Ont contribué à la réalisation de cet ouvrage : Wendy Benoit (anglais) Éric Fou
Ont contribué à la réalisation de cet ouvrage : Wendy Benoit (anglais) Éric Fourcassier (philosophie) Cédric Oline (histoire-géographie) Isabelle Schwan-Ronzier (espagnol) la totale bac L Philosophie Philosophie Sujet 1 8 Sujet 1 Sujet 1 • Énoncé Philosophie Composition Sujet national, juin 2015, série L Suis-je ce que mon passé a fait de moi ? Comprendre le sujet La question posée porte sur l’identité personnelle. Il s’agit d’examiner l’hypothèse se- lon laquelle le passé d’un individu détermine de part en part son identité. L ’opinion commune et sa remise en question Il nous semble spontanément que notre identité est le produit de notre passé. L ’identi- té d’un individu se construit à force d’expériences accumulées. À l’inverse, quiconque perd la mémoire de son passé perd du même coup son identité. Toutefois, réduire l’identité d’une personne au simple produit de son passé, ne se- rait-ce pas lui retirer toute liberté ? Or, n’est-ce pas dans la mesure où un homme est libre et s’affirme comme l’unique auteur de ses pensées et de ses actes, qu’il peut revendiquer une identité qui soit réellement sienne et véritablement personnelle ? Mobiliser ses connaissances Notions et distinctions utiles – Les chapitres « la conscience », « l’inconscient », « l’existence et le temps », mais aussi « l’histoire » et « la liberté » ; – La notion de déterminisme ; – La distinction du passé et de l’histoire (le premier renvoyant à une collection dispa- rate et sans ordre de faits, la seconde à l’unité d’un récit ordonné) ; – Essence / existence ; – La distinction de Sartre entre « situation » et détermination. Repères au programme Contingent / nécessaire / possible Citations pouvant servir de référence – « Notre histoire n’est pas notre code. » Jean-Paul Rabaut Saint-Étienne, Considérations sur les intérêts du Tiers-État . – « Il y a un degré d’insomnie, de rumination, de sens historique qui nuit au vivant et qui finit par le détruire, qu’il s’agisse d’un homme, d’une nation ou d’une civilisation. » Nietzsche, Considérations inactuelles . – « L ’important n’est pas ce qu’on a fait de nous, mais ce que nous faisons nous- mêmes de ce qu’on a fait de nous. » Jean-Paul Sartre, Saint Genet, comédien et martyr. Textes de référence Dans ces deux extraits de l’Éthique à Nicomaque, Aristote montre que les habitudes que nous prenons décident de nos manières d’agir, de penser, de vivre et forment ce que Philosophie Sujet 1 • Énoncé 9 nous appelons notre caractère. Ainsi, nous sommes pour une large part ce que notre passé a fait de nous. Ce que nous avons été décide largement de ce que nous sommes au présent et serons à l’avenir. « Ce que nous devons exécuter après une étude préalable, nous l’apprenons par la pratique ; par exemple, c’est en bâtissant que l’on devient architecte, en jouant de la ci- thare que l’on devient citharède. De même, c’est à force de pratiquer la justice, la tem- pérance et le courage que nous devenons justes, tempérants et courageux. […] aussi, faut-il exercer nos activités d’une manière déterminée ; car les différences de conduite engendrent des habitudes différentes. La façon dont on a été élevé dès l’enfance n’a pas, dans ces conditions, une mince importance. Que dis-je ? Cette importance est extrême, elle est tout à fait essentielle. » « […] Le malade […] c’est autrefois qu’il lui était possible d’éviter la maladie ; mais une fois qu’il s’est laissé aller, il est trop tard. De même, qui lance une pierre ne peut plus la rattraper. Toutefois, il était en son pouvoir de la jeter ou de la laisser tomber, car cela dépendait de lui. Il en va de même pour les hommes qui pouvaient, dès le début, éviter de devenir injustes ou débauchés. » Aristote, Éthique à Nicomaque, Livre II, chapitre I, puis livre III, chapitre V. Dans ce passage célèbre du Discours de la méthode, Descartes retrace l’itinéraire exis- tentiel et intellectuel qui le conduisit à rejeter toutes ses opinions passées et l’autorité de la tradition pour les mettre à l’épreuve d’un doute radical au terme duquel c’est à l’indi- vidu pensant et à lui seul qu’il revient de juger, à la lumière de sa seule raison naturelle, du vrai et du faux, du bien et du mal et, par là même, du chemin qu’il doit suivre en cette vie. Loin d’être le produit de son passé, l’identité de l’individu semble donc naître bien davantage de son refus et de son dépassement. La radicalité proprement moderne de ce geste cartésien inspirera les générations révolutionnaires qui, éprises d’émancipa- tion, se rallieront autour de la formule « du passé, faisons table rase ». « Et ainsi encore je pensai que, pour ce que nous avons tous été enfants avant que d’être hommes, et qu’il nous a fallu longtemps être gouvernés par nos appétits et nos précepteurs, qui étaient souvent contraires les uns aux autres, et qui, ni les uns ni les autres, ne nous conseillaient peut-être pas toujours le meilleur, il est presque impos- sible que nos jugements soient si purs, ni si solides qu’ils auraient été si nous avions eu l’usage entier de notre raison dès le point de notre naissance, et que nous n’eussions jamais été conduits que par elle. [Ainsi] pour toutes les opinions que j’avais reçues jusques alors en ma créance, je ne pouvais mieux faire que d’entreprendre, une bonne fois, de les en ôter, afin d’y en remettre par après, ou d’autres meilleures, ou bien les mêmes, lorsque je les aurais ajustées au niveau de la raison. Et je crus fermement que, par ce moyen, je réussirais à conduire ma vie beaucoup mieux que si je ne bâtissais que sur de vieux fondements, et que je ne m’appuyasse que sur les principes que je m’étais laissé persuader en ma jeunesse, sans avoir jamais examiné s’ils étaient vrais. » Descartes, Discours de la méthode, Seconde partie. Notre passé ne nous ôte jamais la liberté de refuser ce qu’il a fait de nous. C’est ce que Sartre tente de démontrer, dans cet extrait de L ’Être et le Néant, en s’appuyant sur la distinction centrale entre deux idées, celle de « situation » et celle de détermination. La situation dans laquelle me place mon passé n’est en rien déterminante. Sans doute ai-je un passé, mais en aucun cas je ne saurais dire que je suis ce passé. Philosophie Sujet 1 • Énoncé 10 « L ’argument décisif utilisé par le bon sens contre la liberté consiste à nous rappeler notre impuissance. Loin que nous puissions modifier notre situation à notre gré, il semble que nous ne puissions pas nous changer nous-mêmes. Je ne suis « libre » ni d’échapper au sort de ma classe, de ma nation, de ma famille, ni même d’édifier ma puissance ou ma fortune, ni de vaincre mes appétits les plus insignifiants ou mes ha- bitudes. Je nais ouvrier, Français, hérédosyphilitique ou tuberculeux. L ’histoire d’une vie, quelle qu’elle soit, est l’histoire d’un échec. Le coefficient d’adversité des choses est tel qu’il faut des années de patience pour obtenir le plus infime résultat. Encore faut-il « obéir à la nature pour la commander », c’est-à-dire insérer mon action dans les mailles du déterminisme. Bien plus qu’il ne paraît « se faire », l’homme semble « être fait » par le climat et la terre, la race et la classe, la langue. L ’histoire de la collectivité dont il fait partie, l’hérédité, les circonstances individuelles de son enfance, les habitu- des acquises, les grands et les petits événements de sa vie. Cet argument n’a jamais profondément troublé les partisans de la liberté humaine : Des- cartes, le premier, reconnaissait à la fois que la volonté est infinie et qu’il faut « tâcher à nous vaincre plutôt que la fortune ». C’est qu’il convient ici de faire des distinctions ; beaucoup des faits énoncés par les déterministes ne sauraient être pris en considéra- tion. Le coefficient d’adversité des choses, en particulier, ne saurait être un argument contre notre liberté, car c’est par nous, c’est-à-dire par la position préalable d’une fin, que surgit ce coefficient d’adversité. Tel rocher qui manifeste une résistance profonde si je veux le déplacer sera, au contraire, une aide précieuse si je veux l’escalader pour contempler le paysage. En lui-même, s’il est même possible d’envisager ce qu’il peut être en lui-même, il est neutre, c’est-à-dire qu’il attend d’être éclairé par une fin pour se manifester comme adversaire ou comme auxiliaire. Encore ne peut-il se manifester de l’une ou l’autre manière qu’à l’intérieur d’un complexe ustensile déjà établi. Sans les pics et les piolets, les sentiers déjà tracés, la technique de l’ascension, le rocher ne serait ni facile ni malaisé à gravir ; la question ne se poserait pas, il ne soutiendrait aucun rap- port d’aucune sorte avec la technique de l’alpinisme. Ainsi, bien que les choses brutes […] puissent dès l’origine limiter notre liberté d’action, c’est notre liberté elle-même qui doit préalablement constituer le cadre, la uploads/Philosophie/ dissertation-passe-et-identite-pdf.pdf
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- Publié le Fev 07, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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