travail & sécurité – n° 744 – novembre 2013 dossier © Vincent NGuyen pour l’INR

travail & sécurité – n° 744 – novembre 2013 dossier © Vincent NGuyen pour l’INRS 11 12  La séparation des flux montre la bonne voie 15 La Carsat BFC impose sa ligne 16 Une organisation bien conduite 18 Le recyclage fait son tri 20 Colas écrase les dangers 22  Une analyse exhaustive des flux n DOSSIER réalisé par Leslie Courbon, avec Antoine Bondéelle, Cédric Duval et Céline Ravallec Les collisions engins-piétons dossier travail & sécurité – n° 744 – novembre 2013 S ouvent, lorsqu’une entreprise se penche sur la question des collisions engins-pié- tons, c’est qu’elle a subi un accident. Sous le choc, elle veut une solution immédiate et se tourne vers la technique en pensant qu’elle résoudra le problème. » Tel est le constat de Pascal Lamy, responsable de l’étude sur la prévention des col- lisions engins-piétons à l’INRS. Or les dispositifs techniques pour améliorer la visibilité au poste de conduite ou détecter des piétons, s’ils se révèlent indispensables, ont des limites. Ils doivent s’inscrire dans une démarche globale : « Dans un premier temps, les entreprises doivent travailler sur l’organi- sation puis sur le couple visi- bilité-détection », précise-t-il. Mais pourquoi ne pas s’appuyer uniquement sur un dispositif de détection, qui donne l’alarme lorsqu’un piéton est trop proche ? « Parce que, dans cer- taines conditions, il peut être défaillant, sans le signaler. Et, même en état de fonctionner, il peut ne pas donner l’informa- tion attendue lorsqu’il est utilisé dans des conditions imprévues », ajoute Pascal Lamy. Et manifes- tement, accroître la visibilité au poste de conduite ne suffit pas... « Il est important de l’améliorer, soit directement, soit avec des rétroviseurs et des caméras, poursuit-il. Le problème est que, s’il y a trop d’informations, trop d’écrans, le conducteur ne verra pas partout en même temps. » Choc, écrasement et vidéo Le risque de collisions engins- piétons, c’est le choc, le heurt ou l’écrasement (contre l’engin lui-même ou contre un obstacle) d’un piéton lors du déplacement d’un engin. « Pour une nive- leuse, par exemple, ce sont les risques liés à ses manœuvres de recul ou d’avancée à l’avant ou 12 13 La séparation des flux montre la bonne voie Engins et piétons ne font pas bon ménage. Pour prévenir le risque de collisions, la première solution est de séparer les flux, afin que chacun évolue dans une zone qui lui est propre. Mais il est rarement possible de les dissocier complètement et il persiste souvent des zones de croisement ou de coactivité. Des dispositifs peuvent alors aider le conducteur à mieux voir ou détecter les piétons. La séparation des flux de piétons et d’engins se traduit par des allées de circulation distinctes, délimitées par de la peinture au sol au minimum ou, mieux, des barrières physiques. © Fabrice Dimier pour l’INRS Caméras : bien choisir son ma tériel Le choix de l’angle de la caméra est fonction de la zone à couvrir. Il faut qu’elle couvre au minimum la totalité de la zone de danger, voire au-delà pour limiter les effets de la déformation au bord de l’image. La norme ISO 16001 précise que le piéton doit avoir une taille d’au moins 7 mm sur l’écran. L’INRS préconise 10 mm pour qu'on puisse détecter un piéton en un coup d’œil. Sous réserve que cette condition soit remplie, la taille de l’écran importe peu et sera choisie selon la place disponible dans l’habitacle. La robustesse mécanique des caméras est à prendre en compte. Il faut choisir du matériel de chantier, qui résiste aux vibrations, températures extrêmes, pro jections diverses, et pas des caméras à usage domestique. Par ailleurs, les caméras ont beaucoup de fonctionnalités (inverser l’image, régler la luminosité…) et il est nécessaire de verrouiller toutes celles qui ne sont pas liées à la qualité de l’image car elles peuvent être sources d’erreurs lors d’un changement de conducteur. dossier travail & sécurité – n° 744 – novembre 2013 à l’arrière, voire les risques de coincement sur les côtés mais pas les risques liés aux dépla- cements des éléments mobiles tels que la lame », décrit Pas- cal Lamy. « Ce que nous appe- lons engins, c’est une famille de matériel motorisé, non immatri- culé, comme les engins de chan- tier, les nacelles, les chariots de manutention… Ils se retrouvent principalement sur les chantiers de BTP, les usines de collecte et tri des déchets et la logistique », complète Alain Le Brech, res- ponsable du pôle Construction manutention levage et transport à l’INRS. Lors de manœuvres ou de mises à quai des camions, la problé- matique est similaire. Sur les 325 accidents graves ou mortels recensés dans la base Epicéa de l’INRS entre 1997 et 2007, 42% concernaient le transport rou- tier (lors de manœuvres de recul ou de mise à quai de camions), 25 % la logistique, la grande distribution et l’agroalimentaire, 24 % le BTP et 9 % le ramassage et tri des déchets. Au niveau de la Cnamts, le nombre d’accidents impliquant des engins n’est pas identifié. « Mais, indique Pascal Lamy, lorsqu’un accident de ce type survient, il est générale- ment grave, voire mortel. » Séparer les flux Alors, quelle démarche adop- ter ? D’abord, penser à l’organi- sation. « Il faut séparer autant que possible les flux de piétons d’un côté et d’engins de l’autre », indique Michel Granier, tuteur dans l’enseignement à distance pour l’INRS, spécialiste de la question. Cela se traduit par des allées de circulation distinctes, délimitées par de la peinture au sol au minimum, ou, mieux, des barrières physiques. Lorsqu’il y a des portes, les passages des piétons et des engins doivent être séparés car, même si ces dernières sont transparentes, avec le temps, elles deviennent opaques et empêchent les conducteurs de voir les piétons. Il est également nécessaire de s’assurer que l’éclairage est suf- fisant et que les sols sont en bon état et non glissants. C’est dès la conception des bâti- ments que les sols et la circu- lation doivent être pensés afin notamment d’éviter les courbes et de limiter les manœuvres. « Mais ces principes ne sont pas toujours faciles à mettre en œuvre, remarque Michel Granier, principalement sur les chantiers de BTP, où on est tributaire d’un environnement qu’on ne maî- trise pas. C’est difficile d’avoir des voies séparées, elles ne sont pas forcément balisées et les engins peuvent aller vite… » Lorsque l’organisation atteint ses limites, des engins et des piétons sont amenés à coha- biter : la technique peut alors venir compléter le dispositif. Après analyse des situations à risques, certains systèmes peuvent s’avérer utiles, voire indispensables. Première chose : améliorer la visibilité au poste de conduite. « Pour prévenir les collisions, il ➜ Le risque de collisions engins-piétons, c’est le choc, le heurt ou l’écrasement (contre l’engin lui-même ou contre un obstacle) d’un piéton lors du déplacement d’un engin. 11 304 accidents avec arrêt, 1 517 accidents avec invalidité permanente et 112 accidents mortels ont été causés par des engins de terrassement, tous accidents confondus, entre 2001 et 2011. (Source : CNAMTS.) 200 000, c’est l'estimation du parc d’engins de chantier en 2012. 1 085 accidents de travail d’accrochage de piéton par un véhicule ont été recensés en 2011 par la CNAMTS (tous types de véhicules) dont 10 ont entraîné un décès. © Gaël Kerbaol/INRS C’est dès la conception des bâtiments que la circulation doit être pensée afin notamment d’éviter les courbes et de limiter les manœuvres. dossier travail & sécurité – n° 744 – novembre 2013 faut que le conducteur puisse voir les piétons, et la priorité est qu’il puisse les voir directe- ment, explique Jacques Marsot, responsable de l’unité Ingénie- rie de conception de systèmes sûrs à l’INRS. Mais la cabine ne peut pas être ouverte à 360°. Il y a forcément des zones mas- quées ou des angles morts. Pour y remédier, on peut mettre des miroirs, des caméras numé- riques… » Et veiller à ce que le conducteur soit formé à l’utilisa- tion d’un système caméra-écran car c’est lui qui est responsable de son bon fonctionnement. Mais c’est à l’entreprise, si elle choisit de mettre en place des caméras, de former ses conduc- teurs. « Et la caméra doit être uniquement dédiée à la détec- tion de piétons, et ne pas servir d’outil de guidage », complète Jacques Marsot. Les caméras sont de plus en plus répandues car les prix diminuent et leur robustesse augmente. Le risque est de privilégier la caméra sur la visibilité directe, ce qui augmente le nombre d’in- formations à surveiller simul- tanément et rend plus difficile la détection d’un piéton par le conducteur. Ainsi, il y a quatre fois plus d’erreurs de détection sur un écran divisé montrant plusieurs zones en même temps que sur un écran consacré à une seule zone. D’autant qu’il ne faut pas oublier qu’un conducteur d’engin a déjà une tâche à effec- tuer. « Avec le laboratoire Ergo- nomie et psychologie appliquées à la prévention de l’INRS, nous avons fait une analyse ergono- mique avec une uploads/Management/ ts744-page-11.pdf

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  • Publié le Fev 06, 2022
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