La chlamydiose aviaire est une zoonose due à Chlamydophila psittaci. Historique

La chlamydiose aviaire est une zoonose due à Chlamydophila psittaci. Historiquement, le terme de « psittacose » était utilisé pour désigner l’infection des psittacidés et de l’homme alors que le terme de « ornithose » était réservé à l’infection des autres oiseaux. Ces maladies étant identiques, seul le terme chlamydiose aviaire est doréna- vant utilisé en médecine vétérinaire. En médecine humaine, le terme psittacose est préférentiellement utilisé. LA BACTÉRIE Parasites intracellulaires obligatoires, les chlamydies sont des petites bactéries à Gram négatif, pathogènes à la fois pour les animaux et l’Homme. Un cycle de multiplication particulier Le cycle de multiplication des chlamydies comporte des étapes intra- et extra- cellulaires faisant alterner principalement deux formes distinctes qui interviennent à des moments bien précis au cours du cycle : les corps élémentaires (CE) et les corps réticulés (CR) (Figure 1). Ayant un tropisme pour les cellules épithéliales bordant les muqueuses, le CE s’y attache puis est rapidement internalisé en promouvant sa propre ingestion dans des phagocytes non professionnels. Le CE occupe ainsi une niche écologique non exploitée et minimise ainsi les interactions avec les défenses cellulaires de l’hôte. Pour survivre, le CE contenu dans les vésicules d’endocytose doit déjouer les stratégies de défense de la cellule hôte et éviter, par un mécanisme toujours inconnu, la fusion de la vésicule avec les lysosomes de la cellules hôte. Très rapidement, au sein de la vacuole, le CE sort de son état de dormance et subit de nombreuses modifications physiques. Le CE, après un passage par une étape intermédiaire, se transforme finalement en une forme métaboliquement active, le CR. Huit à douze heures après l’infection, les chlamydies se présentent sous la forme de CR métaboliquement actifs. Elles démarrent leur multiplication par division binaire, conduisant à la formation d’une inclusion qui s’agrandit en même temps que leur nombre augmente. À partir de la 20 e heure, les CR commencent à se réorganiser en CE matures. L’évolution finale aboutit à la libération de 100 à plus de 1 000 CE qui peuvent infecter les cellules voisines et initier un nouveau cycle. La classification En raison de leur cycle de multiplication très original, les chlamydies ont été classées dans un ordre à part (Chlamydiales) lui-même composé d’une seule famille (Chlamydiaceae). La taxonomie des chlamydies a connu de récents remaniements et la famille des Chlamydiaceaes a été scindée en 2 genres et 9 espèces principalement sur la base de l’analyse des séquences des gènes ribosomaux 16S et 23S (Tableau 1) [1]. La chlamydiose aviaire Synonymes : ornithose, psittacose, fièvre du perroquet 4 Karine Laroucau (1) et Jean-Luc Guérin (2) (1) Unité Zoonoses Bactériennes, Afssa, Laboratoire d’études et de recherches en pathologie animale et zoonoses, Maisons-Alfort (2) Unité Productions Animales - Pathologie aviaire et porcine, École nationale vétérinaire de Toulouse Figure 1 : Cycle de développement des Chlamydies Légende : CE : corps élémentaires CI : corps intermédiaires CR : corps réticulés Le genre Chlamydia comprend ainsi les espèces C.trachomatis (humain), C.suis (porc) et C. muridarum (souris et hamster). Le genre Chlamydophila comprend les espèces C. abortus (ovin, bovin, caprin), C. caviae (cochon d’indes), C. felis (chat), C. pecorum (ovin, bovin, caprin), C. pneumoniae (humain) et C. psittaci (oiseaux). Les souches aviaires Les souches aviaires appartiennent à l’espèce C. psittaci. Cette espèce comprend 6 sérovars aviaires connus et 2 serovars mammifères : M56 isolée à partir de rats musqués et la souche WC isolée de bovins. Les souches M56 et WC ont chacune été isolées à la suite d’épidémies uniques. Les 6 sérovars aviaires sont identifiés de A à F et inféodés, en partie ou totalement, à une espèce ou à une famille particulière d’oiseaux (Tableau 2). Les hôtes auxquels ces sérovars sont majoritairement associés sont : A, psittacidés – B, pigeons – C, canards et oies – D, dindes – E, pigeons et ratites et F, un isolat unique à partir d’un psittacidé. Cette classification repose sur l’utilisation d’un panel d’anticorps monoclonaux. Les nouveaux outils de biologie moléculaire ten- dent à préciser, à affiner cette classification. Récemment, sur la base du séquençage du gène ompA, un nouveau génotype nommé E/B a été décrit [2]. Les hôtes Les infections aviaires à C. psittaci ont une répartition mondiale. La bactérie ayant été retrouvée chez plus de 450 espèces d’oiseaux domestiques et sauvages [3], pratiquement toutes les espèces d’oiseaux peuvent être considérées comme réservoirs potentiels des chlamydies. LA MALADIE La maladie chez les oiseaux La plupart des infections aviaires se traduisent par un portage asymptomatique. Les oiseaux extériorisent généralement la maladie lorsque leur résistance générale est amoindrie à la suite de facteurs de stress (surpeuplement, infections intercurrentes, conditions d’hygiènes défectueuses, carences nutritionnelles, transport de longue durée…). La chlamydiose aviaire est souvent décrite dans la littérature comme une affection sévère, débilitante voire fatale chez l’oiseau. Cependant l’expression clinique est extrêmement variable notamment en fonction de la souche, de l’âge et de l’espèce des animaux atteints. La symptomatologie n’est pas caractéristique : fièvre, diarrhée, conjonctivite, anorexie, amaigrissement et insuffisance respiratoire. Les conjonctivites sont fréquentes. À l’autopsie, une aérosacculite peut être observée, ainsi que des poumons oedémateux ou congestionnés et un foie hypertrophié et marbré. Une splénomégalie peut être observée chez les psittacidés, ainsi qu’une épicardite ou une myocardite chez la dinde. Il faut noter que ces signes cliniques et lésionnels n’ont rien de spécifique et que, dans le contexte du terrain, il est le plus souvent impossible d’établir une relation de causalité avec la chlamydiose. Retenons que, si chez les psittacidés la chlamydiose se manifeste souvent par un tableau clinique, elle est presque toujours inapparente chez les volailles. La chlamydiose aviaire a longtemps été une Maladie animale Réputée Contagieuse (MRC en juillet 1937 limitée aux seuls psittaciformes, puis étendue à toutes les espèces d’oiseaux en août 1965). Supprimée de la liste des MRC en février 1995, elle vient d’être inscrite sous le nom de chlamydophilose aviaire sur la liste des Maladies Animales à Déclaration Obligatoire (Décret 2006-179 du 17 février 2006). Les sources d’infection et modes de transmission Les oiseaux infectés, qu’ils soient malades ou non, excrètent via leurs déjections un grand nombre de chlamydies dans l’environnement. En séchant, les fientes se transforment en poussières très infectieuses. L’excrétion, continue ou non, de germes par des animaux apparemment en bonne santé est possible et constitue sans doute une source majeure de bactéries. La contamination entre oiseaux se produit par inha- lation de poussières contaminées et dans certains cas par ingestion (coprophagie, cannibalisme). La transmission par l’œuf semble peu fréquente. Elle a toutefois été démontrée chez le canard et la dinde et conduirait le plus souvent à des infections inapparentes. Les arthropodes (poux, mites…) peuvent transmettre l’infection mais l’importance de ce mode de transmission est inconnue. LE DIAGNOSTIC Le diagnostic de chlamydiose peut être rendu difficile en raison des infections latentes asymptomatiques observées chez les oiseaux. La détection de la bactérie La méthode de choix pour l’identification de l’infection est l’isolement et l’identifi- cation de l’organisme. En raison de la durée d’analyse, de la nécessité de disposer de prélèvements de haute qualité, et du risque d’exposition du personnel de laboratoire, la culture cellulaire ou sur œufs embryonnés est souvent délaissée pour d’autres techniques plus conviviales. Celles ci incluent les colorations histochimique, immuno- histochimique ou cytologique, l’immunofluorescence, les tests ELISA pour la détection des antigènes ou encore la PCR. Cette dernière technique, reposant sur la mise en évidence de l’ADN bactérien, constitue une alternative intéressante à la culture.Très sensible et spécifique, quelque soit l’état de viabilité de la bactérie, la PCR est une méthode facile à mettre en œuvre. Classiquement, les amorces utilisées sont spécifiques de séquences des chlamydies (MOMP,ARN ribosomaux 16S et 23S). Les nouveaux protocoles de PCR en temps réel permettent d’abaisser le seuil de détection (détection de quelques copies de génomes) et permettent également de quantifier le niveau d’infection des oiseaux et donc de mieux évaluer le risque zoonotique. En parallèle, de nouveaux outils tels que les puces à ADN sont en cours de dévelop- pement pour les chlamydies [4] et devraient permettre, dans un proche avenir, la détection de la bactérie ainsi que son identification précise. La détection des anticorps La présence d’anticorps témoigne d’une infection en cours ou passée. Bien que coûteux et de mise en œuvre lourde, le test de fixation du complément est le test sérologique le plus utilisé. La méthode modifiée comprend l’ajout d’un sérum de poulet qui permet d’atténuer l’activité anticomplémentaire du sérum de certaines espèces aviaires. Ce test ne permettant pas de distinguer les IgM et les IgG, il est nécessaire de recourir à des échantillons couplés. Un test ELISA reposant sur la détection d’anticorps dirigés contre une protéine majeure de la membrane externe, la MOMP, a été développé pour les dindes. Ce test semble plus sensible et plus spécifique que le test de fixation du complément. Néanmoins, il ne semble pas y avoir de corrélation convaincante entre les statuts sérologique et bactériologique [5]. En particulier, l’infection à C. psittaci a pu être démontrée chez le canard, y compris en l’absence de tout signe clinique, tandis qu’aucun marquage uploads/Sante/ bep-mg-be22-art2.pdf

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  • Publié le Sep 19, 2021
  • Catégorie Health / Santé
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