Examen clinique et paraclinique du patient atteint de vertiges et/ou de trouble
Examen clinique et paraclinique du patient atteint de vertiges et/ou de troubles de l’équilibre M Toupet S Imbaud-Genieys Résumé. – Devant tout vertige ou trouble de l’équilibre, l’examen du patient débute par un interrogatoire précis visant à orienter le diagnostic selon quatre hypothèses diagnostiques différentes : vertiges brefs, positionnels, à répétition, type vertige paroxystique bénin ; vertiges de quelques heures, à répétition, avec signes cochléaires associés, type maladie pressionnelle de l’oreille ; grand vertige rotatoire de plusieurs jours, type névrite vestibulaire ; déséquilibres ou instabilités. Cet interrogatoire est complété par un examen clinique vestibulaire venant conforter l’hypothèse diagnostique dans près de trois quarts des cas : un nystagmus avec vertige de position évoquant un vertige paroxystique positionnel bénin ; des signes cliniques de déficit vestibulaire périphérique harmonieux évoquant une névrite ; des signes cliniques ayant valeur d’atteinte centrale ; un examen normal. En fonction de l’orientation clinique sont prescrits différents examens complémentaires : un examen vidéonystagmographique comprenant une épreuve calorique, un examen vidéo-oculographique et une verticale subjective ; des potentiels évoqués otolithiques sacculocolliques ; un bilan audiométrique complet avec potentiels évoqués auditifs ; un bilan biologique et une imagerie si nécessaire. Parmi ces examens complémentaires, l’épreuve calorique reste toujours un des examens les plus contributifs au diagnostic, associé aux examens audiométriques. © 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : nystagmus, vertiges, vidéonystagmographie, vidéo-oculographie, vertiges positionnels paroxystiques bénins, maladie de Ménière, névrite vestibulaire, déséquilibres. Introduction Le vertige est une pathologie fréquente. Le médecin généraliste, en pratique, examine par semaine cinq patients présentant des vertiges ou des déséquilibres, dont trois en consultation et deux en visite à domicile [27]. Il adresse son patient à l’oto-rhino-laryngologiste (ORL) pour un diagnostic et une prise en charge dans 80 % des cas. En 1980, seuls 6 % des patients vertigineux étaient adressés aux ORL [26] : depuis une vingtaine d’années, l’ORL est donc reconnu compétent sur cette pathologie difficile et en pleine évolution. Les trois quarts des diagnostics sont cliniques, et environ la moitié reposent déjà sur les données de l’interrogatoire. L’autre quart est révélé par l’examen vidéonystagmographique et les autres explorations complémentaires. Définitions VERTIGE Le mot vertige vient du latin « vertere » : tourner. Le vrai sens médical de ce mot doit correspondre à une sensation de rotation, soit de l’environnement, soit de son propre corps. Avec le vertige apparaît un déséquilibre et/ou une sensation de déséquilibre. Il existe une autre sorte de vertige, celui de la pathologie otolithique où le patient ne voit pas tourner, mais sent la pièce s’incliner, osciller, pencher. TROUBLE DE L’ÉQUILIBRE Le trouble de l’équilibre peut être ressenti par le patient de façon isolée, sans vertige. Le mot équilibre vient du latin « libra » : balance. Il se définit comme une égalité de force entre deux ou plusieurs choses qui s’opposent. DÉSÉQUILIBRE Le déséquilibre est cette dérive de l’équilibre postural, qui échappe au contrôle volontaire et entraîne vers la chute. Cette régulation subtile, que l’on peut appeler le contrôle postural fin lorsqu’on est debout, immobile, est assurée par la triple entrée sensorielle visuelle, labyrinthique et proprioceptive, et maintient l’équilibre postural de façon automatique. SENSATION DE DÉSÉQUILIBRE C’est la sensation subjective que le corps ne garde pas son équilibre. Cette sensation peut être erronée, le corps étant parfaitement stable, ou réelle. DIFFÉRENTES ÉTIOLOGIES Toutes les pathologies vestibulaires ne s’expriment pas par des vertiges. Si la pathologie est chronique, lentement évolutive, tel un neurinome de l’acoustique, la pathologie s’exprimera peut-être par un déséquilibre. Michel Toupet : Docteur, ancien assistant des Universités, assistant des hôpitaux de Paris. Sylvie Imbaud-Genieys : Docteur, ancien interne des hôpitaux de Paris, ancien assistant spécialiste des hôpitaux de Paris. Centre d’explorations fonctionnelles oto-neurologiques, 10, rue Falguière, 75015 Paris, France. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 20-199-A-10 20-199-A-10 Toute référence à cet article doit porter la mention : Toupet M et Imbaud-Genieys S. Examen clinique et paraclinique du patient atteint de vertiges et/ou de troubles de l’équilibre. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Oto-rhino-laryngologie, 20-199-A-10, 2002, 21 p. Ainsi, la pathologie vestibulaire correspond soit à des vertiges rotatoires, soit à des sensations erronées de déplacements linéaires, soit à des déséquilibres. De même, tous les vertiges ne sont pas forcément vestibulaires. On peut avoir des sensations vertigineuses dans le cas d’une pathologie musculaire cervicale ou oculomotrice, ou purement neurologique, sans atteinte vestibulaire périphérique, mais touchant les voies et centres vestibulaires centraux. On ne trouve que ce que l’on cherche, et il nous faut donc dans un premier temps récapituler les grands diagnostics des vertiges et leurs pièges diagnostiques, pour bien préciser le but de l’examen clinique et paraclinique. DIAGNOSTICS Nous distinguons quatre principales familles diagnostiques. ¶ Vertige paroxystique positionnel bénin (VPPB) Il s’agit d’un vertige bref positionnel qui se répète depuis plusieurs jours, plusieurs semaines. L’interrogatoire cherche à éliminer les diagnostics différentiels : les fistules endolymphatiques, les lésions de la fosse postérieure et les rares conflits vasculonerveux (nouvelles pathologies otoneurologiques émergentes dont on ignore la vraie prévalence). ¶ Vertiges récurrents Les vertiges récurrents de quelques heures, dont le type est la maladie de Ménière, peuvent être ou non associés à des signes auditifs. Les diagnostics différentiels le plus couramment recherchés sont les maladies auto-immunes, l’otospongiose, l’otite chronique, le cholestéatome, la fistule ou fuite de liquide labyrinthique et le neurinome de l’acoustique (le schwannome vestibulaire). ¶ Grand vertige rotatoire Le grand vertige rotatoire évoluant pendant quelques jours a pour type la névrite vestibulaire. Parmi les diagnostics différentiels, on note l’accident aigu des noyaux vestibulaires ou du vestibulocérébellum (archéocervelet et vermis), la fracture du rocher a minima. ¶ État de déséquilibre L’état de déséquilibre fait évoquer : – une atteinte otolithique ; les troubles de l’équilibre sont en général déclenchés par des stimulations otolithiques répétées (un trajet en voiture, essentiellement sur autoroute, l’ascenseur) ; ils peuvent survenir de façon isolée ou dans le cadre d’un VPPB ; – un déficit vestibulaire bilatéral périphérique ; après un début intense, le déséquilibre s’amende progressivement au fil du temps ; penser à l’intoxication aux aminosides ; – un syndrome postural phobique ; l’état de déséquilibre est constant depuis plusieurs mois ou plusieurs années ; le bilan clinique est tout à fait normal, avec une exploration fonctionnelle et un bilan neuroradiologique normal ; – chez le sujet âgé, la presbyataxie, qui peut être majorée par certains médicaments (les hypotenseurs et tout particulièrement les diurétiques, les sédatifs, surtout les benzodiazépines) ; – une atteinte centrale, bien que beaucoup plus rare : un schwannome vestibulaire, une maladie dégénérative des noyaux gris centraux ou du cervelet, un syndrome extrapyramidal, une lésion d’origine vasculaire telle la leucoaraïose, une hydrocéphalie à pression normale. Rappel anatomique et physiologique L’appareil vestibulaire, dans chaque oreille, est constitué de deux parties : les canaux semi-circulaires et les organes otolithiques. Les canaux semi-circulaires comprennent, de chaque côté, un canal semi- circulaire horizontal, un canal semi-circulaire vertical antérieur et un canal semi-circulaire vertical postérieur. Les organes otolithiques comprennent, de chaque côté, un utricule et un saccule. L’appareil labyrinthique contient des capteurs d’accélération dans l’oreille interne : les canaux semi-circulaires mesurent les accélérations angulaires dans les trois plans de l’espace ; le système otolithique, utricule et saccule, mesure les accélérations linéaires [63] dans toutes les directions de l’espace (préférentiellement dans le plan horizontal pour l’utricule et dans le plan vertical pour le saccule). Ces informations de mouvement sont ensuite transformées en activité électrique et transmises à notre cerveau grâce : – aux cellules neurosensorielles situées sur les crêtes ampullaires dans les canaux semi-circulaires et sur les macules dans les organes otolithiques ; – puis au nerf vestibulaire composé de deux branches : branche supérieure comprenant les nerfs canalaires antérieur et horizontal, et utriculaire ; branche inférieure comprenant les nerfs canalaire postérieur et sacculaire. Le nerf vestibulaire transmet ensuite les informations aux noyaux vestibulaires situés dans le tronc cérébral. Il s’agit de véritables petits ordinateurs qui reçoivent des informations, non seulement de l’appareil vestibulaire homo- et controlatéral, mais aussi du système visuel, proprioceptif spinal, cérébelleux et cortical. Des noyaux vestibulaires partent les neurones vestibulaires centraux à destination des motoneurones spinaux (système vestibulospinal), des motoneurones oculomoteurs (système vestibulo-oculomoteur) et de quelques aires corticales. Le système vestibulospinal permet les réactions d’équilibration et d’adaptation du corps aux mouvements. Le système vestibulo-oculaire permet la stabilisation de la vision lors des mouvements. Ces informations permettent de savoir si c’est nous qui bougeons ou l’environnement, et de connaître la vitesse et la direction du mouvement. Les réflexes vestibulo-oculaires et vestibulospinaux sont soumis à un contrôle cérébelleux grâce aux cellules de Purkinje du flocculus, qui se projettent également sur les noyaux vestibulaires. Examen clinique INTERROGATOIRE Première étape diagnostique indispensable : faire préciser par le patient les caractéristiques du vertige : – sa durée ; – son caractère rotatoire ou la sensation de tangage perçue par le patient ; – la fréquence des crises vertigineuses ; – l’existence de signes auditifs associés (baisse d’audition, acouphènes) ; – l’existence de céphalées associées évoquant des céphalées de tension ou des migraines, leur rapport dans le temps avec les uploads/Sante/ examen-clinique-et-paraclinique-du-patient-atteint-de-vertige-et-ou-de-troubles-de-l-x27-equilibre-p-4 1 .pdf
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- Publié le Dec 22, 2022
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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