CLAUDE LEVI-STRAUSS ANTHROPOLOGIE structurale pion. ANTHROPOLOGIE STRUCTURALE O

CLAUDE LEVI-STRAUSS ANTHROPOLOGIE structurale pion. ANTHROPOLOGIE STRUCTURALE OUVRAGES DU MEME AUTEUR La Vie familiale et sociale des Indiens NambikAvara (Paris, Société DES Américanistes, 1948). Les Stuctures élémentaires de la parenté (Prix Paid-Pelliot) (Pans, Presses Universitaires de France, 1949). Race et Histoire (Paris, Unesco, 1952). Tristes Tropiques. 22« mille. Collection Terre Humaine.. (Librairie Plon, 1955). Entretiens avec Claude Lévi-Strauss, par Georges Charbonnier (Plon Julliard). La Pensée sauvage. (Plon, 1962). CLAUDE LÉVI-STRAUSS ANTHROPOLOGIE STRUCTURALE Avec 23 illustrations dans le texte et 13 illustrations hors-texte pion © 1958 by Librairie Pion, 8, rue Garancière, Paris-6-. Droits de reproduction et de traduction réservés pour tous pays, y compris l'U. R. S. S. 3iS L51 6U De ce livre paraissant en 1958, année du centenaire d'Emile Durkheim, on per- mettra qu'un disciple inconstant fasse hommage à la mémoire du fondateur de l'Année sociologique : prestigieux atelier où l'ethnologie contemporaine reçut une partie de ses armes, et que nous avons laissé au silence et à l'abandon, moins par ingratitude que par la triste persuasion où nous sommes, que l'entreprise excé- derait aujourd'hui nos forces. Xpûceov (Aiv TtpwTiffTa ygvoç. 12G3334 PRÉFACE Dans une étude récente, M. Jean Ponillon a écrit une phrase qu'il ne m'en voudra pas, j'espère, de citer en tête du présent ouvrage, car elle répond admirablement à tout ce que j'ai souhaité accomplir dans l'ordre scientifique, en doutant souvent d'y être parvenu : « Lévi-Strauss n'est certes ni le premier, ni le seul à souligner le caractère structurel des phénomènes sociaux, mais son originalité est de le prendre au sérieux et d'en tirer imperturbablement toutes les conséquences (i). » Je me sentirais comblé si ce livre pouvait amener d'autres lecteurs à partager ce jugement. On y trouvera réunis dix-sept des quelque cent textes écrits depuis bientôt trente ans. Certains se sont perdus; d'autres peuvent avantageusement rester dans l'oubli. Parmi ceux qui m'ont paru moins indignes de subsister, j'ai fait un choix, écar- tant les travaux dont le caractère est purement ethnographique et descriptif et d'autres, à portée théorique, mais dont la substance s'est trouvée incorporée à mon livre Tristes Tropiques. Deux textes sont publiés ici pour la première fois (chap. v et xvi) et joints à quinze autres, qui me semblent propres à éclairer la méthode structurale en anthropologie. Pour former ce recueil, je me suis heurté à une difficulté sur laquelle je dois appeler l'attention du lecteur. Plusieurs de mes articles ont été écrits directement en anglais, il fallait donc les traduire. Or, au cours du travail, j'ai été frappé par la dif- férence de ton et de composition entre les textes conçus da7is l'une ou l'autre langue. Il en résulte une hétérogénéité qui, (I) Jean Pouillon, L'œuvre de Claude Lévi-Strauss, Les Temps Mo- f iernes, i2<= année, n» 126, juillet 1956, p. 158. \ II ANTHROPOLOGIE STRUCTURALE je le crains, compromet l'équilibre et l'unité de l'ouvrage. Cette di^érence s'explique sans doute, en partie, par des causes sociologiques : on ne pense et on n'expose pas de la même façon, quand on s'adresse à un public français ou anglo-saxon. Mais il y a aussi des raisons personnelles. Quelle que soit mon habitude de la langue anglaise, dans laquelle j'ai enseigné pendant plusieurs années, je l'utilise de façon incorrecte et dans un registre limité. Je pense en anglais ce que j'écris dans cette langue, mais, sans m'en rendre toujours compte, je dis ce lue je peux avec les moyens linguistiques dont je dispose, non :e que je veux. D'où le sentiment d'étrangeté que j'éprouve en présence de mes propres textes, quand j'essaye de les transcrire en français. Comme il y a toutes chances pour que cette insatis- faction soit partagée par le lecteur, il était nécessaire que j'en fournisse la raison. J'ai essayé de remédier à la difficulté eri adoptant une traduc- tion très libre, résumant certains passages et développant d'autres. Des articles français ont été aussi légèrement remaniés. Enfin, j'ai ajouté çà et là des notes, pour répondre à des cri- tiques, corriger des erreurs, ou tenir compte de faits nouveaux. Paris, le i^^ novembre 19^7. ANTHROPOLOGIE STRUCTURALE CHAPITRE PREMIER INTRODUCTION : HISTOIRE ET ETHNOLOGIE ^i) Plus d'un demi-siècle s'est écoulé depuis que Hauser et Simiand exposèrent et opposèrent les points de principe et de méthode qui, selon eux, distinguaient l'une de l'autre l'histoire et la sociologie. On se souvient que ces différences tenaient essentiellement au caractère comparatif de la mé- thode sociologique, monographique et fonctionnel de la méthode historique (2). D'accord sur cette opposition, les deux auteurs se séparaient seulement sur la valeur respective de chaque méthode. Que s'est-il passé depuis lors? Force est de constater que l'histoire s'en est tenue au programme modeste et lucide qui lui était proposé, et qu'elle a prospéré selon ses lignes. Du point de vue de l'histoire, les problèmes de principe et de méthode semblent définitivement résolus. Quant à la socio- logie, c'est une autre affaire : on ne saurait dire qu'elle ne\ s'est pas développée ; celles de ses branches dont nous nous' occuperons plus particulièrement ici, l'ethnographie et l'ethnos/ logie, se sont, au cours des trente dernières années, épanouies en une prodigieuse floraison d'études théoriques et descrip- tives : mais au prix de conflits, de déchirements et de confu- sions où l'on reconnaît, transposé au sein même de l'ethno- (i) Publié sous ce titre. Revue de Métaphysique et de Morale, 54 année, n» 3-4, 1949, pp. 363-391. (2) H. Hauser, l'Enseignement des sciences sociales, Paris, 1903. F. Si- miand, Méthode historique et science sociale, Revue de Synthèse, 1903. 4 ANTHROPOLOGIE STRUCTURALE logie, le débat traditionnel — et combien plus simple sous cette forme ! — qui semblait opposer l'ethnologie dans son ensemble à une autre discipline, l'histoire, également consi- dérée dans son ensemble. Par un paradoxe supplémentaire, on verra que la thèse des historiens se trouve reprise textuel- lement, chez les ethnologues, par ceux-là même qui se pro- clament les adversaires de la méthode historique. Cette situation serait incompréhensible si l'on n'en retraçait rapi- dement l'origine, et si, pour plus de clarté, on ne posait quelques définitions préliminaires. Nous laisserons de côté, au cours de cet article, le terme sociologie qui n'a pas encore réussi à mériter, depuis le début de ce siècle, le sens général de corpus de l'ensemble des sciences sociales qu'avaient rêvé pour lui Durkheim et Simiand. Prise dans son acception, encore courante dans plusieurs pays d'Europe y compris la France, de réflexion sur les principes de la vie sociale et sur les idées que les hommes ont entretenues et entretiennent à ce sujet, la sociologie se ramène à la phi- losophie sociale et reste étrangère à notre étude ; et si on voit en elle, comme c'est le cas dans les pays anglo-saxons, un ensemble de recherches positives portant sur l'organisation et le fonctionnement des sociétés du type le plus complexe, la sociologie devient une spécialité de l'ethnographie, sans pouvoir encore prétendre, en raison même de la complexité de son objet, à des résultats aussi précis et riches que celle-ci, dont la considération offre ainsi, du point de vue de la mé- thode, une plus grande valeur topique. Restent à définir l'ethnographie elle-même, et l'ethnologie. Nous les distinguerons, de façon très sommaire et provisoire, rmais suffisante au début de l'enquête, en disant que l'ethno- jgrapliie consiste dans l'observation et l'analj^se de groupes 'humains considérés dans leur particularité (souvent choisis, pour des raisons théoriques et pratiques, mais qui ne tiennent nullement à la nature de la recherche, parmi ceux qui diffè- rent le plus du nôtre), et visant à la restitution, aussi fidèle que possible, de la vie de chacun d'eux ; tandis que r l'ethnologie utilise de façon comparative (et à des fins qu'il i faudra déterminer par la suite) les documents présentés par U'ethnographe. Avec ces définitions, l'ethnographie prend le même sens dans tous les pays ; et l'ethnologie correspond INTRODUCTION 5 approximativement à ce qu'on entend, dans les pays anglo« saxons (où le terme d'ethnologie tombe en désuétude), par anthropologie sociale et culturelle (l'anthropologie sociale se consacrant plutôt à l'étude des institutions considérées comme des systèmes de représentations, et l'anthropologie culturelle à celle des techniques, et éventuellement aussi des institutions considérées comme des techniques au service de la vie sociale)^' Enfin, il va sans dire que, si jamais les résultats de l'étude objective des sociétés complexes et des sociétés dites primi- tives parviennent à être intégrés, pour fournir des conclu- sions universellement valables du point de vue diachronique ou synchronique, la sociologie, alors parvenue à sa forme positive, perdra automatiquement le premier sens que nous avons distingué, pour mériter celui, qu'elle a toujours con- voité, de couronnement des recherches sociales. Nous n'en sommes pas encore là. Cela étant posé, le problème des rapports entre les sciences ethnologiques et l'histoire, qui est, en même temps, leur drame intérieur dévoilé, peut se formuler de la façon sui- vante : ou bien nos sciences s'attachent à la dimension dia- chronique des phénomènes, c'est-à-dire à leur ordre dans le temps, et elles sont incapables d'en faire l'histoire ; ou elles essayent de uploads/Societe et culture/ levi-strauss-claude-anthropologie-structurale.pdf

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