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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/251788045 LA GRAMMAIRE DE L'ASSENTIMENT REVISITEE Article · January 2002 CITATIONS 0 READS 463 1 author: Some of the authors of this publication are also working on these related projects: right now : social epistemology View project Pascal Engel École des Hautes Études en Sciences Sociales 211 PUBLICATIONS 798 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Pascal Engel on 30 June 2015. The user has requested enhancement of the downloaded file. 1 LA GRAMMAIRE DE L’ASSENTIMENT REVISITEE Pascal Engel Université de Paris-Sorbonne In R. Pouivet , S. Gironde eds, Analyse et théologie, Paris, Vrin 1999 A Frédéric Nef, qui m’ incita à lire Newman peu avant l’incendie de sa bibliothèque Bien que célèbre à son époque, l’Essai sur la grammaire de l’assentiment (1870)1 du Cardinal Newman n’est plus tellement lu aujourd’hui, du moins par les philosophes. Cet oubli est injuste, car c’est l’une des contributions les plus importantes à l’épistémologie de la croyance religieuse en même temps qu’une contribution à l’épistémologie de la croyance tout court. C’est sous ce dernier aspect que le livre de Newman m’intéresse. Car il porte sur certaines des questions les plus fondamentales de la philosophie de la croyance : la croyance est-elle un état passif ou un état actif de l’esprit ? Peut-elle subir l’influence de la volonté et si oui comment ? Les croyances sont-elles des états dispositionnels essentiellement liés à l’action, où sont-elles des états distincts? La croyance est- elle un état mental unifié, ou s’agit-il d’un genre qui a de nombreuses espèces ? La croyance est-elle une relation d’un individu avec des entités concrètes, telles que des phrases ou des représentations mentales, ou bien est-elle une relation avec des entités abstraites, telles que des propositions ? Les croyances ont-elles des degrés ? Peut-on croire quelque chose sur la base de données insuffisantes, 1 Je cite d’après l’édition Longmans de 1903, mais en donnant seulement les numéros de chapitres et de paragraphes. L’édition la plus récente est celle d’Oxford. Il existe une traduction française due à « Madame G., 2 voire même à l’encontre des données dont dispose ou contre toute évidence ? Y a-t-il une « éthique de la croyance » distinctive et propre aux normes cognitives ou épistémiques ? Ces questions, et bien d’autres 2, figurent sur l’agenda de toute analyse philosophique de la croyance. Newman entreprend de répondre à un bon nombre d’entre elles, de manière plus ou moins explicite, sans les formuler exactement dans les termes contemporains que je viens d’utiliser. L’ originalité de sa démarche, par rapport à celles de nombreux écrits sur la croyance religieuse, tient au fait qu’il tient à se demander d’abord en quoi consiste le phénomène ordinaire de la croyance, en tant qu’attitude naturelle de l’esprit, pour s’interroger ensuite, et sur cette base, sur le phénomène de la croyance religieuse : il ne considère pas la croyance religieuse comme foncièrement distincte dans ses caractéristiques, de la croyance « normale » empirique, et c’est qui donne à sa pensée un tour naturaliste et descriptif (sans doute hérité de Locke, de Hume, de Paley , et des philosophes britanniques des Lumières)3. Cela n’empêche évidemment pas Newman d’avoir comme objectif principal d’appliquer les résultats de sa discussion à une analyse de la croyance religieuse, à laquelle il consacre deux chapitres (V et X). Au fondement de sa démarche quasi-empiriste, il y a le désir de distinguer la foi religieuse de l’homme de la rue de celle du théologien. Mais je ne traiterai pas ici de ce point. Je ne considèrerai que son analyse générale de la croyance et de l’assentiment, et en particulier sa critique de la conception lockéenne des degrés d’assentiment et sa distinction entre l’assentiment « réel » et l’assentiment « notionnel ». Le premier point concerne le type d’attitude qu’est la croyance, et la question de savoir si on doit la distinguer d’un autre type d’attitude, l’assentiment. Le Paris » en 1907, et une traduction meilleure, mais partielle, due à S. Jankelevitch , 1945 ; il y a aussi une traduction plus récente, que je n’ai pas utilisée (celle de MM Olive, Paris , 1975) 2 Pour une introduction, cf. Engel 1995 3 On peut même dire que c’est ce refus de considérer la croyance religieuse comme foncièrement distincte, en tant que foi, des croyances empiriques ordinaires, qui constitue la base de l’approche empiriste et naturaliste en philosophie de la croyance. Hume par exemple, entreprend de donner une analyse de la croyance comme phénomène psychologique indépendamment de ses contenus et de ses modes de justification. Evidemment la question de savoir si cette entreprise peut être menée jusqu’à son terme est une autre question. 3 second concerne le problème du contenu et du mode de justification de nos croyances. Les deux, en fait, ne peuvent pas, selon Newman, être complètement séparés. Je voudrais essayer de monter que bien que les distinctions introduites par Newman sont très importantes en elles-mêmes, elles ne sont pas dénuées d’ambiguïtés et de confusions, en sorte qu’il nous faudra les reformuler. 1. La taxinomie newmanienne des attitudes doxastiques L’un des traits les plus frappants de l’analyse newmanienne de la croyance dans son Essai, pour un lecteur contemporain, est qu’il ne parle pas tant de « croyance» que d’ « assentiment ». Essayons d’abord de décrire, à grands traits, sa taxinomie de ce que l’on peut appeler les attitudes doxastiques. En fait, l’ « assentiment » selon Newman est l’attitude générique dont la croyance est une espèce, bien qu’il semble supposer qu’il existe une attitude plus générique encore, celle qui consiste à « maintenir une proposition» (holding a proposition) , ce qui n’est possible que si l’on peut d’abord l’ « appréhender » (apprehend it). Par «proposition », Newman semble entendre à la fois une entité linguistique concrète telle qu’une phrase composée d’un sujet et d’un prédicat et une entité mentale, telle qu’une représentation ou un ensemble d’idées dans l’esprit liées par une structure sujet-prédicat. Il ne distingue pas, comme nous le faisons aujourd’hui, entre des phrases d’une part et les significations de ces phrases. Ce qu’il appelle « appréhension » d’une proposition ressemble beaucoup à ce que nous appelons « entretenir » une proposition, c’est-à-dire la considérer sans l’affirmer. En ce sens, appréhender une proposition ce n’est pas encore la tenir pour vraie, ou, comme Newman le dit parfois, l’accepter. Or, et c’est l’une de ses doctrines les plus importantes, Newman distingue ensuite deux types d’appréhension, « notionnelle » et « réelle ». Une appréhension est « réelle » si elle porte sur une entité concrète, existante ou pas ; elle est « notionnelle si elle porte sur une entité abstraite. « Réel », par conséquent, ne doit pas être confondu avec « existant » (cela veut dire qu’il y a une res, mais 4 celle-ci peut exister ou pas). L’assentiment réel repose toujours sur une expérience particulière d’un sujet, tel qu’une perception, bien qu’on puisse conserver cette expérience en mémoire. Il repose sur l’appréhension d’une chose individuelle. C’est ce que Newman appelle proprement une croyance (belief) (IV, 3). L’appréhension et l’assentiment notionnels, au contraire, impliquent des relations à des entités abstraites et générales, et sont moins vives ou plus faibles dans l’esprit. Newman distingue quatre sortes d’assentiments de ce type : les professions, par lesquels on donne son assentiment à ce que l’on ne comprend pas totalement, les créances ( credences), qui sont des assentiments obtenus par ouï-dire, des opinions ou des conjectures à demi-pensées, les présomptions, par lesquelles nous avons confiance en certains principes instinctifs, et les spéculations, qui sont des acceptations de propositions explicitement tenues pour vraies. Newman propose également de distinguer l’assentiment complexe et l’assentiment simple. Il appelle le premier certitude matérielle et le second certitude. Ils ont tous les deux un élément réel et un élément notionnel, et ont tous deux à voir avec nos raisons de donner notre assentiment à des propositions, ou avec les justifications que nous avons pour les accepter. Les certitudes sont des assentiments devenus complexes et persistants. Pour compléter cette taxinomie générale, il faut mentionner une dernière division : la division entre assentiment et inférence. L’inférence, comme l’assentiment, est un acte de l’esprit qui conduit à accepter une proposition ; mais elle n’est pas, selon Newman, une forme d’assentiment : car elle est conditionnée par l’acceptation d’autres propositions, alors que l’assentiment est inconditionnel. L’inférence est affaire de degré : en inférant, nous acceptons des propositions sous certaines conditions, alors que quand nous donnons notre assentiment nous acceptons ces propositions pleinement, sans considérer leurs raisons. Ainsi l'assentiment est-il affaire de tout ou rien , et ne peut avoir de degrés. Essayons de résumer cette taxinomie complexe sur un tableau : 5 APPREHENSION ASSENTIMENT INFERENCE ( DOUTE) Réel Notionnel Formelle Informelle Naturelle (croyance) Profession Créance Opinion Presomption Spéculation Simple Complexe (Certitude) Pour le moment, je n’ai fait qu’énoncer les distinctions que Newman propose sans les expliquer. Comme on le voit il ne considère pas que toutes les attitudes mentales uploads/Philosophie/ la-grammaire-de-lassentiment-revisitee 1 .pdf
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- Publié le Jan 02, 2023
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