Annales Pharmaceutiques Françaises (2010) 68, 332—358 REVUE GÉNÉRALE Déconditio
Annales Pharmaceutiques Françaises (2010) 68, 332—358 REVUE GÉNÉRALE Déconditionnement et stabilité des formes orales sèches solides : états des connaissances Current perspectives on the repackaging and stability of solid oral doses F. Lagrange Service pharmacie laboratoire, centre hospitalier spécialisé, Mas et IME de la Charité, 51, rue des Hostelleries, BP 137, 58405 La Charité-sur-Loire, France Rec ¸u le 2 mai 2010 ; accepté le 20 aoˆ ut 2010 MOTS CLÉS Dose unitaire ; Forme orale sèche ; Reconditionnement ; Aide à l’observance ; Date limite d’utilisation ; Rapport bénéfice—risque Résumé Quelles sont les recommandations scientifiques relatives au déconditionnement- reconditionnement en France en 2010 alors que celui se développe ? L’extraction provisoire ou définitive de l’atmosphère originelle du conditionnement industriel primaire pour suivre le processus de reconditionnement semble être à la base de la controverse actuelle. Cependant, il s’agit de reconditionner avec des matériaux de qualité définie. Considérant cela, nous passons en revue la littérature et les recommandations internationales pour déterminer les conditions de stabilité et d’utilisation des spécialités orales sèches déconditionnées tout au long du processus de reconditionnement. Malgré l’absence d’études de stabilité publiées, différentes alternatives pourraient permettre d’établir de manière scientifique un délai d’utilisation maximal. Ainsi, la comparaison de la perméabilité à la vapeur d’eau des emballages, des modèles galéniques de molécules hygroscopiques et photosensibles ou les études de compatibilité médicament- excipient en phase de préformulation pourraient sécuriser la liste des médicaments pouvant être reconditionnés. Si l’on cherche à appliquer le principe de précaution, il apparaît légitime de disposer également de données de stabilité pour les blisters industriels et les doses unitaires d’origine circulant dans les conditions réelles du circuit du médicament en établissement de santé. Finalement, le bénéfice de la préparation centralisée, l’amélioration de la compliance et la diminution des erreurs d’administration doivent être remis en perspective avec le risque de cet acte pharmaceutique. Cette revue offre la possibilité de construire une liste de médi- caments à reconditionner et des éléments de réflexion pour le pharmacien engagé dans son analyse des risques. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Adresses e-mail : fabrice.lagrange@chs-lacharite.fr, fabrice.lagrange@laposte.net. 0003-4509/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.pharma.2010.08.003 Déconditionnement et stabilité des formes orales sèches solides 333 KEYWORDS Unit-dose; Solid oral medication; Repackaging; Safety risk; Compliance aids; Expiration dating; Beyond-use dating Summary Which are the guidelines and scientific aspects for repackaged oral solid medica- tions in France in 2010 whereas it develops? The transient or definitive displacement of the solid oral form from the original atmosphere to enter a repackaging process, sometimes auto- mated, is likely to play a primary role in the controversy. However, the solid oral dose is to be repackaged in materials with defined quality. Considering these data, a review of the literature for determination of conditions for repackaged drug stability according to different interna- tional guidelines is presented in this paper. Attention is also paid to the defined conditions ensuring the conservation and handling of theses drugs throughout the repackaging process. However, there is lack of scientific published stability data. Nevertheless, recent alternatives may be proposed to overcome the complexity of studying stability in such conditions. Then, the comparison of the moisture barrier properties of the respective package, a galenic model of hygroscopic molecules, or light sensitive molecules or stability data obtained during the indus- trial preformulation phase could also secure the list of drugs to be reconditioned. Similarly, a wise precaution will be to get stability data for the industrial blisters and unit doses undergoing the real conditions of the medication use process in hospitals and other healthcare settings. By now, reduction of dispensing errors and improvement of the compliance aid put a different perspective on the problem of repackaged drugs. To date, the pharmacist is advised to carry out its analysis of the risks. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Introduction La qualité du médicament est étroitement dépendante de la qualité du conditionnement primaire [1]. Celui-ci « garantit au patient que la préparation médicamenteuse qu’il contient satisfait aux exigences pharmacopées en vigueur et de ce fait que sa qualité est préservée » [1]. L’ensemble conditionnement primaire et articles de condi- tionnement secondaire assure un rôle de protection, un rôle fonctionnel et un rôle d’identification [2]. Ainsi, « il n’y a pas de médicament sans conditionnement » [2] et le galéniste le conc ¸oit pour faciliter et optimiser la prise du médica- ment [3]. Finalement, « c’est en terminant les opérations de conditionnement que l’industriel assume véritablement ses responsabilités pharmaceutiques » [2]. Déconditionner, c’est rompre le scellé apposé par l’industriel. Littérale- ment, c’est dégager, libérer, sortir de certaines conditions. Ainsi, pour les formes orales sèches, rompre le conditionne- ment primaire c’est ouvrir la petite enceinte qui contient directement la spécialité. Cette enceinte limite notam- ment les échanges à une zone d’atmosphère confinée. Par reconditionner, nous parlons ici d’effectuer un transfert physique vers un pilulier pharmaceutique et, suivant le dis- positif utilisé, d’apposer un nouveau scellé. Cette sortie n’est qu’une étape vers un nouveau conditionnement pri- maire. Par analogie avec la chaîne du froid, on peut parler d’une étape dans une chaîne d’atmosphère confinée. C’est donc en même temps un acte de préparation et un trans- fert de responsabilité vers le pharmacien qui dispense. Cet acte pharmaceutique pose le problème de la qualité de l’opération pharmaceutique et de l’acte de dispensation (au plus près du patient : R.4235-48), de l’autorisation de préparer et de l’inspection des lieux de prestations. Les bonnes pratiques de préparation sont opposables aux phar- macies d’officine (Art. L.5125-1 du Code de la santé publique [CSP]) et aux pharmacies à usage intérieur des établisse- ments de santé (Art. L.5126-1 du CSP) mais ne s’applique pas au déconditionnement de spécialités pharmaceutiques en vue de leur répartition pour une aide à l’administration des médicaments aux patients (en particulier s’agissant de la constitution de semainiers). Sur le plan légal, deux doctrines s’opposent actuellement en France. Pour les uns (historique- ment le ministère) la préparation des doses à administrer déconditionnées relève de la fabrication industrielle, est soumise à l’autorisation de mise sur le marché (AMM) et donc illégale en officine cependant que le pilulier pourrait être préparé hors officine par tout autre opérateur [4]. Les autres (dont le Conseil national de l’ordre des pharmaciens) y sont opposés car « ces doctrines semblent biaiser les catégories fondamentales du droit pharmaceutiques, civil et pénal » [5]. C’est cette controverse qui nous a fait nous interroger sur les aspects scientifiques du déconditionnement. Quel est le contexte le déconditionnement-recondi- tionnement des formes orales sèches ? Que savons-nous de la stabilité des formes orales sèches ? Pourquoi déconditionner ? Lorsque le déconditionnement est envisa- geable, quelles sont les précautions et contre-indications au reconditionnement existantes ? Quels éléments doivent être soulignés lors du processus de reconditionnement ? Comment nos confrères étrangers ont-ils abordé cette ques- tion, puisque de fait, la France compte plus d’une décennie de retard sur les pratiques automatisées anglo-saxonnes ou canadiennes [6—8] ? Contexte La stabilité des formes sèches orales avant déconditionnement La stabilité d’une spécialité pharmaceutique est la capacité d’une composition pharmaceutique, dans un conditionne- ment primaire spécifique, à rester dans des spécifications, physiques, chimiques (identité, pureté, qualité, dosage), 334 F . Lagrange microbiologiques, thérapeutiques et toxicologiques. Pour certaines formes, les spécifications de bioéquivalence sont demandées. Les formes galéniques sèches sont adaptées à la stabilité microbiologique et physicochimique des prin- cipes actifs. La date limite d’utilisation est « la preuve de la compatibilité contenant-contenu dans les articles de condi- tionnements définitivement adoptés » [2]. Ainsi, les formes solides sont stables et garanties par l’industriel jusqu’à la date d’expiration indiquée sur l’emballage, à condition de ne pas les déconditionner (sortie des blisters, du sachet, etc.) avant le moment même de l’administration. On entend par modification de la stabilité : une baisse de 5 % de la teneur en principe actif (PA) par rap- port à la valeur initiale, la présence de tous produits de dégradation spécifiée en quantité supérieure par rap- port aux spécifications (risques toxiques ou d’inactivation), un pH en dehors des valeurs spécifiées, une vitesse de dissolution inférieure aux limites spécifiées avec pour consé- quence une éventuelle diminution de la biodisponibilité, des spécifications relatives à l’apparence et aux proprié- tés physiques non respectées [9]. La stabilité industrielle des spécialités (date limite d’utilisation [DLU]) est enca- drée par des conditions standardisées et internationales (règlements de l’International Conference on Harmonisation [ICH]) [10]. Bref historique du reconditionnement Les formes orales sèches destinées au public peuvent être conditionnés sous formes multidoses ou sous formes uni- taires. Il existe une différence entre le modèle franc ¸ais de conditionnement en boîtes de plaquettes thermoformées et les modèles utilisant le vrac pharmaceutique (États-Unis, Canada, etc.). Dans les modèles de vrac pharmaceutique, quand un pharmacien honore une prescription, il retire le nombre d’unité de médicament du récipient de grande dimension fournit par le laboratoire (généralement un bulk container de 500 unités) ou le fac ¸onnier pour le placer dans un récipient plus petit au nom du patient. Certains font remarquer que uploads/Sante/ lagrange-2010.pdf
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- Publié le Jui 09, 2021
- Catégorie Health / Santé
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