La Revue de DOMUNI Un philosophe aux rivages de la Foi : Michel Henry dans « Pa

La Revue de DOMUNI Un philosophe aux rivages de la Foi : Michel Henry dans « Paroles du Christ » Numéro n° 4 Juillet 2011 © 2011 www.domuni.eu reproduction et diffusion interdites 2 Remerciements Ce numéro a été réalisé par Alain Papazian et nous lui exprimons un très grand merci. Nous tenons à remercier particulièrement le Frère Michel Van Aerde qui a préparé et animé ce séminaire avec un grand dynamisme et qui a su nous faire profiter de sa connaissance de Michel Henry. Nous remercions aussi les séminaristes pour le travail réalisé et qui permet de publier cette revue à partir de leurs participations : Claire Elisabeth Bellet-Odent, Bernardin Boko, Pascal Brégnard, Clarisse Diaz, Sabine Ginalhac, André Hall, Victor Kossi, Antoine Lega, Joe Lekundayo, Monique Le Mauff, Corine Mouton Dorey, Alain Papazian, Isabelle Patriarche, Marie Rouaux, Jean Marc Véran. La rédaction de la Revue © 2011 www.domuni.eu reproduction et diffusion interdites 3 Index Préambule........................................................................................................................................................ 4 I. UN AUTEUR ................................................................................................................................................... 6 I.1. Approche de sa pensée ................................................................................................................................. 6 I.2 De l’importance du cœur ............................................................................................................................ 16 II- UN OUVRAGE ............................................................................................................................................. 18 II.1 Un titre et une pensée ................................................................................................................................ 18 II.2 Une Christologie philosophique est-elle possible ? ..................................................................................... 20 II.3 Un ouvrage en résumé ............................................................................................................................... 24 III- UN QUESTIONNEMENT ............................................................................................................................. 35 III.1 Quelques réactions spontanées des séminaristes ..................................................................................... 35 III.2 Les questions examinées par les séminaristes ........................................................................................... 37 CONCLUSION .................................................................................................................................................. 63 BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................................. 64 © 2011 www.domuni.eu reproduction et diffusion interdites 4 Préambule Qui donc est Jésus-Christ ? C’est pour approfondir cette question fondamentale que, sous la conduite du frère Michel Van Aerde o.p., les séminaristes ont lu et commenté attentivement le livre Paroles du Christ, du philosophe Michel Henry. La pensée de ce philosophe se développe selon une phénoménologie qui peut aider à renouveler certains aspects de la christologie. Dans le résumé de ce séminaire, qui n’est pas l’édition des Actes mais une sorte de relation aussi complète que possible, Frère Michel Van Aerde nous explique son intérêt pour Michel Henry. Il y a, pour son choix, plusieurs raisons dont chacune, à elle seule, suffirait. C’est à la fois un philosophe, un chrétien, un théologien, un prêcheur, un phénoménologue, et un homme qui a de plus en plus de disciples. Tout d’abord Michel Henry se définit lui-même comme « philosophe de la vie », ni plus ni moins, et c’est peu commun. Ensuite il a écrit un livre qui s’intitule « C’est moi, la Vérité », livre incontournable quand on veut parler du lien entre la vérité et la vie. Pour lui, la vérité était une question de vie ou de mort1, écrit son épouse, Anne Henry. Il le disait à sa manière : « Ma pensée est une pensée dangereuse et non un spiritualisme à l’eau de rose. Elle porte en soi le tragique, la possibilité des plus grandes joies, des plus grandes aventures comme celle de Kandinsky, l’aventure humaine, l’aventure de l’économie. C’est terrifiant, la vie »2. Pour lui, penser était un risque, un risque total, un engagement sans retour. C’est un philosophe de la vie qui devient chrétien et qui finit par écrire un livre sur la vérité comme personne, comme le Christ lui-même. Michel Henry nous intéresse par son évolution personnelle. Il est toujours intéressant, quand on est théologien, d’étudier les intellectuels qui sont devenus chrétiens en suivant le cours même de leur pensée. Le travail intellectuel de Michel Henry l’a conduit au Christ et à Dieu. Bergson, Claudel, Péguy, Dostoïevski, René Girard, Eric-Emmanuel Schmitt y sont aussi parvenus au cœur de leur travail. Théologien, Michel Henry l’est aussi un peu. En effet, il écrit une « phénoménologie du Christ », en écrivant l’ouvrage qui va nous intéresser : « Paroles du Christ », et un autre dont le titre est « Incarnation ». Le père Antoine Vidalin, dans son ouvrage3 La Parole de la Vie : la phénoménologie de Michel Henry et l’intelligence chrétienne des Ecritures ainsi que dans son article « Phénoménologie de la Vie et Théologie »4, réfléchit longuement aux rapports du philosophe avec la théologie. Les livres de Michel Henry invitent à renouveler profondément la pensée chrétienne. Cela ne veut pas dire qu’il y ait rupture avec la Tradition mais plutôt qu’ils apportent un éclairage nouveau, dont les effets ne font que commencer. Il est fortement probable que, dans quelques années, il soit impossible de s’exprimer en théologie sans faire référence à cette philosophie. 1 Michel Henry Ed L’Age d’Homme, Lausanne, Suisse, 2009, p.9 2 Michel Henry Ed L’Age d’Homme, Lausanne, Suisse, 2009, p.43 3 A. Vidalin, La parole de la vie : la phénoménologie de Michel Henry et l’intelligence chrétienne des Écritures, Paris, Éditions Parole et silence, 2006. 4 Michel Henry Ed L’Age d’Homme, Lausanne, Suisse, 2009, p. 512, © 2011 www.domuni.eu reproduction et diffusion interdites 5 Prêcheur, il le devient. D’une certaine manière Michel Henry n’est pas seulement philosophe et théologien, il devient parfois prédicateur, prophète provocateur. Il ne parle pas seulement de la vie, il appelle à naître et à renaître : il commente par deux fois l’entretien de Jésus avec Nicodème. Il s’agit d’entrer dans la Vie absolue et il parle de la chair comme lieu du salut. Encore plus surprenant, Michel Henry a aussi écrit un évangile, un évangile apocryphe bien évidemment « Le Fils du Roi », où l’on retrouve, à peine maquillées, les grandes scènes de l’Eucharistie, de la résurrection de Lazare, de l’agonie, de l’apparition à Marie Madeleine, mais transposées dans un hôpital psychiatrique, avec pour thèse principale la question philosophique fondamentale, celle de la vérité de la vie, une vérité cachée et indémontrable au sens de la « monstration ». Si Michel Henry, que certains célèbrent déjà comme l’un des penseurs les plus importants du XXème siècle5, n’est pas davantage connu, c’est qu’il n’est pas facile à lire, pas même dans ses romans. De plus il adopte une pensée clandestine : il ne s’inscrit pas dans les modes ni dans les courants de pensée majoritaires. Sa vie se déroule à Montpellier (à 50 mètres du couvent des dominicains) et où il travaille continuellement, sans souci des effets médiatiques qu’il critique dans ses écrits. Phénoménologue, il l’est dans sa vie. Il se comprend lui aussi dans la manière même de se manifester et il s’exprime dans un livre intitulé « L’essence de la manifestation ». Fascinant, il est un orateur brillant, parlant sans notes et donnant à son auditoire l’impression de livrer une pensée en cours de jaillissement. Pour autant, Michel Henry ne cherche pas de disciples. Il n’encourage jamais à le répéter. Depuis sa mort, les ouvrages sur son œuvre sont nombreux et ils permettent de mieux entrer dans sa pensée. Surtout, phénomène rare, un auteur est apparu, qui le comprend tout particulièrement et qui ose expliciter de manière plus accessible le système « henryen », c’est son épouse, elle-même philosophe. Il y a quelque chose de très beau, d’impressionnant, de somptueux à ce ministère féminin de l’épouse qui, sans apparaître elle-même, présente son mari au monde en rendant sa pensée accessible au grand nombre. Il s’agit, plus que d’un résumé, d’une véritable épiphanie, d’une manifestation, d’une mise en forme, d’une exégèse, d’une expression qui, à ce degré de qualité, survient comme une œuvre d’art nouvelle, faisant écho à une œuvre d’art originale, à ceci près qu’il ne s’agit pas ici d’une philosophie différente mais de la même philosophie, davantage humanisée. Ce qui convient pour une philosophie de la chair, une philosophie de l’incarnation. 5 Michel Henry Ed L’Age d’Homme, Lausanne, Suisse, 2009, p.5 © 2011 www.domuni.eu reproduction et diffusion interdites 6 I. UN AUTEUR Pour bien se mettre dans l’atmosphère de l’ouvrage de Michel Henry « Paroles du Christ », il est bien utile de connaître la pensée de l’auteur et d’approfondir une de ses caractéristiques majeures qui concerne la place qu’il donne au cœur. I.1. Approche de sa pensée Nous constatons, remarque le frère Michel, que Michel Henry est souvent provocant dans sa pensée. Michel Henry aime-t-il provoquer ou sa pensée, par elle-même est-elle suffisamment à contre courant des modes pour pouvoir se passer d’effets spéciaux ? Les deux, probablement. Mais Michel Henry se préoccupe fort peu des effets de ses formules. Il cherche toujours davantage à approfondir ses intuitions. On lui reproche de ne pas vraiment commenter les auteurs et plutôt de se lire lui- même dans leurs œuvres. C’est ainsi que son Christianisme d’adoption semble à beaucoup de ses collègues si « henryen » qu’il ne peut-être question de « nouvelle étape » et moins encore de « conversion ». Il en est ainsi pour Marx particulièrement car sa lecture renouvelle complètement l’approche que l’on pouvait avoir jusque là de cet auteur. Marx devient « henryen »6, dans la mesure où la ‘digestion’ qu’en fait Michel Henry en transforme radicalement la lecture. Que dirait Marx de la lecture henryenne de son œuvre, s’y retrouverait-il ? Cette question se pose de la même façon pour la lecture « henryenne » du Christianisme avec cette différence que si Marx n’est plus là uploads/Philosophie/ michel-henry.pdf

  • 28
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager