Arbeitspapiere / Working Papers Nr. 111 Azizou Chabi Imorou L’action politico-s

Arbeitspapiere / Working Papers Nr. 111 Azizou Chabi Imorou L’action politico-syndicale des enseignants au Bénin (1945-2008) Approche socio-historique 2010 Institut für Ethnologie und Afrikastudien Department of Anthropology and African Studies The Working Papers are edited by Institut für Ethnologie und Afrikastudien, Johannes Gutenberg-Universität, Forum 6, D-55099 Mainz, Germany. Tel. +49-6131-3923720; Email: ifeas@uni-mainz.de; http://www.ifeas.uni-mainz.de http://www.ifeas.uni-mainz.de/workingpapers/Arbeitspapiere.html Geschäftsführende Herausgeberin/ Managing Editor: Eva Spies (espies@uni-mainz.de) Abstract In this article the author analyses the interplay between teachers’ trade unionism and their engagement in the political arena since the emergence of the SYNEPDA, the first teachers’ trade union in Benin in 1945. The author combines the analysis of archival and press docu- ments with interviews to explain the strategic positions that teachers occupied – and continue to occupy – within both the political and the trade union arena. From the hesitant trade union- ism of the colonial period to its democratic take off, passing a phase of political and unionist unification, teachers’ activism expresses itself as a complex and permanent game of mutual influence between the political power and the trade unions. Thereby teachers are put in the centre of a constant negotiation process concerning the definition of the roles played by the state. This shows the limits of a binary analysis that confines itself to a state-versus- unions- perspective. The author concludes that both teachers’ political and unionist activism fuelled the emergence of a public space of citizenship that appears as one of the facets of a “state at work”. Résumé Cet article tente d’analyser les chevauchements entre l’action syndicale des enseignants béninois et leur engagement dans le champ politique depuis l’apparition en 1945 du SY- NEPDA, premier syndicat enseignant. La démarche utilisée dans cette recherche combine l’exploitation des données d’archives et de presse et l’analyse des témoignages recueillis auprès de certains acteurs pour expliquer les positions stratégiques qu’ont occupé – et que continuent d’occuper – les enseignants au sein de l’espace politico-syndical. Du balbutie- ment syndical de la période coloniale à l’éclosion syndicale démocratique, en passant par le temps de l’embrigadement, l’activé syndicale enseignante s’est traduite par un jeu de va-et- vient complexe et permanent où pouvoir en place et syndicats s’influencent réciproquement. Ce qui met les enseignants au centre d’une négociation constante des rôles étatiques et montre qu’au Bénin le phénomène syndical se prête moins à l’analyse binaire des relations Etat-syndicats dans laquelle de nombreux analystes l’ont souvent confiné. Le texte souligne enfin que l’action politico-syndicale des enseignants a entraîné progressivement l’émergence d’un espace public de citoyenneté qui fonctionne comme l’une des facettes d’un « Etat en chantier ». Der Autor Azizou Chabi Imorou promoviert bei Prof. Dr. Thomas Bierschenk im Rahmen des Pro- jektes „States at Work - Public Services and Civil Servants in West Africa: Education and Justice in Benin, Ghana, Mali and Niger” (http://www.ifeas.uni- mainz.de/projekte/StatesatWork_neu.html). Vorläufiger Titel seiner Doktorarbeit ist: Syndica- lisme enseignant au Bénin: pluralisme, revendications et implications sur la construction de l’Etat (1945 à nos jours). Azizou Chabi Imorou arbeitet am Laboratoire d’Etudes et de Re- cherches sur les Dynamiques Sociales et le Développement Local (LASDEL) in Parakou, Benin (www.lasdel.net). Email: ciazizou@yahoo.fr L’ACTION POLITICO-SYNDICALE DES ENSEIGNANTS AU BENIN (1945-2008) Approche socio-historique Azizou CHABI IMOROU 2 Introduction 1 Au Bénin (ancien Dahomey) aujourd’hui, le syndicalisme enseignant connaît un essor sans précédent avec plus d’une trentaine de syndicats de base. Son évolution a été plus ou moins tumultueuse voire irrégulière parce qu’elle dépend du rôle des acteurs qui l’ont animé. Il y a eu des moments d’hésitation, des temps de cooptation, d’embrigadement, de contestation ou d’alliance. Les manifestations des relations entre les travailleurs et les pouvoirs qui se sont succédés se sont traduites – de temps à autre – par la remise en cause du pouvoir ou de ses fondements. C’est le cas dès les débuts de l’indépendance ou encore – comme nous le montrerons – lors des coups d’Etat qui ont été le plus souvent précédés de contestations syndicales. Le SYNEPDA2 Certaines études ont par ailleurs montré le rôle politique qu’ont joué les enseignants notamment dans la période coloniale (Jézéquel 2002, 2005) ou encore plus récemment dans l’avènement des nouvelles démocraties africaines (Banégas 2003, Gbado Lalinon 1998, Granoux 2007). Cependant, elles renseignent peu sur la dynamique socio-historique des formes d’organisation professionnelle (les syndicats) et les usages qui en ont été faits dans les différents positionnements socio-politiques des élites. premier syndicat enseignant a été créé en 1945. Il est dissout en 1975 pour avoir incité ses membres à la grève. De ce fait, les analystes (historiens) du syndicalisme en Afrique ont souvent présenté le binôme Etat/syndicat en termes de classes aux intérêts contradictoires (cf. Meynaud & Salah-Bey 1963, Dossou 1981, Fonteneau 2004 et Paquelin 2005). Ces analyses se sont révélées très intéressantes dans l’étude des premiers syndicats africains notamment vers la fin de la période coloniale à un moment où, luttes syndicales et lutte contre la présence européenne s’entremêlaient. Mais, l’histoire syndicale post-coloniale se prête moins à cette analyse binaire et montre la nécessité d’appréhender la complexité des dynamiques socio-politiques qui ont caractérisé et qui continuent de caractériser les relations entre le pouvoir et les groupes mobilisés. 3 Dans nombre d’Etats ouest africains, les enseignants apparaissent ainsi comme les acteurs clés de la formation de l’Etat soit en tant que fonctionnaires, soit en tant qu’élites politiques ou producteurs de l’élite politique. Ce faisant, leurs actions vis-à-vis des pouvoirs en place présentent des spécificités par pays. Dans le cas béninois qui nous intéresse ici, quatre grands moments forts de la formation de l’Etat seront analysés : l’indépendance, les coups d’Etat successifs, la révolution marxiste et la démocratie. Quels liens existe-t-il entre ces événements 1 Ce texte est issu des recherches en cours dans le cadre de ma thèse de doctorat sur le thème : « Syndicalisme enseignant au Bénin : pluralisme, revendications et implications sur la construction de l’Etat (1945 à nos jours) ». Mes travaux s’inscrivent d’ans le cadre d’un programme de recherche comparative dénommé « States at work. Public services and civil servants in West Africa. Education & Justice in Benin, Niger, Mali and Ghana ». Je voudrais remercier ici tous les chercheurs du LASDEL, ceux du programme States at work, particulièrement mes directeurs de thèse Thomas Bierschenk et Nassirou Bako Arifari pour leurs commentaires et suggestions sur les précédentes versions de ce texte. Je remercie également Diane Granoux qui m’a fourni d’importants documents. La fondation Volkswagen apporte un soutien financier à cette recherche, je souhaite la remercier ici. 2 Syndicat des Enseignants du Primaire du Dahomey. 3 Exception faite à la thèse de Jézéquel (2002) qui découvre dans la période coloniale (avant 1945), l’existence d’associations et d’amicales qui ont servi de « laboratoire politique » aux élèves de l’Ecole Normale William Ponty. 3 et l’activité syndicale enseignante ? Comment peut-on expliquer les positions stratégiques qu’ont occupées les enseignants au sein de l’espace politique ? Comment s’est effectué le passage de l’action politique à l’action syndicale et vice versa ? Dans le présent texte, nous essayerons de montrer comment s’est manifestée la participation politcio-syndicale des enseignants qui induit certaines pratiques de structuration / déstructuration de l’Etat. L’article se fonde sur une exploitation des données d’archives et un dépouillement de la presse écrite. Ainsi, pour la période antérieure à 1960, nous exploitons les archives disponibles aux Archives Nationales du Bénin (Porto-Novo) et du Sénégal (Dakar). Pour la période d’après, nous combinons plusieurs sources : lettres et chroniques syndicales (par exemple Gbado Lalinon 1998), recueils de discours (cf. Kérékou 1987), journaux officiels (L’Aube Nouvelle, Daho-Express, Ehuzu, La Nation) et privés (Le Matinal, Le Progrès, Fraternité, Le Matin). Les informations contenues dans ces documents ont été complétées par des entretiens avec certains témoins des événements que nous décrivons (notamment ceux de 1989).4 Nos analyses sont centrées sur les enseignants et leurs syndicats. Toutefois, dans les sources et dans la littérature, nous n’avons pas pu, par endroits, spécifier l’action syndicale et / ou politique des enseignants de celle des autres catégories telles que les fonctionnaires et les intellectuels étant entendu que ces trois catégories représentent une seule et même réalité (Granoux 2007 : 11-12). 1. Les enseignants dahoméens sous la colonisation : les chemins de la justice sociale et de l’indépendance Au début de la colonisation, l’enseignement scolaire en vigueur sur les territoires de l’A.O.F est assuré par des enseignants en provenance de la métropole. Il s’agit soit de missionnaires religieux ou encore en nombre relativement réduit des volontaires civils. Il faut attendre 1904 pour que la première promotion d’élèves dahoméens sorte de l’Ecole William Ponty de Dakar et qu’ils soient recrutés dans l’enseignement. 1.1. Les conditions de travail des enseignants dahoméens A l’époque coloniale, l’enseignant noir ou blanc5 4 Nous voudrions les remercier ici tous, en particulier messieurs Léopold Dossou (in memorium), Gervais Kissèzounon, Jules Guézodjè, Raouf Affagnon, Paul Essè Iko, Justin Adjibadé et de nombreux autres informateurs anonymes. Nous sommes également très reconnaissants à Diane Granoux qui a mis à notre disposition deux excellents entretiens qu’elle a réalisés avec monsieur Dossou et Madame Gbado respectivement les 15 et 16 février 2007. uploads/Politique/l-x27-action-politico-syndicale-au-benin.pdf

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