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LES ORIGINES ET LES RESPONSABILITÉS DE L'INSURRECTION VENDÉENNE PAR L E RÉVÉREN

LES ORIGINES ET LES RESPONSABILITÉS DE L'INSURRECTION VENDÉENNE PAR L E RÉVÉREND PÈRE DOM FRANÇOIS C H A M A R D Prieur de l'abbaye de Saint-Martin de Lïgugé. PARIS A R T H U R S A V A È T E , Éditeur 76, rue des Saints-Pères 1898 Biblio!èque Saint Libère http://www.liberius.net © Bibliothèque Saint Libère 2008. Toute reproduction à but non lucratif est autorisée. LES ORIGINES ET LES RESPONSABILITÉS DE L'INSURRECTION VENDÉENNE PRÉFACE Encore que, dans un avis particulier, nous racontions la genèse de cette étude historique^ nous croyons nécessaire rendre compte au lecteur de la manière dont nous l'avons composée, afin de l'engager à excuser tes imperfections qu'il y pourra rencontrer. Ayant pris la plume sans parti-pris* avec le seul désir de mettre en pleine lumière une question historique très contestée* nous ri avons pas tardé à nous apercevoir que Pour la bien traiter, il fallait, ni plus ni moins, écrire Vhistoire de la lutte de la Révolution contre le catholicisme en Vendée, depuis iy8ç jusqu'en i?ç3* L'examen impartial des principaux documents s'y référant s'imposait à nous comme une base nécessaire. N'ayant point, tout d'abord, songé à une étude aussi approfondie, nous avons longtemp liésité à l'entreprendre. Cependant, son importance nous fit triompher de nos répugnances. Aussi, malgré une cruelle et longue maladie et des difficultés de plus d'un genre, nous Vavons poursuivie avec toute l'ardeur qu'un cœur ami de la vérité peut res- sentir en présence des innombrables documents inédits ou mal interprétés quil est appelé à manipuler* et qui tous, contemplés à la lumière de la plus loyale impartialité, forment un faisceau absolument démonstratif en faveur du caractère religieux de l'insurrection vendéenne. Écrit dabord pour la Revue du Monde catholique, notre travail, par la nature même de son développement, a dépassé naturellement les bornes ordinaires imposées au recueils périodiques. De là certaines imperfections que le lecteur intelligent ne manquera pas de remarquer* mais quil excusera, nous l'espérons^ par le profit quil en retirera pour V affermisse- ment de sa conviction personnelle. Abbaye de Saint-Martin de Ligugé, en la fête de Saint-Èenoît, 21 mars i8çç. Les Origines et les Responsabilités de l'Insurrection Vendéenne. A V I S . Les pages qui vont suivre serviront comme d'Introduction à une seconde édition de VHistoire de la Vendée, publiée, il y a quelques années, par M. l'abbé Déni au, curé du Voîde, dans le diocèse d'Angers, en 6 volumes in-8°. Malgré son étendue, cet ouvrage a obtenu un succès vraiment exceptionnel, puisque, depuis longtemps déjà, la première édition est épuisée. Cette Histoire de la Vendée est surtout recommandable par une foule d'épi- sodes locaux, puisés aux sources les plus autorisées, et appuyés sur les témoignages des derniers survivants de cette guerre de géants. La seconde édition lui conservera ce caractère. Toutefois, bien qu'un grand nombre de faits allégués par Crétineau-Joly et les autres écrivains qui ont traité le même sujet, aient été rectifiés par M. l'abbé Deniau, les travaux multipliés et fortement documentés, relatifs à la même période révolutionnaire, qui ont paru dans ces dernières années, imposent à l'historien impartial l'obligation de soumettre à une révision sévère les moindres circonstances de son récit. Comprenant mieux que personne l'importance de cette révision, M. l'abbé Deniau ne s'était épargné aucune fatigue pour améliorer autant que possible la première rédaction. La mort le surprit au milieu de ce consciencieux labeur. Mais longtemps avant de mourir, il avait initié à son œuvre son neveu de prédilection, M. l'abbé Deniau, curé de Saint-Macaire-en-Mauges. Celui-ci ne s'est pas contenté de mettre en ordre les notes de son oncle vénéré ; il s'est livré avec ardeur à de nouvelles recherches, a étudié avec soin toutes les récentes publications sur la matière, s'est mis en rapport avec tous les collec- tionneurs de documents, et s'est appliqué à remettre au point chacun des faits saillants de VHistoire de la Vendée pris dans son sens le plus large. Toutefois, se défiant modestement de lui-même, il fit appel à mon amitié, et à mon dévouement, au nom de nos liens de famille, et de l'affection filiale que j'avais vouée à son oncle, dont la mère, ma grand'tante, avait élevé ma mère» devenue orpheline par suite des ruines amoncelées par la Révolution. Je ne pouvais décliner une pareille proposition, puisqu'il s'agissait de concourir à une œuvre, en quelque sorte, de famille. 6 LES ORIGINES DE L'INSURRECTION VENDÉENNE. C'est ainsi que j'ai été appelé à collaborer à la seconde édition de l'ouvrage de M. l'abbé Deniau, qui, je l'espère, sera mieux accueillie encore que la première, grâce aux perfectionnements que nous venons de signaler. Mais il est une question capitale trop négligée jusqu'ici : Quelle a été la cause déterminante de l'insurrection vendéenne ? Sans doute, M. l'abbé Bos- sard, dans son livre : Catkelineau généralissime^ surtout dans sa seconde édition (1896), a accumulé les témoignages les plus autorisés pour prouver que l'insurrection vendéenne a été la conséquence des vexations exercées contre la conscience des populations de ce pays, profondément attachées à la religion catholique. Déjà, dans son Histoire de la Constitution civile du Clergé (1), fortement et savamment documentée, M. Sciout avait établi que cette loi schismatique avait été la cause de toutes les agitations religieuses qui ont eu lieu dans diverses parties de la France pendant la période révolutionnaire. Par contre, M. Célestin Port, dans sa Vendée angevine, et M. Chassin, dans ses trois volumes grand in-8° de La Préparation de la Guerre de la Vendée^ ont essayé de démontrer, par force documents, que le soulèvement de la Vendée a été le résultat des sourdes menées politiques et combinées du clergé, de la noblesse et de la haute bourgeoisie, qui tous, regrettant l'ancien régime, s'efforcèrent, par tous les moyens, d'ameuter les populations soumises à leur influence contre la nouvelle constitution du pays. Il nous a semblé que le meilleur moyen de mettre en pleine lumière la vérité sur ce point fondamental était, non pas seulement d'en appeler à l'opi- nion des auteurs contemporains de tous les partis, comme l'a fait M. l'abbé Bossard, mais de Condenser en un récit clair et succinct, les principaux événements politico-religieux qui ont amené peu à peu nos populations ven- déennes à passer d'un enthousiasme irréfléchi envers des utopies réformatrices, à une aversion profonde pour un régime où, au lieu du bonheur idéal qu'on leur avait promis, ils avaient à supporter des impôts excessifs et l'oppression la plus tyrannique contre la liberté de leur conscience et de leur foi religieuse. Sans doute, nous ne pourons pas, comme MM. Célestin Port et Chassin, consacrer des volumes entiers à cette question, malgré son importance. Mais nous avons fait tous nos efforts pour nous rendre aussi complets et aussi exacts que possible, non seulement en vérifiant, rectifiant et complétant par des recherches personnelles, aux Archives nationales et ailleurs, les pièces alléguées par les auteurs que nous venons de citer, mais encore en nous appli- quant à donner aux documents contemporains leur véritable signification. Nous ne dirons rien des relations étonnantes qui existent entre les événe- ments qui se succédèrent en Vendée de 1789 à 1793 et ceux dont nous sommes les témoins et les victimes depuis près de vingt ans. Les lecteurs attentifs feront d'eux-mêmes ces rapprochements. C'est ce qui, à nos yeux, constitue l'utilité de ce tableau historique, dont nous sommes heureux d'offrir la primeure à la Revue du Monde Catholique. Comme ce travail est une œuvre entièrement personnelle^ mon cher cousin Deniau veut bien m'autoriser à le publier sous mon nom. x. Hiitoire de la Constitution civile du Clergé, par Ludovic Sciout, 4 vol in-8°. X''irmin Didot, 1872-1881. (Du 24 janvier 1789 au 14 mars 1793.) CHAPITRE PREMIER. L a vraie cause de l'Insurrection L'insurrection vendéenne a-t-elle été produite par les conjura- tions ou les surexcitations réactionnaires des prêtres et des nobles contre le régime établi, ou bien n'a-t-elle été que le résultat des vexations réitérées et des persécutions de plus en plus tyranniques contre la liberté de conscience religieuse de tout un peuple, qui, après avoir vainement tenté par tous les moyens légaux de l'obtenir, s'est enfin lassé de voir ses justes revendications foulées aux pieds, et a cru que le moyen d'obtenir justice de ses bour- reaux était de se la rendre à lui-même, les armes à la main ? Quiconque a étudié 1 histoire sans parti pris se rangera infailli- blement à cette dernière opinion. L'aggravation des impôts, les vexations des administrations nouvelles, l'emprisonnement et la mort du roi, le bruit partout répandu que les souverains de l'Europe s'étaient coalisés pour délivrer la France de la tyrannie révolutionnaire, ont sans doute contribué à hâter le soulèvement et à inspirer au peuple, irrité jusqu'au paroxysme, l'espoir d'être secondé dans sa révolte. Enfin la levée générale des 300.000 hommes a été l'occasion jugée pro- pice pour mettre fin à une situation de plus en plus intolérable. Mais tous ces événements, même réunis, n'auraient certainement pas suffi pour produire dans toute la Vendée une insurrection générale, si la persécution religieuse ne l'avait pas préparée et uploads/Religion/ les-origines-et-les-responsabilites-de-l-insurrection-vendeenne-000000418.pdf