LE POUVOIR POLITIQUE Tout pouvoir n'est pas politique. Les sphères économiques,
LE POUVOIR POLITIQUE Tout pouvoir n'est pas politique. Les sphères économiques, militaires, religieuses... connaissent elles aussi des phénomènes de pouvoir. Le pouvoir politique est celui qui s'exerce dans l'État. De nos jours, l'État n'est plus le seul cadre de ce pouvoir : du fait de la décentralisation, il s'exerce aussi au niveau local, infra-étatique et, du fait de la construction européenne, supra-étatique (institutions européennes). Un pouvoir est politique quand il règle des questions politiques. Un problème devient politique sous la pression de différents acteurs (responsables politiques, opinion publique, médias) quand il est transformé en enjeu politique. Le pouvoir politique est fait de choix, il choisit de traiter un sujet intéressant la cité. C'est aussi un pouvoir politique cherchant à faire triompher l'intérêt général sur la volonté des individus. Toute analyse du pouvoir politique suppose au moins que l'on se pose deux questions : • Qu'est-ce que le pouvoir politique ? • Quelles formes prend-il ? CHAPITRE 1 : L'IDENTIFICATION DU POUVOIR POLITIQUE Toutes les sociétés humaines connaissent des rapports de commandement / obéissance ; certains individus / groupes ont la capacité d'orienter le comportement de l'ensemble de la collectivité, d'élaborer des règles imposées à l'ensemble de la société. L'activité de gouverner est fondée sur une relation de pouvoir entre gouvernant et gouverné. Le pouvoir est à la fois un objet de compétition et un moyen de domination. Pour cerner le contexte de pouvoir, on peut employer diverses approches : • Institutionnelle -> pouvoir de l'État / dans l'État ; • Idéologique -> pouvoir des classes / groupes, perçu comme mode de domination d'un groupe social pour s'imposer sur les autres (Marx, Bourdieu) ; • Sociologique -> pouvoir envisagé comme une relation entre acteurs sociaux fondée sur la contrainte et la légitimité (relation asymétrique). Pourquoi les gouvernés obéissent-ils ? D'où provient cette légitimité des gouvernants ? À quelles conditions un pouvoir est-il perçu comme légitime ? Section 1 : pouvoir, domination et légitimité §1. Définitions Des relations de pouvoir peuvent être observées à tout niveau de la société (mais tout pouvoir n'est pas politique) ; elles associent des acteurs ayant des intérêts différents. Le pouvoir politique concerne les relations coercitives qui s'exercent au nom des affaires collectives : le plus souvent, il s'appuie sur une conception de bien commun, d'intérêt général. Il suppose l'existence d'un gouvernant s'exerçant sur un territoire et une population donnés. Il suppose également des individus et des institutions politiques, ce qu'on appelle l'appareil d'État : ce sont des structures politiques et administratives qui exercent le pouvoir politique. Il existe plusieurs façons d'appréhender le pouvoir : en droit constitutionnel, on adopte une approche institutionnelle (analyse des fondements et limites du pouvoir des gouvernants). Mais les associations et les groupes sociaux, les groupes de pression, les partis politiques sont importants : il faut ajouter à cette approche une approche sociologique. Celle-ci perçoit le pouvoir comme une relation entre des individus et des groupes. Comment obtient-on l'obéissance ? Les théories du pouvoir politique ont recours à deux concepts : la légitimité et la contrainte : • La légitimité est la reconnaissance accordée à celui qui exerce un pouvoir. On accepte comme normal, naturel, juste, souhaitable, que cet acteur / détenteur du pouvoir donne des ordres, prescrive des comportements. • La contrainte permet aux gouvernants d'utiliser divers moyens dont le possible recours à la force pour faire triompher leur volonté en absence / par manque de légitimité. Mais ces deux notions ne sont pas antinomiques, les détenteurs de pouvoir ont souvent besoin des deux. Ces notions ont été clairement identifiées par Max Weber. Il fait une distinction entre puissance et domination : • La puissance correspond à la chance que possède un acteur d'imposer sa volonté à un autre acteur, et ce même contre la résistance de l'acteur. Dans ce cas, le commandement n'est pas obligatoirement légitime. La soumission peut être arrachée, imposée. La notion de puissance décrit la relation sociale permettant de faire triompher la volonté de celui qui l'exerce. • La domination permet d'introduire la notion de consentement. Les dominés doivent accepter que les dominants exercent sur eux une domination. Dans ce cas, l'obéissance est fondée sur la reconnaissance du caractère légitime des ordres prescrits. Les gouvernés considèrent l'intervention des dominants comme légitime. Ce concept est inséparable de la légitimité : toute domination suppose une part plus ou moins consciente de croissance collective en la légitimité de cette domination. Weber se penche sur les types de domination. La soumission au pouvoir repose sur la reconnaissance de la légitimité de ces ordres par ceux qui y obéissent. Un pouvoir est dit légitime lorsqu'il repose sur le consentement de ceux qui y sont assujettis. La première force d'un pouvoir légitime, c'est sa capacité à recueillir l'obéissance volontaire, plus que sa capacité à contraindre les gouvernés. La légitimité est le caractère de toute domination qui semble juste, normale, habituelle. Est légitime ce qui correspond aux valeurs dominantes dans une société. La légitimité revendiquée détermine la manière dont s'exerce la domination. On peut donc établir une distinction des modes de domination à partir des types de légitimité. §2. Les types de domination selon Max Weber Weber fait appel à la notion d'idéal-type désignant un ensemble de concepts abstraits, tirés de l'observation et la décomposition par l'analyse sociologique des situations réelles. Ces idéaux-types permettent ensuite de mieux comprendre le fonctionnement de la société observée. A) La typologie de Weber Pour Weber, il existe trois idéaux-types de domination légitime. On peut les isoler mais les situations sociales concrètes se caractérisent toujours par une combinaison de ces types, même si l'un est dominant en fonction des contextes. La domination légale rationnelle : Les gouvernés consentent à un ordre légal, le rendant légitime. Dans ce type de domination, l'appareil administratif est perfectionné, hiérarchisé, les compétences sont déterminées. L'exercice du pouvoir est fondé sur la compétence juridique des agents, est organisé à l'avance par des textes répartissant ces compétences selon un principe hiérarchique. Weber prend comme exemple l'État bureaucratique moderne. Cette domination caractérise le fonctionnement des sociétés contemporaines. Le pouvoir est organisé par des règles écrites définissant les droits et devoirs des gouvernants et gouvernés. Les gouvernants agissent conformément aux normes car toute transgression menacerait la légitimité à exercer le pouvoir, tandis que les gouvernés ne sont tenus d'obéir que dans la limite de la réglementation du pouvoir. Les gouvernants peuvent gouverner car ils ont été choisis par des procédures conformes à la Constitution. Il y a une forme de dépersonnalisation dans l'exercice de la domination. On obéit à des règles et des fonctions plus qu'à des individus, conduisant à une juridicisation des rapports de pouvoir car la légitimité de l'État repose sur le fait qu'il se soumet lui aussi à des règles de droit qu'il produit et qui sont jugées comme universelles. De plus cet État de droit accepte de se soumettre au contrôle de juridiction constitutionnel. La domination traditionnelle : Elle repose sur la coutume et la tradition. Elle fonde son autorité sur l'obéissance à des coutumes « sanctionnées par leur validité immémoriale ». Elle puise sa légitimité dans les coutumes et repose sur l'habitude que les acteurs ont de respecter ces coutumes. Celui qui exerce le pouvoir est légitime car il puise sa légitimité dans les coutumes, car il y a adéquation entre sa nomination et les coutumes reconnues par le droit. Bien sûr, tout cela dépend de la force de la croyance en la tradition. Au fil des ans, les institutions deviennent naturelles, suscitent des réflexes d'obéissance. Il n'existe pas de texte codifiant le pouvoir, celui-ci est intériorisé dans les individus. Il finit par être naturel et nécessaire car se perpétue. Exemples : domination de la société féodale, monarchie de l'Ancien Régime, les sociétés dans lesquelles existait une forte personnalisation du pouvoir. La coutume est donc une contrainte pour le gouvernement, le dominant doit agir conformément aux valeurs établies. La domination charismatique : La légitimité provient alors de l'aura, des qualités exceptionnelles du dirigeant, liée à un individu et surtout au fait que les gouvernés croient / reconnaissent ses qualités. On obéit à un individu parce qu’il est doté de qualités hors du commun. La domination politique est donc fondée sur la croyance, dans le caractère exemplaire d'un chef. L'adhésion populaire est d'ordre personnel, affectif. La domination charismatique repose sur « la soumission au caractère sacré, à la vertu héroïque ou à la valeur exemplaire d'une personne ou encore émanant d'un ordre révélé de celle-ci. Les qualités exceptionnelles du leader, son charisme, justifient sa position de gouvernant aux yeux des gouvernés ». Cela dépend du contexte, d'un caractère historique rendant la population réceptive à ce type de domination. Le chef impose un contact direct avec le peuple et peut parfois court-circuiter les institutions. Cette forme de légitimité est fragile car elle doit être confirmée régulièrement pour être gardée. Il y a un risque de « routinisation du charisme ». Cette domination est souvent précaire et limitée dans le temps, elle disparaît en même temps que le leader qui l'incarne. Cette domination peut se combiner uploads/Politique/ cours-de-sciences-politiques.pdf
Documents similaires










-
29
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Oct 28, 2021
- Catégorie Politics / Politiq...
- Langue French
- Taille du fichier 0.5562MB