L’ANAL YSE DU SCRUTIN LES CARTES DU VOTE, DÉPARTEMENT PAR DÉPARTEMENT PAGES 6­7

L’ANAL YSE DU SCRUTIN LES CARTES DU VOTE, DÉPARTEMENT PAR DÉPARTEMENT PAGES 6­7 MARINE LE PEN, LES RAISONS D’UN SCORE TROP HAUT PAGES 8­11 NICOLAS SARKOZY , UN SORTANT QUI S’ACCROCHE PAGES 12­13 «Amoide convaincre lesélecteurs duFront national» Interviewexclusive JÉRÔME BONNET POUR «MARIE CLAIRE» PAGES 2­4 •1,50 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO9627 MARDI 24 AVRIL 2012 WWW.LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,20 €, Andorre 1,50 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,60 €, Canada 4,50 $, Danemark 26 Kr, DOM 2,30 €, Espagne 2,20 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,60 €, Grande­Bretagne 1,70 £, Grèce 2,60 €, Irlande 2,35 €, Israël 19 ILS, Italie 2,20 €, Luxembourg 1,60 €, Maroc 16 Dh, Norvège 26 Kr, Pays­Bas 2,20 €, Portugal (cont.) 2,30 €, Slovénie 2,60 €, Suède 23 Kr, Suisse 3 FS, TOM 410 CFP, Tunisie 2,20 DT, Zone CFA 1 900 CFA. ParPAULQUINIO Exemplaire Une expression va, pendant ces quinze jours qui nous séparent du second tour, faire florès: «faire la chasse à l’électorat» du Front national. Comme si les 6 millions de Français qui ont déposé un bulletin Marine Le Pen dans l’urne dimanche n’étaient que du gibier dont la chasse ne serait autorisée que pendant deux semaines tous les cinq ans. La logique du scrutin à deux tours impose évidemment aux deux finalistes de s’adresser aux électeurs de leurs concurrents du premier tour, ceux du FN comme les autres. La question n’est donc pas de parler à cet électorat –autant dire qu’il faut changer le peuple– mais comment François Hollande et Nicolas Sarkozy choisiront de le faire. Le président sortant a, pendant sa campagne de premier tour, fait le choix de l’amalgame: inquiétudes justifiées et angoisses fantasmées, préoccupations compréhensibles et discours indéfendables ont été mis dans le même shaker… au plus grand profit de Marine Le Pen. La force du FN et la faiblesse du vote centriste obligent Nicolas Sarkozy à poursuivre dans cette voie détestable. Elle a tout d’une impasse. François Hollande, dans l’entretien qu’il nous a accordé, confie qu’il entend continuer de parler à la gauche, tout en s’adressant sans perdre son âme aux électeurs en «souffrance» de Marine Le Pen. Mais pour le candidat du PS, puisqu’il reste le favori, le vrai rendez-vous commencera après le 6 mai. Il n’aura pas trop d’un quinquennat pour ramener ces électeurs dans les bras de la République. Certaines conditions pour y parvenir sont à sa portée. Le FN se nourrissant des affaires, la gauche au pouvoir devra être exemplaire. Elle ne l’a pas toujours été. Nicolas Sarkozy a déçu ses électeurs d’avoir trop menti. La gauche au pouvoir devra tenir un langage de vérité et ne pas promettre ce qu’elle saura ne pas pouvoir faire. Nicolas Sarkozy a reconnu avoir abîmé la fonction présidentielle à force de confondre proximité et vulgarité. La promesse d’une présidence normale de François Hollande est un début de réponse. En saignant sans discernement la fonction publique, Nicolas Sarkozy a dévalorisé le rôle de l’Etat. La gauche au pouvoir devra lui rendre la force d’agir sur la cohésion sociale. Mais surtout, la gauche devra réussir là où le président-Sarkozy-des-riches a échoué: mieux partager les efforts pour sortir le pays de la crise. Cela s’appelle l’esprit de justice. ÉDITORIAL L’ESSENTIEL LE CONTEXTE Le score de 17,9% réalisé par Marine Le Pen, dimanche, interpelle les deux gagnants du premier tour, François Hollande et Nicolas Sarkozy. L’ENJEU Dans une interview, le socialiste affirme qu’il faut parler à tout le monde, y compris aux électeurs du Front national. François Hollande en Corrèze, dimanche. Le candidat PS a recueilli plus de 10 millions de voix au premier tour. PHOTO SÉBASTIEN CALVET François Hollande réagit pour la première fois depuis son succès au premier tour, dimanche: «LevoteFNest avanttoutune colèresociale» A rrivé en tête du premier tour de la présidentielle avec 28,63% des suffrages, François Hollande explique quelle sera sa stratégie dans la bataille de l’entre deux tours. Au lendemain du premier tour, quelle est votre analyse du vote des Français? J’ai remporté une première victoire, les Fran- çais m’ont placé en tête. C’est une première dans l’histoire de la Ve République. Le candidat sortant a perdu. Con- trairement à ce qu’il plastronnait, il est arrivé second. Et sa prétendue «straté- gie» fondée sur «le croisement des courbes» s’est écroulée. Dans votre déclaration à Tulle, dimanche, vous en venez très rapidement au vote FN… C’est normal, le résultat obtenu par le Front national est une donnée marquante du scru- tin. Le vote FN a changé de nature entre 2002 et 2012. Il est moins haut dans un certain nombre de villes et il est plus fort dans des territoires ruraux qui en avaient été jusque-là préservés. Qu’est-ce que cela révèle? Un mécontentement agricole, des électeurs qui, sans doute de droite, ont voulu sanctionner le candidat sortant en allant vers Le Pen. Et aussi un électorat de souffrance, composé de petits employés, d’artisans, d’ouvriers qui vivent vraiment un sentiment d’abandon. C’est ma responsabilité de m’adresser tout de suite à ces électeurs qui n’adhèrent pas forcément aux idées du FN, l’obsession de l’immigration en particulier, mais qui expri- ment, avant tout, une colère sociale. Le vote Front national est-il un vote d’adhé- sion ou un vote protestataire? Les deux. Il y a pour une part une adhésion à l’extrême droite, clairement assumée, et même parfois une adhésion per- sonnelle à Marine Le Pen. Et puis un vote d’utilisation, d’instru- mentalisation, de protestation. Il exprime une volonté de sanctionner, pas simplement le candidat sortant, mais le système poli- tique, l’Europe et la mondialisation. A qui s’adresser entre les deux tours? D’abord à l’électorat de gauche qui, quel que soit son vote de premier tour, ne veut pas se détourner de son objectif et veut sanctionner Nicolas Sarkozy. L ’erreur que je ne commet- trai pas, c’est, pour parler aux autres, d’oublier les nôtres. Le vote Mélenchon, c’est un vote de transformation, de contestation, de colère, presque de manifestation dans tous les sens du terme. Jean-Luc Mélenchon a su avec talent incarner cette aspiration. De la même manière, l’électorat éco- RecueilliparLAUREBRETTON François Hollande Nicolas Sarkozy Marine Le Pen François Bayrou Jean-Luc Mélenchon Eva Joly N. Dupont- Aignan Jacques Cheminade Philippe Poutou Nathalie Arthaud               RÉSULTATSDUPREMIERTOUR en nombre de voix et en % des suffrages exprimés Source : ministère de l’Intérieur ABSTENTION                               INTERVIEW Suite page 4 LIBÉRATION MARDI24 AVRIL2012 2 •EVENEMENT Le candidat doit convaincre hors de son camp, mais refuse de modifier la stratégie qui l’a porté en tête. François Hollande veut élargir sans se trahir I ls l’ont d’abord longuement applaudi. Pe- tits yeux mais grands sourires, les socia- listes ont savouré hier matin la pole posi- tion présidentielle de François Hollande lors d’un comité de campagne au QG parisien d’où émanait, «on ne va pas se cacher, une très bonne humeur générale», raconte Olivier Faure, l’un des conseillers du candi- dat socialiste. Qui n’a pas perdu une seconde pour remettre tout le monde au boulot avec un message officiel: pas de segmentation électorale, de saucis- sonnage des messages pour aller chercher les électeurs du reste de la gauche, du centre et les plus de 6 millions de Français qui ont voté pour le Front national dimanche. Ne rien changer, puisque le total des voix de gauche est historiquement élevé (44%), que la dyna- mique est en faveur de Hollande, que Jean- Luc Mélenchon n’est pas aussi haut que l’avait un temps craint les socialistes. Et parce que, s’il ternit un peu leur plaisir, le score de Marine Le Pen a le mérite de remo- biliser les troupes de gauche pour le second tour. Ce qui permet à Hollande de déclarer: «Je suis tranquille et confiant.» (lire ci-contre). Face à une droite qui veut opposer élites et peuple, France du oui et France du non à l’Europe, Français et étrangers, «nous n’avons qu’un seul discours, unique et unifiant, celui de la République», confirme la première secrétaire du PS, Martine Aubry. «Une prési- dentielle, c’est un dialogue entre un candidat et la France entière», rap- pelle de son côté le porte-parole Bernard Cazeneuve, pour qui le projet hol- landais contient tout ce qu’il faut –comme le retour d’un Etat protecteur, l’égalité face aux services publics, la remise à niveau de l’Education nationale– pour «répondre au cri de colère sociale et au sentiment de relégation» qui se sont exprimés au premier tour. Virée. Sauf qu’au sortir de la réunion d’autres participants parlent cash. «La ques- tion qu’on se pose tous depuis dimanche 20 heures, c’est: “Comment on récupère les vo- tes de Le Pen?” Il n’y a pas 6 millions de racis- tes et de fachos en France», confirme un dé- puté. «Cela fait longtemps que l’on dit que le cœur du cœur de cette élection, ce sont les oubliés, les uploads/Politique/ libe-me-24-04-2012.pdf

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