Centre Sèvres – Facultés jésuites de Paris WHITEHEAD OU LE COSMOS TORRENTIEL: I
Centre Sèvres – Facultés jésuites de Paris WHITEHEAD OU LE COSMOS TORRENTIEL: Introduction critique à une lecture de « Process and Reality » (Fin) Author(s): Jean-Claude DUMONCEL Source: Archives de Philosophie, Vol. 48, No. 1 (JANVIER-MARS 1985), pp. 59-78 Published by: Centre Sèvres – Facultés jésuites de Paris Stable URL: https://www.jstor.org/stable/43034909 Accessed: 28-10-2018 19:08 UTC JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at https://about.jstor.org/terms Centre Sèvres – Facultés jésuites de Paris is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Archives de Philosophie This content downloaded from 193.54.110.56 on Sun, 28 Oct 2018 19:08:29 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms Archives de Philosophie 48, 1985, 59-78. WHITEHEAD OU LE COSMOS TORRENTIEL Introduction critique à une lecture de « Process and Reality »* par Jean-Claude DUMONCEL (Fin) VI. - Genèse et structure (1) : la genèse (théorie de la concrescence) 1. Le vecteur préhensif Il peut paraître aberrant et outrancier de soutenir que la philosophie du xxe siècle, dans ses lignes de force principales, consiste en variations sur le concept de vecteur. Les convergences, pourtant, sont assez frappantes. Tournons-nous d'abord vers Russell, collaborateur de Whitehead pour la rédaction du plus grand ouvrage de logique mathématique à ce jour, l'un des pères fondateurs de la philosophie analytique, précurseur du positivisme logique et de l'empirisme logique qui, successivement, ont constitué l'une des deux écoles dominantes de ce courant de pensée. Russell explique lui-même qu'il est passé de la physique à la métaphysique en méditant sur le parallélogramme des forces. Si nous nous tournons maintenant vers la « philosophie continen- tale », que l'on oppose à la philosophie analytique, l'auteur que nous allons trouver entre l'impulsion qu'il reçoit de Brentano (ainsi que de Frege), et l'impulsion que reçoivent de lui R. Ingarden et M. Scheler, M. Heidegger et J.P. Sartre, c'est Husserl. Or ce qui distingue d'entrée de jeu le point de vue de Husserl de celui de Frege (lequel nous renvoie à la philosophie analytique), c'est le rôle que Husserl fait jouer au concept d'intentionalité (hérité de Brentano). Et il est courant de représenter l'intentionalité par un vecteur25. Le fait que, dans ce cas, le vecteur va du sujet à l'objet, contrairement au vecteur whiteheadien qui va de l'objectivé à l'unité subjective, ne doit pas nous arrêter. Toute relation, en effet, a une converse, et à Y orientation, qui distingue le vectoriel du scalaire, correspond toujours l'orientation opposée ; 25. V. p. ex. Bergmann, « Intentionality », in Meaning and existence. This content downloaded from 193.54.110.56 on Sun, 28 Oct 2018 19:08:29 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms 60 J.-CL DUMONCEL Whitehead et Husserl ne font ainsi transit en des sens opposés. Un auteur aussi imposant que Bergs vergences. Mais ce n'est qu'une appar la « mémoire » bergsonienne constitu sions que Whitehead concrétise par l récent de Jean Milet27 nous montre questions qui ne sont pas très différe passer Russell de ses curiosités scientifiques à l'interrogation philosophique : dans les deux cas il s'agit d'élucider les concepts fon- damentaux de la physique. Chez Whitehead, enfin, la res vera est l'occasion actuelle. Mais celle-ci, comme on l'a vu, s'analyse, en préhensions. Or chaque préhen- sion est un vecteur concret28. Dans la plupart des cas, le caractère vectoriel de la préhension se confond avec le fait de Yénergie fluente dans l'univers physique. Le « Tout s'écoule » d'Héraclite, nous dit Whitehead, est à reformuler en « Tout est vecteur » (Il va même jusqu'à parler d'un « flux de vecteurs »). Prenons l'exemple de la chaleur. Elle semble au premier abord une quantité scalaire. Mais quand un corps s'échauffe, cela signifie que l'agitation de ses molécules augmente, et non qu'il est envahi par une masse de « calorique ». Nous sommes donc ramenés au vecteur de l'intensité dans l'agitation. La température est la vérité de la chaleur. 2. Les phases de concrescence 29 A la concrescence correspond, comme on l'a vu, un « flux interne », qui est le devenir constitutif de l'occasion actuelle. Cette histoire se déroule en quatre phases , qui sont : l'origine ; la phase créative ; la satisfaction et l'immortalité objective. La concrescence, dans sa totalité, consiste dans la fusion d'un ensemble de préhensions. Chacune des phases peut être considérée comme fusion d'un sous-ensemble déterminé de cet ensemble. L 'origine d'une occasion O est la fusion de toutes les préhensions physiques positives effectuées par O sur le monde ambiant (cône arrière) de O. La phase créative est caractérisée par l'intervention du pôle mental. Ce sera la fusion de toutes les décisions prises par ce pôle (en référence 26. Tout au moins pour ce qui est des préhensions positives. 27. Bergson et le Calcul infinitésimal (P.U.F., 1974) Introduction et chap. I. 28. PR , Partie III, chap. III, section I, p. 105. 29. On suivra de près ici, l'exposé de R.M. Martin, Whitehead s Categoreal Scheme , Mārtiņus Nijhoff (1975), chap. I, § 10, p. 18-9. This content downloaded from 193.54.110.56 on Sun, 28 Oct 2018 19:08:29 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms WHITEHEAD 61 aux objets éternels qu'il préhend dire que c'est la fusion de to positives effectuées par O. La satisfaction est la réunion fusionnées respectivement lors L 'immortalité de l'occasion est dans la concrescence des occasi sion appartient encore à sa conc qui lui est propre). 3. La dualité du positif et du n Dans la concrescence, les préh leurs formes et par leurs donnée n'entrent que par leur forme. intervention. Supposons un spectateur qui regarde le soleil déclinant sur la mer. Il perçoit dans une même occasion O tel événement solaire S et le reflet R de cet événement. Mais le reflet du soleil est déjà une préhension du soleil. Donc notre sujet a au moins deux préhensions d'une occasion S de référence à la surface visible du soleil. L'une, 5-0, peut être dite préhension directe , bien qu'elle embrasse tout le train d'occasions constituant le rayon solaire ; l'autre, S-R-0 , peut être dite indirecte . C'est en raison des préhensions indirectes que les préhensions néga- tives doivent entrer en jeu. En effet, lorsqu'une même occasion D! est préhendée directement et indirectement (à travers une occasion D2), par une occasion de référence O, certaines des préhensions qui consti- tuent la réalité formelle de D15 doivent être occultées pour satisfaire à sa réalité objective, c'est-à-dire en sorte que la préhension indirecte de Dj soit compatible avec sa préhension directe. C'est ainsi que la préhension positive s'auréole de préhensions négatives. Chaque préhension positive doit, pour frayer son chemin vectoriel, s'aveugler sur une partie de son monde ambiant ; cet aveuglement est une préhension négative. Comme dans un certain hégélianisme, la contra- diction, ici, n'est absente du réel que parce qu'elle en est éliminée par une vigilance occulte (A cela, un leibnizien répondrait que la contra- diction est déjà éliminée du possible , c'est-à-dire au niveau des relations syntagmatiques entre objets éternels). Les préhensions négatives n'étant là que pour constituer une sorte d'environnement propice, ouaté, aux préhensions positives, on peut dire qu'elle leur sont subordonnées. Le « fleuve Léthé » n'est qu'un réseau de ruisselets contrariants qui moire le champ de déploiement sans restriction offert à la mémoire bergsonienne. This content downloaded from 193.54.110.56 on Sun, 28 Oct 2018 19:08:29 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms 62 J.-Cl. DUMONCEL VII. - Genèse et structure (2) : la structure (théorie de la cogrédience) 1. Goutte à goutte Si le panpsychisme de Whitehead impliquait omniprésence de la conscience, on pourrait définir la cogrédience comme le champ de conscience de l'occasion actuelle. Mais en raison des restrictions dont le panpsychisme a été assorti, nous devons opter pour une formule plus neutre, telle que « champ psychique ». Du fait que l'occasion actuelle, tout à l'opposé de la monade leibnizienne, n'est que portes et fenêtres, ce champ psychique est aussi la représentation que l'occasion actuelle se fait (consciemment ou non) de son monde ambiant. La cogrédience est la cogitatio de l'occasion actuelle. Au sens littéral, la cogrédience est la relation qui unit toutes les parties d'une même expérience ou d'un même « présent spécieux ». La cogrédience est, par ailleurs, une fonction de la concrescence. A l'image du sablier, nous pouvons substituer ici celle du compte- gouttes. Tandis que chaque pulsation de concrescence engendre un grain de durée physique (c'est un instant « de sable mémorial »), la relation de cogrédience embrasse toutes les parties d'une totalité en train de s'arrondir sur elle-même, que nous pouvons comparer à une goutte en formation à l'orifice d'un conduit, ou encore à une cellule vivante. Il y a d'ailleurs correspondance biunivoque entre les deux séries. Pour chaque grain de sable concrescent (en abcisse verticale), uploads/Philosophie/ l-x27-initiation-mathematique-de-descartes 1 .pdf
Documents similaires
-
21
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jui 30, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 1.3994MB