Q U E S A I S - J E ? Les 100 dates de la culture générale ÉRIC COBAST Professe
Q U E S A I S - J E ? Les 100 dates de la culture générale ÉRIC COBAST Professeur agrégé de l'Université Pour Anne-Laure et Vadim, pour Wickie. BIBLIOGRAPHIE THÉMATIQUE « QUE SAIS-JE ? » Éric Cobast, Les 100 mots de la culture générale, n° 3831 Pascal Gauchon et Jean-Marc Huissoud (coordonné par), Les 100 mots de la géopolitique, n° 3829 Pascal Gauchon et Jean-Marc Huissoud (coordonné par), Les 100 lieux de la géopolitique, n° 3830 Bertrand Jacquillat et Vivien Levy-Garboua, Les 100 mots de la crise finan- cière, n° 3846 André Comte-Sponville, La philosophie, n° 3728 ISBN 978-2-13-057618-1 Dépôt légal — l r c édition : 2009, septembre © Presses Universitaires de France, 2009 6, avenue Reille, 75014 Paris AVANT-PROPOS La culture générale, et ce n'est pas la moindre des contradictions qui l'affectent, gagne en crédit quand elle s'applique à des objets particuliers ; dès lors qu'il s'agit de situer un texte ou une image, d'interroger un éclat de la réalité ou bien encore d'épousseter un frag- ment du passé, elle est utile pour les liens qu'elle res- taure, sans lesquels il n'y a guère de signification pos- sible. Rien n'y est donc « général » et toute réflexion qui en procède ne réclame qu'à s'incarner. On aura ainsi l'embarras du choix quand il faudra bien en faire la démonstration. Ce pourrait être par des lieux « de mémoire » ou d'oubli, d'ailleurs, par des objets du quotidien, des œuvres de l'art ou de l'esprit, des événe- ments déposés par l'actualité. Le parti pris par ce petit livre qui fait suite aux 100 mots de la culture générale, comme la pratique à la théorie en quelque sorte, consiste à emprunter les por- tes que laissent vacantes les dates, celles bien connues des grands rendez-vous de l'Histoire, et les autres, souvent dérobées, dissimulées parfois par l'habitude et qui ouvrent sur des perspectives étonnantes. De l'invention de la lame de rasoir jetable aux at- tentats du 11 septembre 2001 mais en passant aussi par les premiers sondages politiques de Gallup ou la création de l'Arpanet, voici cent événements qui sont autant d'occasions d'aiguiser la réflexion, autant d'en- trées en matière possibles, autant d'accrochés ou de 3 captationes benevolentiae pour les rhéteurs, et de curiosités pour les curieux. Ces 100 dates ont été classées par thèmes qui cor- respondent à quatre chapitres dont les intitulés sont explicites : « Jours de violence », « Verdicts et suffra- ges », « Créations et fondations » et « Découvertes et inventions ». Pour un usage plus commode, chacun des articles est suivi d'une courte série de mots clés que l'on re- trouve assemblés dans un index en fin d'ouvrage. Enfin, dans la perspective des 100 mots de la culture générale, l'exercice qui relève du genre bref s'autorise une grande variété de traitements pour chacune des entrées, une liberté de ton et de pensée, véritable caractéristique de ce que les Anglo-Saxons nomment libéral éducation. 4 Chapitre I JOURS DE VIOLENCE 1 - 480 avant J.-C., 29 septembre Victoire des Grecs à Salamine Afin d'enrayer l'avance de l'armée perse, Thémis- tocle d'Athènes et Eurybiade de Sparte prennent la dé- cision d'affronter la flotte de Xerxès, dans l'espoir de couper ainsi le ravitaillement des forces terrestres du roi des Perses. La bataille aura lieu dans la rade étroite de Salamine, où les Grecs ont entraîné leurs adversaires afin de réduire l'avantage numérique des envahisseurs - 1 200 navires contre 350 -, empêchant, de fait, toute manœuvre d'encerclement. La victoire imprévisible des Athéniens alliés aux Spartiates pousse le monarque oriental à faire « fouetter la mer » de rage. À la stra- tégie des uns s'oppose la déraison des autres. Il est dés lors évident qu'aux yeux des Grecs leurs adversaires échappent à toute véritable compréhension. Quelle em- pathie le géomètre peut-il éprouver à l'égard du colé- rique, débordé par sa propre passion ? Aucune. D'où le choix de nommer « barbare » - de l'onomatopée bara- bara suggérant, paraît-il, le chant des oiseaux - celui que l'on n'entend pas, que l'on ne comprend pas. La victoire de Salamine fut l'occasion de la mani- festation d'une différence radicale : la culture du con- 5 trôle de soi, de la maîtrise - y compris au plus sombre des circonstances - l'emporte sur celle de la démesure. La force s'impose désormais et l'emporte sur la vio- lence. La Raison sur les Passions. L'expérience d'une telle supériorité est si puissante pour une culture qu'elle aurait vraiment une réelle difficulté à résister à la tentation - ethnocentrique s'il en est ! - de se constituer en modèle de civilisation. Mots clés : Choc des civilisations, Civilisation, Force, Guerre, Nation, Violence. 2 - 4 9 avant J.-C., ~ 11 janvier Jules César franchit le Rubicon Désireux de se présenter au consulat après une longue campagne victorieuse, alors qu'il se trouve en- core sur le territoire de la province des Gaules qu'il vient de pacifier, Jules César se voit sommé par le Sé- nat de se présenter personnellement à l'élection, ce qu'exige par ailleurs la tradition. Il lui faut, par consé- quent, pour être éligible, licencier son armée et rentrer seul à Rome. Il franchit pourtant le Rubicon accom- pagné de la 13e légion, celle des vétérans, et en l'es- pace de deux mois il conquiert toute l'Italie, alors que Pompée, consul en titre et principal obstacle aux am- bitions de César, se réfugie en Grèce où il sera défait quelques mois plus tard à Pharsale, en Thessalie. Le Rubicon est un fleuve côtier d'Italie centrale qui se jette dans l'Adriatique et qui sépare la Gaule cisalpine du territoire directement administré par les magistrats romains. La tradition en fit une frontière symbolique, 6 impossible à franchir avec une armée sans déclencher immédiatement l'hostilité du pouvoir légal. Le Rubicon agit en effet un peu à la manière du pomœrium de Rome, c'est une limite destinée à mainte- nir à distance la violence. De fait, pour César, le fran- chissement de ce petit fleuve est un véritable engage- ment, nul désormais ne peut ignorer ses intentions politiques : devenir le nouveau maître de Rome, ce dont il rêve depuis l'échec de la conjuration de son ami Catilina. Le symbole est renforcé d'un supposé bon mot rapporté par Suétone : Alea esto jacta, « le sort en est jeté », devenu dans un latin de cuisine aux saveurs proverbiales alea jacta est, mais que jamais César ne prononça. Au mieux dit-il en grec, dans la langue des élites politiques de Rome, quelque chose comme Aner- riftho Kubos, « Que soit jeté le dé ! ». Outre que les mots destinés à l'Histoire doivent toujours être situés dans un contexte, l'anecdote vaut pour ce qu'elle offre d'illustration à la notion de décision en politique. Déci- der, c'est trancher, introduire dans son existence de l'irréversible : César sait que rien, après le passage du Rubicon, ne sera comme avant. Pour le meilleur ou pour le pire car en politique celui qui décide s'en remet toujours plus ou moins à 1' « aléatoire ». Mots clés : Décision, Engagement, Responsabilité. 3 - 1 7 8 Marc Aurèle fixe les limites de l'Empire Quatre-vingt huit millions d'habitants et cinq mil- lions de kilomètres carrés, telles sont les mesures de 7 l'Empire lorsque l'empereur-philosophe Marc Aurèle, qui exerça l'essentiel de son principat à faire la guerre - Rome ne connut sous son règne que quatre années de paix -, donne au territoire romain sa plus large étendue. Mais quel avenir pour un Empire figé ? Un Empire qui se croit protégé par la ligne discontinue de son limes ? De fait, si l'Empire impose un ordre mili- taire - imperium -, il s'impose aussi un « devoir de conquête » que l'usage du mot « impérialisme » atteste. Or, à l'abri d'un rempart, le goût du risque et l'ambition nécessaires à l'esprit des grands conqué- rants s'émousse. /V En fait, de l'Antiquité au Moyen Age, la guerre s'organise autour de la pratique du siège : siège de ci- tés fortifiées (La Rochelle), siège de citadelles (Mas- sada), etc. Dans tous les cas, la guerre est une guerre d'occupation, elle est statique et s'inscrit dans la durée. Lorsque les assaillants lèvent le siège, ils recon- naissent aux assiégés une endurance et une autonomie imprévues. La stratégie de l'assiégeant se limite à cou- per toutes les voies d'approvisionnement de l'assiégé qui, en retour, s'efforce par les « sorties » de maintenir un contact permanent avec l'extérieur. Il n'est pas in- différent de noter que la première guerre de notre his- toire se limite à un long siège de dix ans : les Achéens se contentent en effet d'assiéger les Troyens qui s'ef- forcent de les repousser à la mer. Cette conception ar- chaïque de la guerre qui avantage la défense sur l'at- taque va conduire en France jusqu'au XX E siècle toutes les politiques d'aménagement militaire du territoire, de Vauban à Maginot. Fortifications (Metz), renfor- cement des ports (Marseille), remparts (ligne Magi- uploads/Philosophie/ qsj-100datescultgenerale.pdf
Documents similaires










-
94
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 15, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 0.8017MB