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Tous droits réservés © Laval théologique et philosophique, Université Laval, 1989 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/en/ Document generated on 10/09/2022 5:38 p.m. Laval théologique et philosophique Le Verbe de Dieu selon Athanase d’Alexandrie Charles Kannengiesser Volume 45, Number 2, juin 1989 Statut et droits du foetus URI: https://id.erudit.org/iderudit/400457ar DOI: https://doi.org/10.7202/400457ar See table of contents Publisher(s) Faculté de philosophie, Université Laval ISSN 0023-9054 (print) 1703-8804 (digital) Explore this journal Cite this article Kannengiesser, C. (1989). Le Verbe de Dieu selon Athanase d’Alexandrie. Laval théologique et philosophique, 45(2), 229–242. https://doi.org/10.7202/400457ar Laval théologique et philosophique, 45, 2 (juin 1989) LE VERBE DE DIEU SELON ATHANASE D'ALEXANDRIE * Charles KANNENGIESSER RÉSUMÉ. — Arius et Alexandre, son évêque, tous deux éduqués dans l'esprit de la théologie alexandrine du 3e siècle, finirent dans une impasse idéologique. Le jeune évêque Athanasefit sortir son église de la crise en inventant une nouvelle herméneutique, génératrice d'une christologie et d'une ecclésiologie adaptées aux réalités du 4e siècle. LA CHRISTOLOGIE D'ARIUS Dieu est un. La révélation biblique et la raison philosophique s'accordent à reconnaître qu'un seul principe ultime de tout ce qui est peut être appelé Dieu. Ni l'une ni l'autre n'enlèvent à Dieu son mystère absolu. Car Dieu est, par définition, au-delà de tous les discours humains, fussent-ils ceux des prophètes inspirés. Ce Dieu est trinitaire pour les chrétiens, puisqu'on vénère dans l'Église, avec le Père, son Fils et son Esprit. L'Évangile, il est vrai, nous renseigne fort peu sur la nature exacte de ces trois êtres qui composent la divinité salutaire. Mais il est formel sur un point : le Père est premier, il est plus grand que les deux autres, issus de lui. À y regarder de près, le langage de la tradition ecclésiale n'a jamais dévié à cet égard. Le Fils n'a-t-il pas opéré l'œuvre rédemptrice en accomplissant la volonté de son Père? Cette infériorité reconnue du Fils n'enlève rien à sa perfection divine. Elle maintient celle-ci à la place qui lui revient. De même, la liturgie et la piété célèbrent les mérites de l'Esprit, en gardant celui-ci à son rang, qui est de servir à la sanctification des élus du Père, sauvés par le Fils. Origène avait souligné la gradation des domaines propres au Père, au Fils et à l'Esprit dans l'œuvre universelle du salut. Il disait qu'au Père revenait la création de toutes choses, au Fils le salut de beaucoup d'êtres rationnels, à l'Esprit la sainteté des meilleurs d'entre les chrétiens. Pour Arius, cette répartition reflétait bien une hiérarchie d'être entre les trois composantes de la divinité chrétienne. * Cette étude sera reprise et développée dans un ouvrage à paraître chez Desclée (Paris), ainsi que chez Harper and Row (San Francisco) en traduction anglaise. 229 CHARLES KANNENGIESSER La raison philosophique, quant à elle, ne laisse aucun doute. Le monde transcendant des réalités divines a beau être complexe — et il l'est du simple fait de la surabondance de vie et de puissance qui caractérise le divin —, son ultime principe, soit Dieu lui- même, ne peut qu'être un. Arius témoigne d'un sens aigu de cette radicale transcendance de Dieu en soi. Il la perçoit aussi réelle par rapport aux êtres immédiatement inclus dans la notion chrétienne de la divinité, que par rapport à nos réalités terrestres. Tout est issu du Père, le Père seul est inengendré et non-devenu. Si le Fils et l'Esprit appartiennent à l'ordre du devenir, parce qu'ils sont nés de par la volonté du Père, ils ont en commun avec toutes les créatures d'avoir eu un commencement. Certes les ordres du réel ne doivent pas être confondus. Un être transcendant comme le Fils de Dieu dépasse tous les ordres connus de la réalité cosmique. Il se situe au-delà des créatures au sens commun du terme. Mais l'Écriture le laisse se présenter sans ambages, sous le titre de Sagesse, par ces mots : « Le Seigneur m'a créée au commence- ment de ses voies » (Pr 8,22). Elle enseigne donc bien une différence de nature entre le Père incréé et le Fils «créé». D'ailleurs, comment en serait-il autrement, puisqu'un Fils qui serait en tous points équivalent au Père n'imposerait rien de moins qu'une forme de polythéisme chrétien? Si l'éternité du Fils est définie dans les mêmes termes que celle du Père, on en vient très vite à nier l'origine même du Fils, voulue par le Père. On laisse même entendre que deux êtres absolus co-existent avec la même puissance infinie, ce qui est absurde. L'Écriture ne nous impose pas de telles absurdités, mais elle nous invite à rendre compte de notre foi trinitaire en élaborant une théorie correcte de l'origine du Fils. Notre lecture des évangiles s'en trouvera renouvelée, car nous verrons qu'ils illustrent sans arrêt cette théorie. Arius, on le voit, se comporte en véritable épigone d'Origène. Il approfondit d'abord, pour elle-même, sa doctrine sur Dieu comme tel. Il médite sur les titres divins du Christ et sur ce qu'ils impliquent quant à la nature de la Trinité. Il assimile l'enseignement des philosophies contemporaines pour articuler sa théologie. Enfin, il passe à la considération de la figure évangélique de Jésus, afin de montrer comment elle correspond à sa théorie sur le Fils de Dieu. Réfléchissant selon une tradition très ancienne, Arius étonnait ses auditoires par la nouveauté de ses exégèses. Il n'était pas seulement à la tête d'une grande communauté paroissiale, il faisait aussi figure de chef spirituel. Sa prédication tranchait sur la médiocrité routinière de ses collègues, elle introduisait une ferveur ascétique et une grande originalité christologique clans son commentaire des Écritures. Les plus lettrés parmi ses auditeurs, en particulier les clercs qui enviaient ses succès, l'entendaient également transposer en termes bibliques et en notions de catéchèse chrétienne les interrogations les plus à la mode parmi les philosophes du temps. Ceux-ci faisaient écho à la tradition orale de l'école de Plotin, lorsqu'ils énonçaient la transcendance absolue de l'Un, soit de Dieu considéré en soi. Plotin avait séjourné à Alexandrie durant toute la période de sa maturation philoso- phique. C'est là qu'il avait entrepris de repenser les doctrines platoniciennes, en les confrontant avec d'autres traditions de métaphysique, de psychologie ou de morale. Son souvenir demeurait vivant dans la métropole égyptienne, bien qu'il eut décidé de s'établir à Rome où il fit florès. Des écrits de Plotin commençaient à se répandre, en particulier ceux de sa cinquième Ennéade, centrée sur le problème de l'Un et de l'origine des êtres multiples, divins ou autres. Pour des esprits avertis, Arius pouvait 230 LE VERBE DE DIEU paraître introduire subrepticement cette problématique non-chrétienne sous le couvert de sa prédication. À son origénisme relativement traditionnel et banal se mêlait une passion spéculative qui en pervertissait les notions de base. Si Arius suggérait, par exemple, en termes voilés, que l'Écriture et la raison humaine concluaient à une différence de nature entre le Père et le Fils, il trahissait Origène. S'il prenait les évangélistes au mot, à propos des faiblesses humaines de Jésus, pour leur faire enseigner une faiblesse métaphysique du Logos en sa nature divine, il trahissait tout autant l'exégèse origénienne. En dernier ressort, le recours à Origène ne suffisait pas à rendre compte de ce qui était si insolite chez Arius. Le tour origénien de son discours cachait mal une motivation systématique, peut-être une angoisse de croyant, qui venait d'ailleurs, d'un autre horizon de la pensée métaphysique. Libre à Arius de tenter d'acclimater cette pensée dans la communauté de foi, mais il ne devait pas perturber les fidèles par des propositions insoutenables. En effet, malgré les images bibliques et les termes traditionnels du commentaire origénien, ses idées maîtresses créaient le scandale. Pour le commun des fidèles, aucune subtilité de philosophe n'autorisait à réduire le Fils de Dieu, même par analogie, à une créature. Arius avait beau se défendre en expliquant que ce Fils n'était pas une créature comme les autres, ou qu'il était le premier-né de toute la création, selon la belle expression de l'apôtre Paul ; la communauté paroissiale flairait le sophisme. Les clans rivaux entre clercs alexandrins faisaient le reste. À force d'incidents et de dénonciations, on finit par faire bouger l'évêque Alexandre, fort peu enclin à retirer sa confiance au vieux et savant prêtre Arius. Des conférences contradictoires restèrent sans succès jusqu'au jour où il devint clair que la prédication arienne comportait bel et bien des thèses inassimilables par la communauté ecclésiale. Un parti, formé d'évêques suffragants, de clercs et de laïcs, prit la défense de l'accusé. La rupture devint inévitable. Entre 318 et 320, un synode alexandrin d'une centaine de participants excommunia Arius et ses amis. Il faudrait relire ici et discuter avec plus uploads/Philosophie/ le-verbe-dieu.pdf

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