Kant et l’équivoque du monde Michael Foessel Illusion cosmologique expérimentée
Kant et l’équivoque du monde Michael Foessel Illusion cosmologique expérimentée dans le conflit entre des thèses contradictoires mais véraces sur le monde. Les antinomies rendent nécessaire le questionnement transcendantal dont le résultat n’est pas une nouvelle conception du monde, mais le désaveu définitif d’un monde en soi (concept de monde = idée régulatrice). Pour Husserl, la modernité philosophique se caractérise par la mise en suspens du rapport entre raison et monde : « Tant qu’à la fin le problème du monde, devenu problème conscient, celui de la plus profonde liaison essentielle de la raison et de l’étant en général, l’énigme des énigmes, devait devenir proprement le thème de la philosophie » (Krisis). La contrepartie de la mathématisation galiléenne de la physique = séparation de la raison et du monde, obscurcissement du rapport entre le monde et la conscience auquel participerait la critique kantienne. Stade sceptique = stade où l’antithèse et la thèse cosmologiques ne cessent de se détruire réciproquement. En posant le problème du monde, Kant fait l’épreuve de la skepsis (« scepticisme dogmatique »). Antinomie cosmo = doute sur la raison qui ne semble plus être en mesure de remplir les conditions de cohérence minimales qui lui sont fixées par le principe de non-contradiction. Kant rencontre « l’énigme du monde » sous la figure de la contradiction de la raison avec elle-même. Question : philosophie transcendantale au regard de son analyse du problème du monde spécifié comme problème de l’adéquation de la raison au réel. C’est parce que le monde est abandonné comme thème métaphysique qu’il peut symboliser le problème plus général de l’accord de la raison à l’étant et engager par là le registre de la refondation. Corpus : A partir de la Critique I. Le thème du monde est très présent dans l’œuvre pré-critique mais il est traité comme thème et non comme instance de mise à l’épreuve de la rationalité (= ne plus envisager cosmologiquement le monde, comme un objet représentable selon les procédures « normales » de l’entendement). Tournant transcendantal + la persistance d’un motif « athéologique » (superflu de la référence à Dieu, refus de toute garantie théologique). Dans la Théorie du ciel, contre Newton pour qui la régularité naturelle est trop merveilleuse pour ne pas attester de Dieu (métaphore du Dieu artisan et monde ouvrage), Kant se plait à insister sur les perturbations qui caractérisent le cours des planètes = signe de l’absence de Dieu de l’ordre cosmique. Le monde = avant tout nature, c’est mécaniquement qu’il faut rendre compte de son ordre. Théorie du ciel + Unique argument possible pour une démonstration de l’existence de Dieu : impertinence de tout usage théologique de la finalité + remise en cause de l’acosmisme métaphysique. Pour Kant, l’ordre de la nature ne pouvait être autre que ce qu’il est, et le monde ne saurait se réduire à la figure d’un « agrégat » de choses contingentes. Dans la Critique : le thème de la création du monde n’est plus réfuté en regard de Dieu, mais exclusivement sur la base d’une analyse de la temporalité phénoménale (1ère antinomie). Le concept de monde récapitule les errements de la métaphysique dogmatique = position stratégique de l’idée cosmologique dans le travail de déconstruction du dogmatisme. 1 Trois aspects de l’équivoque de l’idée de monde : Equivoque de l’idée de monde par rapport à son mode de production par la raison dogmatique : thèse et antithèse EQUIVOQUE MÉTAPHYSIQUE Les thèses et antithèses peuvent être établies « par des preuves également lumineuses et irrésistibles » = deux concepts du monde contradictoires et présentant toutes les apparences de la nécessité logique. C’est le scandale d’une raison partagée entre des thèses adverses qui incite la critique à réfléchir sur les limites du savoir rationnel. Structure antinomique Critique du langage de la métaphysique : l’idée de monde ne signifie rien, puisqu’elle réunit sous un même terme deux significations inconciliables : le phénomène et l’inconditionné. Equivoque de l’idée de monde parce qu’elle repose sur deux opérations distinctes : sensibilité et raison ÉQUIVOQUE ONTOLOGIQUE 1) Opération d’unification de l’expérience sensible sous un concept : monde comme ensemble des phénomènes 2) Opération qui prétend conférer à cette unité les attributs d’une totalité inconditionnée : monde sous un sens transcendantal, comme « absolue totalité des choses existantes » et de leur synthèse. La cosmologie rationnelle se fonde sur la confusion de ces deux opérations quand elle prétend atteindre transcendentalement une totalité sensible. WOLFF : « La cosmologie générale scientifique démontre la théorie générale du monde à partir des principes de l’ontologie » ; sensible conçu comme adéquat aux réquisits de la raison. La réfutation kantienne de l’usage ontologique et cosmologique des catégories de l’entendement implique la reconnaissance de l’autonomie du sensible par rapport aux procédés rationnels de totalisation. La cosmologie est une discipline rationnelle où, pourtant, la nature du phénomène, et sa teneur en effectivité, viennent au 1er plan = intrication du rationnel et du sensible. Problème de l’articulation du criticisme à la phénoménologie. Equivoque de l’idée de monde entre monde sensible, monde intelligible EQUIVOQUE SÉMANTIQUE Emploi d’un terme unique pour désigner deux réalités ontologiques distinctes. Cf. relation d’homonymie platonicienne pour penser la distinction de l’identité du sensible et de l’intelligible : Timée, le sensible est une seconde espèce « qui porte le même nom (humônumon) que {l’intelligible} et qui lui ressemble ». Univocité comme condition de possibilité du langage de la métaphysique ? En effet, le discours métaphysique présuppose un minimum de ressemblance entre l’intelligible et le sensible qui justifiera l’usage transcendantal des catégories. Dans le système critique, en quoi l’intelligible fait-il encore « monde » si sa caractéristique première, rançon inévitable de l’inefficience de l’entendement au-delà de la sphère sensible, est l’indétermination ? La vérité est que le monde des sens et le monde de l’entendement = un seul et même monde sans rapport avec le monde intelligible, mais l’intelligible est une limite avant d’être un objet. Méprise par la prétention ontologique des concepts de l’entendement qui élèvent les catégories au rang de lois dogmatiques pour l’être. Critique anticosmologique des Antinomies = démontage systématique d’une telle prétention. 2 Peut-on parler du monde comme d’une idée régulatrice au sens de l’idée psychologique (le moi) ou de l’idéal transcendantal (Dieu) ? OU : le paradigme de l’expérience possible se substitue-t-il purement et simplement au mirage cosmologique ? L’idéalisme transcendantal = tentative de sortie hors de l’équivoque du monde : permet de départager les thèses et décider du rapport entre sensible et rationnel. Statut du concept de causalité. Le problème de la pertinence métaphysique des concepts cosmologiques = au cœur de la problématisation kantienne de la liberté : c’est dans le cadre de la philosophie pratique que sera mise à l’épreuve la capacité du concept de causalité à signifier au-delà de la sphère de l’expérience possible. Seule la raison pratique semble en mesure de donner consistance à un concept déterminé de monde, le « monde moral » comme vérité du monde intelligible. Le principe des cosmologies = articuler le monde en une hiérarchie de plans ou de degrés d’être où l’homme s’ajoute à l’ordre général de la nature tout en dépendant de lui. Or le propos le plus explicite de Kant est de distinguer entre des sphères de validité ontologiquement distinctes parce que circonscrites, soit par les concepts de la nature, soit par la liberté. Mais pourquoi user du langage cosmo de la causalité dans les deux cas (liberté comme causalité 1ère) ? Cosmopolitique, Rapport entre Dieu, le monde et l’habitant du monde. Quel rapport peut se nouer entre le monde et la subjectivité pour que cette dernière puisse, à la fois, être comprise selon son appartenance au monde et selon une liberté qui la situe en marge de la nature ? Métaphysique kantienne : fragilité du rationnel en regard de l’objectif. I. La raison et la crise de la cosmologie A. Le transcendantal et le monde Deux types d’approches transcendantales irréductibles l’une à l’autre : - Le criticisme - La phénoménologie VS dogmatisme de la vision naïve du monde. Transcendantal = démarches régressives qui s’interrogent sur les conditions de la connaissance. Cependant, pour Husserl, Kant ignore le problème de l’origine du monde dans la mesure exacte où il se refuse à placer le transcendantal en position d’origine. Le fil conducteur de l’objectivité Le transcendantal n’est pas à l’origine de toute validité d’être (affirmation kantienne constante). Le transcendantal = le résultat d’une abstraction à partir de la connaissance effective (principe formel) : la différence transcendantal / empirique n’appartient qu’à la critique des connaissances. « Transcendantal ne signifie jamais une relation de notre connaissance aux choses, mais uniquement une relation à la faculté de connaître » (Prolégomènes). Fonction critique et négative, non ontologique : ne permet pas de déterminer les choses telles qu’elles sont, mais seulement telles qu’elles apparaissent et se produisent. Hiatus entre être et apparaître (cf. Krisis d’Husserl : reconduction d’une dualité entre sensible et intellectuel, renoncement à l’accès aux choses en soi ; l’unité du monde demeure obscure à la pensée critique, impossibilité pour la uploads/Philosophie/ kant-et-lequivoque-du-monde.pdf
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- Publié le Fev 18, 2022
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