Volume LXXXIII N 014 www.larotonde.ca éditorial section Didier Pilon redaction@

Volume LXXXIII N 014 www.larotonde.ca éditorial section Didier Pilon redaction@larotonde.ca Il est grand temps que la Ville d’Ottawa de­ vienne une ville officiellement bilingue. C’est bien cette mission que s’est donnée une coalition d’organismes communautaires et provinciaux. Leur proposition – un texte lé­ gislatif bref et accessible – a été dévoilée en début janvier. Ce texte vise à transformer la Politique de bilinguisme ­ d’Ottawa en Règlement ratifié par le gouvernement provincial. Ainsi, l’ac­ cès aux services en français ne sera plus su­ jet au gré ou aux caprices du dernier maire élu. Toutefois, une personne n’est pas convain­ cue : Jim Watson, maire d’Ottawa. L’an dernier, une pétition du RÉFO visant à re­ connaître officiellement le bilinguisme d’Ot­ tawa avait récolté des milliers de signatures. Le maire a toutefois répondu de manière univoque : « On a une politique qui marche bien. » Toutefois, maintenant le dossier ré-ouvert, il devra se prononcer de nouveau sur la question. Il se doit d’entendre l’ensemble de la communauté et de réagir à leur demande. Mais c’est aussi aux citoyens d’Ottawa ­ – francophones, anglophones ou même allo­ phones – de se faire entendre. Un peu de contexte La Ville d’Ottawa, tel qu’on la connait, n’existe que depuis l’agglomération de 2001. D’anciennes municipalités bilingues, comme Orléans et Vanier, y ont alors été in­ tégrées à la communauté urbaine officielle­ ment unilingue. Toutefois, la nouvelle Ville a mis en place dès lors une Politique de bilinguisme. Ce texte d’à peine 650 mots confie ainsi aux citoyens d’Ottawa « le droit de recevoir les services disponibles en anglais et en français dans l’une ou l’autre de ces langues ». À quoi bon résister? À en croire la littérature sur la question, il n’y a aucune dissidence : Ottawa doit être bilingue. Toutefois, dans les rues et les recoins urbains, tout citoyen n’est pas convaincu. Examinons leurs arguments : « Toute les francophones parlent déjà an­ glais! » Cette banalité est si souvent cité qu’on cesse de la questionner. Mais en fait, des milliers de citoyen d’Ottawa ne parlent que français. À Vanier comme à Rideau-Rockcliffe, c’est plus que 5 % de la population. Plus d’un Faisons-nous entendre DIDIER PILON quart de ces gens – souvent âgés, souvent issue d’un groupe minoritaire – vivent dans la pauvreté. Il ne faut pas non plus négliger que plusieurs des 140 000 francophones d’Ottawa se sentent considérablement plus confortable en français. Mais, de manière beaucoup plus impor­ tante, le simple fait de parler anglais ne nie pas son droit de parler français. « Ça coûtera cher à la ville! » Le mythe que le français constitue un far­ deau financier grandiose au Canada semble faire usage. Nulle part n’est-il plus inappro­ prié qu’ici. Le règlement n’augmenterait pas le montant de services offert en français; il garantirait leur continuation. Ainsi, ça ne coûtera pas un cent de plus. « Ça ne changera rien alors? » Au contraire, la proposition législative au­ rait deux conséquences importantes. Dans un premier temps, elle assurerait que la politique actuelle soit respectée. Présente­ ment, il n’y a aucun mécanisme d’appel si la Ville brime les droits linguistiques. De plus, alors que le Conseil municipal peut amen­ der ou même estomper la politique actuelle, un règlement entériné par le gouvernement provincial protégerait les services offerts et attesterait leur pérennité. « La politique actuelle est déjà bonne! » Mais si la politique est si efficace, pourquoi ne pas en faire un Règlement? Politique de la reconnaissance Dans le débat au sujet du bilinguisme municipal, les m é ­ dias font grand cas de telle ou telle lacune matérielle. Par exemple, un article dans cette édition racontera brièvement les péripéties d’une étudiante que voulait avoir accès au budget municipal préliminaire en français. Ces histoires sont importantes dans la me­ sure qu’elles cataloguent des injustices quo­ tidiennes. Toutefois, il ne faut pas négliger l’importance de la dimension symbolique du problème puisque c’est cette dimension que donne forme à l’expérience identitaire à Ottawa. La reconnaissance est à la fois un bien psy­ chologique et une force qui façonne notre société. Alors que certains de nos désirs sont matériels (une maison, une voiture, de la nourriture), d’autres sont purement symbo­ liques. Nous voulons ainsi être respecté, que notre opinion soit considérée, que les gens nous trouvent drôle, beau ou intelligent. L’absence de reconnaissance – tel que le témoigne l’histoire du colonialisme et de la discrimination systémique – a des effets néfastes sur les individus et les groupes identitaires qui se traduisent souvent en inégalité matérielle. C’est dans cette optique que Charles Taylor affirme que la reconnais­ sance est « un besoin vital ». En bref, la méreconnaissance est un juge­ ment de valeur : cette culture est moins importante; cette culture est inférieure. Ce discours implicite est intériorisé par les ci­ toyens, tant les membres de la culture majo­ ritaire que les membres des groupes mino­ ritaires. De ce fait, un traitement inégal des minorités s’infiltre dans d’autres sphères et ces individus « apprennent leur place ». Comment contrer cette dynamique? Il faut lutter pour l’affirmation des identités mi­ noritaires. Signons la pétition du RÉFO. Manifestons-nous sur les médias sociaux. Écrivons aux médias et au bureau du maire. Bref, faisons-nous entendre. ILLUSTRATION : ANDREY GOSSE www.larotonde.ca ACTUALITÉS section Frédérique Mazerolle actu2@larotonce.ca www.larotonde.ca À la mi-décembre dernière, alors que la grande majo­ rité de la popu­ la­ tion de l’Uni­ ver­ sité d’Ot­ tawa se prépa­ rait pour des fêtes sans neige, une tempête était sur le point de s’abattre sur la haute admi­ nis­ tra­ tion de l’U d’O. Après plusieurs mois de silence insti­ tu­ tion­ nel, l’As­ so­ cia­ tion des profes­ seurs à temps plein de l’Uni­ ver­ sité d’Ot­ tawa (APUO) demande une fois pour toutes à l’U d’O de s’ex­ pliquer devant les tribu­ naux en ce qui concerne les hausses de salaire de deux membres de la haute admi­ nis­ tra­ tion, qu’elle juge « illé­ gales » en vertu du gel sala­ rial du secteur public de l’On­ ta­ rio. Un retour sur la saga oppo­ sant pour la première fois les deux partis en cour. Le 27 mars 2015 : la « Sunshine List », palma­ rès annuel offrant un regard iné­ dit sur les sala­ riés du secteur public les mieux payés en Onta­ rio, fait sour­ ciller. En effet, plusieurs grands noms, dont celui du recteur de l’Uni­ ver­ sité, Allan Rock, font partie de la liste. Cepen­ dant, les salaires respec­ tifs de deux membres de la haute admi­ nis­ tra­ tion, soit celui de la vice-rectrice à la recherche, Mona Ne­ mer, et celui du doyen de la Faculté de méde­ cine, Jacques Brad­ wejn, affichent des chiffres fara­ mi­ neux. Plus encore, une anoma­ lie a été remarquée par l’APUO quant au salaire de la vice-rectrice à la recherche, qui est passé de 132 304 $ à 292 058 $ entre 2012 à 2014, soit une hausse de 120 %. Quant à M. Brad­ wejn, il aurait eu droit à une augmen­ ta­ tion de 36 000 $ en deux ans. À l’avis de l’APUO, ces hausses seraient illé­ gales, selon la Loi sur la respon­ sa­ bi­ li­ sa­ tion du secteur pu­ blic de 2010. Après avoir émis de nombreuses lettres ouvertes à l’Uni­ ver­ sité, au Comité exécu­ tif du Bureau des gouver­ neurs, ainsi qu’au ministre de la Forma­ tion et des Collèges et Univer­ si­ tés de l’On­ ta­ rio, Reza Moridi, l’APUO reste sans réponse, ou plutôt, sans réponse satis­ fai­ sante. Le recteur de l’U d’O a répondu à la première lettre adres­ sée à l’Uni­ ver­ sité, soute­ nant « [qu’] en plus d’oc­ cu­ per le poste de vice-rectrice à la recherche de l’Uni­ ver­ sité, Mme Nemer est membre perma­ nente du corps profes­ so­ ral de la Faculté de méde­ cine et cher­ cheuse en méde­ cine cardio­ vas­ cu­ laire. En 2011, le mandat de vice-rectrice à la recherche de la profes­ seure Nemer a été renou­ velé pour cinq ans, et une chaire profes­ so­ rale à la Faculté de méde­ cine lui a égale­ ment été accor­ dée pour la même période. Comme titu­ laire de la chaire, la profes­ seure Nemer reçoit une rému­ né­ ra­ tion annuelle de 30 000 $ en appui à ses tra­ vaux. » Selon Jenni­ fer Dekker, prési­ dente de l’APUO, cette réponse est « redon­ dante » et ne vient pas répondre aux exigences de l’As­ so­ cia­ tion. « Nous sommes telle­ ment, comment dire, insul­ tés par le manque de réponse du Bureau des gouver­ neurs et même du ministre, par qui nous devons pas­ ser pour avoir l’in­ for­ ma­ tion dont nous avons besoin. Main­ te­ nant, la seule ma­ nière de savoir si ces hausses sont bien légales ou non, c’est en amenant ça de­ vant un juge », a expliqué la prési­ dente de l’APUO, lors d’une entre­ vue avec uploads/Politique/ la-rotonde-2015-01-18.pdf

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