Documents pour le Médecin du Travail N° 114 2e trimestre 2008 221 dmt TF 169 M.
Documents pour le Médecin du Travail N° 114 2e trimestre 2008 221 dmt TF 169 M. APTEL*, O. MOREL*, A. AUBLET -CUVELIER*, A. GUERRIER*, M. FORSMAN** * Département Homme au travail, Laboratoire de biomécanique et d'ergonomie, INRS, Vandœuvre les Nancy, France ** Department of public health sciences, Division of occupational medicine, Karolinska Institutet, 171 76 Stockholm, Suède é t u d e s e t e n q u ê t e s VIDAR Une méthode-outil d’aide à la prévention des TMS pour les petites entreprises L a prévention des troubles musculosquelettiques (TMS) est une priorité sanitaire et sociale pour les pouvoirs publics et les partenaires so- ciaux. Si la mise en place et la conduite d’une poli- tique sanitaire relèvent de leur responsabilité, il est important que le socle de compréhension et, consécu- tivement, les moyens de leur prévention soient solides pour que les préventeurs et, plus largement les acteurs de l’entreprise, puissent agir efficacement. Cela passe notamment par la mise en place de méthodes et d’outils appropriés aux contextes dans lesquels ils sont mis en œuvre et aux acteurs auxquels ils sont destinés. L’INRS a formalisé depuis 10 ans les principes d’une méthode [2] de prévention des TMS organisée en 3 étapes successives : mobiliser, investiguer, maîtriser. Pa- rallèlement, des outils intégrables à la méthode ont été développés. Ainsi, un questionnaire visant à évaluer les facteurs psychosociaux [2] et un outil d’évaluation des facteurs de risque biomécaniques de TMS du membre supérieur dénommé OREGE ont été développés [3]. L’un des principaux reproches faits à ce dispositif est sa lourdeur. Pourtant, est-il nécessaire de rappeler que c’est d’abord la question de la prévention en soi des TMS qui est complexe ? La méthode ne vise qu’à com- prendre cette complexité qui s’exprime au niveau des situations de travail à risque de TMS. La compétence en ergonomie, qui est un pré-requis pour agir, a aussi fait l’objet de critiques. Elle reste irréductiblement le moyen de l’action de prévention. L’amélioration continue des connaissances sur les TMS, comme en témoignent de nombreux documents de synthèse [4, 5], l’appropriation croissante de ce risque professionnel par les acteurs de l’entreprise, les partenaires sociaux et les pouvoirs publics (cf. Plan Santé Travail) ainsi que l’expérience renforcée des pré- venteurs ont changé le décor. Par exemple, les re- cherches sur l’évaluation de l’implantation des actions de prévention [6, 7] apportent des moyens nouveaux d’appréciation de l’efficacité ou de l’utilité des mé- thodes et des outils de prévention développés. Parallè- lement, la multiplication des actions de prévention a renforcé les motivations et les compétences des pré- venteurs dans ce domaine de la prévention des risques professionnels. Cette nouvelle situation permet de faire évoluer les méthodes et les outils en les simpli- fiant ou de mieux cibler leur utilité sans perte de perti- nence. Les spécifier à différents types d’entreprise ou de situation de travail sont des objectifs qu’il est pos- sible maintenant d’atteindre. Dans le cadre des échanges scientifiques entre l’INRS et le National Institute for Working Life (NIWL, équivalent de l’INRS en Suède fermé en juillet 2007), les chercheurs de l’INRS ont repris et adapté une méthode-outil de prévention des TMS du rachis et des membres développée par le NIWL et dénommée VIDAR [1]. Le but de cet article est triple : 1) rappeler succinctement les principes d’une démarche de prévention des TMS et présenter VIDAR, 2) rapporter l’étude d’évaluation faite par les médecins du travail et les modifications de la version française de VIDAR qui ont été réalisées à la suite, 3) présenter la version française maintenant disponible de cette méthode-outil. En résumé La prévention des troubles musculosquelettiques (TMS) passe par une démarche cohérente avec les données scienti- fiques probantes et opérationnelles en entreprise. Des cher- cheurs et des praticiens des conditions de travail ont fait le constat que les méthodes disponibles étaient peu opération- nelles pour les petites entreprises de moins de 20 salariés (TPE). Les récents progrès dans le domaine des connais- sances sur les TMS permettent de proposer de nouveaux moyens utilisables dans les TPE. La méthode-outil VIDAR dé- veloppée par les chercheurs suédois du NIWL en est un exemple. Elle a été adaptée au contexte des TPE françaises par les spécialistes de l’INRS. Elle intègre aussi plus spécifi- quement la dimension organisationnelle des TMS que la ver- sion initiale et un certain nombre d’autres modifications. Cette version modifiée, testée par des médecins du travail évaluateurs et largement modifiée suite à leurs observations, est décrite dans cet article. Documents pour le Médecin du Travail N° 114 2e trimestre 2008 222 d’une volonté d’action partagée. Enfin, la méthode est mise en œuvre par une personne compétente en ergo- nomie et comprend différentes étapes (figure 1) : mobiliser : « s’accorder pour agir ensemble ». Cela nécessite d’informer, de dialoguer avec les diffé- rents acteurs de l’entreprise afin de s’assurer de leur participation ; investiguer : cette étape vise à produire des connaissances sur la santé de l’entreprise et des sala- riés, à identifier les situations sollicitantes, à objectiver les origines de ces sollicitations et enfin à objectiver la gestuelle par une analyse des facteurs biomécaniques ; maîtriser : cela conduit à transformer les situa- tions de travail en agissant sur les déterminants sus- ceptibles d’être à l’origine des TMS. OUTILS Les outils qui s’inscrivent dans la méthode en sont les éléments visibles, concrets. Ils apportent des appré- ciations quantitatives ou qualitatives sur un élément du problème, parfois sur tous. La boite à outils est riche de moyens complémentaires pour apprécier les diffé- rentes dimensions du travail. Il existe aussi différents outils pour apprécier un même phénomène. Par exemple, OREGE est un outil pour évaluer les facteurs de risque biomécaniques mais il en existe d’autres [3, 8]. De nombreux questionnaires ont aussi été proposés pour évaluer le vécu du travail des salariés [2, 9]. En ergonomie, l’auto-confrontation est un outil es- sentiel qui permet à l’opérateur de verbaliser à partir de la trace vidéo sa propre activité de travail [10]. Elle per- met, suite à un enregistrement de l’activité de travail d’un opérateur, de la commenter ou d’en débattre avec lui lors de son visionnage. Les deux principaux avan- Principes d’une démarche de prévention des TMS La prévention des TMS se fonde d’abord sur une méthode qui vise à comprendre les origines de ces at- teintes à la santé. Elle s’accompagne d’outils qui sont les moyens opérationnels de cette compréhension. Il est donc nécessaire de bien distinguer ces 2 notions trop souvent confondues. Selon Le petit Robert®, une méthode « est un ensemble de démarches raisonnées qui sont suivies pour parvenir à un but » et un outil est « un élément d’une activité qui n’est qu’un moyen, un instrument ». MÉTHODE Dans une démarche de prévention des TMS, l’es- sentiel est de s’accorder sur la méthode qui doit être globale, participative et pluridisciplinaire et s’ancrer dans les connaissances scientifiques et les pratiques so- ciales ; le choix des outils devant être laissé à l’appréciation des utilisateurs, en particulier l’ergonome et le médecin du travail. La méthode doit prendre en compte l’ensemble des facteurs de risque et des déterminants, du fait de la multifactorialité des TMS, et évidemment être cohérente avec les connais- sances scientifiques probantes. Elle intègre les acteurs de l’entreprise et se fonde sur l’association des diffé- rents savoirs. Elle s’inscrit dans un projet d’entreprise et se conduit sous la responsabilité d’un comité de pilo- tage. Elle doit aussi s’inscrire dans le temps. La mise en œuvre du diagnostic ergonomique est l’expression MOBILISER INVESTIGUER S'accorder pour agir ensemble Connaître les risques Analyser les situations de travail Identifier les facteurs de risque Transformer les situations de travail MAÎTRISER Informer et organiser la concertation Fig. 1 : Démarche de prévention des TMS. Documents pour le Médecin du Travail N° 114 2e trimestre 2008 223 tages sont d’une part, l’analyse objective des traces du travail partageables grâce à la vidéo par l’opérateur et l’ergonome et d’autre part, la possibilité de verbaliser son activité par l’opérateur dans un contexte facilita- teur et interactif [10]. MÉTHODE-OUTIL On peut aussi distinguer la méthode-outil de la mé- thode et des outils. La méthode-outil est l’intégration dans la méthode d’outils dédiés. C’est donc un en- semble cohérent, appliqué aux objectifs énoncés, mais non modifiable. Il faut la considérer comme un tout et l’utiliser en conséquence. Les avantages essentiels sont la cohérence des moyens avec les objectifs assignés et la facilité de prise en main. La principale limite est qu’elle porte un prescrit que l’utilisateur doit suivre, ce qui peut être gênant dans certaines situations ou contraignant pour certains utilisateurs. Si la méthode et la plupart des outils ont été conçus pour le secteur industriel où dans le passé le risque était prééminent, il est nécessaire qu’ils s’adaptent à des si- tuations de travail qui évoluent mais où le risque de TMS demeure présent. En effet, l’évolution du tissu économique conduit au développement du secteur des services (plus de 60 % des emplois sont dans ces sec- teurs) uploads/Management/ tf-169.pdf
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- Publié le Apv 04, 2022
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