© Camion Blanc, 2010 www.camionblanc.com ISBN : 978-2-35779-062-9 Dépôt légal :
© Camion Blanc, 2010 www.camionblanc.com ISBN : 978-2-35779-062-9 Dépôt légal : mai 2010 Tous droits réservés. Crédits Photos : Couverture : Amon Amarth, Hellfest 2009, © Michel Janvier Quatrième de couverture : Korpiklaani, Raismes Fest 2008, © Michel Janvier Pages intérieures : p. 100 à 111 : © Romain Mallard Autres : © Michel Janvier Préface Si depuis les années soixante-dix la sociologie anglo-américaine s’est beaucoup intéressée aux subcultures, à qui nous laisserons leur appellation anglaise pour ne pas les rabaisser à des « sous-cultures », la situation française est beaucoup moins florissante, surtout si ces subcultures ont le malheur de se constituer autour de musiques rock ou assimilées. Et si, de surcroît, ces musiques ne constituent qu’une frange peu valorisée du rock, comme le metal, le silence est presque total. Nicolas Walzer, ouvrage après ouvrage, relève avec courage ce double défi, en s’intéressant à l’évolution esthétique et thématique du black metal. Si l’imaginaire satanique a accompagné les premiers âges de cette musique, c’est aujourd’hui vers le paganisme que ses amateurs, musiciens comme publics, se tournent. On sort impressionné de la lecture de cet ouvrage, non seulement par la connaissance intime que Nicolas Walzer possède du black metal et du milieu païen français, mais aussi par la nature complexe, imprévisible et fascinante des liens qu’il met à jour. Ce monde, invisible pour la grande majorité des Français, se met sous sa plume à exister, les voix d’obscurs amateurs se font entendre, intelligentes, passionnées, à qui il accorde autant d’importance qu’aux prestigieux auteurs qu’il convoque pour mieux comprendre son sujet. Avec justesse et pertinence et sans fausse complaisance ni sentiment de supériorité, Walzer analyse une communauté, ses convictions, ses croyances, ses errements aussi. Un tel respect pour son sujet et une telle précision dans l’observation méritent d’être salués. Voici un ouvrage qui contribuera à une meilleure connaissance des particularismes du tissu musical français et d’une mouvance mal connue. Il reste à espérer qu’avec de telles publications le peu d’estime dans lequel est encore tenue aujourd’hui en France l’étude des subcultures finisse par disparaître définitivement. Claude Chastagner Agrégé d’anglais, traducteur Professeur de civilisation américaine à l’Université Paul Valéry - Montpellier III Auteur de La loi du rock, Climats, 1998. Introduction À quoi sert d’étudier le metal ? Retour sur des interrogations « Ce que nous faisons n’est jamais compris, mais toujours seulement loué ou blâmé » (Nietzsche, Le Gai Savoir, § 264) Comme le rock, on ne peut plus étudier le metal que par différentes entrées thématiques. En effet, il est devenu si complexe et si diversifié entre les quelques black métalleux d’origine européenne très à droite fans de Graveland, adeptes des chalets en forêt, et les rappeurs-métalleux d’origine africaine, d’extrême gauche, avides d’urbanité et fans de Rage Against The Machine ; entre le métalleux de 60 ans fan d’AC/DC depuis leurs débuts à l’adolescent de 14 ans fan du néometal de Slipknot… Inscrire le metal dans des thèmes partagés par un public plus large, rappeler à quel point en étudiant les subcultures on en apprend sur la société en son entier, ce fut le sens de nos ouvrages personnels antérieurs : Satan profane. Portrait d’une jeunesse enténébrée, Desclée de Brouwer, 2009 et Anthropologie du metal extrême, Camion blanc, 2007. Ils semblent avoir été reçus dans une logique d’attrait/rejet1. Digne d’une étude à elle-seule, passionnante à analyser, celle-ci s’explique par le fait que les métalleux oscillent constamment entre indignation face à leur traitement médiatique et jouissance élitiste de voir qu’ils suscitent interrogations, inquiétudes et parfois peurs. Ils prennent plaisir à jouer de leur image extérieure car ils pensent pouvoir la manipuler lorsque par exemple ils s’affirment vampires et sacrificateurs d’animaux au journaliste qui vient les interviewer en deux minutes un après-midi devant la Fontaine des Innocents à Paris. Le sociologue qui met le doigt sur cette tendance ne peut au départ que susciter des réactions très contrastées. Devant ces tiraillements mêlés souvent d’incompréhension, il est utile de rappeler brièvement en quoi consiste la sociologie. Elle n’est pas là pour « enfermer » des comportements par définition complexes et changeants (en effet certains éprouvent souvent un malaise vis-à- vis des étiquettes). Il s’agit juste d’outils méthodologiques pour permettre de mieux réfléchir et débattre. Le sociologue met en relief ses données ethnographiques (ses descriptions de terrain) grâce à une série d’outils épistémologiques. Autrement dit, les travaux de ceux qui l’ont précédé l’aident pour analyser un cas particulier. Il s’agit donc de bâtir des fondations saines permettant un débat contradictoire. Avec des fondations branlantes, la recherche s’écroule… Avant tout, savoir poser les bonnes questions en n’ignorant pas qu’elles n’auront jamais de « réponses » au sens mathématique. Le chercheur n’assène donc pas un verdict péremptoire mais des propositions pour structurer une réflexion, car les livres sociologiques sont une invitation à la compréhension de l’altérité. En ce sens, ils espèrent être utiles à ceux qui en attendent une meilleure compréhension de l’espace social en question, voire d’eux-mêmes. Le sociologue photographie des personnes sachant très bien que les clichés seront à réévaluer, à réajuster, à critiquer à partir d’un certain moment. C’est la position inverse : une sociologie qui serait surplombante, trop sûre d’elle, est suspecte (le philosophe Karl Popper avec son critère de réfutabilité l’a bien démontré). L’idée n’est pas extraordinaire, il s’agit juste de susciter le dialogue à partir d’une position argumentée, distanciée et réfléchie (cf. la célèbre phrase de Durkheim : « nous estimerions que nos recherches ne méritent pas une heure de peine si elles ne devaient avoir qu’un intérêt spéculatif »). Le sociologue tâche d’étudier le satanisme ou le paganisme comme n’importe quel courant de pensée. En lisant ses travaux, chacun se fait sa propre opinion. Ce qu’il apprend à l’université ne revient pas à se « remplir la tête ». C’est avant tout une méthode pour savoir gérer, réfléchir sur la ligne entre objectivité (qui n’est pas un sésame indépendant, il n’existe pas une Objectivité idéale au sens de Platon) et subjectivité. Comment gérer sa présence sur un terrain de recherche et le fait qu’elle va nécessairement induire des comportements un peu différents. L’observateur influence l’observé comme l’observé influence l’observateur, c’est ce qu’on appelle en termes freudiens le transfert et le contre-transfert. Il faut répondre aussi aux interrogations quant au nombre important d’auteurs cités dans nos travaux. Quelques lecteurs pensent alors que nous n’avons pas de réflexion personnelle voire que nous nous abritons derrière des grands chercheurs en sciences sociales. Immédiatement, il faut souligner avec force que la pensée personnelle privée de tout référent est simplement impossible. Cela est valable même sur un plan plus large : que nous le voulions ou non, nous sommes tous issus d’un « formatage » particulier du fait de notre culture, de notre milieu d’origine et de notre éducation – toutes choses sur lesquelles nous n’avons eu aucune prise. Le fantasme du penseur solitaire, intègre dans sa tour d’ivoire, qui voudrait livrer au monde le fruit de réflexions absolument neuves et pures est dangereux car il renvoie à un autre fantasme : celui de la pureté absolue qu’on étudiera justement dans ce livre. Pour grossir le trait, le chercheur est comme un récipient qui se remplit de références qu’il va ruminer pour ensuite livrer sa propre interprétation des grands noms de sa discipline et peut être en dévoiler des aspects cachés grâce au reflet que lui aura projeté un terrain de recherche original. La recherche en sciences sociales comme en sciences dures est toujours le fruit d’un effort collectif. Le sociologue entérine les travaux de ses prédécesseurs pour investiguer un domaine plus pointu qu’ils ont peu ou pas étudié. Sous ces conditions, il y a donc vraiment possibilité de produire un travail inédit et c’est ce que nous pensons avoir réalisé avec nos livres. Ils sont d’ailleurs lus et cités par des étudiants qui choisissent à leur tour de se pencher sur d’autres thèmes non explorés. Nous espérons justement leur donner des pistes implicitement dans le développement et explicitement en conclusion. Qu’ils puissent « faire leur miel » (Nietzsche) de nos travaux. À l’échelle internationale, les études sur le metal ont à peine vingt-ans, en France pas même dix ans ce qui apparaît dérisoire par rapport à la profusion des travaux sur le jazz, le rap sans parler du classique. Ainsi peut-on décrire très brièvement la dette que chaque chercheur contracte envers ses aînés. Il sème des graines à la fois à l’intérieur de l’espace social qu’il étudie, mais aussi, espère t-il, en dehors pour que les deux puissent se rencontrer et échanger… En souhaitant que les graines/livres se développent et rencontrent un public, c’est-à-dire apportent quelque chose à quelqu’un, tout simplement, et surtout nourrissent des avis contradictoires – seul signe de la portée d’un travail. Ce fut le cas de notre Anthropologie du metal extrême et de notre Satan profane et nous voulons simplement ici remercier grandement les lecteurs de leur intérêt. L’éditeur qui permet la création de cette rencontre est tout autant à remercier. Il est si rare aujourd’hui qu’une maison accepte de uploads/Philosophie/ du-paganisme-a-nietzsche-se-construire-dans-le-metal-by-nicolas-walzer-walzer-nicolas-z-lib-org-epub.pdf
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- Publié le Apv 07, 2021
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