Les termes du débat féministe Nicole Van Enis Une étude Barricade 2010 Avec le

Les termes du débat féministe Nicole Van Enis Une étude Barricade 2010 Avec le soutien de la Communauté française de Belgique et de la région Wallonne Table des matières TABLE DES MATIÈRES.........................................................................................................................3 AVANT-PROPOS.......................................................................................................................................5 CERNER LES FÉMINISMES.................................................................................................................7 IL N’Y A PAS « UN » MAIS « DES » FÉMINISMES................................................................................................8 LE FÉMINISME CONCERNE LES HOMMES ET LES FEMMES......................................................................................8 L’ENJEU DU FÉMINISME EST POLITIQUE..........................................................................................................10 LES FEMMES NE SONT PAS UNE CATÉGORIE DE LA POPULATION...........................................................................10 LE FÉMINISME EST TRANSVERSAL À TOUTES LES AUTRES LUTTES SOCIALES..........................................................10 UNE CLASSIFICATION PAR « VAGUES »..........................................................................13 LE PRÉFÉMINISME : UN PREMIER ESSAI DIFFICILE.............................................................................................15 PREMIÈRE VAGUE : LES DROITS CIVILS ET POLITIQUES......................................................................................15 DEUXIÈME VAGUE : LA LIBÉRATION INDIVIDUELLE ET SEXUELLE........................................................................17 TROISIÈME VAGUE : LE RÉSEAU GLOBAL........................................................................................................18 UNE CLASSIFICATION PAR COURANTS POLITIQUES ............................................................22 LE FÉMINISME LIBÉRAL-ÉGALITAIRE..............................................................................................................23 LE FÉMINISME DE TRADITION MARXISTE.........................................................................................................23 LE FÉMINISME RADICAL..............................................................................................................................25 LE FÉMINISME POST-MODERNE OU « POST-FÉMINISME »...................................................................................26 LE FÉMINISME ENVIRONNEMENTALISTE OU « ÉCOFÉMINISME »...........................................................................29 LE BILAN................................................................................................................................................31 Asbl Barricade Rue Pierreuse 19-21, B-4000 Liège +32 (0)4.222.06.22 info@barricade.be www.barricade.be 2 Avant-propos Cette étude traitera des différents points de vue débattus au sein du mouvement féministe. Il sera cependant impossible d’être exhaustive tant les contributions à ce débat sont foisonnantes. Au cours du siècle dernier, le féminisme s'est construit et a évolué dans le contexte politique et économique mouvant des deux guerres, de la révolution culturelle de mai 68 et des bouleversements climatiques entraînant les catastrophes humaines annoncées. Des concepts se sont forgés et ont permis de mieux cerner les enjeux de l'émancipation des femmes, tels celui de patriarcat ou celui de genre. Des observateurs de toutes disciplines soulignent les changements et les mutations culturelles au sein de nos sociétés occidentales où les questions de bien-être individuel et de développement personnel ont peu à peu pris la place des recherches de solutions collectives. Le féminisme, dans sa particularité de démarche émancipatrice, tient compte de ces deux pôles, c'est l’une de ses grandes richesses mais c'est peut-être aussi une des raisons des reproches qu’on lui fait si souvent. Le féminisme serait dépassé, selon certain-es, il aurait fait « fausse route » et serait devenu obsolète alors que, par ailleurs, d'autres voix appellent à la vigilance, les conquis n'étant pas forcément protégés par les lois contre des attaques et des reculs. Alors que certains proclament la mort du féminisme, des rapprochements se sont opérés entre femmes du nord et du sud au cours des dernières décennies. Ces alliances fécondes annoncent une adaptation créative pour la transition économique inéluctable. Par ailleurs, devant ces avancées majeures pour les femmes, se profilent des réactions aux difficultés identitaires des hommes. Les défis restent grands. De nombreux ouvrages sont publiés chaque année sur le féminisme, ses conséquences et son actualité mais notre modeste ambition ici est de permettre d'y voir un peu plus clair dans les composantes variées de ce vaste mouvement social. Pour ce faire, nous proposerons ici deux typologies de présentation, deux classifications, du débat féministe qui ont chacune leur intérêt. La première présente le mouvement sous forme de trois vagues (précédée d'une période préféministe) qui se succèdent dans le temps, avec des revendications distinctes et des droits conquis, il s'agit donc d'une typologie chronologique. La seconde, intitulée « les courants de pensée féministe », se réfère plus directement à des clivages traditionnellement politiques. Ces deux typologies sont donc complémentaires et éclairent soit les étapes du mouvement, soit les idéologies qui sous-tendent les revendications et les stratégies pour les faire aboutir. Nous voudrions ici écrire quelques mots pour remercier toutes les femmes et les hommes avec lesquels nous avons échangé et débattu, et qui nous ont donc permis de rédiger cette synthèse. L'environnement que constitue l'asbl Barricade, lieu de rencontres et de confrontations est devenu au cours de ces dix dernières années -nous dit-on- incontournable sur la question de l'émancipation des femmes. Par son rayon de livres féministes, ses « midis de l'égalité », ses « cafés féministes » et ses improbables « Witches »1, elle participe au développement du réseau. Depuis 2005, nous coordonnons également la Marche Mondiale des Femmes dans la région liégeoise. Cette expérience, en nous permettant de rencontrer des femmes du monde entier, fortifie notre conviction du bienfondé des principes et des valeurs de l'action du mouvement des femmes, de l'impérieuse nécessité de la prise en compte des propositions du féminisme pour un monde plus juste. Nous ouvrirons la première partie par deux définitions choisies en fonction de l'approche du féminisme comme mouvement social et donc de la mise en avant de son dynamisme. Elles ne peuvent pas rendre compte de la totalité des enjeux du mouvement car ils sont nombreux et très diversifiés. 1 Le WOB, « Sorcières de Barricade », groupe de femmes très animé(es), se réunissant hebdomadairement pour des échanges féministes sous forme de table de conversation en anglais. 4 Cerner les féminismes On trouve de nombreuses définitions du féminisme dans la littérature spécialisée. Le féminisme étant un mouvement social, nous avons choisi d'emblée deux définitions qui mettent en évidence des éléments de mobilisation sociale. Louise Toupin2 met en évidence les différentes étapes nécessaires à la mobilisation des femmes. Cette mobilisation commencerait par une prise de conscience individuelle des inégalités entre hommes et femmes, vécue de manière plus ou moins personnelle, observée ou subie, et déboucherait - pour certain-es - sur une prise de conscience collective, sur la nécessité de mettre des mots sur cette injustice, de trouver des causes à cette situation afin de changer les choses, de faire évoluer les rapports sociaux de sexe. C’est de cette nécessité d’agir collectivement que naît le mouvement des femmes. La révolte qui suit la prise de conscience individuelle apparaît ici comme une condition incontournable du ou des féminismes. Il s’agit d’une prise de conscience d’abord individuelle, puis ensuite collective, suivie d’une révolte contre l’arrangement des rapports de sexe et la position subordonnée que les femmes y occupent dans une société donnée, à un moment donné de son histoire. Il s'agit aussi d'une lutte pour changer ces rapports et cette situation.3 Une autre définition du féminisme, proposée par Ute Gerhard4, souligne également le double mouvement de libération individuelle et de transformation de la société : (Le féminisme est) l’ensemble des tentatives menées par des femmes pour leur reconnaissance, leur autodétermination, leur participation politique et le respect de leurs droits. Un double objectif est poursuivi par le féminisme : d’une part, la libération ou la liberté de décision de chaque femme en tant qu'individu, (...) et d’autre part, la transformation fondamentale de la société et de son ordre des genres. Ces deux définitions plantent le décor et montrent d'emblée que le débat ne se joue pas seulement au niveau des couples ou des relations interpersonnelles, que la question du féminisme est d'ordre politique, qu'elle est transversale à toutes les luttes sociales. Ces 2 Louise Toupin est spécialiste en science politique à l'Institut de recherches et d'études féministes et professeure à l'Université de Laval au Québec. 3 Louise Toupin, (1997), Les courants féministes, Québec, http://netfemmes.cdeacf.ca/documents/courants0.html#t2 4 Ute Gerhard (2004), Concepts et controverses, article paru dans l'ouvrage de Gubin Eliane, et al., Le siècle des féminismes, Paris, Les éditions de l'Atelier, p.48 5 définitions, pourtant non exhaustives, ouvrent de vastes perspectives et soulèvent de nombreuses réflexions. Nous allons tenter de répondre à quelques unes d'entre elles ce qui nous permettra de cerner un peu le sujet et d'appréhender le contexte dans lequel les débats ont lieu et les enjeux sont développés. Ces quelques repères nous permettrons d'aborder ensuite les classifications annoncées. Il n’y a pas « un » mais « des » féminismes La diversité des points de vue, la variété, voire les oppositions justifient l'utilisation fréquente de ce pluriel : les féminismes. Louise Toupin précise : Il n’y a pas de théorie générale du féminisme. Il y a plutôt des courants théoriques divers qui cherchent à comprendre, chacun à sa façon, pourquoi et comment les femmes occupent une position subordonnée dans la société.5 En effet, si le constat d’oppression des femmes est commun, les avis divergent sur les causes de cette situation. Les stratégies de changement également. Dans ce travail, nous utiliserons le vocable féminisme au singulier lorsqu'il désignera le mouvement des femmes, la diversité étant alors portée par le mot femmes. Par ailleurs, on évitera de parler de La Femme, vocable qui nous paraît peu adéquat, dans tous les domaines, compte tenu de la diversité des réalités vécues par les femmes. Plutôt que de parler de LA femme, le nouveau féminisme se réfère toujours aux femmes, féminin pluriel, exprimant davantage la solidarité de groupe et la mobilisation nécessaire pour provoquer un changement de société.6 Le féminisme concerne les hommes et les femmes Le féminisme est un mouvement social qui concerne autant les hommes que les femmes puisqu'il s'agit de rapports sociaux de sexe, de rapports de pouvoir entre eux. Les deux définitions reprises ci-dessus dénoncent l’organisation hiérarchisée des rôles attribués à l’un ou l’autre sexe : l’ordre des genres. Le Dictionnaire critique du féminisme7 écrit ceci : Penser en termes de rapports sociaux de sexe, c'est prendre en compte la diversité uploads/Politique/ etude-2010-les-termes-du-debat-feministe.pdf

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