Isis Planas Monnier Politique du cinéma hollywoodien - SciencesPo Dissertation
Isis Planas Monnier Politique du cinéma hollywoodien - SciencesPo Dissertation : La religion dans les films d’horreur “Ta mère suce des b. en enfer !”, rien de tel pour nous donner une image claire de ce qu'est le cinéma d’horreur que par cette réplique de L’Exorciste réalisé par William Friedkin 1. Entre obscénités, mystère et angoisse, le genre cinématographique d’horreur s’est avéré une représentation des peurs de la société. Nous voyons dans cette citation ce qui pourrait être une illustration du genre horrifique ; un mélange de grossièreté et de spiritualité, soit la religion. En effet, nombreux sont les fils d’horreur qui utilisent la religion en mettant en scène sa vision du bien et du mal pour créer chez nous ce sentiment de peur. D’un côté plus théorique, nous avons Éric Dufour qui nous définit le cinéma d’horreur étant “un type de film qui vise à susciter chez le spectateur des émotions d'effroi, de terreur et d'angoisse en créant une atmosphère d'horreur et en utilisant des éléments tels que le surnaturel, le gore, le suspense et la violence” dans son ouvrage Le cinéma d’horreur et ses figures 2. Nombreuses sont les études faites sur le pourquoi les films d’horreur nous font peur. Pour cela, Martine Roberge 3 nous explique, nous pouvons regrouper des images archétypes de la peur en cinq thèmes majeurs ; l’animalité, le mal, l’autre, l’anormalité et le double. Ces cinq thématiques différentes ont en commun deux caractéristiques ; la menace à l’intégrité de l’Homme et de son identité. En effet, dans nombreux de films connus, nous voyons de figures horrifiques qui incarnent soit quelque chose qui n’est ni non-humain ni humain et qui va mettre en danger un ou plusieurs personnages du film (l’image du loup-garou) soit quelque chose qui est totalement extérieure de la dimension humaine et qui incarnerait une menace (et donc apparaîtrait la peur de l’Autre). Pour illustrer cela, nous pouvons prendre l’exemple du film Split réalisé par Manoj Nellieyattu Shyamalan en 2016 4. Ce film nous montre un personnage qui soufre d’un trouble dissociatif de l’identité qui va séquestrer deux jeunes soi-disant “impures”. La première moitié du film, nous voyons un humain qui remet en cause l’identité humaine puisqu’il est atteint sévèrement d’une maladie mentale qui le pousse à faire des actes qui ne sont pas considérés comme humaines. À la fin du film, nous voyons apparaître sa 24ᵉpersonnalité ; “la Bête”. On voit le personnage se transformer en quelque chose qui échappe à la dimension humaine et qui menace l’intégrité de la nature humaine. Il ne faut pas oublier tout de même que les films d’horreur se sont inspirés longuement de la religion dans la conceptualisation du mal. Le mal va être représenté comme quelque chose 4 M. Night Shyamalan. Réalisateur. (2016). Split. Blinding Edge Pictures 3 ROBERGE Martine, « L'art de susciter l'effroi », Sciences Humaines, 2005/7 (N°162), p. 26-26. DOI : 10.3917/sh.162.0026. URL : https://www.cairn.info/magazine-sciences-humaines-2005-7-page-26.htm 2 Le Cinéma d'horreur et ses figures, Paris, PUF, coll. « Lignes d'art », 2006 1 William Friedkin. Réalisateur. (1973) L’exorciste. Warner Bros. 1 Isis Planas Monnier Politique du cinéma hollywoodien - SciencesPo que l’on ne peut pas considérer humaine entrant dans le champ de la monstruosité. Nous le voyons dans Split, mais aussi dans la grande majorité des films d’horreur. Le mal est forcément associé à l’image de l’enfer que la religion, notamment chrétienne, a mobilisée pour terroriser ses adhérents. C’est pour cela qu’il serait intéressant de nous pencher sur la question de la représentation et l’omniprésence de la religion dans les films d’horreur. Pour cela, nous allons tout d’abord analyser la religion dans l’imaginaire de l’horreur en abordant le sujet de la religion comme source de peur et d’angoisse, mais aussi comme élément de construction narrative et symbolique de ces films. Dans un deuxième temps, nous verrons la représentation de la religion en décomposant les figures du mal et de l’enfer et aussi le détournement des pratiques religieuses. ***** I. La religion dans l’imaginaire de l’horreur a. La religion comme source de peur et d’angoisse Depuis les débuts du cinéma d’horreur, la religion a souvent été utilisée comme créatrice d’angoisses, mais aussi comme étant la seule qui pouvait nous sauver des possibles manifestations démoniaques. En effet, dans divers films, le message qui est mobilisé est celui de “il ne faut pas jouer avec la religion”. Prenons l’exemple de Frankenstein 5 de 1931 réalisé par James Whale. Bien que ce film ne soit pas explicitement religieux, on peut lui associer tout de même certaines thématiques religieuses. L’histoire de Frankenstein est en partie une critique de l’arrogance de l’homme face à la création. Le Docteur Frankenstein incarnerait le rôle de Dieu en tant que créateur, ce qui, finalement, finit par se retourner contre lui en voyant le monstre qu’il a créé. Le message ici est clair, nul ne peut défier le rôle de Dieu, seul lui est le créateur tout-puissant. De plus, comme cette créature a été créée de manière artificielle, celle-ci se retrouve totalement isolée de la société et est condamnée à la souffrance. Nous pouvons ici faire un parallèle avec Adam et Ève qui sont rejetés du paradis pour avoir désobéi à Dieu. Pour en donner un exemple plus concret, nous pouvons prendre le film The Witch 6, réalisé par Robert Eggers en 2015. Dans ce film, nous voyons la famille de William qui se fait expulser de leur communauté religieuse à cause de l’orgueil du père, puis s’installent à la 6 Robert Eggers. Réalisateur. (2015) The Witch. Rooks Nest Entertainment. 5 James Whale. Réalisateur. (1931) Frankenstein. Universal Pictures. 2 Isis Planas Monnier Politique du cinéma hollywoodien - SciencesPo limite de la civilisation pour mener une vie pieuse. Au fur et à mesure du temps, la famille commence à être victime d’incidents étranges et effrayants liés à un certain occultisme. Même si le père de famille qui tient fermement à ces croyances religieuses, ses enfants vont être curieux de voir ce qu’il se passe. Plus le film avance, plus les membres de la famille commencent à rentrer dans une paranoïa qui leur fait éloigner de la foi religieuse. En effet, la figure de Black Phillipe (un bouc qui symbolise le dieu satanique), qui au début est représenté comme un simple animal, va prendre chaque fois plus d’importance dans le film jusqu’à être une représentation du mal et du diable. On pourrait dire que ce personnage est l’incarnation du péché et de la tentation puisqu’il incite la jeune fille, Thomasin, à abandonner sa foi puritaine. Dans ce film, donc représente les épreuves que Dieu impose à la famille et l’importance de ne pas le défier. De plus, on a souvent des symboles des péchés chrétiens comme la luxure ; à un moment, la sorcière se dénude pour séduire Caleb, un jeune garçon de la famille. Il y a aussi le péché de l’avarice qui est représenté lorsque le diable promet de la richesse à Thomasin. La foi de cette famille se voit ébranlée par leur peur et l’incertitude qui les entoure, ce qui les mènent donc à un éloignement de Dieu 7. Grâce à ces deux exemples, nous pouvons ainsi dire que la religion nous a inculqué la peur de ne pas la respecter et des conséquences graves que l’on peut subir si nous ne respectons pas les règles dictées par Dieu. De plus, le fait de représenter le mal comme quelque chose d’horrifique, manipulateur et machiavélique contribue à cette construction de la peur. De l’autre côté, nous remarquons qu’il y a une tendance à illustrer la religion comme sauveuse de tous les méfaits du diable. L’élément que nous retrouvons le plus souvent et la pratique de l’exorcisme qui, selon le dictionnaire La Rousse, est une “pratique religieuse ayant pour but de chasser le démon qui a pris possession de quelqu’un” 8. Pour en donner un exemple le plus classique, nous pouvons prendre le film de L’exorciste réalisé par William Friedkin en 1973. Dans ce film, nous avons Regan MacNeil qui est victime de spasmes violents et de symptômes étranges. Malgré la tentative de la guérir à travers des traitements médicaux, la fille ne cesse d’empirer. La jeune fille commence donc à parler avec une voix rauque, crache du sang et tient des propos violents et scatologiques. La mère, Chris MacNeil fait alors recours à un prêtre, Karras, qui va examiner les comportements de Regan et va finir par en conclure que la seule façon de guérir sa fille de la possession diabolique est de lui faire un exorcisme pour essayer que le démon soit libéré. On assiste à une scène où le prêtre récite des prières tout en l’arrosant d’eau bénite. Le démon, loin d’être 8 LaRousse, définition Exorcisme https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/exorcisme/32187 7 Simon Riaux (2016). The Witch : critique d’une horreur envoûtante. Écran Large https://www.ecranlarge.com/films/critique/950594-the-witch-une-horreur-sublime-et-onirique 3 Isis Planas Monnier Politique du cinéma hollywoodien - SciencesPo insensible, commence à être de plus en plus virulent. Le fait d’avoir eu recours à la religion comme seul moyen de sauver quelqu’un d’une possession démoniaque montre bien que uploads/Religion/ dissertation-la-religion-dans-les-films-d-x27-horreur-isis-planas-monnier-politique-du-cinema-hollywoodien-sciencespo.pdf
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- Publié le Aoû 18, 2022
- Catégorie Religion
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