Henri Bergson (1902) “ Camille Bos – Psychologie de la croyance ”. (Compte rend

Henri Bergson (1902) “ Camille Bos – Psychologie de la croyance ”. (Compte rendu de livre) (1902) Un document produit en version numérique par Bertrand Gibier, bénévole, professeur de philosophie au Lycée de Montreuil-sur-Mer (dans le Pas-de-Calais) Courriel: bertrand.gibier@ac-lille.fr Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html Fondée et dirigée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.uquebec.ca/index.htm Henri Bergson (1902), “ Camille Bos — Psychologie de la croyance ” 2 Cette édition électronique a été réalisée par Bertrand Gibier, bénévole, professeur de philosophie au Lycée de Montreuil-sur-Mer (dans le Pas- de-Calais), bertrand.gibier@ac-lille.fr , à partir de : Henri Bergson (1902) “ Camille Bos — Psychologie de la croyance ” (1902) Une édition électronique réalisée à partir de l'article d’Henri Bergson (1902), “Camille BOS. — Psychologie de la croyance, 1 vol. in-18. Paris, Félix Alcan, 1902.” in Revue philosophique, XXVIIe année, n° 7-12, juillet-décembre 1902, pp. 529-533. Polices de caractères utilisée : Pour le texte: Times, 12 points. Pour les notes de bas de page : Times, 10 points. Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2001 pour Macintosh. Mise en page sur papier format LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’) Édition complétée le 27 novembre 2002 à Chicoutimi, Québec. Henri Bergson (1902), “ Camille Bos — Psychologie de la croyance ” 3 Henri BERGSON Camille BOS. — Psychologie de la croyance, 1 vol. in-18. Paris, Félix Alcan, 1902. In REVUE PHILOSOPHIQUE, XXVIIe année, n° 7-12, juillet-décembre 1902, pp. 529-533. Ce compte-rendu, écrit par Bergson en 1902, n’a pas été repris dans le volume des Mélanges, édité par les PUF. À notre connaissance, il n’a fait, depuis sa première publication, l’objet d’aucune réédition. Bertrand Gibier. Henri Bergson (1902), “ Camille Bos — Psychologie de la croyance ” 4 Le livre de M. Camille Bos est une étude instructive, autant que sugges- tive, du phénomène de la croyance. L’auteur, qui est un psychologue péné- trant, examine la croyance dans ses rapports avec la sensation, avec les images, avec les émotions et les tendances, avec l’intelligence, enfin et surtout avec la volonté et l’action en général. Sur tous ces points il nous apporte une ample provision de descriptions et d’analyses. De chacun de ces points aussi il nous suggère une certaine représentation de la croyance. Sa méthode consiste à prendre, sur l’objet qu’il étudie, une série de vues qu’il nous montre tour à tour, isolément. À nous alors de faire converger toutes ces vues sur un même point pour obtenir de l’objet une vision unique : l’auteur, par une défiance peut-être excessive vis-à-vis de l’esprit de synthèse, n’a pas voulu entrepren- dre lui-même ce travail. Nous allons résumer d’abord les divers chapitres du livre. Puis nous dirons un mot de la théorie qui nous paraît s’en dégager, théo- rie dont nous accepterions volontiers, pour notre part, les points essentiels, car nous arrivons, par des chemins assez différents, à une conclusion du même genre. Il y a d’abord une croyance qui s’attache à la sensation. Elle dépend de l’intensité de cette sensation, de sa netteté, et aussi de la cohésion des élé- ments qui la composent. Elle est peut-être moins forte pour les sensations visuelles que pour les sensations tactiles, moins forte pour les sensations re- çues passivement que pour les sensations que nous soulignons par des mouvements. Notre activité joue donc ici un rôle important, peut-être le rôle principal. Et il ne s’agit pas seulement de notre activité musculaire, mais de notre réaction générale à la sensation et de l’attitude que nous adoptons vis-à- vis d’elle. De la sensation nous passons aux images. Comme l’image n’est qu’une sensation diminuée, notre croyance aux images devra suivre les mêmes lois que notre croyance aux sensations : elle sera plus forte pour une image plus nette et plus intense. Mais ce qui complique beaucoup les choses, c’est que les images représentent notre passé et non pas, comme les sensations, notre Henri Bergson (1902), “ Camille Bos — Psychologie de la croyance ” 5 moment présent. S’il n’y a, pour un moment donné de notre vie, qu’un seul système de sensations, le nombre des images qui peuvent se présenter au seuil de la conscience, à ce même moment, est illimité. De toutes les appelées, quelle sera l’élue ? Ce sera celle qui s’organisera le mieux avec nos sensations présentes ; ce sera aussi celle qui sera assez forte pour refouler toutes ses concurrentes et occuper la place. M. Bos se rallie ici à la théorie de Taine relative à la « réduction » des images. Nous arrivons alors aux émotions et aux tendances. M. Camille Bos nous montre sur des exemples bien choisis comment l’émotion « colore la croyan- ce, l’anime et lui communique la vie ». Les idées introduites dans notre esprit sont acceptées ou rejetées selon qu’elles sont en harmonie ou en désaccord avec nos émotions. Et si l’on considère que l’ensemble de notre vie affective, tendances, désirs, etc., constitue le fond même de notre caractère, on trouvera qu’en dernière analyse c’est sur notre caractère que nos croyances reposent. Mais nos croyances se rattachent aussi, par un autre côté, à « l’activité automatique de notre intelligence ». Mémoire, habitude, association produi- sent en nous de véritables tendances à croire. La mémoire et l’habitude implantent en nous les idées par la répétition. Les lois de l’association font, comme l’a montré M. Paulhan, qu’une idée est acceptée ou rejetée par les éléments psychologiques selon qu’elle peut ou ne peut pas s’unir à eux pour une fin commune. Jusqu’ici la volonté n’intervient pas. Mais jusqu’ici nous avons affaire à ce côté de la croyance qui est commun à l’homme et à l’animal. Chez l’homme seul la croyance devient explicite et complète, parce que, seul, l’homme est capable de vouloir. Le rôle de la volonté, plutôt négatif que positif, est d’opé- rer une sélection entre les croyances qui nous arriveraient de divers côtés par les processus qu’on vient de décrire : c’est, par là même, d’exercer sur certaines croyances virtuelles ou possibles une action d’arrêt. De là le rôle considérable de l’attention. La croyance, ainsi envisagée, est un phénomène complexe ; elle suppose la formation progressive de représentations qui viennent s’offrir à nous et solliciter notre adhésion : il faut, pour que la croyance se constitue définitive- ment, que nous ayons adopté l’une d’elles. L’auteur consacre un chapitre intéressant à ce qu’il appelle « le temps de croyance ». On reconnaît le mo- ment précis où la croyance est constituée à ce qu’elle est devenue une force agissante ; une source d’action. L’action est le critérium de la croyance. On peut se faire illusion sur sa croyance, on peut croire qu’on croit, alors qu’on se borne à répéter les mots sans vivre réellement la chose. On n’est sûr de croire Henri Bergson (1902), “ Camille Bos — Psychologie de la croyance ” 6 que lorsqu’on a fait passer sa croyance dans sa vie. « La croyance et l’action sont substituts l’un de l’autre ; croire c’est se retenir d’agir, et agir c’est traduire au dehors sa croyance. » L’auteur est ainsi amené à parler des croyances « implicites », et aussi des croyances « abstraites ». Il entend par croyances implicites ces croyances qui sont vécues par nous à tout instant de notre existence consciente, encore qu’elles ne soient pas distinctement formulées. L’acte le plus simple, le plus spontané, comme celui de manger, implique une certaine croyance générale à la réalité de la vie, croyance qui résulte, dit finement l’auteur, d’une espèce « d’impératif vital ». En outre, les croyances particulières qui vont à tel ou tel objet sont autant d’espèces taillées dans des genres plus vastes, et si l’on considère ces croyances très générales, on verra qu’elles servent de substrat aux autres, quoiqu’elles passent le plus souvent inaperçues. Telle est la croyance de chacun de nous à l’existence de son corps, à l’existence de sa personnalité : cette dernière croyance, impliquée, en un certain sens, dans toutes les autres, en un autre sens les suppose, notre personnalité étant la syn- thèse même des éléments dont toute croyance est faite. Telle est aussi notre croyance à l’existence des autres êtres et à la réalité du monde sensible, notre croyance au passé et à l’avenir. Par croyances « abstraites », l’auteur entend les croyances métaphysiques et religieuses, et il aurait aussi bien pu les appeler « concrètes », car il n’en est pas, comme il le montre avec beaucoup de justesse, qui impliquent une plus grande richesse d’éléments combinés. Dans la croyance religieuse, c’est la personnalité entière qui donne, alors que nous n’allons à tout le reste qu’avec une partie de nous-mêmes. De là la profondeur du sentiment religieux ; de là aussi le timbre différent, en quelque sorte, qu’il prend chez les différentes per- sonnes, selon le nombre et la nature des harmoniques qui viennent renforcer le son fondamental. uploads/Philosophie/bergson-henri-psychologie-de-la-croyance.pdf

  • 45
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager