Numero 4 - Octobre 2009 – Association Mondiale de Psychanalyse PAPERS Bulletin

Numero 4 - Octobre 2009 – Association Mondiale de Psychanalyse PAPERS Bulletin Electronique du Comité d'Action de l'École-Une Version 2009-2010 Sommaire Hebe Tizio Editorial : Littoral Lucia D'Angelo Masques, postiches et semblants Bernard Lecoeur Masques du semblant Ana Lucia Lutterbach Holck Le fantasme féminin et le semblant Marie-Hélène Roch Du littoral, en psychanalyse Equipe de traduction Pascale Fari Maria Brinco de Freitas Ligia Gorini Beatriz Ramos Vindret 1 Editorial Littoral Le prochain Congrès de l’AMP met au travail le bord d’où se soutient la pratique analytique. Le thème Semblants et sinthome trace en effet un littoral, celui de l’hétérogène, de l’antinomie entre le sens et le réel, et par là, nous invite à rendre compte de la manière dont le discours analytique opère à l’égard du réel. La difficulté est assurément stimulante, si l’on en juge par l’ampleur des travaux qui jalonnent le travail des Écoles de l’AMP, au travers de leurs activités, de leurs Journées – elles-mêmes vivifiées par leurs périodiques, le Journal des Journées, Vanguardia – et de la série des Papers qui arrive ici à son quatrième numéro. Venons-en à la polyphonie qui compose la présente livraison. Prenant appui sur sa lecture de « Lituraterre », Marie-Hélène Roch analyse ce qu’est le littoral en psychanalyse. Ana Lucia Lutterbach Holck explore la féminité et le semblant à partir de son expérience de la passe. Quant à Lucía D’Angelo, elle s’intéresse à la mascarade, aux postiches et aux semblants dans la position féminine. Enfin, approfondissant la différence entre discours hystérique et discours de la science, Bernard Lecœur scrute les masques qui soutiennent le semblant. Ces quatre textes s’approchent, chacun à leur manière, de ce bord qui indique une exclusion. C’est ce que Lacan indique dans son Séminaire sur « Joyce le Symptôme », quand il se réfère à cette jouissance opaque qui exclut le sens. Cela implique de pousser à ses ultimes conséquences l’impossible écriture du rapport sexuel. Du littoral au nœud, il s’agit d’un réel hors sens. Selon cette perspective, la psychanalyse est, comme l’a souligné Jacques-Alain Miller, une pratique du non-rapport qui vise à produire ce qu’il y a de plus singulier. Chacun qui s’engage dans cette expérience peut ainsi approcher le traitement fondateur qui a été le sien à partir cet impossible. Ce réel sécrète sa propre méconnaissance. Dès lors, l’analyse et la passe, l’École, les textes sont des modalités opératoires qui témoignent d’une tentative pour s’en approcher, et faire avec ce mouvement forclusif. Ce sont autant de moyens qui permettent de produire un savoir y faire d’approximation, un bord de savoir produit par l’exploration d’un littoral… Hebe Tizio 2 Masques, postiches et semblants Lucia D’Angelo Dans l’enseignement de Lacan, toute recherche rétroactive sur le terme de semblant renvoie à la définition du phallus comme le semblant, par excellence, de la comédie des sexes. Voyons les antécédents de cette formulation. Selon Lacan, dans La signification du phallus, le phallus comme signifiant donne la raison du désir, et sa fonction désigne les modalités auxquelles seront soumis les rapports entre les sexes : « (…) ces rapports tourneront autour d’un être et d’un avoir qui, de se rapporter à un signifiant, le phallus, ont l’effet contrarié de donner d’une part réalité au sujet dans ce signifiant, d’autre part d’irréaliser les relations à signifier ». (1) Pour notre réflexion, soulignons le fait que parmi les multiples déclinaisons du terme en castillan, le semblant définit l’apparence, le paraître, ou l’aspect favorable ou défavorable sous lequel se présente une affaire ». (2) Dans son cours « De la nature des semblants », J.-A. Miller souligne la présence du terme paraître dans les Ecrits de Lacan: (…) « ceci par l’intervention d’un paraître qui se substitue à l’avoir, pour le protéger d’un côté, pour en masquer le manque dans l’autre, et qui a pour effet de projeter entièrement les manifestations idéales ou typiques du comportement de chacun des sexes (…) dans la comédie ».(4) Pour Lacan, bien que la relation du sujet avec le phallus s’établisse au-delà de la différence anatomique des sexes, il met spécialement la femme dans une situation épineuse. Pour être le phallus, c’est-à-dire le signifiant du désir de l’Autre, la femme doit rejeter une part essentielle de la féminité, et ses attributs, dans la mascarade. La féminité trouve son refuge dans le masque par le fait de la Verdrängung inhérente à la marque phallique du désir, ce qui « a la curieuse conséquence de faire que chez l’être humain la parade virile elle-même paraisse féminine ». (5) A partir de ces références des Ecrits de Lacan, J.-A. Miller interprète que l’intervention d’un paraître que se substitue à l’avoir suppose, déjà, d’introduire le semblant dans le rapport entre les sexes. Et, prolongeant la réflexion de Lacan, que la distinction entre l’amour et le désir suppose que le paraître (parêtre) puisse s’écrire comme l’être. Cette distinction se fonde sur le fait que l’amour ne remet pas en question l’être mais l’avoir. Ainsi est mis en relief que l’amour, c’est le don de ce que l’on n’a pas. Dans ce sens, aimer appartient à la position féminine. (6) A la lumière des propositions de « La signification du phallus » sur le paraître (parêtre) qui se substitue à l’avoir, il y a une bipartition des positions sexuelles du sujet : protéger l’avoir (hommes), ou masquer le manque à avoir (femmes). Dans la perspective de cette répartition, le signifiant du phallus s’érige comme unique dans l’élaboration lacanienne. Pour avancer dans cette direction, J.-A. Miller souligne que le parêtre qui se substitue à l’avoir suppose un antécédent, le phallus comme semblant. Prenons, par exemple, les références du Séminaire XI (7) où Lacan se confronte, entre autres, avec toute la perspective de la « Phénoménologie de la perception ». Il prend comme référence le 3 mimétisme, et il mentionne le terme de semblant pour souligner que ce phénomène intervient aussi bien dans l’union sexuelle que dans la lutte à mort. « L’être s’y décompose, d’une façon sensationnelle, entre son être et son semblant, entre lui-même et ce tigre de papier qu’il offre à voir ». (8) Cependant, le sujet humain, le sujet du désir qui est l’essence de l’homme, à la différence de l’animal, ne reste pas entièrement attrapé dans cette capture imaginaire. Il sait s’y orienter dans la mesure où il peut isoler la fonction de l’écran pour jouer avec elle. Selon Lacan, l’homme sait jouer avec le masque, avec le déguisement, avec l’imposture, avec le leurre, et il se sert de la médiation introduite par le voile, l’écran, soit le semblant, pour s’inclure dans le tableau de la relation entre les sexes. Dans Les quatre concepts fondamentaux…, il y a une autre référence à retenir à propos du sujet de la certitude chez Freud et chez Descartes : « (…) ce quelque chose qui est à préserver peut être aussi bien le quelque chose qui a à se montrer - puisque, de toute façon, ce qui se montre ne se montre que sous une Verkleidung, déguisement, et postiche aussi, qui peut tenir mal »(9). Le phallus sert de voile à ce qui se cache derrière : la castration. Le masque est aussi un semblant puisqu’il masque le rien. Selon J.-A. Miller, la fonction du masque chez la femme est une interprétation plus authentique de la position féminine que celle de la femme à postiche. Le terme de postiche se définit en castillan comme un ajout, une falsification qui remplace artificiellement quelque chose de naturel. C’est feint ou superposé. L’intérêt de ce terme, pour J-A Miller, est qu’il justifie une théorie des postiches et de leur rapport avec le semblant dans l’enseignement de Lacan. Dans la mesure où le postiche, comme ajout à une partie du corps, occupe la place de quelque chose qui n’y est pas, il répond au manque à avoir. (10) Pour aller dans ce sens, Miller prend comme point de départ une référence des Ecrits: « Telle est la femme derrière son voile : c’est l’absence du pénis qui la fait phallus, objet du désir. Evoquez cette absence d’une façon plus précise en lui faisant porter un mignon postiche sous un travesti de bal, et vous, ou plutôt elle, nous en direz des nouvelles : l’effet est garanti à 100%, nous l’entendons auprès d’hommes sans ambages ». (11) Il faut souligner que le postiche est une catégorie liée à l’existence d’une place. L’objet postiche remplace ce qui manque là où ça manque. Cependant, son importance - à la différence de l’objet prothèse - c’est que le postiche assure l’image dont la fonction est de semblant (12), dans la mesure où le postiche désigne un emblème au-delà de l’image. Alors que le masque fait croire qu’on cache le rien, le postiche n’est pas fait pour laisser croire à un avoir. Pour cette raison, Lacan indique dans les Ecrits que le désir sexuel se conjugue essentiellement avec l’avoir, la menace ou la nostalgie du manque-à-avoir : la menace qui porte sur l’avoir concerne fondamentalement l’homme (13). Ainsi, l’homme doit protéger son uploads/Philosophie/ autours-du-semblant.pdf

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