Au retour de mon dernier séjour au Vietnam en 2005 j’ai écrit un texte illustré
Au retour de mon dernier séjour au Vietnam en 2005 j’ai écrit un texte illustré, documenté et augmenté d’une bibliographie substantielle de mon humble point de vue. J’y ai travaillé plus de 6 mois. J’y abordais des thèmes tels que les diverses religions, les ethnies, le mandarinat et le confucianisme, l’histoire du Vietnam des origines au communisme en passant par l’étude des différentes périodes de la colonisation française, les effets à long terme de l’agent orange (dioxine)…Je me suis naturellement aussi intéressé par extension aux expositions coloniales et aux zoos humains. Lorsque j’ai découvert l’existence du Jardin Tropical de Paris en novembre 2005 j’ai voulu immédiatement en faire l’exploration. L’endroit, qui se trouve en bordure du bois et d’une rue jalonnée de jolies villas, est discret. On y pénètre par une reproduction de portique asiatique qui marquait l’entrée de l’exposition de 1907. J’ai tout d’abord été frappé en constatant l’état d’abandon du lieu, malgré un début d’élagage et de taille des arbres, et l’absence de toute surveillance publique. Puis j’ai été senti saisi par cette impression étrange qui vous envahit lorsque vous prenez subitement conscience que vous vous trouvez dans un endroit « chargé d’histoire ». Un site sans vie, oublié de tous, à l’écart des foules de la ville ; où pourtant des milliers de personnes se sont promenées pour observer des femmes et des hommes se livrant à leurs activités quotidiennes ou coutumières. Des femmes et des hommes directement transplantés de leurs villages d’origine dans des villages factices, contraints d’y vivre le temps de l’exposition, et directement acheminés dans leur village au retour. Tel était le principe du zoo humain. A la fois une extraordinaire leçon de géographie humaine, et une terrifiante démonstration de l’idéologie coloniale de la France de la IIIè République. Peu à peu je me suis trouvé au milieu d’une « friche » historique et culturelle. Pourtant les bâtiment, les monuments, reconnaissables à leur style architectural, leurs décorations, à leurs symboles livraient le sens de leur présence, la fonction de représentation dans ce qui fut une exposition sous la forme nouvelle et attractive du musée vivant. Immergé dans ce site comme à Olympie, Delphes, Volubilis ou Ephèse, ces traces artificielles d’une manifestation éphémère ont été pour moi les supports d’un voyage imaginaire surprenant et profondément émouvant dans l’histoire. Dans l’histoire des représentations de l’homme – des « mentalités » de l’époque - ; interrogeant en retour cette fameuse identité nationale qui fait résurgence depuis deux ans, et ce qui reste encore de la « mission civilisatrice de la France ». Dans les notes que j’ai retrouvées ce matin j’avais relevé les traces qui m’avaient particulièrement touchées : o Une plaque rappelle que René Dumont, considéré comme l’inventeur de l’écologie politique a été étudiant à l’école des ingénieurs d’agronomie coloniale qui au début ne comptait que quelques étudiants. o Le superbe pavillon du Congo a été détruit par un incendie en 2004, les restes calcinés sont restés en l’état o Le monument aux morts malgache, isolé sur une allée est superbe. De style art déco et probablement en marbre. o Particulièrement émouvants sont les monuments aux morts laotiens et cambodgiens, qui contrastent avec l’importance de celui qui est consacré aux vietnamiens Plusieurs informations, en particulier celles qui figurent sur les panneaux qui présentent les bâtiments ne sont pas mentionnées dans ce site Internet. Cependant je ne puis que vous inciter à lire le site de ONAC78, site des anciens combattants des Yvelines, qui à mes yeux est celui qui restitue le plus fidèlement l’histoire de ce lieu. Souvenirs coloniaux au bois de Vincennes - le Jardin tropical de Paris Le Jardin tropical de Paris A l'origine, un jardin d'essai d'agronomie tropicale : A la fin du XIXème siècle, la France cherche à accroître les productions agricoles de ses colonies pour améliorer son approvisionnement en thé, café, cacao, épices… Un jardin d’essai colonial est créé en 1899 dans le bois de Vincennes pour coordonner les expériences agronomiques et multiplier les végétaux afin de les introduire sur de nouveaux sites de production outre-mer. Des serres et différents bâtiments abritent bureaux, laboratoires et bibliothèque. Le travail quotidien permet la réception de plants en provenance des colonies, leur culture, leur multiplication puis leur expédition vers de nouvelles colonies. On cultive des plants de caféiers, de cacaoyers, de vanilliers, de muscadiers, de bananiers. Chaque année le jardin colonial publie un catalogue de plantes disponibles et expédie 40 000 graines et plus de 10 000 boutures, semis et greffons dans des serres portatives vers les exploitations agricoles des différentes colonies. L'exposition coloniale de 1907 : Un village indochinois reconstitué avec ses occupants pendant l'exposition coloniale de 1907. De mai à octobre 1907, l’organisation d’une exposition coloniale transforme le jardin. Une transformation à la fois matérielle mais aussi symbolique: Cinq villages exotiques sont construits. Villages indochinois, malgache, congolais, ferme soudanaise et campement touareg. Le jardin est divisé en deux parties : l’Asie et l’Afrique. Pour faire vivre ce décor, on fit venir des « indigènes ». Ils devaient faire vivre les villages, mettre en scène leurs gestes du quotidien, endossés des tenues traditionnelles souvent inadaptées au climat parisien, participer à heures fixes à des « spectacles ethnographiques » tels que des danses rituelles ou la reconstitution de combats guerriers. L’agriculture et l’artisanat ne sont pas en reste. Les productions locales typiques sont exposées et commercialisées dans les pavillons des contrées : tapis, café, chocolat, thé à déguster sur place… Ainsi le jardin n’est plus seulement voué à l’agronomie tropicale, il est, le temps de l’exposition, une vitrine vivante des colonies dans la capitale, une reconstitution grandeur nature de la splendeur de l’Empire. Et le succès est au rendez-vous. L’exposition accueille, en six mois, près de deux millions de visiteurs. Exposition de 1907 - Visiteurs de l'exposition intéressés et femmes des colonies exhibées et dévêtues ! Grande exhibition des Touaregs dans "Le journal des voyages", 19 mai 1907. Reconstitution d'une attaque fictive du courrier par des vrais Touaregs du Sahara avec chameaux, habits traditionnels et lances. On présente au public des spectacles du type "combats coloniaux" entre "blancs et indigènes" pour créer un climat de terreur et de fascination à l'égard de ces "peuples exotiques". Les vestiges de l'exposition : Les cinq villages qui symbolisaient les colonies de l’Empire français (Indochine, Madagascar, Congo, Soudan, Tunisie, Maroc) ont aujourd’hui disparu. Ne subsistent que quelques vestiges souvent en mauvais état de conservation et camouflés par une végétation envahissante. Il règne dans ce jardin une atmosphère de palais abandonné, c’est aussi cela qui en fait son charme. Voici quelques vestiges de l'exposition de 1907 en photos : Cette porte en bois pourrait provenir de l'Exposition coloniale de 1906 au Grand-Palais. Elle marque l'entrée actuelle du Jardin tropical. Elle matérialise l'axe de symétrie du jardin : à gauche de cette porte se trouve la partie africaine de l'exposition coloniale et à droite, la partie asiatique. (coll.ONAC78) Carte postale ancienne présentant des Laotiens devant la Porte chinoise lors de l'exposition coloniale de 1907. Cette porte est composée de nombreux bas-reliefs en bois sculpté qui représentent des décors floraux, des dragons, des animaux, des scènes théâtrales, le travail des paysans dans les champs ou des motifs géométriques. Cette porte a été abîmée par la tempête de décembre 1999. Le pavillon de la Tunisie : Autre bâtiment construit pour l’exposition coloniale de 1907, le pavillon de Tunisie. Comme l’écrit un journal de l’époque, « c’est une jolie construction mauresque toute blanche au milieu de la verdure ». Aujourd’hui, l’édifice est particulièrement abîmé. On ne peut pas s’en approcher car un périmètre de sécurité est marqué par des grillages et des bâches en plastique font office de toiture… De loin, on peut tout de même visuellement l’apprécier. Dans ce pavillon était présenté la production artisanale de luxe de la Tunisie (tapis, broderies, soieries, costumes, tentures, meubles en marqueterie et bijoux) et aussi des produits agricoles méditerranéens (huiles d’olive, miel, vins, céréales…) 0NAC78 Pavillon du Maroc : Durant l’exposition coloniale, ce bâtiment présente aux visiteurs les caractéristiques de la religion musulmane mais c’est surtout après l’exposition coloniale que l’édifice acquiert sa particularité. Le pavillon du Maroc devient une mosquée, certainement la première de Paris et de France. En effet, dans ce bâtiment était aménagé un lieu de prière où deux Imams officiaient. Le bâtiment sert aussi pendant la guerre à recevoir les soldats maghrébins convalescents après une blessure au front. Il faudra attendre 1926 et l’inauguration de la Grande Mosquée de Paris près de la place Monge, pour que disparaisse ce premier lieu de prière de l’Islam improvisé dans un jardin du bois de Vincennes ! Le pavillon de l’Indochine : Bâtiment imposant construit pour l’exposition de 1907. Lieu de présentation des matières premières et produits manufacturés de la colonie indochinoise. La serre du Dahomey : Cette serre provient de la partie coloniale consacrée au Dahomey (aujourd’hui le Bénin) à l’Exposition universelle de 1900 au Trocadéro. Cette serre chauffée est dite d’acclimatation pour les plantes tropicales. Elle est implantée sur le site du uploads/s3/ jardin-tropical-2.pdf
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- Publié le Fev 23, 2021
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