Atelier de préparation à l’Épreuve uniforme de français DOCUMENT 2A DISSERTATIO

Atelier de préparation à l’Épreuve uniforme de français DOCUMENT 2A DISSERTATION CRITIQUE – ÉPREUVE DU 18 DÉCEMBRE 2002 – TROISIÈME SUJET Exemple complet comprenant l’introduction, le développement et la conclusion (inspiré d’une copie étudiante) Point de vue choisi : point de vue nuancé. Azarius s’engage dans l’armée à la fois pour le bien de sa femme et son propre bien. Tentez de repérer les parties de la dissertation (arguments principaux et secondaires, preuves et explications, sujet amené, posé, divisé; point de vue, conclusions de paragraphe, etc.) Après la Seconde Guerre mondiale, le Québec est en pleine expansion économique et vit une importante transformation sociale, notamment la migration de la campagne à la ville. La littérature québécoise de l’après-guerre reflète ces mutations. C’est le cas pour Bonheur d’occasion, roman paru en 1945 dans lequel Gabrielle Roy donne une vision frappante de la réalité de l’époque, en soulevant des problématiques sociales et morales concernant l’argent, la famille et la vie de tous les jours. L’extrait où Azarius annonce à sa femme qu’il a trouvé la solution à leurs problèmes en s’engageant dans l’armée reflète bien cela, et Azarius tente de convaincre Rose-Anna qu’il pourra ainsi lui rendre la vie meilleure. Mais est-ce vrai d’affirmer qu’il s’enrôle dans l’armée principalement pour le bien de sa femme, ainsi qu’il tente de l’en convaincre? En fait, au-delà de son désir d’améliorer les conditions de vie de Rose-Anna, Azarius vise principalement à contrer les échecs de sa vie, à réaliser pleinement son destin et à découvrir la liberté. Il est vrai d’affirmer que, dans une certaine mesure, Azarius souhaite le bien de Rose-Anna puisqu’il aimerait qu’elle goûte enfin au bonheur. Dans un premier temps, nous constatons qu’il voudrait que son épouse retrouve la joie de vivre qu’elle avait perdue: « Et ça te montait, ça te montait sur le cœur, tant qu’à la fin t’en avais pu de larmes, même en te cachant de moi le soir. […] Et le chagrin qui continuait à te ronger le cœur […]» (lignes 4 à 6) ; « Si je t’en parle aujourd’hui, dit-il, c’est qu’elle est finie ta misère. Écoute ben, Rose-Anna : tout va recommencer en neuf. » (lignes 27-28). Manifestement, Rose-Anna ne vit pas une situation très heureuse, puisque son grand chagrin a même tari ses larmes. Par une personnification (le chagrin qui ronge le cœur), Azarius montre l’ampleur de la détresse de Rose-Anna. Sa détresse est palpable. Cependant, Azarius souhaite que cette situation cesse enfin, il voudrait donner une deuxième vie à Rose-Anna, une vie sans misère. Ceci montre qu’il espère vivement le bien-être de sa femme. Son ton affirmatif en fait foi. Dans un second temps, il est possible d’affirmer qu’Azarius souhaite le bien-être psychologique de Rose-Anna, car il aimerait que son enrôlement permette à sa femme de réaliser ses rêves: « Et d’abord, tu pourras te chercher une maison à ton goût quand t’auras retrouvé tes forces et que tu seras debout… Une maison de gaieté, Rose Anna, comme t’en toujours voulu une…Pas une maison comme c’telle-citte où je t’ai vue pas capable de fermer l’œil de la nuit, et penser, penser des heures de temps à arranger nos affaires! » (lignes 28-32). La famille vit dans une masure, très près du chemin de fer, ce qui est très bruyant. Cela explique que Rose- Anna, déjà préoccupée par ses soucis financiers, n’arrive pas à dormir. Azarius aimerait qu’enfin Rose-Anna puisse goûter à son rêve de posséder une maison à son goût, qui soit conforme à ses rêves, « comme elle en a toujours voulu une ». Azarius est manifestement soucieux d’offrir à Rose-Anna un lieu idéal pour élever la famille grâce à son enrôlement, ce que montre l’expression « une maison de gaieté ». Il voudrait que la joie revienne au sein de son foyer et voir à nouveau sourire Rose-Anna. Bref, il est vrai que, dans une certaine mesure, Azarius semble désirer le bien de Rose-Anna, puisqu’il souhaite qu’elle soit heureuse. Cependant, il semble aussi possible d’affirmer que son enrôlement lui profitera à lui aussi. Bien que certains aspects nous portent à croire qu’Azarius souhaite s’enrôler pour le bien de sa femme, il semble que ce ne soit pas son unique motif. Le lecteur peut le constater en raison des pensées moins honorables agitant l’esprit d’Azarius, lesquelles révèlent un certain égoïsme. Celui-ci s’exprime d’abord par son besoin de remonter dans sa propre estime avant toute chose, de se prouver qu’il est un homme : « Il évoqua L’Accord – Centre d’aide en français du Collège de Maisonneuve 2 jusqu’aux champs de bataille fumants de sang humain, mais où un homme se révélait dans sa force. […] Et même, lui qui s’était trouvé incapable de secourir le malheur qui l’entourait, il fut saisi d’une fièvre intrépide à la pensée de combattre les grandes afflictions ravageant le monde. » (lignes 99-101). On voit clairement dans cette citation qu’Azarius souhaite réaliser quelque chose de grand qui puisse lui donner l’impression d’être un homme et que cela ne concerne en rien son attachement à sa famille. Il a besoin de se prouver, même au prix du sang, qu’il est un homme fort. Azarius constate l’échec de sa vie, puisqu’il n’a jamais pu venir correctement au secours des siens, frappés de « malheur ». Partir à la guerre le rend fiévreux, métaphore qui révèle le sentiment d’excitation qui le gagne. Il ne part donc pas pour le bien-être de Rose-Anna essentiellement, mais aussi pour lui-même, il est prêt à quitter sa famille qui a pourtant besoin de lui. Ensuite, il a aussi besoin de se libérer de ses engagements familiaux : « Le plus beau de toutes, c’est que tu vas être débarrassée de moi. […] Et il comprit que s’il venait d’employer ce mot vulgaire, c’est qu’il cachait un sens qui était comme l’assurance de sa propre libération […] Libre, libre, incroyablement libre, il allait recommencer sa vie. Sa salive goûta non pas la suie et le charbon, mais déjà les espaces ouverts, les vents pleins et fougueux. » (lignes 88-94). On comprend grâce à cet extrait qu’il prétend que Rose-Anna sera débarrassée de lui, mais que c’est peut-être le contraire qui est vrai, comme le suggère le fait qu’il souhaite en réalité sa propre libération (« l’assurance de sa propre libération »). Le mot « libre », répété à trois reprises, montre bien qu’il se sent étouffé auprès de sa famille et que seul l’enrôlement pourra lui permettre de « recommencer sa vie », perspective qui le rend heureux et qui prouve son égoïsme. Il goûte littéralement cette liberté à venir, comme l’évoque la métaphore de la salive qui a la saveur non pas « de la suie et du charbon », comme le suppose un long et réaliste voyage en train, mais « les espaces ouverts », image positive liée étroitement à l’idéal de la liberté. En somme, certains aspects de l’extrait à l’étude nous font hésiter à affirmer franchement qu’Azarius part exclusivement pour le bien de Rose-Anna. L’Accord – Centre d’aide en français du Collège de Maisonneuve 3 Pour conclure, il est évident qu’Azarius veut soulager Rose-Anna de sa misère puisqu’il désire qu’elle retrouve la joie de vivre et qu’elle réalise enfin ses rêves, mais il agit aussi de façon égoïste si l’on considère ses intentions secrètes. S’enrôler dans l’armée lui permettra de regagner une fierté perdue en raison de ses échecs et lui fournira la clef de la liberté. Étant donné toutes les avenues qu’offre cette nouvelle position dans l’armée, il apparaît donc clairement qu’Azarius s’enrôle à la fois pour le bien de sa femme et le sien. Le choix d’Azarius de s’enrôler dans l’armée, alors que l’on connaît les événements entourant la conscription, n’est tout de même pas surprenant. Durant la Seconde Guerre mondiale, il arrivait fréquemment que les hommes choisissent cette voie, même si la plupart étaient contre la conscription, afin de pouvoir subvenir aux besoins de leur famille appauvrie par de longues années de récession. Commentaires : Cette dissertation montre bien les articulations entre les arguments principaux et les arguments secondaires. Idéalement, il convient de sous-diviser ainsi les arguments, ce qui permet de montrer que l’on maîtrise bien la question. Cependant, lors de l’Épreuve, si vous manquez de temps pour sous-diviser les arguments, ne le faites pas. Le plus important demeure de présenter un certain nombre de bons arguments, appuyés par des preuves pertinentes et bien expliqués. L’Accord – Centre d’aide en français du Collège de Maisonneuve 4 uploads/Philosophie/ 2a-dissertation-bonheur-d-x27-occasion-rev.pdf

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