Méthode des sciences sociales La science politique est la dernière venue des sc
Méthode des sciences sociales La science politique est la dernière venue des sciences sociales (début XXe dans le monde, et années 60 en France). Ce caractère récent a des conséquences, puisque la science po tâtonne un peu au niveau méthodologique, n’a pas réglé ses problèmes fondamentaux et qui plus est se renouvelle en permanence. Les hommes se sont toujours intéressés aux questions politiques (Platon, Aristote, Machiavel, Montesquieu, Hobbes, Rousseau, Tocqueville…). Pour autant, la démarche ne relève pas forcément de ce qu’on appelle la science politique ; on parlerait plutôt de philosophie politique. En effet c’est une démarche moraliste, essayiste, à la recherche du gouvernement idéal. Il faut alors compléter cette réflexion par la mise en œuvre d’une méthode d’investigation scientifique, pour essayer de mettre en évidence ce qui est et non se contenter de dire ce qui devrait être. Cette démarche n’est pas aisée pour de nombreuses raisons. D’abord, la science politique apparaît aux non-initiés comme une sorte de fourre-tout, parce qu’on observe que beaucoup d’individus parlent au nom de la science po, notamment des universitaires d’autres disciplines, des journalistes… Cette idée est illustrée par la notion de politologue, qui renvoie au commentaire journalistique sur la politique. Ainsi dans l’esprit des citoyens il y a un brouillage entre discours savants (de politistes) et discours de politologues. Cette idée on la retrouve à travers l’expression « sciences politiques » au pluriel, qui implique finalement de prélever des éléments politiques dans l’ensemble des sciences sociales. Or si toutes les disciplines des sciences sociales ont vocation à s’intéresser aux phénomènes politiques, la spécificité de la science politique c’est que la politique est son objet exclusif. Ensuite, la science politique est une discipline fragile, qui nécessite des conditions particulières en termes de liberté de conscience et d’expression pour exister et se développer. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles elle n’est apparue que tardivement, et plus encore dans les pays de l’ancien bloc soviétique. Ainsi la répression politique peut être un facteur empêchant le développement des sciences sociales. A ce titre Robert Merton a fait une étude sur les effets néfastes du totalitarisme sur la démarche scientifique : les scientifiques sont complétement dépendants vis- à-vis du pouvoir politique (interdiction de la démarche critique). Finalement s’il n’y a pas de démocratie, il ne peut y avoir de science sociale, parce que la démocratie encourage l’esprit scientifique ; c’est un régime fondé sur le débat, la tolérance, l’égalité, voire qui accepte le désordre. Qu’est-ce que la science politique ? Maurice Duverger (années 50) disait de la science po qu’elle était une discipline dans l’enfance. Ce caractère récent se retrouve en particulier dans la difficulté de donner une définition précise à cette discipline. En fait il n’existe pas une mais des définitions, aucune ne faisant véritablement consensus. On peut tout de même les regrouper dans plusieurs catégories : Les définitions qui essayent de mettre en évidence la spécificité de la science politique ; elles sont presque sociologiques. Ex – Madeleine Grawitz : « l’étude de la façon dont les hommes conçoivent ou utilisent les institutions qui régissent leur vie en commun, les idées et la volonté qui les anime, pour assurer la régulation sociale ». Les définitions plus rigoureuses, qui essayent d’être plus exhaustives ; elles traduisent la volonté d’émancipation de la sp. Ex – Bernard Lacroix : « l’explication des conditions et des formes du débat politique, l’explication des faits et gestes des pros engagés dans cette activités, l’étude de la manière dont ce déploiement d’activités affecte les acteurs sociaux ». Les définitions sommaires, qui mettent en avant le terme « politique ». Ex – JM Denquin : « la science de l’univers politique » ; Rémi Lefebvre : « l’étude des faits considérés à un moment donné comme politique ». Ce terme est très courant en termes d’usage, et se caractérise par sa redoutable banalité qui renvoie schématiquement à deux approches : la Politique au sens d’Aristote, à savoir le gouvernement idéal de la société et la recherche du bien commun ; la politique au sens péjoratif, celle qui a mauvaise presse (politique des bavardages, de la corruption…). En anglais il y a 3 mots pour traduire « politique », qui révèlent les trois domaines d’intervention prioritaire de la science politique : Polity = le gouvernement, le pouvoir politique, la régulation sociale ; tout ce qui attrait à l’organisation d’une collectivité. Politics = la vie politique, la compétition entre les acteurs pour conquérir/conserver/exercer le pouvoir. Policy = l’action politique, de manière générale ou de manière sectorielle. I – Un objectif : la connaissance des phénomènes politiques La question de l’objet est assez ancienne, et a animé des débats pendant longtemps. En 1948 par exemple, elle s’est posée pour l’Unesco. Cela a débouché sur un désaccord, sauf sur une chose : la science politique comprend quatre branches. Le tronc c’est la sociologie politique : pour les politistes c’est la branche qui s’intéresse à l’Etat, au pouvoir, aux partis, aux régimes politique, à la participation politique, aux groupes de pression… Les relations internationales : c’est l’étude des phénomènes politiques au niveau international, notamment en rapport avec la notion de souveraineté (- logique d’appropriation d’un territoire qui conduit à une opposition permanente). L’histoire des idées politiques : essentiellement des idées, des doctrines, des réflexions, des analyses sur les théories politiques (philosophie, histoire, sociologie…). La sociologie de l’administration : c’est l’étude des phénomènes administratifs, l’admin étant la concrétisation du pouvoir politique. Le Politique s’en est doté de deux : l’armée pour s’imposer, et l’administration fiscale pour la financer. Méthode des sciences sociales 1 Au-delà de ce consensus, la science politique connaît un autre débat avec deux approches différentes. Néanmoins il a perdu son intérêt, il s’agit plus d’un débat historique puisqu’il y a consensus sur les grands objets, cad les sujets abordés par cette discipline. Ex : les partis, l’élection, les groupes de pression, les sondages, les questions de violence et de radicalisation, l’intégration… a) La 1 ère approche : l’objet de la science politique c’est l’Etat Etat = entité constituée d’un territoire occupé par une population, et un mécanisme de régulation sociale enclenché grâce à son pouvoir pour organiser la société. On parle aussi de conception statologique, qui est en fait liée à la souveraineté de l’Etat (Jean Bodin – 1576). Il faut alors distinguer la souveraineté de l’Etat et la souveraineté dans l’Etat, qui renvoie aux prérogatives de puissance publique. On considère ici que la science politique doit étudier tous les phénomènes relatifs à l’Etat. Pour autant l’Etat est une création récente dans l’histoire de l’humanité ; si on prend un pays comme la France, on considère que l’Etat s’est réellement développé autour des XVe/XVIe, à partir du moment où le pouvoir central s’est imposé face aux seigneurs féodaux. C’est d’ailleurs le monde occidental qui a inventé l’Etat, qui s’est après propagé par la colonisation (Badie - Bayart). Tout cela signifie que le phénomène politique a préexisté à l’Etat, puisqu’il existait des formes d’organisation politique avant le XVe. Dès lors, si on se cantonne à cette approche, on abandonne les formes originelles du Politique (anthropologie – Robert Lowie). Les sociétés primitives sont des sociétés sans Etat, pour autant cela ne signifie pas qu’elles n’ont pas de politique. L’une des études les plus célèbres est celle d’Evans-Pritchard (1940) sur les Nuer : c’est ce qu’il appelle une anarchie ordonnée (sans gouvernement) avec l’existence d’un chef (peau de léopard), qui est l’autorité morale qui gouverne sans violence et exerce son pouvoir à travers des règles rituelles. Il peut toutefois exister des formes de contrainte (Pierre Clastres – Gua-Yakis) notamment pour des rites de passage. Tout ceci amènera J-Y Lapierre à écrire « Vivre sans Etat ? », où il considère que la différence société avec/sans Etat n’est pas pertinente, car toutes les sociétés connaissent un pouvoir politique. Il propose une échelle à 9 degrés pour mesurer le pouvoir politique et classer les sociétés (1 = très rudimentaire, recours à la médiation ; 9 = organisation étatique, contrainte + légitimation). b) La 2 nde approche : l’objet de la science politique c’est le pouvoir Pouvoir = rapport inégalitaire d’autorité, de domination. Cette conception correspond au virage sociologique emprunté par la science politique dans les années 70. Le pouvoir est une notion très large, et l’Etat n’en est qu’une forme parmi tant d’autres. La science po doit alors s’intéresser à toutes ces formes. Dès lors qu’il y a des individus il y a du pouvoir puisqu’il est nécessaire pour organiser la répartition inégalitaire des ressources. L’être humain ayant besoin de vivre en société pour survivre, le pouvoir est une caractéristique de tout être humain. Cette fonction de régulation sociale s’entoure souvent d’un caractère sacré (Balandier – Anthropologie politique), pour éviter le recours à la violence. On peut alors parler d’une sorte d’autorité naturelle. Toute relation sociale sous-tendant un rapport de pouvoir, la science politique va s’intéresser à énormément de choses, et se rapproche fortement de la sociologie, or la dimension politique uploads/Politique/ methode-des-sciences-sociales 1 .pdf
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- Publié le Nov 08, 2021
- Catégorie Politics / Politiq...
- Langue French
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