SAINTE JEANNE D'ARC LE PÈRE L. H. PETITOT, 0 . P. PARIS G A B R I E L B E A U C
SAINTE JEANNE D'ARC LE PÈRE L. H. PETITOT, 0 . P. PARIS G A B R I E L B E A U C H E S N E Rue de Rennes, 117. PAR 1921 www.traditio-op.org SAINTE JEANNE D'ARC NihiZ obstat R. LOUIS, O. P. IMPttlMATUlt Parisiis, die 14* Septembre 1920. 15. LAPALMK Vie. gen. AVANT-PROPOS M. Hanotaux a exprimé une pensée capable de faire trembler tout historien de Jeanne d'Arc : « Il faut, a-t-il dit, que le goût public soit averti, il faut que Jeanne d'Arc soit protégée contre certains attentats et qu'elle soit mise une fois pour toutes à l'abri des déclamations éphémères et des enthousiasmes mala- droits. Il faut que tout écrivain, tout artiste, qui touche à un tel sujet, apprenne à quel ridicule définitif il s'expose, s'il s'éloigne de la simple et nue vérité. » Cet avertissement est aussi juste qu'opportun. La plupart des artistes ou écrivains sont tentés, en tout ce qui touche Jeanne d'Arc, de donner dans le genre déclamatoire. Pourquoi se trouve-t-il si peu de statg£» de Jeanne qui nous agréent, si ce n'est parce qu'elles sont emphatiques ; et pourquoi celle de la princesse Marie d'Orléans est-elle la plus satisfaisante, si ce n'est parce qu'elle est à la fois noble, religieuse, simple et touchante ? Nous nous sommes efforcé de ne pas nous éloigner de « la simple et nue vérité ». Nous nous sommes pro- posé, après avoir pris connaissance de tous les docu- ments et ouvrages importants, d'écrire un récit con- tinu, exact et vrai de la vie de Jeanne d'Arc. Nous AVANT-PROPOS avons dédié en pensée ce travail à tous les esprits cultivés qui aiment la lecture sérieuse, Phistoire objective. C'est pourquoi, malgré l'ennui qu'apporte une lecture fréquemment interrompue, nous avons multiplié les notes, en nous bornant toutefois à celles qui sont significatives ou justificatives. On sait que nulle traduction, si fidèle soit-elle, ne remplace la confrontation avec le texte original. Les notes instruc- tives, celles qui ne sont pas des simples références, sont la monnaie d'or de l'histoire. Si nous n'avons pas réussi à écrire le livre objectif, exact que nous aurions voulu, c'est sans doute à cause de notre insuffisance, mais c'est aussi parce que les recherches archéologiques et historiques sur les pre- mières années du xv e siècle sont encore loin d'être achevées. Sauf les études de M. Germain Lefèvrc- Pontalis, qui sont des modèles du genre, nous n'avons pas trouvé de commentaires suffisants sur les princi- pales chroniques. Il manque aussi des monographies sur les personnages de premier et second plan qui entouraient Charles VII. Une étude sur Regnault de Chartres dans le genre de celle que M. Pierre Champion a donnée sur G. de Flavy serait infiniment précieuse. L'Histoire de Charles VII par du Fresne deBeaucourt est évidemment partiale et certaines pages ne sont qu'une apologie du roi. On pourra remarquer aussi que nous ne précisons pas l'effectif de l'armée anglaise devant Orléans. Malgré toute la peine que nous avons prise pour élucider la question, nous n'avons pu y parvenir. Les archéologues ou historiens ne sont pas d'accord là-dessus. Les chroniqueurs, Monstrelet, Cousinot, chancelier du duc d'Orléans, qui devait AVANT-PROPOS III être bien renseigné, évaluent cette armée à 10.000 hommes. D'après M. Jarry, il faudrait les réduire à moins de 3.000. Nous n'avons pas qualité pour trancher le problème. En général les chiffres les moins forts sont les plus vraisemblables. Ceux qui savent par habitude de l'histoire combien les armées anciennes et les sièges étaient peu considérables relativement aux nôtres^ ne seront pas trop étonnés de constater la faiblesse des effectifs engagés à Patay et l'exiguïté des Tourelles. L'importance de ces sièges et batailles a été en grande partie d'ordre moral ; on ne saurait trop, croyons-nous, insister sur ce point. M. Boucher de Molandon, l'un des archéologues orléanistes les plus compétents, a écrit avec une très heureuse justesse d'expression : « La délivrance d'Orléans relève de l'examen psychologique, plus que de toute étude historique et militaire. » Cette remarque s'applique à toute la carrière de Jeanne d'Arc, qui relève de l'examen psychologique, moral, religieux aussi bien que de l'histoire. Elle appartient donc à la com- pétence du philosophe, du moraliste autant que de l'historien. Il arrivera un temps, qui sans doute n'est pas loin, où il ne sera plus permis à un Français cultivé d'igno- rer les principaux faits et dits de notre héroïne natio- nale. Si ce livre pouvait contribuer si peu que ce fût à faire connaître la véritable Jeanne d'Arc nous serions trop heureux. Nous ne pourrions assez dire ce que nous devons auxtravauxde Quicherat,Ayroles,Hanotaux, Dunand, Debout, Vallet de Viriville, Siméon Luce, du Fresne IV AVAIfT-PROPOS de Beaucourt, Lefèvre-Pontalis, M. Sépet, etc.. Quand nous avons commencé cette étude, il y a environ cinq ans, nous ignorions que Mgr Touchet, réminent évêque d'Orléans et de Jeanne d'Arc, préparait un grand ouvrage sur le même sujet. Nous regrettons de n'avoir pu le consulter. Nous devons remercier tout particulièrement M. Gar- sonnin, conservateur du musée Jeanne d'Arc à Orléans, d'avoir mis gracieusement à notre disposition les trésors de la bibliothèque. Nous remercions aussi MM. les bibliothécaires de Limoges, de Nancy et tous ceux qui nous ont aidé dans nos recherches. CHAPITRE PREMIER La grande pitié du royaume de France. La grande pitié du royaume de France durant Penfance de Jeanne d'Arc est un sombre et tra- gique tableau. Un roi fou, une reine sensuelle, deux ducs ambitieux et rivaux, un grand conquérant, deux assassinats politiques, une défaite désastreuse, une révolution, la peste, un traité qui livre Paris et la France à Pennemi héréditaire, rien ne manque. C'est cependant cet état désespéré de la France qui a été la condition première de la vocation de Jeanne d'Arc, car c'est au plus fort de la crise que la Providence suscite la libératrice. Or cette agonie dans laquelle la France se débattait, comme un moribond qui ne veut pas mourir, était causée avant tout par la rivalité des maisons d'Orléans et de Bourgogne. On ne peut donc se dispenser pour comprendre la vocation de Jeanne d'Arc de repasser au moins d'une manière sommaire l'histoire de cette rivalité. On se souvient certainement de ce jeune fils de Jean le Bon, qui, au plus fort de la bataille de Poitiers, alors que ses frères avaient fui, était demeuré auprès de son père, l'avertissant : « Père, gardez- vous à droite, père, gardez-vous à gauche. » Cet acte d'audace fut le principe, l'acte générateur de cette seconde maison de Bourgogne qui faillit perdre la Jeanne d'Arc 1 2 JEANNE D'ARC Franco, nous sommes ici à la source de toute une longue histoire. En cfïct, quelques mois seulement avant de mourir, Jean le Bon, roi de France, légua à son plus jeune fils, comme par testament, la Bourgogne en apanage « en raison, disait la charte, de ce que le dit Philippe s'est exposé de son plein gré à la mort pour nous, et, tout blessé qu'il était, resta inébran- lable et sans peur durant la bataille de Poitiers » K Par ce legs, Philippe qu'on nomma le Hardi, devint duc de Bourgogne. Une hardiesse, une audace qui plus tard devait dégénérer en témérité folle, semble avoir été héréditaire en cette famille 2. Le duché de Bourgogne, ainsi engendré par Fau- dace, ne tarda pas à s'accroître en tendant vers le nord, en entrant en contact avec le comté de Flandre et en se soudant avec lui. Philippe le Hardi avait été marié avec Marguerite de Flandre, unique enfant légitime de Louis le Mâle ; à la mort de ce dernier en 1384, Philippe devint comte de Flandre, d'Artois et de Franche Comté s. Par cette succession 1 DOM P L A N C H E R , Histoire de Bourgogne, II, p. 278. 2 Philippe le Hardi a pour fils Jean sans Peur qui a pour petit-fils Charles le Téméraire. * C'était Charles V roi de France qui, pour faire échec aux combinaisons politiques do son redoutable adversaire Edouard III, avait machiné ce mariage do Philippe le Hardi, avec Marguerite de Flandre. On le blâma do n'avoir pas demandé pour lui-même la main de cette Marguerite, mais fi l'estimait trop laide au dire de Froissart. Cependant il eut soin de stipuler que. à la mort du Comte de Flandre, Lille, Douai, Orchics reviendraient à la couronne de France. Natu- rellement Philippe le Hardi oublia cette clause. Ce sont donc les rois de France, Jean le Bon et Charles V, qui créèrent de toutes pièces le duché de Bourgogne. LA GRANDE PITIÉ DU ROYAUME DE FRANCE 3 Philippe le Hardi devenait le plus puissant parmi tous les princes de l'Europe qui ne portaient pas le titre de roi et il se taillait entre la Seine et le Rhin une sorte de royaume du nord. Il eut l'habileté, sous prétexte de venger l'honneur du roi de France, do faire travailler les Français à la prospérité de sa maison. Durant la minorité de Charles VI, il conduisit le jeune roi avec uploads/Religion/ sainte-jeanne-d-x27-arc.pdf
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- Publié le Jui 13, 2022
- Catégorie Religion
- Langue French
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