Cours de Droit des affaires Sciences Economiques et Gestion « Parcours Gestion
Cours de Droit des affaires Sciences Economiques et Gestion « Parcours Gestion » Semestre 5 Section B Professeur Kawtar NFISSI Année Universitaire 2020-2021 Titre I Les traits fondamentaux des sociétés commerciales Chapitre 1. Les caractères principaux des sociétés commerciales L’article 982 du code des obligations et des contrats marocain (DOC) définit la société comme étant « un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail, ou tous les deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter ». En effet, le caractère contractuel de la société ne fait aucun doute : la société naît de l’accord de volonté de plusieurs personnes qui décident de mettre en commun des apports pour en tirer un bénéfice. Mais aujourd’hui, certaines sociétés peuvent être instituées par l’acte de volonté d’une seule personne : c’est le cas des SARLU. Que la société résulte d’un engagement unilatéral ou d’un contrat, l’acte juridique qui lui donne naissance présente toujours certaines caractéristiques. Il faut d’abord une réunion d’apports (section 1), une participation aux résultats (section 2), et enfin s’y ajoute un élément intentionnel qui réside dans l’affectio societatis (section 3). Ces trois conditions constituent les éléments caractéristiques de la société, permettant de distinguer celle-ci des institutions voisines. Section 1/ La réunion d’apports Le terme « apport » désigne l’opération juridique qui consiste à mettre certains biens à la disposition de la société. Il désigne également le bien lui-même dont l’associé transfert la propriété ou la jouissance à la société, et en contrepartie duquel il reçoit des droits sociaux (parts sociales ou actions). La mise en commun des apports est une condition indispensable à la constitution d’une société. La réunion d’apports constitue le capital social. Mais, les apports ne sont pas tous de la même catégorie. §1/ Les différents types d’apport Il existe différentes catégories d’apports, mais elles ne contribuent pas toutes à constituer le capital social. L’article 988 du DOC fait une distinction tripartite entre l’apport en numéraire, l’apport en nature et l’apport en industrie. A/ L’apport en numéraire C’est un apport d’une somme d’argent que l’associé verse à la société contre l’attribution des parts sociales ou d’actions. Ce type d’apport est à la fois le plus habituel et le plus simple. Les fonds provenant de l’apport en numéraire ne peuvent être mis à la disposition des représentants légaux de la société qu’après immatriculation de celle-ci au registre de commerce et des sociétés. B/ L’apport en nature C’est un apport qui consiste à transmettre à la société tous les biens autres que les espèces et qui peuvent être exploités commercialement. Il peut s’agir des biens meubles ou immeubles, corporels ou incorporels. Ex : apport d’un terrain, d’un immeuble, d’un fonds de commerce… Il existe en fait plusieurs formes d’apports en nature : *L’apport en propriété : par lequel l’apporteur transfère la propriété du bien à la société par sa mise à la disposition effective de celle-ci. L’apporteur perd donc tout droit sur le bien apporté. Il est garant envers la société comme un vendeur envers son acheteur, mais l’apport n’est pas rémunéré par un prix, il l’est plutôt par l’attribution de droits sociaux. *L’apport en jouissance : par lequel l’apporteur met temporairement un bien à la disposition de la société pour le libre usage. L’apporteur reste propriétaire du bien apporté ; sa situation est comparable à celle du bailleur. Il ne transfère à la société que le droit d’user et de jouir du bien. Par conséquent, à la dissolution de la société, l’apporteur reprend en tant que propriétaire le bien qu’il a apporté. *L’apport en usufruit : se réalise par un transfert à la société d’un droit réel que possède l’apporteur, mais le droit transféré n’est qu’un droit de jouissance. Donc la société n’acquiert pas le droit de disposer du bien apporté en usufruit, elle peut juste l’utiliser (usus) ou en percevoir les fruits (fructus). Par ailleurs, la grande difficulté qui concerne les apports en nature est relative à leur évaluation. Cela est dû au fait que les apporteurs ont une tendance naturelle à surévaluer leurs apports. Pour cette raison, le législateur a instauré des mesures de contrôle en confiant la mission d’évaluation des apports en nature au commissaire aux apports pour vérifier que les parts ou actions sont attribuées aux associés en proportion des apports effectués. C/ L’apport en industrie Par cet apport, l’associé met à la disposition de la société ses connaissances techniques, ses services, son travail. Il doit rendre à la société les services promis et lui verser tous les gains qu’il a réalisés par l’activité faisant l’objet de son apport. Ce type d’apport ne contribue pas à former le capital social. Il est vrai que l’apporteur en industrie est considéré comme un associé à part entière, il reçoit des parts sociales ouvrant droit aux bénéfices ; mais il n’a pas droit au remboursement de son apport en cas de dissolution de la société. Ce type d’apport est habituel dans les sociétés civiles professionnelles ; mais il est refusé dans les sociétés où la responsabilité est limitée (SA- SARL) car il ne sert pas de gage aux créanciers et ne peut donc pas être saisi par eux. §2/ La souscription et la libération des apports Le droit des sociétés distingue entre deux catégories d’opérations qui portent sur le capital social, et qui sont en relation directe avec les apports : il s’agit de la souscription et de la libération. A/ La souscription d’apports C’est la promesse faite par les futurs associés de participer dans la société par une fraction bien déterminée de son capital. B/ La libération d’apports C’est le versement effectif des fonds dans la caisse sociale suivi de l’attribution consécutive des droits sociaux. Les deux opérations ne se réalisent pas de la même manière, puisque la souscription doit porter sur la totalité du capital social (art 21, Loi 17-95 et art 51, Loi 5-96), alors que la libération varie selon la nature de l’apport et selon la forme de la société. Dans la SA, les apports en nature doivent être libérés intégralement lors de leur souscription, alors que les apports en numéraire peuvent être libérés à concurrence du quart de leur valeur lors de leur souscription, et la libération du surplus intervient dans un délai qui ne doit pas excéder trois ans à compter de l’immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés (art. 21, L. 17-95). En matière de SARL, le législateur impose que les apports en nature doivent être souscrits en totalité par les associés et intégralement libérées lors de la souscription, alors que les apports en numéraire doivent être libérés d'au moins le quart de leur montant ; la libération du surplus intervient en une ou plusieurs fois sur décision du gérant, dans un délai qui ne doit pas excéder cinq ans à compter de l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés (art. 51 de la loi 5-96 sur les SARL). §3/ Le capital social Il convient de définir d’abord la notion de capital social avant d’en analyser les fonctions. A/ La notion du capital social Le capital social est une notion centrale du droit des sociétés. Il est composé du total du montant des apports en numéraire et des apports en nature, à l’exclusion des apports en industrie. C’est le patrimoine initial de la société et l’instrument essentiel de son fonctionnement. Autrement dit, le capital social représente la valeur portée au bilan indiquant le montant de l’actif au dessous duquel les associés s’interdisent tout prélèvement à leur profit. Du point de vue économique et financier, le capital représente la richesse de la société, mais cela n’est vrai qu’à la constitution de la société, lorsque le capital social équivaut à l’actif net de la société. Mais le développement par la société de son activité lui permet de générer des richesses en actif net, sans que son capital en soit modifié. Donc c’est l’actif net et pas le capital social qu’il convient de consulter pour connaitre la véritable situation financière de la société en cours de vie sociale. *Règle de la fixité du capital social : Le capital social est régi par la règle de la fixité ou de l’intangibilité. Selon cette règle, toute modification de la valeur du capital en cours de vie sociale est en principe interdite, sauf dans les conditions prévues pour la modification des statuts. B/ Les fonctions du capital social La doctrine assigne deux fonctions primordiales au capital social : il est à la fois le gage des créanciers et la clé de répartition du pouvoir entre les associés. 1. Fonction de garantie : Le capital social représente le gage général des créanciers sociaux. Cette règle entraine deux séries de conséquences : *D’abord il est interdit aux associés de distribuer une partie du capital sous forme de dividendes. Une telle distribution fictive est prohibée par la loi ; chose qui assure aux créanciers que les associés ne vont pas dissiper pas la valeur du capital social. *Ensuite uploads/Societe et culture/ titre-i-chapitres-1-et-2.pdf