1 Université Notre Dame d’Haïti (UNDH) UDERS d’Anse-à-Veau et Miragoâne, Nippes

1 Université Notre Dame d’Haïti (UNDH) UDERS d’Anse-à-Veau et Miragoâne, Nippes Village Sainte-Anne, Anse-à-Veau, Haïti, W.I EFACAP de Chalon, Route Nationale #2 JUIN-JUILLET 2022 Brève introduction à l’anthropologie ternaire dite encore spirituelle Michel Fromaget Si vous le voulez bien, je me propose de vous introduire d’emblée au cœur de notre sujet. Celui-ci est donc le paradigme anthropologique ternaire qui distingue absolument, en tant que composantes ontologiques de l’être humain, le corps, l’âme et l’esprit. Je dirais les choses ainsi. En matière de paradigme anthropologique, c’est-à-dire en fait de conception, en fait de représentation de l’homme considéré en tant que tel, nos contemporains, en particulier ceux qui constituent l’élite nos sociétés, sont pour la plupart aussi ignorants que nos ancêtres qui, concernant le système solaire, s’en remettaient à Ptolémée et plaçaient la terre en son centre. Au vrai, ils sont semblables à ce poisson rouge qui ignore qu’il est dans un aquarium parce qu’il n’en est jamais sorti. Le parallèle qui est fait ici, entre paradigme anthropologique et paradigme cosmologique, est loin d’être gratuit. Car c’est d’une même erreur qu’il s’agit. A quoi s’ajoute que l’erreur anthropologique est sensiblement plus tragique puisqu’elle porte sur le centre même de notre être, ce centre qui définit notre humanité. Simplement dite, l’erreur est celle-ci : nous avons tous appris à nous construire, à nous ressentir et à vivre comme des êtres tissés seulement de deux dimensions ontologiques, alors que l’homme en a pour le moins trois. Devons-nous, dès lors, nous étonner que notre civilisation soit en crise ? Mais, en premier lieu, d’où vient l’erreur ? Tout d’abord, et au plus haut point, de la civilisation occidentale moderne, car c’est certainement elle qui, niant et disqualifiant notre troisième dimension, nous enferme et asphyxie dans les deux premières. Notre société, de reste aussi bien la laïque que la religieuse, est donc la première coupable. Première coupable, mais non la seule, car l’individu, vous et moi, le sommes aussi. Il est vrai que dans cette tragique erreur nous trouvons notre compte et que celui-ci paraît excellent. Et tout va bien. Tout va bien tant que l’économie fonctionne et que la santé est bonne. Mais que celles-ci vacillent, alors l’angoisse et la nuit accourent du fond de l’horizon. Mais alors aussi les vraies questions se posent et sont prises enfin au sérieux. Ces « vraies questions » concernent, aussi et directement, la santé et la médecine. C’est pourquoi il en sera ici question. Le bref exposé qui suit n’a d’autre ambition que d’inciter le lecteur à étudier et méditer les notions et les arguments qui lui permettront, non seulement de commencer à prendre la mesure de ces questions, mais aussi, suivant sa propre équation, de commencer à leur apporter un début de réponse. Nous progresserons en trois temps. Le premier se propose de déminer le vocabulaire 2 de l’anthropologie spirituelle, car il se trouve, hélas ! Que les mots utiles à la dire sont piégés depuis des siècles. Précisions préalables de vocabulaire L’auteur vient d’employer le mot de « paradigme ». Le sens exact de ce mot nous importe au plus haut point. De quoi s’agit-il ? Voici une définition classique de cette notion : "Un paradigme est un ensemble de présupposés conceptuels et théoriques assurant la cohésion d'une vision du monde, propre à une culture, et permettant à cette dernière de vivre dans l’environnement qui est le sien". En sorte qu’un paradigme est une représentation parmi d'autres possibles du réel. Mais il en est une représentation viable et vivable. Tels sont par exemple les paradigmes cosmologiques géocentrique de Ptolémée et héliocentrique de Copernic. Ou encore les paradigmes anthropologiques dualiste et ternaire, le premier affirmant que l’homme est seulement tissé de corps et d’âme, le second affirmant qu’il peut être tissé aussi d’esprit. Mais avant que nous quittions cette notion capitale de paradigme, je désire qu’ayant bien noté qu’elle désigne de seuls présupposés, vous graviez profondément dans votre esprit cette caractéristique suressentielle qui n’appartient qu’aux seuls paradigmes anthropologiques. Savoir qu’en aucun cas ils ne conçoivent ni ne décrivent l’homme tel qu’il est fait, mais qu’ils font l’homme tel qu’ils le conçoivent et le décrivent. Ce que les anciennes civilisations, d’Orient notamment, savent depuis des millénaires. La notion de corps, quant à elle, si on l’approfondit, est certes délicate, mais l’expérience montre qu’on peut l’évoquer sans engendrer de graves contre-sens. Tel n’est pas, par contre, le cas des notions d’âme et d’esprit dont le sens peut varier d’un extrême à l’autre suivant qu’elles sont entendues dans leur acception la plus ancienne qui est biblique ou dans leur acception plus récente que je qualifierai aujourd’hui, pour simplifier, de moderne. Dans cette dernière, l’âme a une très forte connotation religieuse, ou spirituelle, puisqu’elle serait de l’homme sa part éthérée et immortelle. Quant à l’esprit, son sens le plus lourd est ici d’ordre psychologique puisque le plus fréquent est qu’il désigne la faculté de penser, de conceptualiser et comprendre les choses. Tel est par exemple le cas dans les catéchismes catholiques, chez des philosophes comme Descartes et Pascal, dans la littérature romantique et le vocabulaire ordinaire de nos contemporains. Or, soyons très attentifs car le sens premier et biblique, bien plus cohérent et respectueux de l’étymologie – raison pour laquelle il sera le nôtre –, ce sens est exactement à l’opposé. Là, le mot âme désigne de l’homme seulement son mental, soit sa part psychologique, sa part ouverte sur le monde naturel et le mot esprit sa part spirituelle, soit sa part ouverte sur l’infini, le divin et Dieu, quelle que soit la manière dont celui-ci est conçu. Je voudrais enfin donner une définition tout à la fois ample et précise du mot spiritualité. Je l’emprunte à Michel Foucault qui écrit dans son livre L’herméneutique du sujet : la spiritualité consiste dans « la recherche, la pratique, l’expérience par les quelles le sujet opère sur lui-même les transformations nécessaires pour avoir accès à la vérité ». Ce sont ces transformations que l’anthropologie chrétienne, comme nous le verrons bientôt, appelle très justement metanoïa et qu’elle comprend non moins justement comme 3 une « nouvelle naissance ». Mais positionnons clairement et sans plus tarder les deux plus grands paradigmes anthropologiques forgés au fil des siècles par notre civilisation. Les paradigmes dualiste et ternaire La conception ici nommée de dualiste est celle selon laquelle vous et moi, que nous le voulions ou non, avons construit notre humanité et notre personne. Cette conception dit que l’être humain possède par nature deux, et seulement deux, dimensions ontologiques, c’est-à- dire nécessaires à la définition de son être même : la physique et la psychique. Soit son corps et son âme. Ces deux aspects, pour être inséparables n’en sont pas moins distincts. Ils appartiennent à des ordres de réalité différents. Nul ne niera en effet que le monde des os, des viscères et des humeurs n’est pas le même que celui des idées, des pensées et des rêves. Disons un mot rapide de ces deux composants. Le corps tout d'abord. Le corps ouvre sur le monde physique, sur l'ordre des réalités sensibles. On dit qu’il ouvre par ses cinq sens sur le monde des objets. La conscience qu'il propose de ce monde est une conscience préverbale, comme chez le nourrisson, ou averbale comme chez les animaux. Mais le corps n'est pas seulement ouverture et sensation. Il est aussi action : il me permet d'agir sur le monde sensible. Au vrai, le corps est mon interface avec le monde extérieur. Par lui, ce monde s'imprime dans mon âme et, par lui, mon âme s'exprime dans ce monde. L’ontologie du corps a sur lui bien plus à dire, bien sûr. Mais nous ne pouvons ici faire mieux. L'âme L'anima en latin, la psyche en grec, équivaut donc dans son sens ancien et premier au psychisme, au mental. Ce que nous avons déjà signalé. Le mot grec psyche dit que l’âme n’est autre que ce qu’étudie la psychologie. Le mot latin anima suffit déjà à nous prouver que tous les animaux ont une âme, bien sûr. L’âme ouvre pour sa part sur le monde psychique, sur l'ordre des réalités intelligibles, sur le monde des sujets. La conscience psychique, contrairement à la conscience corporelle, n'est pas strictement soumise au déterminisme du temps et de l'espace. Elle peut partiellement s'en affranchir. Mais l'âme est aussi action : par le langage, parlé ou non, elle agit sur le monde des âmes et des sujets. Sur l’âme aussi nous aurions aussi bien d’autres choses dire. Mais il faudra nous contenter de ce qui vient d’être dit et aussi de cela. A savoir que toutes les élites, aussi bien profanes que religieuses, qui définissent les orientations de notre société, toutes ces élites, conformément au paradigme anthropologique dualiste qui est le leur, toutes affirment que la définition, l’ontologie, l’essence de l’homme se réduit à ces deux dimensions. Selon elles, le reste, donc l’esprit ne concerne pas l’essence, et n’est en conséquence qu’accessoire, secondaire, voire illusoire. Vous pouvez vérifier cela très facilement. Par exemple, en consultant les approches uploads/Philosophie/ anthropologie-ternaire-travail-en-groupe.pdf

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