Émile DURKHEIM (1899-1900) “ Deux lois de l'évolution pénale ” Un document prod
Émile DURKHEIM (1899-1900) “ Deux lois de l'évolution pénale ” Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Courriel: jmt_sociologue@videotron.ca Site web: http://pages.infinit.net/sociojmt Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.uquebec.ca/index.htm Émile Durkheim (1899-1900), « Deux lois de l'évolution pénale » 2 Cette édition électronique a été réalisée par Jean-Marie Tremblay, bénévole, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi à partir de : Émile Durkheim (1899-1900) “Deux lois de l'évolution pénale” Une édition électronique réalisée à partir du texte d’Émile Durkheim (1899- 1900), « Deux lois de l'évolution pénale » in Année sociologique, vol. IV, 1899- 1900, pp. 65 à 95, rubrique: “Mémoires originaux”. Paris: PUF. Texte reproduit dans Journal sociologique, pp. 245 à 273. Paris: PUF, 1969, 728 pages. Collection Bibliothèque de philosophie contemporaine. Polices de caractères utilisée : Pour le texte: Times, 12 points. Pour les citations : Times 10 points. Pour les notes de bas de page : Times, 10 points. Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2001 pour Macintosh. Mise en page sur papier format LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’) Édition complétée le 22 septembre 2002 à Chicoutimi, Québec. Édition revue et corrigée par Bertrand Gibier, professeur de philosophie au Lycée de Montreuil-sur-Mer (dans le Pas-de-Calais), bertrand.gibier@ac-lille.fr, le 22 novembre 2002. Émile Durkheim (1899-1900), « Deux lois de l'évolution pénale » 3 Table des matières « Deux lois de l’évolution pénale » Section I : Loi des variations quantitatives Section II : Loi des variations qualitatives Section III : Explication de la seconde loi Section IV : Explication de la première loi Section V : Conclusion Émile Durkheim (1899-1900), « Deux lois de l'évolution pénale » 4 « Deux lois de l'évolution pénale. » par Émile Durkheim (1899-1900) Retour à la table des matières in Année sociologique, vol. IV, 1899-1900, pp. 65 à 95, rubrique: “Mémoire originaux”. Paris: PUF. Texte reproduit dans Journal sociologique, pp. 245 à 273. Paris: PUF, 1969, 728 pages. Collection Bibliothèque de philosophie contemporaine, 728 pp. Dans l'état actuel des sciences sociales, on ne peut le plus souvent traduire en formules intelligibles que les aspects les plus généraux de la vie collective. Sans doute, on n'arrive ainsi qu'à des approximations parfois grossières, mais qui ne laissent pas d'avoir leur utilité ; car elles sont une première prise de l'esprit sur les choses et, si schématiques qu'elles puissent être, elles sont la condition préalable et nécessaire de précisions ultérieures. C'est sous cette réserve que nous allons chercher à établir et à expliquer deux lois qui nous paraissent dominer l'évolution du système répressif. Il est bien clair que nous n'atteindrons ainsi que les variations les plus générales ; mais si nous réussissons à introduire un peu d'ordre dans cette masse confuse de faits, si imparfaite qu'elle soit, notre entreprise n'aura pas été inutile. Émile Durkheim (1899-1900), « Deux lois de l'évolution pénale » 5 Les variations par lesquelles a passé la peine au cours de l'histoire sont de deux sortes : les unes quantitatives, les autres qualitatives. Les lois des unes et des autres sont naturellement différentes. I Loi des variations quantitatives Retour à la table des matières Elle peut se formuler ainsi : « L'intensité de la peine est d'autant plus grande que les sociétés appar- tiennent à un type moins élevé - et que le pouvoir central a un caractère plus absolu. » Expliquons d'abord le sens de ces expressions. La première n'a pas grand besoin d'être définie. Il est relativement aisé de reconnaître si une espèce sociale est plus ou moins élevée qu'une autre ; il n'y a qu'à voir si elles sont plus ou moins composées et, à degré de composition égal, si elles sont plus ou moins organisées. Cette hiérarchie des espèces sociales n'implique pas, d'ailleurs, que la suite des sociétés forme une série unique et linéaire ; il est, au contraire, certain qu'elle doit être plutôt figurée par un arbre aux rameaux multiples et plus ou moins divergents. Mais, sur cet arbre, les sociétés sont situées plus ou moins haut, elles se trouvent à une distance plus ou moins grande de la souche commune 1. C'est à condition de les considérer sous cet aspect qu'il est possible de parler d'une évolution générale des sociétés. Le second facteur que nous avons distingué doit nous arrêter davantage. Nous disons du pouvoir gouvernemental qu'il est absolu quand il ne rencontre dans les autres fonctions sociales rien qui soit de nature à le pondérer et à le limiter efficacement. A vrai dire, une absence complète de toute limitation ne se rencontre nulle part ; on peut même dire qu'elle est inconcevable. La tradition, les croyances religieuses servent de freins même aux gouvernements les plus forts. De plus, il y a toujours quelques organes sociaux secondaires qui, à l'occasion, sont susceptibles de s'affirmer et de résister. Les fonctions subordonnées auxquelles s'applique la fonction régulatrice suprême ne sont jamais dépourvues de toute énergie personnelle. Mais il arrive que cette limi- tation de fait n'a rien de juridiquement obligatoire pour le gouvernement qui la subit ; quoiqu'il garde dans l'exercice de ses prérogatives une certaine mesure, 1 V. nos Règles de la méthode sociologique, chap. IV. Émile Durkheim (1899-1900), « Deux lois de l'évolution pénale » 6 il n'y est pas tenu par le droit écrit ou coutumier. Dans ce cas, il dispose d'un pouvoir qu'on peut appeler absolu. Sans doute, s'il se laisse aller à des excès, les forces sociales qu'il lèse peuvent se coaliser pour réagir et pour le contenir ; même en prévision de cette réaction possible et pour la prévenir, il peut se contenir de lui-même. Mais cette contention, qu'elle soit son fait ou qu'elle lui soit matériellement imposée, est essentiellement contingente ; elle ne résulte pas du fonctionnement normal des institutions. Quand elle est due à son initiative, elle se présente comme une concession gracieuse, comme un abandon volontaire de droits légitimes ; quand elle est le produit de résis- tances collectives, elle a un caractère franchement révolutionnaire. On peut encore caractériser d'une autre manière le gouvernement absolu. La vie juridique gravite tout entière autour de deux pôles : les relations qui en sont la trame sont unilatérales, ou bien, au contraire, bilatérales et réciproques. Tels sont, du moins, les deux types idéaux autour desquels elles oscillent. Les premières sont constituées exclusivement par des droits attribués à l'un des termes du rapport sur l'autre, sans que ce dernier jouisse d'aucun droit corré- latif à ses obligations. Dans les secondes, au contraire, le lien juridique résulte d'une parfaite réciprocité entre les droits conférés à chacune des deux parties. Les droits réels, et plus spécialement le droit de propriété, représentent la forme la plus achevée des relations du premier genre : le propriétaire a des droits sur sa chose qui n'en a pas sur lui ; le contrat, surtout le contrat juste, c'est-à-dire celui où il y a une équivalence parfaite dans la valeur sociale des choses ou des prestations échangées, est le type des relations réciproques. Or, plus les rapports du pouvoir suprême avec le reste de la société ont le carac- tère unilatéral, en d'autres termes, plus ils ressemblent à ceux qui unissent la personne et la chose possédée, plus le gouvernement est absolu. Inversement, il l'est d'autant moins que ses relations avec les autres fonctions sociales sont plus complètement bilatérales. Aussi le modèle le plus parfait de la souverai- neté absolue est-il la patria potestas des Romains, telle que la définissait le vieux droit civil, puisque le fils était assimilé à une chose. Ainsi, ce qui fait le pouvoir central plus ou moins absolu, c'est l'absence plus ou moins radicale de tout contrepoids, régulièrement organisé en vue de le modérer. On peut donc prévoir que ce qui donne naissance à un pouvoir de ce genre, c'est la réunion, plus ou moins complète, de toutes les fonctions directrices de la société dans une seule et même main. En effet, à cause de leur importance vitale, elles ne peuvent se concentrer dans une seule et même personne, sans donner à celle-ci une prépondérance exceptionnelle sur tout le reste de la société, et c'est cette prépondérance qui constitue l'absolutisme. Le détenteur d'une telle autorité se trouve investi d'une force qui l'affranchit de toute contrainte collective et fait que, dans une certaine mesure tout au moins, il ne relève que de lui-même et de son bon plaisir et peut imposer toutes ses volontés. Cette hypercentralisation dégage une force sociale sui generis telle- ment intense qu'elle domine toutes les autres et se les assujettit. Et cette prépondérance ne s'exerce pas seulement en fait, mais en droit, car celui qui en a le privilège est investi d'un tel prestige qu'il semble être d'une nature plus qu'humaine ; on ne conçoit donc même pas qu'il puisse être soumis à des obligations régulières, comme le commun des hommes. Si uploads/Philosophie/ durkheim-1899-deux-lois-de-l-x27-evolution-penale.pdf
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- Publié le Aoû 28, 2021
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