Monsieur H., 46 ans, est adressé par son gastro-entérologue pour un suivi psych

Monsieur H., 46 ans, est adressé par son gastro-entérologue pour un suivi psychologique destiné à « réduire l’anxiété du patient et à faciliter la prise en charge médicale. » En effet, un mois auparavant, Monsieur H., alerté par de brusques saignements accompagnant des troubles digestifs et des douleurs intestinales, appelle d’abord SOS Médecin, pour se rendre ensuite aux urgences, de son propre chef, à deux heures du matin. Là, l’annonce que les examens exploratoires ne seraient pratiqués que le lendemain déclenche chez monsieur H une vive angoisse accompagnée de revendications à l’adresse de toute l’équipe médicale. La coloscopie effectuée, malgré tout, le lendemain matin révèle alors la présence de polypes dans le gros intestin, sclérosés immédiatement pendant l’examen. De retour à son domicile, après une surveillance de vingt- quatre heures, Monsieur H. entreprend donc de téléphoner à son médecin pour connaître les résultats de la biopsie, et cela, bien que ce dernier lui ait notifié un délai d’attente d’une semaine. Recevant enfin les résultats - négatifs- le médecin croit alors rassurer définitivement monsieur H. en les lui faxant. A sa grande surprise, ce dernier est cependant de retour à l’hôpital le lendemain, inquiet d’une possible erreur d’examen du laboratoire, tourmenté par l’éventualité de séquelles, se plaignant de constipation et souhaitant même prendre rendez-vous pour « une coloscopie de contrôle dans quinze jours. » En reprenant ces éléments à la demande de la psychologue, Monsieur H. se montre très critique à l’égard des soignants : « Ils n’y connaissent rien, si on les harcèle pas, ils ne vous disent rien. Je ne suis pas du tout rassuré, le gastro est jeune, il n’a pas l’air très compétent… Je lui ai demandé de me faire un bilan et une ponction lombaire pour voir si je n’ai pas une maladie auto-immune associée aux polypes, il n’a rien voulu savoir ! Pourtant, cela pourrait être la maladie de Crohn ou une rectocolite hémorragique… De toute façon, je vais faire transférer mon dossier dans une clinique dont on m’a parlé où il y a de vrais spécialistes et où on peut se faire entendre… parce que des polypes seulement je n’y crois pas… Et si j’ai un cancer du côlon, il faudrait s’en occuper tout de suite. Ils n’ont même pas d’IRM ! Dans le doute, je vais faire prolonger mon arrêt maladie, de tout façon, je suis trop stressé pour travailler. » Monsieur H. poursuit de la sorte pendant vingt minutes et se montre particulièrement prolixe dans la description de ses symptômes : « Cela irradie dans tout le ventre comme un feu qui s’embrase ou un lever de soleil, des fois, j’ai l’impression que l’on me brûle le côté droit avec un chalumeau… » La psychologue recueillera cependant un certain nombre de renseignements complémentaires : Monsieur H. est l’aîné d’une fratrie de trois garçons tous bien portants, il est célibataire : « Je ne supporterais pas de vivre avec quelqu’un, j’ai trop de manies et je n’aime pas que l’on touche à mes affaires ou alors il me faudrait une femme comme ma mère, très soigneuse et ordonnée mais je n’ai pas encore trouvé la perle rare (rires) » ; et partage son temps entre son métier d’architecte : « Cela se passe bien, surtout si c’est moi qui gère … sauf pour rendre à temps… On me reproche souvent le temps que je prends, ça c’est un échec… mais je ne peux pas faire vite et bien, il faut choisir ! » et un loisir qu’il partage avec son père : les reproductions des monuments de France en allumettes, disposées sur une gigantesque carte de France qui couvre toute la surface du grenier de ses parents. Cette activité débutée il y a quatre ans est l’occasion pour Monsieur H. de se rendre dans sa famille tous les dimanches : « J’adore cela, les maquettes, c’est tout à la fois une activité, un art et une discipline. Bon, il est certain que c’est contraignant aussi, cela me prend pratiquement tout mon temps de repos. Mais je n’ai pas le choix, il faut que je termine ce projet et je tiens à ce que ce soit bien fait, sinon, ce n’est pas la peine. Ah, j’en ai détruit des maquettes ratées ! (rires) même mon père voulait les garder, il est moins méticuleux que moi finalement. Mais l’échec, ç’ aurait été de les garder justement… » Approche sémiologique Présentation du patient : Il s’agit de faire une présentation très sommaire car nous n’avons que très peu d’éléments. L’âge est essentiel car à lui seul, il permet dans l’absolu d’écarter certains troubles (ex : schizophrénie) ou de s’inquiéter de l’éventualité de quelques autres (ex : paranoïa). Le métier peut fournir des indications sur certaines capacités (intellectuelles, de précision etc.). Quant au célibat, cette information, croisée avec d’autres, peut enrichir l’approche des processus psychiques. Monsieur H. a 46 ans. Il est l’aîné d’une fratrie de trois garçons. Il est architecte et célibataire et occupe son temps libre à fabriquer des maquettes en allumettes des monuments français avec son père. Motif de la consultation : Ici, il est important de préciser que le patient n’a pas exprimé de demande personnelle car c’est une indication précieuse concernant la proposition thérapeutique que vous avez à faire. Monsieur H. a sollicité cette consultation sur la suggestion de son gastro-entérologue qui pense qu’un travail thérapeutique devrait réduire son anxiété et faciliter la prise en charge médicale. Mr H. n’exprime toutefois aucune demande en propre et semble plutôt considérer l’entretien comme une occasion d’exposer une nouvelle fois ses griefs envers la médecine. Il paraît également avoir à cœur de rallier la psychologue à sa cause : faire reconnaître le fait qu’il est atteint d’une grave maladie. Eléments médicaux : Cette rubrique est nécessaire à renseigner ici compte tenu de la participation des éléments médicaux au trouble psychique de M.H, et également dans la mesure où elle offre la possibilité de signifier le discord observable entre l’état de santé réel de M.H. et ses angoisses disproportionnées. (A l’examen, il ne vous serait pas demandé d’avoir ces connaissances médicales). Présence de polypes dans le gros intestin qui ont été sclérosés au cours de la coloscopie. Cette pathologie est relativement bénigne mais nécessite une surveillance au long cours dans la mesure où les polypes peuvent reparaître et devenir malins. Cependant, ceci représente seulement une éventualité et, à ce titre, et surtout au vu des résultats de la biopsie, les vives inquiétudes de Monsieur H. paraissent être démesurées. Antécédents personnels : Concernant cette rubrique, vous pouvez soit spécifier qu’aucune information à ce sujet n’est donnée soit vous risquer à faire une hypothèse sur la foi de possibles déductions. Il ne convient pas, en revanche, d’inclure ici des éléments qui relèveraient du trouble de la personnalité puisque ce dernier est nécessairement ancien et persistant. Nous ne disposons d’aucun élément concernant d’éventuels antécédents somatiques chez Mr H. (point qui resterait à explorer dans un entretien ultérieur). En revanche, eu égard entre autres à ses connaissances médicales, nous pouvons supposer que son fonctionnement probablement hypochondriaque est ancien. Et nous constatons par ailleurs que ce fonctionnement ne cède pas devant une réalité morbide : les polypes. Antécédents familiaux : Si nous avions connaissance d’antécédents psychiatriques concernant la famille de M.H., c’est ici qu’il conviendrait d’en faire part. De même s’agissant d’antécédents somatiques car ces derniers pourraient éventuellement nous éclairer sur l’origine de la massivité des préoccupations hypochondriaques du patient (ex : un cancer du côlon chez son père) voire nous permettre de les relativiser. Là encore, nous ne disposons d’aucun élément, si ce n’est, selon les dires de Mr H., que ses deux frères sont “ bien portants ”. Nous ne savons rien au sujet de ses parents, toujours en vie. Nature de l’épisode actuel : Vous pouvez rédiger une petite introduction au relevé sémiologique proprement dit, cela clarifie le propos, mais ce n’est pas exigible. Les troubles engendrés par la présence de polypes (saignements, douleurs intestinales, problèmes digestifs) et les circonstances entourant les examens exploratoires (arrivée aux urgences de nuit et report de la coloscopie au lendemain) ont déclenché chez Mr H. une vive angoisse, accompagnée de revendications à l’adresse des soignants. Cette angoisse ne s’est résorbée, ni après l’annonce du diagnostic et la sclérose des polypes, ni après que Mr H. a reçu l’assurance – examens à l’appui – du caractère bénin de ces derniers. Bien au contraire, cette angoisse s’est majorée jusqu’à revêtir un caractère nettement hypochondriaque, Mr H. conservant un mois après son “ opération ” la conviction erronée d’avoir une maladie auto-immune ou un cancer du côlon. Les revendications à l’adresse de l’équipe médicale, quant à elles, se sont amplifiées. Pour effectuer ce relevé sémiologique, vous devez vous référer explicitement à une classification nosographique (classique, DSM, CIM) mais à l’examen uniquement au cours de A. Plagnol. En effet, les sujets ont été pensés de sorte à ce que vous puissiez identifier trouble et personnalité sur la foi du cours qui contient, les concernant, tous les uploads/Sante/ vignette-corrigee-m-h.pdf

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  • Publié le Jui 26, 2021
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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