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lundim ma at ti in n Une explicitation du mécanisme politique de génération de l’inégalité : « La racisation » [Les cahiers de vacances de Jacques Fradin] Jacques Fradin - paru dans lundimatin#349 (5-septembre), le 7 septembre 2022 ANALYSE POLITIQUE DE L’ÉCONOMIE [4/4] Pour nir les vacances et donc les révisions, Jacques Fradin nous propose ce cas pratique : penser l’inégalité et la hiérarchie, depuis le concept de racisation. La première partie de ces révisions estivales est accessible ici < https://lundi.am/Analyse- politique-de-l-economie-1-4 > , la seconde là < https://lundi.am/Analyse-politique-de-l-economie-2-4 > et la troisième par-là->https://lundi.am /Analyse-politique-de-l-economie-3-4 < https://lundi.am/Analyse-politique-de-l-economie-3-4 > ]. Comme les épisodes précédents de la série restaient, faute de place, théoriques ou abstraits, nous proposons un supplément, an d’expliciter par un exemple, celui de « la racisation » (« racecraft »), les différentes analyses de l’inégalité, que nous avons précédemment développées (dans les épisodes 1 & 2). L’ouvrage remarquable de Barbara Fields & Karen Fields, Racecraft ou l’esprit de l’inégalité aux États-Unis (2012, traduction française 2021) [1] nous servira d’appui pour cette explicitation. Où « la racisation » sera analysée comme une expression possible (et bien développée) d’une constitution sociale politique inégalitaire et hiérarchique. Pour comprimer les thèses que nous développerons un tout petit peu (en renvoyant à l’ouvrage Racecraft pour une analyse complète) : L’inégalité peut s’exprimer en termes de « racisation » ou de constitution politique de « races » ; l’inégalité précède toujours « la race » (« race » qui est une construction politique) ; La reconstitution permanente de l’inégalité (l’accumulation primitive permanente) peut s’exprimer en termes de « guerre des races », forme particulière du « diviser pour régner ». « Guerre des races » ou, plutôt, lutte pour la suprématie supposée « raciale », lutte pour la domination, en utilisant un prétexte « racial ». Le despotisme est un gigantesque système hiérarchique reposant sur une classication inégalitaire minutieuse ; classication obsessionnelle dont nous avons vu, que dans le capitalisme, elle pouvait prendre une forme numérique. L’imposition, de force, de la hiérarchie, également maintenue de force, conduit à un apartheid généralisé. Les seigneurs dominants considèrent toujours les inférieurs dominés, state par strate, comme des « êtres à part », des êtres inférieurs, intermédiaires entre les « vrais humains » (les oligarques et toute strate supérieure) et les bêtes de somme. Souvent, même, ces « intermédiaires semi-humains » sont désignés comme des bêtes : brutes, sales, incultes. Apparaît immédiatement le lexique social-politique de « la race » : les « êtres à part », ni humains ni bêtes, mais, cependant, bestialisés, forment « une sale race ». La racisation, la caractérisation politique des strates sociales inférieures en termes de « races », « races inférieures » évidemment, correspond à la bestialisation. Nous avons un orilège de dénominations injurieuses ou dépréciatives : poux, rats, teignes, etc. « La race » n’est pas, instantanément, liée à une « couleur » ou une apparence, « le faciès », mais est liée à une position hiérarchique : celle du perdant, du raté (qui renvoie au rat), le si fameux loser. La position hiérarchique inférieure correspondant à un revenu (très) inférieur et, ainsi, à une « mauvaise présentation », en termes d’habillement ou de santé buccale, par exemple. C’est la constitution historique, politique ou militaire, de l’inégalité qui génère la classication raciale (avec « la race » imaginaire ou social symbolique : une construction sociale au moyen d’une guerre civile ou coloniale). Ce n’est jamais « la race », supposée donnée a priori (par la couleur, par exemple), qui détermine la position hiérarchique (cette position dominée résulte de la guerre pour la stratication hiérarchique et son maintien). « La race », comme l’esclavage, qui est lié à « la race », est l’effet d’une défaite dans un conit, civil ou colonial, la grande guerre de colonisation (que nous avons analysée dans le premier épisode). Pendant très longtemps, les esclaves, « ceux qui ont perdu », n’étaient pas dénis par une couleur ; ils étaient de même apparence (et plus) que les maîtres. Ce qui distinguait les esclaves des maîtres était une position hiérarchique, appuyée par la force et légitimée par la métaphysique (ou l’idéologie) : Aristote et l’esclavage. Beaucoup plus tard, lorsque certains maîtres (les planteurs coloniaux) ont eu besoin de main d’œuvre servile (ou sous-payée), après avoir exterminé « les indiens » locaux, et que des traquants capitalistes, « négriers », leur ont offert des « nègres », des Africains faits prisonniers ou raés, s’est produit une compression entre « l’esclave » (l’inférieur absolu) et « le nègre ». Toute une histoire « raciale » de « racisation » ou de « coloration » des catégories inférieures. Mais « le nègre » n’était pas naturellement esclave ; il l’est devenu à la suite de campagnes répétées de déportations (encore le thème de l’accumulation primitive répétée ; et de la richesse des « pôles négriers », des villes négrières, des entreprises négrières, des plantations coloniales, etc.). Introduisons quelques propositions, pour cadrer l’explicitation. Soit « la race ». Au sens biologique, génétique, l’humanité constitue une unité, biologique, génétique. En ce sens « les races » n’existent pas [2]. Les « différences » biologiques, génétiques, sont des différences individuelles et non pas « raciales » : tous les individus sont « différents » biologiquement, génétiquement (ce qui rend la médecine si difcile). Ces différences individuelles, génétiques, s’inscrivent dans une unité, l’humanité. Il n’existe pas de classes d’individus qui seraient séparables (ou « ségrégables ») par leur simple apparence de couleur. Il peut exister des catégories (ou des classes statistiques) dénies par telle ou telle combinaison génétique (comme la classe des porteurs de telle ou telle maladie génétique) ; mais la détermination de ces classes implique de lourdes analyses, génétiques ou biologiques et ne renvoie pas à une apparence (de couleur). Mis à part le symptôme visible, quand il l’est, l’analyse génétique pénètre un domaine invisible, celui de la génétique, qui exige un travail de recherche scientique. Et ce travail d’analyse ne renvoie jamais à une catégorie sociale politique comme « la race ». Si, donc, on prend « race » au sens d’apparence visible, comme la couleur (« le drapeau »), cette apparence macroscopique soit correspond à un déterminisme génétique limité à la pigmentation (héréditaire) soit ne correspond à rien : on ne peut lier la couleur et l’intelligence ou la criminalité ou la violence (pour reprendre des poncifs « racistes ») [3]. Il n’y a pas de déterminisme génétique derrière les catégories sociales ou morales ordinaires ; comme la criminalité ; il est impossible de dire : « le noir » ou « le nègre » est un criminel né ! Ceci doit être considéré comme un acquis. Pour le dire à la manière ordinaire et « raciste inversée » : « les races » n’existent pas, au sens biologique ou génétique. Mais ce qui nous concerne socialement, moralement ou politiquement, n’a rien à voir avec la génétique. L’afrmation qu’il y a « des races » ou des différences raciales, cette afrmation n’est pas une afrmation scientique, biologique ou génétique. Précisément le terme « race » n’est pas déni scientiquement ; il correspond à une catégorisation sociale, politique ou morale ; telle que l’expression « sale race » l’indique. Comme nous l’avons dit, ce terme social politique de « race » n’est pas nécessairement lié à une « couleur » ; « la guerre des races » entre les Normands (les supérieurs des châteaux) et les Saxons (les inférieurs, les bouseux de la fange) est un exemple de dénition sociale ; ou de psychologie sociale de bazar : les Teutons ! Lorsque « la race » est entendue comme division sociale, elle peut être l’expression de cette division : « la race » des pauvres. Si on prend le terme « race » au sens d’une construction sociale, sans aucune base biologique, on pourra dire que la division sociale, la hiérarchie, est « racisée ». Ainsi il peut être afrmé que « les paysans pauvres sans terre » (les journaliers) constituent « une race ». Toute la stratication sociale, la hiérarchie, peut emprunter le vocabulaire de « la race ». Et, ainsi, se cacher derrière ce lexique « racial » ; plaçant « la race » imaginaire comme explication de l’inégalité (en inversant le sens de l’explication). Ici « race » signie « classe », au sens du classement hiérarchique. Pour combiner le maintien des références sociales, politiques, morales, à « la race », pour légitimer la diffusion contemporaine des nouvelles « pratiques racistes » ou de racisation ET l’impossibilité scientique de dénir « la race » (comme nœud d’un déterminisme génétique du social), il faut considérer que le terme « race » n’a plus qu’un sens politique ou moral. « La race » est un objet social symbolique. Voire un terme idéologique. Développé pour masquer la question de l’inégalité La démonstration du caractère vide de l’idée de « race », démonstration faite du point de vue scientique, biologique, génétique, cette démonstration uploads/Politique/ analyse-politique-de-l-x27-economie-4-4.pdf

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