Le dossier documentaire pour préparer l’EC3 de mardi sur la socialisation diffé
Le dossier documentaire pour préparer l’EC3 de mardi sur la socialisation différentielle par le sport GENRE & SPORT 4 Pourquoi considérer la dimension genre dans le sport Le sport est un phénomène socioculturel dans lequel les constructions sociales de la masculinité et de la féminité jouent un rôle clé: I On associe traditionnellement le sport à la notion de «virilité». Beaucoup de sociétés tendent à réprouver la pratique du sport par les femmes, et les femmes qui prati- quent un sport sont parfois perçues comme «masculines». Inversément, les hommes qui ne font pas de sport ou sont peu doués en sport sont parfois qualifiés d’«efféminés». Il n’y a cependant pas une façon unique d’être viril ou féminine, et le sport peut être l’occasion de renégocier masculinité et féminité plutôt que d’en réaffirmer les acceptions dominantes. I La pratique du sport est liée à un certain nombre de conventions autour de ce que sont «travail» et «loisirs», conventions souvent vécues différemment par les hom- mes et les femmes. S’occuper des malades et des personnes âgées, élever des enfants et s’acquitter des tâches domesti- ques – activités «reproductives aujourd’hui encore accomplies surtout par les femmes et les filles – ne sont en général pas consi- dérées socialement et économiquement comme du «travail». Les activités «produc- tives» exercées en-dehors du domicile et reconnues comme «travail» – en particu- lier lorsqu’elles sont déployées par des hommes – impliquent le droit d’avoir du temps libre à consacrer aux loisirs. I Certaines sociétés jugent le sport «produc- tif» dans la mesure où il contribue à la santé physique des travailleurs, manuels surtout. Alors même que la proportion de main-d’œuvre féminine augmente, dans certaines régions tout au moins, il y a une tendance à considérer les sports comme bénéfiques lorsqu’ils sont pratiqués par des hommes et comme une perte de temps lorsqu’ils le sont par des femmes. I Femmes et hommes s’adonnent à des acti- vités physiques distinctes, et leurs attitudes à l’égard du sport peuvent être très diffé- rentes. L’aspect compétitif d’un sport donné peut être considéré comme central par certains, tandis que d’autres voient le sport comme moment de rencontre. Le fait d’être identifié ou de s’identifier soi-même comme appartenant à une «culture», à une «ethnie», à une classe socioéconomi- que ou à une caste joue également un rôle dans la manière dont on s’adonne à la pratique d’un sport. GENRE & SPORT 5 Les femmes, et parfois aussi les hommes, peuvent rencontrer différents obstacles con- crets à la pratique d’un sport: I Outre des lacunes générales en matière d’équipements sportifs sûrs et appropriés ainsi que le manque de compétences, de ressources et d’assistance technique, les femmes sont souvent confrontées au man- que de temps et de garderies pour leurs enfants. I Les femmes sont particulièrement exposées au harcèlement sexuel verbal et/ou physi- que et à d’autres dangers, liés par exem- ple au lieu et au moment où elles prati- quent leur sport. I Il y a un manque de modèles féminins, notamment de femmes ayant une fonction de coach ou de «leader». Les femmes sont sous-représentées dans les organes de décision des institutions sportives. Pourquoi l’égalité hommes-femmes dans le sport? L’égalité hommes-femmes est un objectif essentiel du développement; elle fait partie des droits civils, culturels, économiques, politi- ques et sociaux fondamentaux et universelle- ment reconnus. La politique d’égalité hom- mes-femmes de la DDC vise à assurer que toutes ses interventions apportent aux femmes et aux hommes des chances accrues d’exer- cer les mêmes droits et d’accéder équitable- ment aux bienfaits du développement. Partout dans le monde, on voit moins de fem- mes que d’hommes participer à des activités sportives. Le sport peut favoriser le bien-être mental et physique, et des études scientifiques ont établi que faire du sport réduit plus tard les risques de maladies chroniques. Il convient ainsi d’y encourager les filles aussi bien que les garçons. Enfance & Cultures Actes du colloque international, Ministère de la Culture et de la Communication – Association internationale des sociologues de langue française – Université Paris Descartes, 9es Journées de sociologie de l’enfance, Paris, 2010 http://www.enfanceetcultures.culture.gouv.fr/ 2 Sexuation des pratiques des enfants et positions des parents : des familles peu favorables aux choix non conformes Les familles étudiées adoptent globalement des positions équivalentes à propos de l’engagement des enfants d’une même fratrie dans les activités culturelles et sportives : les familles privilégiant les activités culturelles incitent filles et garçons à s’y engager, celles orientées vers le domaine sportif proposent des activités aux filles comme aux garçons. Dans les fratries mixtes, les frères et les sœurs investissement (ou pas) les pratiques culturelles de manière relativement indifférenciée : Frédéric et Léa ont tous deux fait de la clarinette, Denis et Julie prennent des cours de piano, Audrey fait de la flûte et son frère du piano, Léo et Oriane font du théâtre comme Noémie et Justin… Certes, filles et garçons n’apprécient pas forcément les activités instrumentales de la même manière, les premières pouvant se montrer plus persévérantes que les seconds : Frédéric a ainsi arrêté la clarinette au bout d’un an de pratique et Jules a abandonné l’éveil musical, quand leurs sœurs ont maintenu leur activité (la sœur de Jules fait du piano) ou pratiqué plus longtemps (Léa a fait 3 ans de clarinette). Les tentatives éphémères d’inscription à des cours d’éveil musical concernent également toutes des garçons. En favorisant la conformité des filles aux attentes institutionnelles, scolaires ou associatives, la socialisation familiale les prépare davantage à investir des loisirs « sérieux » (Baudelot et Establet, 2007). L’importance des activités ludiques physiques dans la socialisation des garçons (Brugère, 1999) rend plus difficile leur engagement dans des loisirs très scolarisés comme la pratique instrumentale. Cependant, dans la population étudiée, les enfants d’une même fratrie sont tous inscrits ou ont été inscrits dans une activité culturelle quel que soit leur sexe quand les parents accordent de l’importance à ces pratiques. Cet élément ne signifie pas que les parents encouragent et renforcent la pratique des unes et des autres de la même manière, mais ils permettent néanmoins aux enfants des deux sexes d’être confrontés à des expériences similaires. Cette situation concerne notamment les familles des milieux favorisés privilégiant un style de vie cultivé. Elles prônent en effet une position plus égalitaire au sujet de l’éducation des filles et des garçons que les milieux populaires (Ferrand, Imbert et Marry, 1999 ; Schwartz, 1990). Cependant, les familles de Frédéric et Léa, Léo et Oriane ou encore David et Julie appartiennent aux milieux populaires et adoptent pourtant une position similaire. Manifestement, pour les parents concernés (et donc plutôt pour les mères), les pratiques culturelles associatives apparaissent comme des pratiques relativement neutres d’un point de vue sexué. La mère de Medhi, employée, exprime clairement ce point de vue : « Moi, Medhi, je voulais le mettre à la danse contemporaine mais son père ne voulait pas, il disait : « ce n’est pas une fille »…il voulait un sport d’homme, c’est lui qui a choisi le judo…alors je me suis dit le théâtre, c’est plus neutre, ça peut être aussi bien pour une fille que pour un garçon, du coup, ça lui posait moins de problèmes ». Si les parents conçoivent les pratiques culturelles comme peu sexuées, leur position change radicalement au sujet des pratiques sportives. En effet, les pratiques sportives des enfants sont très sexuées dans 25 familles sur 36, et ce constat concerne tous les milieux sociaux. Dans certaines familles, l’inscription des enfants dans des activités sexuées renvoie à un choix parental explicite. Cette situation concerne essentiellement des mères des milieux favorisés choisissant la danse pour développer la « féminité » de leur fille, et des pères des milieux populaires optant pour des sports collectifs de grand terrain pour leur fils, en raison de la virilité associée à ces activités (Messner, 1992). Le père de Kevin, ouvrier, suggère ainsi que le hockey convient bien à ses fils pour sa dimension virile, et celui Jonas, également ouvrier, regrette que son fils pratique le football, jugé « moins viril » que le rugby. De la même manière, les mères de Marine, de Linda et de Manon voient dans la danse un moyen privilégié d’incorporation d’une hexis corporelle féminine, en permettant conjointement l’apprentissage du « contrôle » et de la « grâce » : Enfance & Cultures Actes du colloque international, Ministère de la Culture et de la Communication – Association internationale des sociologues de langue française – Université Paris Descartes, 9es Journées de sociologie de l’enfance, Paris, 2010 http://www.enfanceetcultures.culture.gouv.fr/ 3 « Je pense à l’avenir, si elle se présente devant un patron, la nana qui est habillée en jean baskets et qui se tient mal, je ne sais pas…si il voit une nana habillée normalement, elle croise les jambes, elle se tient droite, elle a un bouquin ou elle revoit son CV, moi, je suis le patron, j’ouvre la porte ma décision est vite prise quoi… » (mère de Linda, assistante maternelle, CAP). Sans employer les mêmes mots, la mère de Manon, cadre commercial dans uploads/Societe et culture/ dossier-documentaire-preparatoire-a-l-ec3-la-socialisation-differentielle-par-le-sport-pdf.pdf
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- Publié le Jan 14, 2022
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