de licenciement...). Cependant, le dirigeant occupe une part très réduite dans cette discussion, ses objectifs et ses possibilités d'action ne sont à aucun moment évoqués. Jensen et Meckling [1976], les fondateurs de la théorie positive de l'agence, accordent également peu d'attention au dirigeant. Ce dernier est censé maximiser une fonction d'utilité dont les arguments sont la richesse et les avantages non pécuniaires liés à l'exercice de la fonction managériale. Le contrôle du comportement du dirigeant au moyen des différents systèmes disciplinaires est étudié en supposant un rôle passif du dirigeant ; celui-ci ne joue à la rigueur un rôle actif qu'en proposant des systèmes d'autocontrôle destinés à le dédouaner, par exemple, en mettant en place un système d'audit interne. Le statut du dirigeant est similaire dans l'analyse proposée par Fama [1980] qui s'applique exclusivement aux dirigeants des entreprises managériales, au sein desquelles, les dirigeants ne détiennent qu'une part non significative du capital. Le dirigeant n'est qu'un facteur de production particulier contrôlé principalement par le marché des dirigeants. Dégagé de la fonction d'assomption du risque résiduel — il n'est plus l'actionnaire principal — il loue sa capacité managériale à l'entreprise. Sa fonction consiste à surveiller l'ensemble des contrats et à assurer la viabilité de la firme. La discipline des principaux dirigeants est l'apanage du conseil d'administration considéré comme un mécanisme formel induit par le marché. Fama évoque cependant la possibilité que les dirigeants puissent neutraliser le conseil, en entrant en collusion avec les administrateurs. Le pouvoir disciplinaire du conseil serait cependant sauvegardé grâce à l'existence d'administrateurs 5 externes (non-dirigeants) dont l'indépendance serait garantie par le caractère concurrentiel du marché des administrateurs, ces derniers ayant intérêt à maximiser leur uploads/Management/ pour-une-veritable-theorie-de-la-latitude-manageriale-et-du-gouvernement-des-entreprises.pdf

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  • Publié le Jul 26, 2021
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