La toxine botulique en ophtalmologie INTRODUCTION Justinus Kerner, médecin et p

La toxine botulique en ophtalmologie INTRODUCTION Justinus Kerner, médecin et poète allemand, a été le premier à décrire le botulisme de façon détaillée au XIXème siècle. Cependant, il aura fallu 150 ans pour que la neurotoxine botulique (NTBo) soit utilisée à des thérapeutiques. Cela a été accompli par Alan Scott, co- auteur de ce chapitre, qui a examiné un certain nombre de substances chimiques pour trouver celle qui pourrait allonger un muscle oculaire extrinsèque, afin d’avoir une alternative à la chirurgie du strabisme. Dans les essais sur les animaux, la NTBo s’est avérée être la seule substance ayant montré l’effet paralytique désiré et qui était localement, et systémiquement, bien tolérée à très faible dose (Scottet al., 1973). Les premiers patients ont été traités en 1978. Il est évident que cette méthode est sans danger, mais ne peut pas remplacer la chirurgie pour la plupart des patients atteints de strabisme, parce que l’effet à long terme est souvent instable (figure 1). Ce livre montre que le strabisme a été rejoint par un large éventail de troubles pour lesquels la NTBo a émergé comme un traitement important, voire même de premières lignes, en plus des indications esthétiques. Un certain nombre de maladies autour de l’œil/orbite peuvent être traitées avec la NTBo : principalement le blépharospasme essentiel et le spasme hémifacial ; pour les deux, la NTBo est le traitement de premier choix. Cependant la NTBo peut également servir pour allonger des paupières rétractées, traiter la vision double dans la maladie de Basedow, réduire l’oscillopsie et améliorer la vision dans le nystagmus, produire un ptosis protecteur en cas de lagophtalmie ou de maladies de la cornée, réduire le larmoiement à l’aide d’injections dans la glande lacrymale et traiter des cas particuliers d’entropion spastique. Traitement du strabisme : Le réalignement physique des yeux est souvent nécessaire dans le traitement du strabisme afin de supprimer la diplopie et aligner les yeux pour permettre le développement de la fonction binoculaire, et également dans un but esthétique. L’utilisation de la NTBo a été développée comme une alternative à la chirurgie pour traiter les petits angles (figure 2) et l’ésotropie infantile, et pour réduire la contracture antagoniste dans le strabisme paralytique acquis, de même que pour les patients qui refusent la chirurgie. Dans le système des muscles oculaires, le but n’est pas de réduire les intervalles d’activité anormale, comme c’est le cas pour le blépharospasme et de nombreux autres troubles. La paralysie induite agit plutôt de façon à modifier la position des yeux, et modifie donc la longueur des muscles de l’œil pendant une période de 2 à 3 mois. Les muscles réagissent à ce changement par l’adaptation du sarcomère, l’allongement effectif du muscle injecté et le raccourcissement de l’antagoniste, tout comme le font les muscles squelettiques (Scott, 1994). En général, environ 40 % des patients sont corrigés dans la limite de 10 dioptries prismatiques à 1 an avec une seule injection, et environ 65 % corrigés avec une moyenne de 1,6 injections. Indication : Les injections de la NTBo dans les muscles extra-oculaires sont utiles aussi bien pour le strabisme normal que restrictif. La paralysie du sixième nerf est une indication fréquente : le muscle droit interne est injecté pour réduire la contracture. Il y a souvent un bon effet sur la vision double. Chez les patients qui ont un bon pronostic (par exemple une origine diabétique ou hypertensive de la parésie), la NTBo peut assurer une récupération plus précoce. Chez les patients présentant une parésie plus grave et pour laquelle on prévoit un plus long délai de récupération, la contracture du muscle droit interne et l’augmentation de l’ésotropie peuvent être évitées. Par rapport à ceux ne recevant pas les injections de la NTBo, ces patients bénéficient de résultats à la fois fonctionnels et esthétiques. Une opération telle qu’une procédure de transposition est nécessaire chez les patients atteints de paralysie permanente, mais la NTBo peut améliorer la contracture du droit interne et ainsi éviter la récession chirurgicale, de même que la réduction concomitante de l’amplitude des mouvements. En outre, l’approvisionnement de l’artère ciliaire antérieure est gardé intact, réduisant ainsi, ou évitant, le problème d’ischémie du segment antérieur. Certains cas de patients atteints d’une parésie des 3eet 4enerfs sont également améliorés par l’injection de la NTBo (Mc Neer et al.,1999). Un certain nombre de spécialistes du strabisme traitent les enfants souffrant d’ésotropie infantile, d’ésotropie acquise, d’exotropie intermittente et de strabisme dans l’infirmité motrice cérébrale. Les résultats approchent ceux de la chirurgie, et le fait que seulement une brève anesthésie générale soit requise est un atout supplémentaire. Dans le strabisme chez l’adulte, l’injection de la NTBo est particulièrement utile chez les patients ayant subi des chirurgies fréquentes et qui craignent des opérations supplémentaires sans résultats satisfaisants à long terme. Souvent, les résultats sont encourageants en cas de strabisme après un décollement de la rétine ou une cataracte, en particulier en cas de strabisme avec un petit angle et une vision binoculaire normale. L’injection de la NTBo est également utile pour un ajustement post-opératoire chez les patients atteints de strabisme lorsque le but recherché à la chirurgie n’a pas été atteint, ou lorsqu’une nouvelle intervention chirurgicale peut menacer la vascularisation du segment antérieur. La diplopie due au strabisme dans la myasthénie chronique et l’ophtalmoplégie externe progressive constituent une indication supplémentaire. Pour discuter la place de la NTBo dans ces cas spécifiques de strabisme, voir Mc Neer et al. (1999). En plus des indications bien documentées mentionnées ci-dessus, les auteurs utilisent l’injection de la NTBo chez les adultes qui désirent une correction du strabisme, mais qui répondent par une diplopie aux tests préopératoires d’adaptation prismatique ou de duction forcée. La position de l’œil recherchée par une opération peut être testée temporairement par rapport à la vision double au cours de la période de sur-cor-rection, environ 1 semaine après l’injection de la NTBo (figure 3). Il a été démontré qu’il existe une adaptation de la suppression ou une habituation à la vision double chez 80 % des patients (Nuessgens et Roggenkamper, 1993). Guidage électromyographique de l’injection : Les aiguilles d’injection isolées par du téflon, qui enregistrent seulement par la pointe, localisent le site de l’injection dans le muscle actif. Celles-ci, de même qu’un appareil d’EMG, sont des outils importants pour l’injection des muscles oculaires. Les injecteurs expérimentés peuvent réussir l’injection sans EMG pour le muscle droit interne non opéré précédemment, mais le guidage EMG est très utile pour les muscles verticaux en cas d’atteinte musculaire inhabituelle (par exemple dans la maladie de Basedow), et chez les patients ayant subi une intervention chirurgicale antérieure. Le bruit sec des unités motrices individuelles indique le positionnement correct dans le muscle ; ceci est facilement apprécié et différencié du bourdonnement général à proximité du muscle. L’injection sous contrôle visuel direct, après une petite ouverture de la conjonctive, est aussi une bonne pratique. De temps en temps, l’EMG est utile pour localiser les muscles qui ont été déplacés et pour déterminer si un muscle faible est partiellement, ou totalement, dénervé (figures 4 à 6). Dosage : Pour le strabisme concomitant de 15 à 30 dioptries prismatiques, la dose initiale est de2,5 U d’onabotulinumtoxine A (Botox®) ; pour les déviations plus importantes 5,0 U d’onabotulinumtoxine A sont utilisées (d’autres formules de NTBo pourraient également être utilisées, mais nous avons moins d’expérience avec ces formules, et tous les dosages ultérieurs, dans ce chapitre, se réfèrent également à l’onabotulinumtoxine A). En se basant sur l’expérience dans d’autres indications, une relation de 1 : 1 : 3 pour l’onabotulinumtoxine A, l’incobotulinumtoxine A, l’abobotulinumtoxine A pourrait être considérée, mais les médecins devraient se baser sur l’expérience personnelle pour déterminer la dose à utiliser. Bien que la plupart des muscles répondent bien à ce schéma posologique, il arrive que les individus requièrent beaucoup plus de NTBo pour une meilleure efficacité. On augmente la dose d’environ 50 % si une dose initiale est insuffisante, évaluée par le degré de paralysie induite et la correction qui en résulte. Pour l’injection du muscle droit interne, dans le cas d’une parésie partielle du muscle droit externe, une dose de1,0 -1,5 U est satisfaisante. Le volume prévu est prélevé dans une seringue à tuberculine de 1,0 ml. L’électrode aiguille est fixée de façon ferme, et l’excès de liquide est éjecté pour s’assurer de la perméabilité de l’aiguille et de l’absence de fuite au niveau de l’aiguille. On utilise plusieurs aiguilles pour injecter plusieurs muscles, car il est souvent impossible de voir les gradations sur la seringue pour les injections de petits volumes. L’amplitude de l’EMG diminue à mesure que le fluide injecté repousse les fibres musculaires à distance du site d’injection, ceci est le signe d’une bonne insertion. L’aiguille est laissée en place30 à 60 secondes après l’injection pour permettre au bolus injecté de se disperser dans le muscle – sinon, il peut revenir vers le tube de l’aiguille, comme cela a été montré avec une solution colorée chez les animaux. Anesthésie : Des gouttes de proparacaïne 1 % sont suivies, 30 secondes plus tard, par un alpha-agoniste uploads/Sante/ toxine-botulique-et-pom.pdf

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  • Publié le Nov 30, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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