Examen National Classant Module transdisciplinaire 11 : Synthèse clinique et th
Examen National Classant Module transdisciplinaire 11 : Synthèse clinique et thérapeutique NOUVEAU Grosse jambe rouge aiguë J.-M. BONNETBLANC (Limoges), P. BERNARD (Reims), A. DUPU (Saint-Louis, Paris) Objectifs – Diagnostiquer une grosse jambe rouge aiguë. – Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge. L a « grosse jambe rouge aigüe » réalise un tableau clinique d’installation rapide en quelques heures (maximum 48 heures) associant un placard érythèma- teux assez bien limité, parfois extensif, uni ou bilatéral, associé souvent à un œdème et pouvant s’accompagner de signes infectieux. Un œdème du membre inférieur peut être primitif, du à la maladie causale, ou être secondaire à une pathologie associée (insuffisance lymphatique ou veineuse). Il est responsable d’une partie de la symptomatologie locale et doit être pris en compte dans le traitement. LE DIAGNOSTIC POSITIF L’interrogatoire Il fait préciser : −la date de début et les modalités évolutives (début brutal ou insidieux, extension rapide ou lente, ...), −la précession par des prodromes : frisson, douleur lo- cale... ; −les antécédents chirurgicaux sur le membre concerné : chirurgie osseuse ou vasculaire, présence d’un corps étran- ger... ; −un antécédent récent d’une pathologie du pied ou de la jambe (douleur ou prurit inter-orteils, traumatisme, grattage, arthralgie, entorse ou tendinite de la cheville, ...) ; −la notion d’un œdème chronique de jambe soit par stase veineuse (insuffisance veineuse, post phlébitique, ...) ou par stase lymphatique, avec la présence éventuelle d’un ulcère de jambe ; −les traitements déjà instaurés, notamment les antibioti- ques par voie générale et les traitements topiques ; −la notion de morsure animale, de piqûre ; −l’existence de maladies associées : diabète, insuffisance veineuse, artériopathie, rhumatismes..., sans oublier un alcoolisme chronique. Les signes subjectifs locaux sont variables. Une sensation de brûlure locale est plus fréquente, de tension douloureuse si l’œdème est important. Un prurit peut être présent. La symptomatologie douloureuse est aggravée par la position déclive, ou la palpation. L’examen clinique Il recherche : −le siège uni- ou bilatéral des lésions ; −la nature des lésions élémentaires cutanées. Par défini- tion l’érythème est associé à un œdème. Le plus souvent l’érythème est rouge vif. L’œdème de la plaque est souvent tendu mais dépressible. Sa palpation est douloureuse. L’œdème peut être plus étendu, ferme, avec perte de ballot- tement du mollet. Une douleur à la pression ou à la dorsiflexion du pied font évoquer une thrombose veineuse profonde. Des vésicules et/ou des bulles peuvent être présen- tes. Un œdème de constitution rapide peut entraîner des décollements superficiels étendus, en particulier chez le sujet âgé. Il faut rechercher attentivement : −des lésions de nécrose superficielle ou profonde (elles sont marquées par une pâleur de certaines zones ou des plaques noirâtres) ; −la bonne limitation des lésions cutanées et leur étendue sont évocatrices d’un érysipèle (diagnostic le plus fréquent) ; −une porte d’entrée potentielle : intertrigo inter-orteils, ulcère de jambe, plaie traumatique, excoriations, lésions de grattage, piqûre d’insecte... ; −des signes neurologiques (hypo- ou anesthésie superfi- cielle) ; −des signes d’insuffisance veineuse chronique : œdème vespéral, varices, dermatoliposclérose ; −les pouls périphériques pédieux et tibial postérieur, parfois difficiles à palper avec l’œdème ; −des signes régionaux : lymphangite, adénopathie inflam- matoire inguinale homolatérale. La mobilité articulaire est conservée, un épanchement articulaire réactionnel est rare ; −des signes généraux : fièvre, altération de l’état général, signes de choc toxi-infectieux (hypotension, cyanose). 2S170 Ann Dermatol Venereol 2002;129:2S170-2S175 Les signes de gravité Leur présence doit conduire à un diagnostic étiologique et à une prise en charge rapides. Leur présence fait suspecter une fasciite nécrosante (tableau I). Le rôle délétère ou aggravant des anti-inflammatoires non stéroïdiens a été suspecté, sans jamais être prouvé. Il faut systématiquement les rechercher et, par précaution, les arrêter. Les examens complémentaires Il n’y a pas de bilan standard devant une grosse jambe rouge. Les examens à demander doivent préciser : −la nature infectieuse : prélèvement bactériologique de toute lésion de jambe avec effraction cutanée, d’un intertrigo inter-orteil, numération et formule sanguine, protéine C réactive, antistreptolysines O (ASLO), antistreptodornases (ASD). Ils ne sont pas indispensables en cas d’érysipèle typique et leur rentabilité diagnostique (ASLO, ASD) est faible. En cas de suspicion de thrombose veineuse : D-dimères, echo-Doppler des membres inférieurs ; En cas de signes de gravité : enzymes musculaires, iono- gramme sanguin, pH et gaz du sang (acidose métabolique ?), coagulation (coagulation intravasculaire disséminée ?). L’imagerie (radiologie, échographie des parties molles, examen par résonance magnétique) est limitée aux tableaux évocateurs de fasciite nécrosante. L’échographie peut être utile pour dépister un abcès profond. DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE Erysipèle L’érysipèle est une dermo-hypodermite aiguë bactérienne à streptocoques -hémolytiques A, plus rarement B, C ou G). C’est une maladie fréquente. C’est le premier diagnostic à évoquer par argument de fréquence devant une grosse jambe rouge aiguë et fébrile. La maladie s’observe le plus souvent chez l’adulte après 40 ans, avec un âge moyen de survenue vers 60 ans. L’atteinte des membres inférieurs est favorisée par l’insuffisance veineuse et (ou) lymphatique. Les facteurs favorisants sont locaux (lymphœdème, porte d’entrée inter- trigo inter-orteil, ulcère de jambe) et généraux (obésité). Le diabète et l’éthylisme chronique ne sont pas démontrés comme étant des facteurs de risque. La forme habituelle est rencontrée chez l’adulte, où elle donne un tableau de « grosse jambe rouge aiguë fébrile » unilatérale. Le début est brutal, par une fièvre élevée (39° à 40 °C) accompagnée de frissons, qui souvent précède de quelques heures l’apparition du placard cutané inflammatoire. C’est une plaque érythémateuse, œdémateuse, circonscrite et dou- loureuse à la palpation. Un bourrelet périphérique marqué est rarement retrouvé. Dans certains cas, des décollements bulleux superficiels, conséquence mécanique de l’œdème dermique, ou un purpura, sont observés sur le placard. Des adénopathies inflammatoires homolatérales sont fré- quemment associées. Une traînée de lymphangite homolaté- rale est présente dans un quart des cas. Une porte d’entrée est décelable cliniquement dans les 2/3 des cas. Il s’agit de portes d’entrées cutanées minimes (intertrigo interdigito-plantaire, piqûre, traumatisme avec effraction cutanée passée inaperçue) ou évidentes (ulcère de jambe). Devant un tableau typique et en l’absence de comorbidité, aucun examen complémentaire n’est nécéssaire. Sinon ils montreraient une hyperleucocytose généralement impor- tante (≥10 000/mm3) avec polynucléose neutrophile (> 7 000/mm3). Le syndrome inflammatoire biologique est important (VS ≥80 mm à la 1re heure ; protéine C réactive (CRP) souvent > 100 mg/L d’emblée). Les hémocultures sont de faible rentabilité ; elles ne sont pas réalisées systématique- ment. Des formes subaiguës, où la fièvre et l’hyperleucocytose sont modérées, voire absentes, ne sont pas rares, notamment au membre inférieur. Dans ces cas, le diagnostic repose sur les caractères cliniques du placard inflammatoire cutané et sa régression sous antibiothérapie antistreptococcique. L’évolution est favorable en 8 à 10 jours sous traitement antibiotique dans plus de 80 p. 100 des cas. L’apyrexie est obtenue en 48 à 72 heures ; elle signe l’éfficacité du traite- ment. Les signes locaux s’améliorent plus lentement, en une semaine. Une phase d’extension dans les premières 24 heures sous traitement (érythème débordant les limites initiales déssinées au feutre) est fréquemment observée. Une Tableau I. −Marqueurs de sévérité de l’érysipèle Signes généraux et symptomes Fièvre élevée avec confusion Désorientation Tachypnée Tachycardie Oligurie Hypotension Pâleur Signes locaux Douleur locale intense Œdème majeur Bulles hémorragiques Nécrose focale Hypoesthésie Livedo Crépitation Autres facteurs Co-morbidité : diabète, obésité Contexte social : sans domicile fixe Grosse jambe rouge aiguë Ann Dermatol Venereol 2002;129:2S170-2S175 2S171 phase de desquamation superficielle secondaire est parfois observée. Des complications locales surviennent dans 5 à 10 p. 100 des cas, surtout en cas de maladies associées, d’immunodé- pression. Des abcès localisés superficiels, plus rarement profonds, doivent être incisés et drainés, parfois sous anes- thésie générale. Les complications systémiques sont très rares (< 5 p. 100 des cas) : septicémie à streptocoque, glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique, voire érythème noueux. La récidive est la complication la plus fréquente ; elle touche 20 p. 100 des malades. Elle survient sur un terrain d’insuffisance veineuse ou lymphatique chronique et elle est souvent associée à la persistance ou la récidive d’une porte d’entrée chronique (dermatose, ulcère de jambe). Autres dermo-hypodermites infectieuses Le tableau clinique est variable. Il peut ressembler à un érysipèle. Ce tableau semble plutôt s’observer chez des malades immunodéprimés. Les germes rencontrés sont Staphylococcus aureus, Pseudomonas aerugi- nosa principalement ou des germes transmis par contact avec une eau souillée (Vibrio vulnificus, Aeromonas hydrophila). Le tableau clinique est le plus souvent une dermo- hypodermite à évolution subaiguë. L’inflammation apparaît plus profonde et l’érythème est moins bien limité. Cette évolution subaiguë s’observe aussi après un début initial simulant un érysipèle ; l’évolution est moins favorable, avec une dermo-hypodermite qui ne répond pas au traitement anti-infectieux. Le diagnostic à éliminer est celui d’une fasciite nécrosante. Il faut rechercher une anesthésie locale et les autres signes de gravité locaux ou généraux. Le tableau peut être plus aigü avec des signes locaux de gravité d’emblée. La présence de zones nécrotiques est évocatrice. Les signes généraux sont marqués, ainsi que les signes infectieux. Les examens complémentaires sont de peu d’utilité. Le diagnostic de fasciite nécrosante doit amener une prise en uploads/Sante/ dermato-grosse-jambe-rouge-aigue-erysipele-pdf.pdf
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- Publié le Oct 12, 2021
- Catégorie Health / Santé
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