III LE GRAND GUVRE D'ALCHIMIE " Tu acquerras la Gloire de I'Univers Tout Entier
III LE GRAND GUVRE D'ALCHIMIE " Tu acquerras la Gloire de I'Univers Tout Entier. " HnnuÈs TnIsuÉclsr"r L'alchimie a été, pendant des siècles, la science à la mode. Elle allie la magie à I'astrologie, la Kabbale et les lois de la physique. Elle vient des Grecs et des Egyptiens. Ses inspirateurs officiels étaient Isis. Horus, Hermès, Agathodémon, MoÏse, Zoroastre. Le célèbre Démocrite la présente dans sa Physique et Mystique comme la science millénaire des prêtres égyptiens. PIine raconte que I'empereur Caligula voulut fabriquer de I'or. Les Grecs utilisaient I'appareil à distiller et le four. Les empe- reurs byza!tins protégeaient les alchi- mistes. En Egypte. au vlle siècle. le prince Omniade Chalid Ibn Jazid se rendit illustre par ses expériences d'alchimie. Quant à Platon, son Timée est une des sources les plus importantes de la phy- sique au Moyen Age. L'alchimie était pratiquée en Perse, aux Indes, avec les Sassanides. qui fournirent au monde les plus célèbres astronomes. L'alchimie babylonienne des tablettes d'argile d'As- sourbanipal était réputée. On fabriquait t57 L'ATHANOR ET LE BESTIAIRE DU GRAND GUVRE (snsrI.e vller.rrrN) du verre, des métaux, des pierres artifi- cielles. L'Allemagne du xve siècle a pour livre de chevet des alchimistes Ie Buch der heiligen Dreifaltigkeit, ou Livre de la Sainte-Trinitd, que I'on disait avoir été dicté par I'esprit de la Sainte-Trinité et qui était dédié au burgrave Frédéric de Nuremberg, premier margrave de Brandebourg, de la maison des Hohen- zollern. On consultait aussi beaucoup la Turba Philosophorutn, qui rapportait les thèses de Pythagore et des Grecs. Depuis trois cents ans, de grands moines avaient pratiqué l'alchimie : maître Albert le Dominicain, Magister Albertus dixit, (la célèbre De Alchemia). Le dominicain italien Thomas d'Aquin, son élève, attaché au pape Alexandre IV et à Urbain IV et Clément V, le Docteur Angélique, reconnut valable I'or des alchimistes. Nous avons exposé que le grand fran- ciscain anglais Roger Bacon pratiqua lui-même la transmutation des métaux. Son Opzs Tertium et sa Scientia Experi- mentalis font une large part au Grand (Euwe et à la transmutation des métaux. Ne disait-on pas que Bacon sauva plu- sieurs fois son roi de la banqueroute? Le pape le protégea personnellement contre toute accusation de magie, tant qu'il le put. Le Grand (Euvre? Le profond secret du monde, le mystère de la Nature retrouvée et recréée. la révélation par une philosophie expérimentale secrète, de la formule cosmique d'oir découlaient la lumière et la vérité, la sagesse et aussi la 158 jeunesse éternelle, la richesse inépuisable, la puissance et également la faculté de fabriquer un être vivant. Les Égyptiens vainquaient la mort. Les Grecs deve- naient de vrais dieux. Le Grand (Euvre? La réalisation surtout de la Pierre Philosophale par la Nature, en saisissant le secret divin du Créateur qui nous fit naitre et qui régit le monde : I'imiter dans son æuvre grandiose, l'égaler peut-être. L'immense aspiration du Moyen Age, I'immense ambition des plus grands savants, celle d'échapper aux lois de la réalité, de la vie, au-delà de la religion, le transcendantal étant retrouvé dans la matière, et le savant atteignant, captant et utilisant pour lui, I'arcane du magistère souverain. La Pierre Philosophale, le but du Grand (Euvre des Sages, qu'Hermès appelle l'æuwe du Soleil, la vérité philosophique, I'absolu dans I'infini. La panacée univer- selle. Le but suprême, magistral. Dans son avidité de la connaissance. sa volonté de découvrir le secret des secrets, selon la réflexion de Paracelse, Johannès Faust se fit le serment d'acqué- rir cette Pierre Philosophale. Il apprenait que la Pierre est née du vrai mariage du Ciel et de I'Enfer, son nom est Superius et Inferius, ou bien Absolu, ou bien Le Petit Charbon, L'Es- carboucle, Le Rubis des Sages; ces noms reviennent constamment dans les écrits des Adeptes. Mais fallait-il vraiment faire appel à I'Enfer? Le Feu philosophique menait-il à la vie luciférienne? Igne Natura Reno- vatum Integra, disaient les alchimistes, La Nature entière est renouvelée par le Feu. D'oit venait ce feu? Les aichimistes, derrière ies grands moines, restaient dans ies voies du Christ et ne reniaient rien de leur foi. On lisait dans le Turba : Ploton a écrit dans son euvre d'Alchimie le même message de joie, que Jean l'Évangëliste, bien longtemps après lui. En effet, les soffieurs, à leur fourneau invoquaient saint Jean. Le visionnaire apocalyptique passait pour avoir été alchimiste : selon une légende byzantine. il avait transformé en or et en pierres précieuses les galets du bord de la mer. Pourouoi I'Ecriture ne serait-elle pas garnie dès secrets de I'Alchimie? Les sept étages de la fabrication de I'or ne se devinent-ils pas dans la parole de Matthieu : J'ouvrirai ma bouche en paraboles. Je leur raconterai les mystères cachës depuis Ie Création (XII, 35)? Angelus Silesius a écrit : Lo divine Alchimie. C'est l'Esprit-Saint qui fond. Dieu le Père dissout Le Fils est la Teinture où l'or se fait plus clair. Beaucoup de reiigieux pratiquaient dans les couvents les expériences du four alchi- mique : au xIIIe siècle, en Allemagne. le prieur de Walkenried. Dom Gilbert. surnommé Abbas Aureus, y consacrait ses nuits, sans se cacher pour cela. Raymond Lulle confiait ouvertement qu'il possédait la Pierre Philosophale, grâce aux formules de la Kabbale. Arnoid de Villeneuve expliquait la science de Ia transmutation par I'action décelée. du Spiritus. Il possédait aussi la Pierre. Tout le monde savait qu'à Paris, en piein xrve siècle. Nicolas Flamel s'était enrichi par I'opération du Grand CEuvre, son Art Royai, et que cet écrivain archi- tecte et constructeur. fils soirituel de saint Jacques. prétendait tenir sa formule des aichimistes juifs d'Espagne. Nous en parlerons plus ioin. L'alchimie était essentiellement basée sur l'expérience personnelle, sur les durs t.ravaux du soffieur à son four. Roger Bacon écrivait : Sine experientia, nihil sfficenter sciri potest. < Sans I'expérience on ne peut rien savoir de précis. > Le mystique illuminé prescrivait la loi de I'expérimentation personnelle. Raymond Lulle, de son côté, dans sa Théorie, a écrit : Tant que tu n'es pas arrivé à une parfaite connaissance de ce que tu recherches, au tnoyen d'expëriences répétées, patientes et évidentes. la nqture ne t'invitera pas à t'qsseoir à sa table somptueuse. Ortolanus disait bien, au xrve siècle, que, mieux que les leçons des professeurs, valaient ie travail assidu, opiniâtre, et la fatigue perpétuelle de I'expérimentateur, celle de la pratique. La vërité par I'expé- rience. disait Lulle. Tout magicien apprenait donc, avec les alchimistes, cette ioi du travail acharné au four. Nuit et jour, il s'y essayait. Son but? Un rêve presque inaccessible, un désir grandiose. divin : S'asseoir à la table somptueuse. Le but même de la magie. A Cologne vivait un médecin astrologue que plus d'un magicien allait consulter. Léonard Thurneyssen était considéré comme un alchimiste réputé. Il pratiquait Ie mys1p1's spagirique, capable aussi bien de faire de l'or que de guérir le corps 159 humain. Il se flattait de posséder le fameux dissolvant alcaest, qui donne à tous les corps l'état liquide. Léonard lui révéla l'(Euf Philosophique, I'encens fumant. les invocations (qu'il publiera dans un livre sur le Grand CEuvre L'Archidoxo). La Chimie. disait-il. venait de Cham. Isaie et Daniel faisaient de I'or. C'est en Égypte qu'Abraham avait appris ce Grand Art. Al-Chimie venait de I'arabe. Léonard Thurneyssen conseilla à Johannès d'étudier à fond l'æuvre du célèbre moine et maître alchimiste Basile Valentin. Johannès se rendit donc à Erfurt. Mutianus Rufus I'y a rencontré en l5l4 : il y est nommé professeur et va faire un cours d'humanités extrêmement briilant. Ce sera une des plus belles époques de son existence hasardeuse. Il y vient enseigner Homère en chaire publique. Charmante petite ville d'Erfurt! Au début du xvre siècle, une brillante académie existait à Erfurt. On y enseignait les arts libéraux (suspects au clergé); les maîtres choisis s'appelaient Cicéron, Virgile, Tite-Live, dont on soulignait les conseils. ies maximes pour la vie à venir. C'est là que vint se former le jeune Martin Luther, arrivant de l'école d'Ei- senach, oir il avait appris la grammaire avec le maître Trébonius, dont on rapporte qu'il avait coutume de faire ses leçons tête découverte, pour honorer les chance- 160 liers et docteurs qui sortiraient un jour de son école. A Erfurt, on secu,rait. durement les théologiens : Martin Luther. toujours tourmenté. s'accusera un jour d'avoir hâté le trépas de son maître Jodocus par ses révoltes contre la théologie scolastique! La bibliothèque était magnifiquement constituée. comme toutes celles des villes universitaires allemandes. de manuscrits enluminés, rehaussés de miniatures. et de nouveaux livres imprimés grâce à Gutenberg, livres saints. livres juridiques. Quand on parvenait à Ia maîtrise, I'Université vous remettait solennellement, avec le parchemin du diplôme. I'habit et la bague. En 1505. un incident avait fait quelque bruit : le jeune étudiant Martin Luther, né en 1483 et ayant donc sensiblement Ie même âge que Johannès Faust, vit mourir à côté de lui, frappé par la foudre, son meilleur ami, le jeune Alexis. qui faisait ses études d'humanités. il renvoya ses insignes de maître, l'habit et la bague, pour s'enfuir, comme frappé, lui aussi, par la foudre uploads/Philosophie/ histoire-de-la-magie-157-224-p04.pdf
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- Publié le Oct 02, 2021
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