LA PRESSE. MONTREAL. JEUD117 SEPTEMBRE 1992 A 7 Un père à bout de souffle lance
LA PRESSE. MONTREAL. JEUD117 SEPTEMBRE 1992 A 7 Un père à bout de souffle lance un cri du coeur Son fils de 24 ans atteint du syndrome de Tourette a épuisé toutes les ressources M A R T H A G A C N O N Ml II y ii des jours où Marcel lou- cher se dit que son fils serait mieux mort que vivant tellement il est malheureux et fait souffrir son entourage. «C'est affreux d'en arriver à souhaiter la disparition de son enfant, mais je n'en peux plus», dit-il avec une expression de dé- couragement. Loin d'être cruel ou sans-coeur, ce père est simple- ment au bord du précipice. Tout comme sa femme, Margot. Lui a fait un infarctus. 1-Ile s u r s a u t e au moindre coup de telephone. Agés dans la cinquantaine, ils se de- mandent s'ils trouveront la paix un jour. Leur fils, Martin, 24 ans, at- teint du syndrome de Tourette, une maladie neurologique encore mal connue, leur fait vivre un en- fer depuis des années. Sa maladie le pousse à commettre des délits, â semer le désordre partout où il passe, à proférer des menaces de mort, à mettre le feu et à manipu- ler ses proches. Quand ce n'est pas les services sociaux qui télé- phonent pour se plaindre qu'ils n'en peuvent plus, c'est la police. Martin harcèle sans cesse ses parents, menace de les tuer ou de se suicider s'ils ne répondent pas à ses désirs. Dans une lettre qu'il leur a envoyé, il dit: «Agissez au nom de Dieu. Libérez-moi.» Le syndrome Gilles de la Tou- rette du nom du neurologue fran- çais qui a identifié les premiers si- gnes de la maladie en 1885, est caractérisé par des tics moteurs et des bruits vocaux multiples (jap- pements, reniflements, grimaces, pirouettes, etc. ), des périodes d'automutilation ( Martin s'arra- che les cheveux et se mord), des obsessions, des sautes d'humeur incontrôlables, des compulsions et des troubles de comportement. La personne atteinte peut aussi laisser échapper à n'importe quel moment des mots orduriers et ré- péter sans cesse des sons ou des phrases déjà entendues. Les Foucher ont un autre fils plus âgé qui. lui aussi, souffre de cette maladie qui est d'origine gé- nétique. Heureusement, il est beaucoup moins turbulent que son frère et mène une vie relati- vement normale en appartement. Ressources épuisées Depuis l'âge de 1 1 ans, Martin  • * t y 1 1 A ï ... • • ; , . ; •'V ' J — PHOTO PAUL-HENRI TALBOT. La Presse Martin, 24 ans, atteint du syndrome de la Tourette, mène une vie misérable. Son père, Marcel Foucher, lorsqu'il est dans son petit jardin oublie ses soucis. a fait le tour des hôpitaux psy- chiatriques, des familles d'ac- cueil, des refuges pour itinérants, des services sociaux et des centres de crise. En 1985, il a même été placé au centre d'accueil pour dé- linquants à Cité des Prairies parce qu'il avait volé une voiture et heurté des véhicules. En 1990, il a profité de l'absence de ses parents pour casser une vitre, pénétrer dans la maison et faire des dégâts. Il a aussi fait un séjour à Pinel, hôpital psychiatrique à sécurité maximale. Il a connu de mauvaises expé- riences dans des familles d'ac- cueil où, par exemple, il a subi l'influence néfaste d'un homme alcoolique. A u j o u r d ' h u i , plus personne n'en veut. « I l a brûlé le réseau», explique M. Foucher. Et voilà maintenant qu'il se retrouve à la prison de Parthcnais pour avoir défonce la vitrine d'un conces- sionnaire automobile, à Lon- gueuil, le 9 septembre, peu de temps après avoir reçu son congé de l'hôpital Charles-Lemoyne. Que faire? Les Foucher sont en colère con- tre les autorités médicales qui ont laissé sortir Martin de l'hôpital avant qu'on ne puisse trouver une nouvelle ressource. «C'est un ges- te irresponsable, selon eux. Ils au- raient dû prolonger la cure fer- mée. Mais on nous répond que sa place n'est pas à l'hôpital ni en prison. Y-a-t-il seulement une place où il peut vivre sur cette ter- re? Notre fils est devenu un mala- dc-délinquant-itinérant. » Même s'il comprend leur désar- roi, le directeur des services pro- fessionnels de l'hôpital Charles- Lemoyne, le docteur François Gauthier, réfute les accusations des parents. À son avis, les autori- tés médicales n'ont rien à se re- procher. « T o u t a été fait pour ce patient. Les psychiatres pour des raisons que je n'ai pas le droit de révéler publiquement, ont jugé préférable de mettre fin à la cure fermée. Dans ce dossier, tous les intervenants ont fait plus que leur possible. Mais l'hôpital Char- les-Lemoyne esl un centre pour soins aigus, nous ne* sommes pas tenus de donner des services car- céraux. L'hôpital n'a pas plus de responsabilité envers cet individu que les autres ressources socia- les. » Le problème est que Martin re- fuse les médicaments et les traite- ments. Selon le psychiatre Yves Dion, de l vH6tel-Dieu de Sorel, qui l'a suivi durant plusieurs an- nées et qui est considéré comme un spécialiste du syndrome de la Tourette, Martin est un cas pathé- tique. «Bien qu'il soit d'intelli- gence supérieure, il n'a pas réussi a faire des études. Il a été ballotte d'un endroit a un autre, place dans des conditions parfois ina- déquates.» D'après lui, il y a eu des erreurs et des manquements qui ont éventuellement conduit a une dé- térioration de son état, « l e me suis battu souvent avec les servi- ces sociaux qui refilaient le dos- sier d'un bureau a l'autre. O n in- voquait toujours le manque de ressources. O n a. par exemple, re- fuse qu'il soit suivi régulièrement par un travailleur communautai- re.» Plus de 400 personnes font par- tie de l'Association québécoise du syndrome de la Tourette qui exis- te depuis seulement trois ans. « U n e maladie encore mal con- nue, selon la présidente, Evelyne Paiement. À cause de leur com- portement bizarre, les gens sont souvent perçus comme des fous, des déficients mentaux. O r . ils ont un quotient intellectuel nor- mal. Malgré cela, les parents doi- vent se battre pour maintenir les" enfants, atteints de ce syndrome, dans des classes régulières. O n a tendance â les envoyer avec les élèves qui ont des troubles de comportement. Et c'est la pire chose à faire. Ils imitent les com- portements délinquants.» Certains ont aussi des problè- mes avec la justice. Récemment, une avocate communiquait avec elle parce qu'elle défendait un client souffrant de cette maladie, accusé d'avoir troublé l'ordre pu- blic. O n a aussi vu une personne injurier un policier sans raison. «Pour éviter certains ennuis, on conseille aux malades de porter sur un eux une carte décrivant les manifestations de la maladie.» O n peut joindre l'Association au numéro $45-0251. uploads/Sante/ un-pere-a-bout-de-souffle-lance-un-cri-du-coeur.pdf
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- Publié le Jui 22, 2021
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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