7.2 Formes et figures de la négation : Freud, Hyppolite et Lacan Le célèbre art

7.2 Formes et figures de la négation : Freud, Hyppolite et Lacan Le célèbre article de Freud Die Verneinung (La négation) de 1925 propose une approche essentielle pour pouvoir introduire le négatif en psychanalyse. Or, on a constaté que la façon d’aborder le négatif lui-même reste le plus souvent très indirecte. Ces sources nous ramènent nécessairement au nom de Hegel. Certes, il est possible de parler d’une sorte d’échange, à propos de la notion du négatif, entre la philosophie, dont l’autorité dans la spécificité de la négativité elle-même, est exprimée par Hegel, et la psychanalyse, dont l’autorité est avant tout celle de Freud. C’est donc cette présence de Freud et Hyppolite, mais aussi celle de Hegel, qui constituera l'objectif de notre commentaire par rapport à la mort logique inscrite dans la dialectique du jugement affirmatif/négatif développé par Lacan à partir de la forclusion [Verwerfung] et de la dénégation1 Hegel/Freud amène vers l’ouverture des reformulations entre négativité et mort, déjà présentes chez Lacan mais à partir d’un domaine de logique- discursive. Notre lecture va se concentrer d’abord sur le texte de Freud « la négation » (Die Verneinung) ainsi que sur les textes des « Ecrits » intitulés « Commentaire de Jean Hyppolite sur la Verneinung » et «Réponse au commentaire de Jean Hyppolite ». Dans ce contexte textuel, Freud octroie une place privilégiée à la signification de la négation, liée au sujet de l’inconscient, pour essayer de démontrer le caractère du « non » en tant que signe du refoulement inconscient, mais aussi parce que l’opération de la fonction du jugement deviendrait possible à condition que se crée le « symbole de la négation ». Ce qui permettrait à la pensée d’avoir un degré d'indépendance à l'égard des conséquences du refoulement. 1Il très important de souligner la distinction entre dénégation et forclusion. La dénégation veut dire la même chose que la notion de négation proposée par Freud. En fait, bien qu’il s’agisse d’un terme proposé par Freud pour caractériser un mécanisme de défense à travers lequel le sujet exprime, d'une manière négative, un désir ou une pensée, dont la présence ou l’existence nie, il constitue aussi un moyen pour prendre conscience de ce qui est réprimé dans l'inconscient. Or, le plus important, d’après nous, est que la dénégation apparaît toujours dans le discours sous la forme d’une proposition qui désigne le refoulement, c’est-à-dire, qui indique la négation. La célèbre proposition analysée par Freud « ce n’est pas ma mère » exprime la façon dont le refoulement apparaît sous la proposition négative, bien qu’il s’agisse d’une proposition affirmative. A cet égard le refoulement est reconnu de façon négative sans être accepté. Par ailleurs, en France, la traduction de la Verneinung freudienne a suscité de nombreuses polémiques, générées par une discussion entre Freud et René Laforgue à propos des théories d'Édouard Pichon sur la négation grammaticale, et d’après le concept de forclusion créé par Jacques Lacan. En 1956, dans son débat avec Lacan, Jean Hyppolite (1907-1968) a préféré dénégation et, en 1967, Jean Laplanche y Jean-Bertrand Pontalis ont proposé négation pour la Verneinung et déni (renégation) pour la Verleugnung. Ici, Freud établit une distinction à l’intérieur de la fonction du jugement. D’un côté se trouve le jugement d’attribution, qui représente ce qui est exprimé par le langage, et d’un autre, le jugement d’existence, dont la signification est ce qui est simplement représenté. En fait, la question que se pose Freud est celle de savoir si ce qui est dans le dedans, avec ses qualités, existe aussi comme tel dans le dehors. Ces deux fonctions du jugement sont étroitement liées entre elles : le non-réel, le simplement représenté, constitue le subjectif interne, alors que le réel constitue le lieu du dehors. C’est qu’en fait, si l’existence de la représentation a dépendu des perceptions déjà manifestées, alors sa présence « objective », c’est-à-dire, la garantie de sa réalité, dépend du revenir de la réalité de ce qui est représenté. Nous pourrions dire qu’il s’agit de l’exercice de rencontrer, de répéter ou refaire un contenu qui est aussi le dehors du sujet. La liaison entre l’intérieur subjectif et l’extérieur « objectif » dépendra donc de la fonction du jugement intellectuel, car c’est l’activité du jugement qui rend possible l’exercice de projection d’une idée, ou contenu de pensée, qui commence à émerger vers la conscience. Or, en admettant que ledit contenu de représentation est une pensée refoulée, comme pour Freud, elle ne peut pas s’ouvrir à la conscience2, si ce n’est à travers sa négation. C’est à partir de là que nous pouvons établir l'opération dialectique du jugement affirmatif3, dans le sens où il nécessite de sa négation4 pour apparaître dans la conscience. Alors, la manière de procéder, 2Notons ici que l’expression « ne pas s’ouvrir pas à la conscience » vient de l’allemand durchdringen qui est un verbe intransitif dont l’accent est mis dans la particule séparable : durch. Alors la signification : arriver à quelque chose par la force (dringen) et totalement (durch) de « ne pas s’ouvrir » signifie : ouvrir un chemin en tirant au sort les obstacles. Un contenu de représentation ne peut donc pas s’ouvrir à la conscience (zum), et non plus "jusqu'à la conscience" qui correspondrait à l'Allemand (bis zum). En fait, le verbe allemand met plus l’accent sur le chemin (durch) que sur son résultat (zum). Dans cette analyse, nous pourrions faire la liaison avec le chemin sceptique de désespoir, où la dialectique, en tant que méthode, possibilité (se concentre plus sur le durch de la négativité, que (sur) son zum. Voici l’idée de mort radicale des processus de dissolution des catégories et jugements fixes des contenus de représentation. 3Ici la notion de jugement affirmatif présente, d’un côté, la connotation philosophique de donner un jugement comme véritable, c’est-à-dire, trouver que quelque chose est conforme à sa conception. Et d’un autre côté, dire oui, c’est-à-dire, donner une réponse affirmative à une question. Tout ceci est très important parce que le mot « affirmer » quelque chose se traduit en allemand par : bejahen, qui présente ces deux acceptions. 4Egalement la notion de l’allemand verneinen contient deux aspects qui sont intéressants à remarquer. D’un côté elle signifie dire non, c’est-à-dire, donner une réponse négative à une question ou nier sur le mode d’un refus. Et d’un autre côté, il signifie trouver quelque chose qui n’est pas conforme à sa conception, dans le sens de quelque chose de faux. Nier au sens philosophique de donner un jugement comme faux, dans le sens logique des propositions de l’entendement où se situe l’origine psychologique. Or, il est vrai que le terme verneinen est compris par cette idée. Par contre, la Verneinung, qui est la catégorie analysée ici, existe et est examinée par Hyppolite et Lacan à partir du texte de Freud. A cet égard, il est nécessaire de prendre de la distance pourapprécier un autre rapprochement. Ainsi donc, si pour Freud il y a deux décisions qui sont liées entre elles- mêmes, à savoir, l’affirmer [bejahen] et le nier [verneinen], ces décisions opèrent comme les valeurs de vérité d’un contenu propositionnel, dont le jugement n’est que celui d’existence qui se situe toujours sur le langage de la connaissance en général. Cependant, si nous nous arrêtons sur la Verneinung, cette notion permet de comprendre la Aufhebung comme ce qui est contenu aussi dans l’acceptation, l’affirmation du refoulement à dira Freud, est déjà l’exercice de surpassement et même de dépassement, propre au Aufhebung5du refoulement. Si Freud analyse le dispositif de la négation, c’est pour montrer la distinction entre la fonction intellectuelle, propre au mode d’agir du jugement, et le processus affectif. Ainsi, le mouvement du refoulement inscrit, en même temps, l'arrêt du contenu de représentation à la conscience et le dépassement du cheminement, ce qui provoque une sorte d'acceptation intellectuelle du refoulement. Mais là encore, avec la persistance du refoulement.6 Revenons à notre point de départ, à savoir l'idée de Lacan sur Die Verneinung [la négation] de Freud exprimée dans « les Ecrits », à propos du commentaire qu'a fait Jean Hyppolite. D’abord Lacan va faire une Introduction au commentaire de Jean Hyppolite sur la Verneinung de Freud. Nous allons nous y arrêter ici pour comprendre ensuite ce que dit Hyppolite, ainsi que pour faire une analyse de la réponse donnée par Lacan. En fait, pour être plus spécifique, nous pourrons établir le rapport entre négativité et mort, et voir comment il est possible d’articuler la liaison avec la notion de force chez Hegel. Lacan, dans le chapitre intitulé Introduction au commentaire de Jean Hyppolite sur la « Verneinung », va prendre la notion de résistance proposée par Freud pour pouvoir rendre compte de la limite du discours où elle se manifeste. Le sujet dans ses chaînes discursives sera déroulé non seulement à partir du statut métaphorique, mais aussi dans le refoulement comme phénomène structurant, qui permet à l'opposition divergente entre le signifié et le signifiant de se réveler. travers le retour du refoulé par le mécanisme de la négation. En fait, si l’Aufhebung représente uploads/Philosophie/ formas-y-figuras-de-la-negacion.pdf

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