LA CONCEPTION AU CŒUR DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE Michel Sonntag ADRESE/CIR
LA CONCEPTION AU CŒUR DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE Michel Sonntag ADRESE/CIRNEF | « Les Sciences de l'éducation - Pour l'Ère nouvelle » 2007/3 Vol. 40 | pages 59 à 78 ISSN 0755-9593 ISBN 9782952802529 DOI 10.3917/lsdle.403.0059 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-les-sciences-de-l-education-pour-l-ere- nouvelle-2007-3-page-59.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ADRESE/CIRNEF. © ADRESE/CIRNEF. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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Elle repose en grande partie sur des questions de métacognition en insis- tant sur la manière de «bien conduire sa pensée» pour trouver des solutions inédites aux problèmes techniques rencontrés. Elle se présente comme une théorie sur l’objet technique et un entraî- nement mental qui vise, paradoxalement, à conduire la pensée avec méthode pour être inventif et créatif. Elle constitue aussi une approche intéressante pour la forma- tion professionnelle parce qu’elle s’attache à explorer le raisonnement qui habite la résolution des problèmes inventifs, donc la conception. L’article précise ces points en replaçant la TRIZ dans un contexte de formation professionnelle. *Professeur des Universités à l’Institut National des Sciences Appliquées de Strasbourg (INSA), Chercheur au LGECO EA 3434 (Laboratoire de Génie de la Conception), équipe Licia (Laboratoire d’Ingénierie, de Cognition et d’Intelligence Artificielle). Chercheur associé au Lisec EA 2310 (Laboratoire Interuniversitaire des Sciences de l’Éducation et de la Communication), Université Louis Pasteur, Strasbourg. Mots-clés : Conception. TRIZ. Résolution de problème. Métacognition. Pensée inventive. © ADRESE/CIRNEF | Téléchargé le 30/01/2023 sur www.cairn.info via Université de Sousse - CNUDST (IP: 196.235.115.76) © ADRESE/CIRNEF | Téléchargé le 30/01/2023 sur www.cairn.info via Université de Sousse - CNUDST (IP: 196.235.115.76) «Quiconque imagine quelques dispositions visant à changer une situation existante en une situation préférée est un concepteur… La conception, ainsi conçue, est au cœur de toute formation professionnelle. C’est elle qui fait la différence entre science et profession. Les écoles d’ingénieurs, comme les écoles d’archi- tecture, de droit, de gestion, de médecine, les Écoles normales d’enseignement, toutes sont concernées, au premier chef, par le processus de la conception»1. (SIMON, 1974). Par ces propos H. Simon rappelle une question centrale de la formation profes- sionnelle des ingénieurs. En effet, l’enseignement de la conception ou la formation à la conception ont toujours été au cœur de la formation des ingénieurs pour qu’ils soient capables de mettre en œuvre leurs connaissances scientifiques et technologiques pour résoudre des problèmes techniques et industriels. On pourrait rajouter qu’aujourd’hui ces questions sont particulièrement vives parce qu’on répète sans cesse que le dévelop- pement ou la survie même des entreprises dépendent de leur capacité à innover. Et l’innovation repose en partie sur la maîtrise des processus de conception et plus préci- sément encore sur la conception inventive, entendue comme capacité à trouver des solutions inédites aux problèmes. De ce fait, savoir concevoir des solutions aux problèmes de nature technologique constitue une compétence visée par tous les curricula des formations d’ingénieurs. La définition que propose la CTI2 pour parler de l’ingénieur recouvre bien cette idée : «Le métier de base de l’ingénieur consiste à résoudre des problèmes de nature technologique, concrets et souvent complexes, liés à la conception, à la réalisation et à la mise en œuvre de produits, de systèmes ou de services. Cette aptitude résulte d’un ensemble de connaissances techniques d’une part, économique, social et humain d’autre part, reposant sur une solide culture scientifique». En fait, l’idée reprend aussi à son compte la notion d’ingénieux qui qualifie une personne qui a l’esprit inventif. Mais former des concepteurs inventifs n’est pas chose aisée et relève plutôt du souhait ou de l’idéal. En effet, élaborer un programme d’enseignement sur la conception ne garantit pas la formation d’ingénieurs concep- teurs… inventifs. Quelle École n’aimerait pas pouvoir afficher «nous formons des concepteurs inventifs» et rassurer ainsi les services de recherche et développement des entreprises. Apprendre à concevoir, former à la conception, enseigner la conception reste problématique, si l’on ne réduit pas la conception à la résolution de problèmes connus, mais si on pense que le cœur de la conception est la capacité à trouver des solutions inédites. 1. SIMON H. La science des systèmes. Paris : Épi, 1974, pp. 73. 2. CTI : Commission des Titres d’Ingénieurs. Introduction 60 Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 40, n° 3, 2007 © ADRESE/CIRNEF | Téléchargé le 30/01/2023 sur www.cairn.info via Université de Sousse - CNUDST (IP: 196.235.115.76) © ADRESE/CIRNEF | Téléchargé le 30/01/2023 sur www.cairn.info via Université de Sousse - CNUDST (IP: 196.235.115.76) Malgré ces difficultés, une formation d’ingénieurs renvoie à l’idée de conception comme celle des architectes d’ailleurs. En effet, si l’on demande ce qu’il y a de commun entre un ingénieur et un architecte, on dira volontiers que ce sont des concepteurs. L’architecte conçoit des bâtiments et des aménagements de l’espace, l’ingénieur des produits et des systèmes techniques. C’est dans ce contexte que nous situons l’émergence de la notion de «sciences de la conception» qui fait son chemin à la fois chez les ingénieurs et chez les architectes et constitue un objet de recherche et de débat. Nous nous arrêterons d’abord à cette question de «sciences de la conception». L’analyse des approches de la conception chez les architectes et les ingénieurs à partir d’éléments recueillis sur leur formation à l’INSA de Strasbourg, École qui a la particularité de former à la fois des ingénieurs (7 sections) et des architectes (1 section) nous permettra ensuite de préciser les dimen- sions procédurale et créatrice de l’activité de conception. Nous verrons aussi comment cette tension entre procédure et créativité est abordée par la théorie sur l’invention de la TRIZ3 aujourd’hui assez largement diffusée auprès des entreprises et enseignée dans plusieurs Écoles d’ingénieurs. Elle soutient une idée plutôt audacieuse en postu- lant que l’on peut apprendre à être inventif. Ce parcours à travers des dispositifs de formations et la pensée inventive nous permettra de revenir à la conception comme objet de recherche en formation à travers quatre éléments constitutifs : le produit, le processus, le sujet et le contexte. L’existence aujourd’hui acceptée de la notion de «sciences de la conception» répond à la remarque de Simon qui souligne qu’au cœur des formations professionnelles il faut placer la formation à la conception. Mais comment former à la conception? Parler de «sciences de la conception», c’est un peu répondre à la question. En effet, si la conception relève d’une science, on peut apprendre à concevoir, parce que le propre de la science est d’être formalisable et transmissible. Cela paraît logique et marqué du sceau de l’évidence. Le texte parut dans le B.O. du 31 août 2000 (Bulletin Officiel du ministère de l’Education Nationale et du ministère de la Recherche) sur l’enseignement des sciences de l’ingénieur en classe de première et de terminale confortait cette idée en disant : 3. TRIZ : acronyme russe de la théorie de résolution des problèmes inventifs «Teorija Reshenija Izobretateliskih Zadatch» élaborée par l’ingénieur et scientifique russe Genrich Altshuller à partir des années 1946. 1. Science de la conception? 61 Michel SONNTAG © ADRESE/CIRNEF | Téléchargé le 30/01/2023 sur www.cairn.info via Université de Sousse - CNUDST (IP: 196.235.115.76) © ADRESE/CIRNEF | Téléchargé le 30/01/2023 sur www.cairn.info via Université de Sousse - CNUDST (IP: 196.235.115.76) «Partant de problèmes concrets, les sciences de l’ingénieur, sciences de la concep- tion et de la réalisation des systèmes inventés par l’homme, concernent aussi bien l’élaboration d’objets, d’équipements et de processus, que l’organisation qui les accom- pagne». On remarquera que le texte, non seulement assimile les sciences de l’ingénieur aux sciences de la conception et de la réalisation…, mais parle «des» sciences de la concep- tion. La question qui reste en suspens est celle de savoir ce que recouvre la notion de «sciences de la conception». Question d’épistémologie Notons d’abord la difficulté épistémologique qui se cache sous l’expression de «sciences de la conception». La conception a-t-elle le statut d’objet? La science de la concep- tion relève-t-elle des sciences classiques ou faut-il parler d’une science de l’action? Est-elle une application des sciences ou une science de l’action, pour reprendre les distinctions d’Yves de Saint Arnaud4 [SAINT ARNAUD, 1992]. Certes, dans une approche uploads/Philosophie/ lsdle-403-0059 1 .pdf
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- Publié le Jul 10, 2022
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