Glocalisation Prendre en compte les spécificités de chaque marché M A R S 2 0 1
Glocalisation Prendre en compte les spécificités de chaque marché M A R S 2 0 1 1 • • N ° 2 1 4 • 5 3 POINT DE VUE : Penser local, agir global : le temps de la glocalisation ! En collaboration avec Michel HÉBERT, VP de TBWA France, février 2011. 6 TÉMOIGNAGE : Nokia Inde : le pari de la glocalisation Interview de Shiv SHIVAKUMAR, managing director et vice-président de Nokia Inde, février 2011. 8 CAS : Free Beer : De l’open source à la glocalisation D’après « L’avenir est aux entreprises Y » (Enjeux les Echos, juin 2010), « “Free” Danish Beer Makes a Splash » de Clark BOYD (BBC News, juillet 2005) et « Online Beer Firm Gets Straight to the Point » de Ruth MORTIMER (Brand Strategy, septembre 2005). Glocalisation : pensez l’offre localement pour l’intégrer dans une stratégie globale de création de valeur. Les business models basés sur la standardisation pour tous partout sont (déjà) dépassés, seul un état d’esprit à l’écoute du client sur son terrain est de mise. Au-delà du simple intérêt marketing, c’est une toute nouvelle philosophie stratégique qui se met en place. L’exemple de Nokia en Inde en est une parfaite illustration : l’écoute attentive des besoins particuliers des clients sur ce marché émergent en fait pour la troisième année consécutive la marque la plus fiable en Inde. Mais au-delà d’un pur intérêt d’optimisation marketing local, cet état d’esprit sert l’ensemble du groupe par le simple principe de la reverse innovation. Free Beer : quand la bière devient un bien en open source. L’exemple a bouleversé ce marché si traditionnel de brasseurs gardant jalousement le secret de recettes vendues à l’identique dans le monde. Free Beer est une recette, un nom et un logo que chacun peut exploiter partout, selon son goût. Et qui a remis en question les concepts traditionnels de copyright et de standardisation ! En bref 6 • • N ° 2 1 4 • M A R S 2 0 1 1 Mondialisation a longtemps rimé avec standardisation. Une stratégie directement issue du monde de la finance qui, depuis les années 1950, estime qu’uniformiser l’offre est le meilleur moyen pour amortir les coûts du processus indus- triel. Et si, dans les années 1990, les départements marke- ting des grands groupes se sont pour la plupart mis à suivre la mode du « think global, act local » (adapter une offre globale au niveau local), Michel Hébert pense qu’il est temps de pas- ser aujourd’hui au « think local, act global ». Comprenez : pensez l’offre au niveau de chaque région pour l’intégrer dans une stratégie globale de création de valeur ! LA GLOCALISATION POUR S’ADAPTER À UN MONDE QUI CHANGE Dans un contexte où incertitude et diversité contraignent les entreprises à une adaptabilité croissante, le modèle Coca- Cola de standardisation n’est absolument plus envisageable. I L’incertitude sonne le glas de la standardisation « Les meilleurs stratèges du monde ont beau faire des plans formidables de développement, rien ne se passe jamais comme prévu. » Qui, chez Renault lors du lancement de la Logan en 2005, aurait imaginé qu’elle rencontrerait un tel suc- cès non seulement dans les pays émergents, mais également en Europe occidentale : sous la marque Sandero, elle est la sep- tième voiture la plus vendue en France en 2010 ! Résultat, le groupe automobile doit adapter en permanence son plan de développement. Dans un environ- nement de plus en plus volatil où les leviers de croissance future sont difficiles à anticiper, vouloir planifier à l’échelle mondiale as usual n’est plus réaliste. « Les marchés ont besoin de spécificité, les entreprises d’adaptabilité », résume Michel Hébert. I Faire face à la diversité des consommateurs Le mythe de l’uniformisation des besoins est éculé. Aujourd’hui, Michel Hébert observe que la réduction des dis- tances entre les pays se traduit paradoxalement par un renfor- cement des spécificités locales. Une diversité qui joue sur la manière d’approcher les consommateurs. Résultat, « un pro- duit ou une campagne pensés à New York ne peuvent avoir d’impact équivalent à Dubaï ». Un phénomène bien compris par Nike, chantre pendant des décennies du « Just do it » américain (donc forcément universel) et qui a progressive- ment modifié son marketing en abandonnant ce slogan au profit d’approches locales. Des stratégies de communication notamment basées sur un renforcement du sponsoring des équipes nationales et sur l’adaptation des messages : « Vive le football libre » en France, « Rebuilt to Shine » au Brésil… À R E T E N I R Penser local, agir global Le temps de la glocalisation ! En collaboration avec Michel Hébert, VP de TBWA France, février 2011. • « Penser local, agir global » : seule une stratégie de développement tenant compte des spécificités locales permet aux entreprises de surmonter la volatilité des marchés. • Observation, expérimentation et transfert des pouvoirs vers les filiales sont les trois leviers d’exécution de la glocalisation. • Vectrice d'innovation et support de la relation clients, la glocalisation est une stratégie de croissance à long terme qui repose sur l'adaptabilité de l'entreprise. Les stratégies d’internationalisation basées sur le « one size fits all » sont usées ! La Coca-Colisation des produits et services ne séduit plus, les consommateurs où qu’ils soient exigent d’être pris en considération avec leurs particularités. Et Michel Hébert est formel : une stratégie de développement réussie, qu’elle soit nationale ou mondiale, doit s’inspirer des spécificités locales plutôt que de les ignorer ou de les écraser. STRATÉGIE D O S S I E R M A R S 2 0 1 1 • • N ° 2 1 4 • 4 I L’expérimentation et l’adaptation Autre facteur clé de succès de toute stratégie glocale de conquête d’un marché : l’expérimentation ! L’enjeu est de tester des stratégies, de revenir en arrière, d’apprendre de ses échecs. Michel Hébert constate que « les plus grands succès de ces der- nières années tels Google, Facebook ou Twitter ne sont pas nés d’un plan préétabli mais d’hésitations et d’adaptations pour comprendre et répondre aux attentes des utilisateurs ». Et c’est en effet la stratégie du zéro business plan qui a fait le succès d’une entreprise comme Facebook : avant même d’engranger le moindre dollar en 2009, les dépenses annuelles de Facebook étaient évaluées entre 200 et 300 millions de dollars par an (salariés, électricité, bande passante…). Une approche dont peuvent s’inspirer les business developers : oser prendre des risques, tester son concept afin d’adapter le projet en perma- nence en le confrontant à la réalité. I Le transfert des pouvoirs Dernier enjeu majeur de toute approche glocale, la décentrali- sation du pouvoir vers les unités opérationnelles. Un processus qui invite à repenser la structure de l’organisation : laisser plus de marge de manœuvre aux responsables des marchés locaux pour mettre en place les stratégies adaptées à leur marché. Une stratégie éprouvée par McDonald’s qui depuis une tren- taine d’années adapte ses sandwichs en fonction des régions du monde où les restaurants sont implantés. Enjeu pour réagir vite et bien aux spécificités locales : donner carte blanche aux responsables locaux pour qu’il testent leurs innovations sans avoir besoin de défendre leurs propositions auprès du siège de l’Illinois. Par exemple, au Maroc, la direction de McDonald’s a pris la décision de servir, pendant le mois de Ramadan, un menu spécial pour rompre le jeûne qui associe plats locaux (soupe marocaine, dattes…) et Big Mac. EXÉCUTER LA STRATÉGIE DE GLOCALISATION Observation, nouvelle répartition des pouvoirs et expérimenta- tion : trois facteurs clés de succès pour mettre en place une stratégie de glocalisation cohérente et performante. I L’observation « Le bureau est la plus mauvaise place pour observer le mar- ché », souligne Michel Hébert pour qui les dirigeants et res- ponsables marketing ont tort de se limiter aux études des cabinets spécialisés. Il recommande au contraire d’aller voir sur place ce qui se passe pour comprendre les comporte- ments des consommateurs. « Une responsabilité qui ne peut être externalisée », souligne Michel Hébert. À l’image de McDonald’s dont certains collaborateurs ont pour mission spécifique de se rendre dans les restaurants pour compren- dre leur clientèle (âgée, étudiante…) et la nature de la concurrence (proximité d’une boulangerie, d’une pizzeria…). Seule cette phase d’observation permet de capter les signaux faibles qui permettent d’adapter la stratégie aux réalités du marché. Diplômé de l’Ecole du Marketing et de la Publicité, Michel HÉBERT a commencé sa carrière chez Marketing Office, puis a créé la première société d’études de marché au Maroc. De retour en France, il devient le premier directeur marketing du Loto et rejoint ensuite l’agence FCA, puis Young & Rubicam. Il crée Jump France (groupe TBWA) en 1984. Il est aujourd’hui VP de TBWA France. Michel Hébert a publié trois ouvrages : La publicité est-elle toujours l’arme absolue ? (Liaisons, 1997) ; Les 10 nouveaux défis pour le marketing et la communication (Maxima, 2006) ; Raisonner Métis (Maxima, 2007). Il publiera en avril 2011 Le marketing et uploads/Marketing/ glocalisation.pdf
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- Publié le Mai 02, 2021
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