C H A P I T R E I La métacognition : qu'est ce que c'est ? L'ensemble des auteu

C H A P I T R E I La métacognition : qu'est ce que c'est ? L'ensemble des auteurs qui ont cherché et écrit sur la métacognition le notent, ce terme recouvre un grand nombre de phénomènes mais qui sont variables d'un auteur à un autre : Wellman (1985) parle à ce propos d'un concept flou, sans contour ("fuzzy"), ce qui a souvent conduit les auteurs qui cherchaient à le définir à recourir à des "prototypes" de la métacognition comme par exemple la métamémoire, la métacompréhension, ou la méta-attention. Mais si tous s'accordent sur l'ampleur du champ qu'il recouvre en même temps que sur la variabilité de sa définition, ils s'accordent aussi sur l'intérêt du concept et même sur ses "vertus" (Paris et Winograd 1990)29 : il apparaît en effet essentiel au fontionnement cognitif et à l'apprentissage :" La promesse de la métacognition (...), c'est qu'elle permet la généralisation des performances à des situations différentes (...)", c'est qu'elle fait de l'apprenant "un sujet auto-correcteur, quelqu'un qui a appris comment apprendre" (Gavelek, 1985). Et plus récemment : " Le principal message (de cette recherche sur la métacognition) est que les apprenants peuvent progresser dans leurs apprentissages en devenant conscient de leur propre manière de penser quand ils lisent, écrivent ou résolvent des problèmes à l'école " (Paris et Winograd, 1990). La métacognition, qui promet d'être gage d'autonomie, apparaît aussi comme caractéristique du comportement cognitif des élèves qui réussissent à l'école - les différences entre élèves en réussite scolaire et élèves en échec étant plus définies du côté du métacognitif que du cognitif ( Booker Loper et Murphy, 1985, Bouffard-Bouchard, Parent et Larivée 1991a, 1991b, Cullen 1985, Wong 1985, Paris et Winograd, 1990, etc.) :"La métacognition offre une réflexion et des instruments 29 L'ensemble des citations produites à partir de textes écrits en langue anglaise sont traduits par nous. D pouvant, d'une part contribuer au repérage des éventuelles difficultés d'apprentissage scolaires et à leur remédiation et, d'autre part, guider une pédagogie générale soucieuse de limiter l'écliec scolaire " (Doudin et Martin, 1992). Ainsi est-il devenu indispensable d'élucider ce concept "pour rendre compte le plus logiquement possible et décrire des savoirs et des événements mentaux qui existent" (Yussen, 1985) qui semblent bien recouvrir des problèmes fondamentaux de l'éducation et être en jeu dans la réussite scolaire : nous chercherons d'abord à en cerner la signification pour en comprendre ensuite le fonctionnement et le rôle dans l'apprentissage. Quelles sont les définitions du concept proposées par ceux qui servent de référence commune parce qu'ils en sont les fondateurs ? J.H. Flavell, le premier, débute la recherche sur la métacognition dès le début des années 70, avec H.M.Wellman par des travaux sur la "métamémoire", qui visent à montrer que la maîtrise consciente de stratégies de mémorisation influence le fonctionnement de la mémoire et en augmente les performances. S'ils reconnaissent à la métacognition deux composantes de type déclaratif et procédural, ils ont été plus intéressés à définir la première - de quelles connaissances est constituée la métacognition ? -, tandis qu'A. L. Brown et son équipe s'interrogeaient davantage sur le fonctionnement de la métacognition dans l'apprentissage et son aspect procédural, étudié en particulier dans des recherches sur la métacompréhension. 1. Les définitions des fondateurs Flavell (1985) donne une première définition très générale de la métacognition et souvent reprise :"On Vappelle métacognition parce que son sens profond est "cognition sur la cognition" .30 Cette définition très vague permet cependant de spécifier ce type de connaissance par rapport aux autres, de différencier, dans une première approche, le métacogmtif du cognitif : c'est une connaissance qui porte sur elle- même et renvoie par là à une activité "réflexive", un travail intérieur, dans lesquels nous pouvons retrouver ce dont nous avons parlé à propos de la pédagogie de l'éveil avec les termes de conscience et de prise de conscience. C'est dans ce sens que Yussen (1985) reprend la définition en utilisant une référence aux "prototypes de la métacognition" qui en sont des modalités de mise en œuvre et aident à en saisir la signification et le rôle (cf. plus loin, 4.) : "La métacognition recouvre un corps de connaissances et de modes de compréhension qui portent sur la cognition elle-même. C'est cette activité mentale pour laquelle les autres états et processus mentaux deviennent objets de réflexion. (...) Par exemple 1) se demander entre deux stratégies, laquelle vaut-il mieux utiliser pour aider au rappel d'une liste de mots (métamémoire) ; 2) vérifier qu'un message est bien compris (métacompréhension) ; 3) analyser les conditions dans lesquelles se produisent les moindres distractions (méta- attention) " La distinction faite ici entre "état" et "processus" renvoie à des types différents de connaissances métacognitives ou métaconnaissances , dont nous allons retrouver avec Flavell une catégorisation plus précise, qui composent l'un des deux aspects de la métacognition : savoir que je sais (ou non) telle partie en histoire est une connaissance sur un "état", savoir comment faire pour bien mémoriser est une connaissance sur un "processus". On retrouve la même distinction chez Wellman qui définit les métaconnaissances comme des "conceptions" ou "représentations" des individus sur les contenus et modes de fonctionnement de leur pensée. Ce terme rappelle celui que Giordan et de Vecchi (1987) ou Astolfi et Develay (1989) utilisent pour désigner ces "préconnaissances", qui sont à la fois ce à partir de quoi on apprend 30 On traduit les terme anglais "cognition"par le terme français "cognition" et non connaissance : cognition renvoie plutôt à Yactivité de connaître dans son aspect procédural tandis que "connaissance" renvoie plutôt aux "états" et "produits" de la cognition dans son aspect déclaratif. Cependant, les deux termes ont la même origine, et la distinction n'est pas toujours évidente (comme c'est le cas chez Flavell où "cognition" renvoie quelquefois aux deux aspects ). et ce qui fait obstacle à des apprentissages nouveaux et dont il faut prendre conscience justement pour qu'elles fonctionnent positivement dans l'apprentissage31 : ce que je sais (ou crois savoir) de moi-même, de mes connaissances ou de mon fonctionnement cognitif intervient et modifie (positivement ou négativement) la manière dont je résous les problèmes et on peut déjà imaginer qu'un enseignement adapté saura apprendre au sujet à utiliser positivement ces "conceptions" quitte à les modifier par des apprentissages adéquats. Voyons la définition de Wellman : "Le terme de métacognition a été employé pour désigner la connaissance du sujet sur ses processus cognitifs et ses états mentaux tels que la mémoire, V attention, la connaisssance, les conjectures, les illusions. L'intérêt n'est pas tant de savoir comment les sujets s'y prennent pour mettre en œuvre ces processus que de se demander ce qu'Us savent et ce qu'ils croient sur ces processus. La thèse de cette recherche est que les individus ne sont pas que des organismes qui ont des connaissances sur les objets, les événements, les comportements, mais ils en ont aussi de très importantes sur la connaissance elle-même. Ils construisent et détiennent des conceptions sur la manière dont fonctionne leur pensée, sur la difficulté ou la facilité des problèmes mentaux, sur l'état et les processus de leurs propres fonctionnements cognitifs " (1985) Flavell (1976), qui retrouve la distinction précédente en introduit une autre essentielle à la compréhension du concept : "La métacognition se réfère aux connaissances du sujet sur ses propres processus et produits cognitifs ainsi que sur tout ce qui s'y rapporte ; par exemple, les propriétés des informations ou des données pertinentes pour leur apprentissage. Par exemple, je mets en œuvre une activité métacognitive (métamémoire, méta-apprentissage, méta-attention, métalangage ou autre) si je remarque que j'éprouve plus de difficulté à apprendre A que B ; s'il me vient à Vidée que je dois vérifier C deux fois avant de l'accepter ; qu'il est préférable, dans une situation à choix multiple, dlexaminer chacune des possibilités avant de décider quelle est la meilleure ; si je sens qu'il vaut mieux prendre D en note pour ne pas risquer de l'oublier. La métacognition renvoie entre autres au contrôle (monitoring) actif, à la régulation qu'il entraîne et à l'orchestration de ces processus en fonction des données et des objets 31 Cette idée fondamentale sera illustrée en 1.2. cognitijs sur lesquels ils portent, cela se faisant habituellement pour viser un but ou un objectif concret" ( souligné par nous).. La distinction faite ici et largement reprise par l'ensemble des auteurs est celle entre - d'une part, des connaissances de type déclaratif sur les "produits" et les "processus" cognitifs, - et d'autre part, un aspect procédural concernant l'exécution d'une tâche, défini par une activité de "contrôle" et de "régulation" sur les processus en jeu dans la gestion de cette tâche, qui est pour Brown ou Borkowski, comme on l'a dit, l'aspect dominant de la métacognition. Cependant, comme le remarquent Paris et Winograd (1990),"la plupart des chercheurs mêlent aujourd'hui ces deux approches dans une même définition" même si cela ne va pas sans difficulté et ambiguités sur lesquelles nous aurons à revenir. Il y a donc deux pôles de la métacognition, — les connaissances métacognitives ou métaconnaissances (Mélot, uploads/Philosophie/ doly-am-partie2chap1.pdf

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