59 Chantal Forestal Université de Provence, France Abstract: In this paper, I a

59 Chantal Forestal Université de Provence, France Abstract: In this paper, I argue against one of the trends of contemporary society and its values, « the relativistic temptation », which can be found in language education, and which is often based on a principle of neutrality: kindly neutrality or indifferent neutrality? In this perspective, is the « transcultural component », which is related to the question of universal values, « discussable », in the indirect meaning of little reliability and thus can be rejected? Or does it deserve to be rightly and more than ever discussed, especially in its relations to other metacultural, intercultural, multicultural or co-cultural components? Keywords: transcultural approach, ethical professional positioning, transgression, emancipation. I. Quelques éléments de réflexion à partir de l’étymologie du préfixe « trans » I.1. Préfixe emprunté au latin « trans » peut signifier « à travers » comme dans « transeuropéen » (qui traverse l’Europe), ou « par delà » comme dans Synergies Pays Riverains de la Baltique n°6 - 2009 pp. 59-75 La démarche transculturelle en Didactique des Langues-Cultures : une démarche discutable… et/ou qui mérite d’être discutée Résumé : L’idée de cette communication est une prise de position contre une des tendances actuelles de la société et de ses valeurs, « la tentation relativiste », que l’on retrouve en didactique des langues, et qui s’appuie sur le plus souvent sur un principe de neutralité : neutralité bienveillante ou neutralité indifférente ? Dans cette perspective, la « composante transculturelle », qui concerne la problématique des valeurs universelles est-elle « discutable », au sens indirect de peu fiable et donc à écarter de la discussion, ou bien mérite-t- elle d’être justement plus que jamais discutée, notamment dans ses rapports avec les autres composantes méta-culturelle, interculturelle, multiculturelle ou co- culturelle ? Mots-clés : approche transculturelle, posture professionnelle éthique, transgression, émancipation. 60 « transalpin » (par delà une frontière). Il signifie le passage, l’échange, lequel peut être considéré positivement ou négativement ou alternativement l’un et l’autre. Ainsi la transfusion sanguine au 17ème suggère un échange possible de qualités entre les vivants. En France, à la Libération, les banques de sang sont vues comme des dépôts de redistribution d’un bien social commun ; la transfusion devient encore plus positive, elle est un élément de solidarité. Par contre, elle est considérée comme franchement négative dans la transmission de maladies (cf. le scandale du sang contaminé). On connaît également les problèmes médicaux et bioéthiques que pose le « transsexualisme ». Celui-ci est d’abord la certitude négative de ne pas être à l’aise dans son corps et davantage lorsqu’on est l’objet en tant que communauté de transphobie (comme c’est souvent le cas en France par exemple), mais qui peut être la certitude positive d’être libre de changer son idéal du moi. I.2. Dans le domaine culturel « transculturel » peut signifier la traversée d’une culture à l’autre, que ce soit dans l’espace ou dans le temps : de la culture rurale à la culture urbaine, de la culture ouvrière à la culture bourgeoise, de la culture du Sud à celle du Nord, de la culture antique (latine ou grecque) à la culture moderne. On sait qu’en ethnologie, la « transculturation » concerne le processus de transition d’une culture à l’autre qui participe d’une transformation de la culture traditionnelle et qui s’accomplit dans le développement de la culture nouvelle. En didactique des langues ce peut être reconnaître la multiplicité interculturelle des possibilités de relations, d’échanges, de compréhension entre cultures-langues différentes. C’est aussi la possibilité d’être à l’aise dans la mondialisation (cf. devenir multilingue, cosmopolite, bref un homme planétaire). Mais les phénomènes d’acculturation, c’est-à-dire d’adaptation d’un individu au milieu socioculturel dans lequel il vit qui en résultent ne sont pas sans conséquences : traumatismes d’acculturation des immigrés qui peuvent être considérés tantôt comme « bien acculturés» tantôt comme « mal acculturés » selon leur degré maîtrise de la langue française. On se souvient de ce qu’on pourrait qualifier d’ingérence totalitaire, le rapport Bénisti, qui tenait à la fois de l’ineptie et de la violence institutionnelle et qui portait atteinte aux droits humains puisqu’il interdisait aux parents de parler une autre langue que le français à la maison. Comme le souligne le sociolinguiste Louis- Jean Calvet au sujet de l’exclusion des minorités, pour sécuriser les enfants immigrés dans le système scolaire français, il faudrait les conforter dans la langue de leurs parents (Lefranc, Sefta, 1982). En effet si on est fier de sa culture d’origine, il est plus facile d’ « intégrer » la culture du pays d’accueil ou mieux de s’y associer (mot emprunté au vocabulaire de Rousseu, 1789-93). Le travailleur social ou le pédagogue se doit de considérer cette mise en tension permanente des deux cultures, tension qui n’est pas sans conséquence sur le plan psychique, mais qui, délibérément travaillée par les sujets, peut créer chez eux une troisième culture. La question du cosmopolitisme et du multilinguisme est aujourd’hui d’actualité. La presse anglo-saxonne a ainsi avancé l’idée que la culture française serait en Synergies Pays Riverains de la Baltique n°6 - 2009 pp. 59-75 Chantal Forestal 61 net recul parce qu’elle serait trop repliée sur elle-même. S’agit-il seulement d’un « manque de porosité » de la langue-culture française d’un manque d’ouverture, d’adaptation à la communication transnationale et transculturelle, ou plutôt d’un problème de diffusion du aux limites actuelles de la traduction du français dans les autres langues ? Mais n’y-a-t-il pas un problème d’un autre ordre, à savoir la domination économique anglo-saxonne ? Il ne faudrait pas oublier que les enjeux économiques et technologiques sont désormais au coeur de la culture, enjeux qui semblent gouverner une certaine conception de la transculturalité. Ainsi le Louvre est-il devenu une véritable multinationale qui doit savoir se vendre pour s’exporter. A quel prix ? Celui de l’autocensure concernant certaines oeuvres jugées plus ou moins scandaleuses ? On peut anticiper sur des conflits futurs (Abbou Dhabi est un projet complexe avec un risque de marchandisation mais aussi de colonisation : la culture doit sortir de sa tour d’Ivoire… mais jusqu’à quel point ?) Aujourd’hui le transculturel semble être représenté principalement par un média, le média télévisuel. Celui-ci est très souvent déconsidéré car rendu responsable de l’émiettement, l’éparpillement de la culture. Pourtant une forme d’art pourrait reposer sur l’unité plurielle de la Culture qui sans uniformiser, rassemblerait et donnerait sens et forme à des éléments composites provenant des cultures « cultivées » « populaires » ou « commerciales » (cf l’émission « Le mauvais genre » à France-culture) ? Or pendant longtemps – et dans le domaine éducatif entre autres – la culture a été liée à son approfondissement, au temps nécessaire à son acquisition mais aussi à la stabilité, à la norme, à la hiérarchie des valeurs et des oeuvres : un poème de distribution des prix ne vaut pas un texte de Baudelaire, ni un slogan publicitaire une maxime de Chamfort. Mais la culture n’est-elle pas liée aussi à une pensée critique en acte, à l’autoréflexion, au doute, à ce qui en Europe depuis la Renaissance sait remettre en cause les traditions et les autorités ? Un transculturel, qui favorise le retour critique sur les manières de faire et de penser, sur les institutions et les oeuvres, doit s’affranchir à la fois de l’adoration confite des grandes oeuvres tout comme du relativisme esthétique qui a envahi les médias comme la didactique du FLE (lorsqu’elle privilégie, par exemple, les documents authentiques). Une autre DLC devrait promouvoir une culture cultivée transculturelle renouvelée, celle des créations réflexives et recherchées, celle des êtres et des oeuvres qui traversent et transforment les nations, les ethnies, les classes sociales et les sujets humains. La DLC se doit de revisiter les cultures raffinées qu’elles viennent d’en haut - la culture créative légitime des grands romans, de la grande musique, du cinéma d’auteur - ou d’en bas - la culture créative populaire des chansons, des blagues, des proverbes ou celle du quotidien, du divertissement festif ou commercial – et cela afin de les faire dialoguer (coopérer et s’affronter) entre elles. Autre média, le web, « média des medias », il semble être considéré actuellement comme le média le plus libre et le plus réactif et par conséquent le plus transculturel. Il favoriserait le libre accès à la connaissance, à travers les frontières des pays, des disciplines et des cultures. Mais ici encore la progression La démarche transculturelle en Didactique des Langues-Cultures : une démarche discutable… et/ou qui mérite d’être discutée 62 de la connaissance quantitative augmente au détriment de la connaissance qualitative. On ne peut plus rien vérifier lorsqu’on tape « www » sur Google. Mini conclusion: lorsqu’on est installé dans la transculturalité, on est simultanément dans un principe d’expansion : un espace de rencontres et de pluralisme, mais inévitablement aussi un espace de conflit des valeurs, que celles-ci soient locales, communautaires ou nationales avec parfois désinstitutionalisation, déhiérachisation des oeuvres, déréglementation de l’accès aux codes. Ce peut être en économie comme en art. Nous prendrons comme exemple l’exposition publique des collections dites uploads/Societe et culture/ la-demarche-transculturelle-en-didactique.pdf

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